KF/AN REPUBLIQUE DE CÔTE D IVOIRE ------------------- COUR D APPEL D ABIDJAN -------------------- TRIBUNAL DE COMMERCE D ABIDJAN -------------------- ORDONNANCE EN REFERE du 01/04/2013 ------------------ RG N 803/14 ----------------------- Affaire : La Société BOIS ET SCIAGES D ABIDJAN dite BSA (SCPA SORO, BAKO & Associés) C/ COMPAGNIE IVOIRIENNE D ELECTRICITE dite CIE SA (Me N deye ADJOUSSOU-THIAM) DECISION Contradictoire ---------------------- Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu elles aviseront mais dès à présent vu l urgence ; Recevons la Société BOIS ET SCIAGES D ABIDJAN dite BSA en son action ; L y disons cependant mal fondée ; L en déboutons ; La condamnons aux dépens. AUDIENCE PUBLIQUE DU 1 er AVRIL 2014 L an deux mil quatorze Et le premier avril Nous, Docteur KOMOIN François, Président du Tribunal de Commerce d Abidjan, statuant en matière de référé d heure à heure en notre Cabinet sis à Cocody les Deux-Plateaux ; Assisté de Maître KONE Songui Adama, Greffier; Avons rendu l ordonnance dont la teneur suit : Par exploit d huissier du vingt et un mars 2014, la Société BOIS ET SCIAGES D ABIDJAN dite BSA a assigné la Compagnie Ivoirienne d Electricité dite CIE SA à comparaitre le 25 mars 2014 devant la juridiction des référés de ce siège pour s entendre : - Ordonner d avoir à procéder au rétablissement de l électricité dans son unité de transformation, sous astreinte comminatoires de cinq millions (5.000.000) de francs CFA par jour de retard à compter du prononcé de la décision ; - Ordonner l exécution provisoire de l ordonnance à intervenir sur minute et avant enregistrement, - Condamner la CIE aux dépens. Au soutien de sa demande, elle expose qu elle est une entreprise qui intervient dans la transformation de bois ; Que son unité de transformation est implantée au sud-ouest de la Côte d Ivoire, précisément à San- Pedro ; Que pour les besoins de son activité commerciale, elle utilise l électricité dont le compteur fourni par la Direction de la CIE de San-Pedro est le Numéro 53126400 ; Qu elle n a jamais omis de régler ses factures d électricité ; 1
Que le 11 mars 2014, aux environs de 11 heures, des agents de la CIE venus d Abidjan ont effectué des contrôles sur ses installations électriques en présence de son électricien nommé OUAGA Aimé ; Que c est à l issue de ce contrôle que ces derniers ont pris la décision d interrompre la fourniture de l électricité après vérification du second poste qui se trouve en face de la société S.M.CI ; Que cette interruption sans raison valable n a pas été précédée d une mise en demeure encore moins de l avis de la direction de la CIE de San-Pedro ; Que ces agents prétendent y avoir découvert un cas de fraude, alors même que les niches de courant sont implantées hors de son site et seuls les agents de la CIE détiennent les clefs ; Qu en effet, les portes des niches sont habituellement fermées par des cadenas fournis par la CIE et ses clés restent entre les mains de ses propres agents ; Qu il n y a que la CIE qui est habilitée et qui a la possibilité d ouvrir les portes des niches ; Que lors de l ouverture des niches par les agents de la CIE, aucune trace d effraction n a été relevée, les cadenas se trouvant en place et en bon ordre ; Que la prétendue fraude à elle reprochée n est pas établie ; Or, il est de jurisprudence constante que dès lors que la fraude reprochée au client n est pas certaine, la CIE ne doit pas interrompre la fourniture de l électricité ; Qu en effet, dans des affaires similaires, le juge des référés a ordonné à la CIE le rétablissement immédiat de la fourniture d électricité au motif que la fraude reprochée à son client n était pas établie ; Que depuis lors, son usine a totalement cessé de 2
fonctionner pour cause d interruption d électricité ; Que cette situation nuit gravement à ses intérêts financiers dans la mesure où les espèces de bois qui s y trouve sont en voie de dégradation pour faute de transformation ; Que pis, en raison de cet évènement malheureux dû au fait des agents de la CIE, elle est sur le point de mettre les trois quarts de son personnel au chômage technique ; Que pour sauvegarder ses intérêts, elle a requis l étude de Maître KOUADIO Kouassi à l effet de constater l agissement illégal de ces agents indélicats de la CIE ; Que nonobstant la sommation qui lui a été servie le 14 mars 2014 aux fins de rétablir l électricité dans son unité de transformation, la CIE n a fait aucun effort à cette fin, de sorte que jusqu à ce jour, elle est sans électricité ; Que cette situation s aggrave de jour en jour et lui cause un énorme préjudice ; Qu il y a donc urgence à y mettre fin en ordonnant à la CIE de rétablir l électricité dans son unité de transformation ; Aux termes de l article 221 du code de procédure civile, commerciale et administrative : «Tous les cas d urgence sont portés devant le Président du Tribunal de Première Instance ou le Premier Président de la Cour d Appel qui a statué ou devant connaître de l appel ou le Président de la Cour Suprême en cas de pourvoi intenté ou d arrêt rendu par l une des Chambres de ladite Cour..» ; Qu en application des dispositions sus énoncées, elle sollicite que la juridiction des référés ordonne à la CIE de rétablir l électricité dans son unité de transformation, sise à San-Pedro sous astreinte comminatoire de cinq millions (5.000.000) de francs CFA par jour de retard à compter du prononcé de la 3
décision ; Que le cas d espèce, il est incontestable qu il y a extrême urgence car elle a besoin d électricité pour faire fonctionner son usine. La défenderesse s oppose à cette demande. Elle explique que le contrôle qu elle a effectué sur les installations de la demanderesse lui ont permis de constater des cas de fraude, et que c est à la suite de ce constat que la fourniture de l électricité a été interrompue. Elle estime que cette suspension est parfaitement justifiée de sorte que la société BSA doit être déboutée de sa demande. En la forme SUR CE Sur le caractère de la décision La défenderesse a conclu. Il y a lieu de statuer par décision contradictoire. Sur la recevabilité de l action L action initiée par la Société BOIS ET SCIAGES D ABIDJAN dite BSA est régulière. Elle est donc recevable. Au fond La société BSA sollicite le rétablissement de l électricité aux motifs que la CIE qui détient les clés des niches où se trouvent les compteurs, niches implantées hors de la société, ne rapporte pas la preuve que les anomalies qu elle a constatées sur ces compteurs sont de son fait, surtout que lors de l ouverture des niches, aucune trace d effraction n a été relevée, les cadenas se trouvant en place et en bon ordre. Il est constant que la CIE a produit au dossier un procès-verbal de constat de fraude établi par voie d huissier, qui a relevé les anomalies suivantes : «Les scellés du coffret compteur et du cache borne qui protège le transformateur de courant 4
ont été coupés et collés. Le compteur et le transformateur de courant ont été manipulés afin de réduire l énergie facturée. Numéros de scellés coupés et collés du compteur : 1/- 135 55 072 2/- 135 55 027 3/- 135 55 031 Numéros de scellés coupés et collés du couvercle du transformateur de courant : 1/- 135 55 095 2/- 135 55 055» Il ressort de l article 41.5 de la convention de concession de service public conclue entre l Etat de Côte d Ivoire et la CIE que «Les parties conviennent que toute rupture de scellement ou de cachet, de même que tout acte qui ont pour objet ou pour effet de prendre de l énergie électrique en dehors des quantités mesurées par le compteur ou de fausser les indications du compteur, donnent lieu à une action en réparation par toute voie de droit, sans préjudice du droit pour le concessionnaire d engager des poursuites judiciaires et de cesser immédiatement la fourniture de l énergie électrique sans formalité. Le Concessionnaire doit faire constater cette infraction dans un procès-verbal dressé par ses préposés commissionnés et assermentés à cet effet ou par toute autorité compétente. Les frais de constat, d interruption et de rétablissement de la fourniture de l énergie électrique, fixés par le règlement du service concédé, sont supportés par l abonné.». Il résulte de ce texte que toute rupture de scellement, comme cela a été le cas en l espèce, permet à la CIE de suspendre la fourniture de l électricité. La société BSA conteste la régularité de ce procès-verbal aux motifs qu il n a pas été établi de façon contradictoire et n a donc aucune valeur probante. Ce moyen ne peut toutefois prospérer au regard de l article 41.5 susmentionné qui donne le droit à la CIE de faire constater les anomalies pas ses agents assermentés ou par toute autorité compétente. En l espèce, il est produit au dossier le jugement du 19 juillet 2013 de réception de serment par le Tribunal de Première Instance d Abidjan, dont celui de Monsieur SORO Bakary qui 5
a procédé au constat des anomalies, accompagné de surcroit par un huissier de justice qui a légalement compétence pour procéder à telles constatations matérielles. Il résulte de ce procès-verbal que les constatations ont été faites en présence de Messieurs BROU Florentin et OUAGA Aimé, respectivement responsable technique et électricien à la société BSA. Dans ces conditions, les critiques élevées sur ce point par cette société contre le procès-verbal de constat des anomalies doivent être rejetées. La société BSA estime en outre que les anomalies ne sont pas de son fait parce que les niches sont situées hors de la société, que les clés des niches sont en la possession des agents de la CIE et que le cadenas les protégeant n a subi aucune effraction. Il est constant que les compteurs contrôlés appartiennent à la société BSA. Dans ces conditions, les anomalies qui sont constatées relèvent de sa responsabilité sauf pour elle à prouver qu elles sont le fait d un tiers. En l espèce, la société BSA s y essaie. Toutefois, les motifs avancés ne sont pas pertinents. En effet, le fait que les compteurs soient situés hors de la société ne l empêche pas d y avoir accès. De même le fait que ce sont les agents de la CIE qui détiennent les clés de la niche et que le cadenas protégeant ceux-ci n ait pas subi d effraction ne sont pas non plus décisifs, puisque le cadenas dont s agit est des plus ordinaires et donc susceptible d être ouvert sans la clé et refermé par une technique appropriée. Au regard de ce qui précède, la juridiction des référés considère que la société BSA n a pas rapporté de façon incontestable la preuve que les anomalies constatées sur son compteur ne sont pas de son fait. Dans ces conditions, elle doit être déboutée de sa demande et les dépens mis à sa charge. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en premier ressort ; 6
Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu elles aviseront mais dès à présent vu l urgence ; Recevons la Société BOIS ET SCIAGES D ABIDJAN dite BSA en son action ; L y disons cependant mal fondée ; L en déboutons ; La condamnons aux dépens. Et avons signé avec le Greffier. /. 7