PROFESSION : ENSEIGNANT(E)



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SAMEDI 11 OCTOBE 2014 POFESSION : ENSEIGNANT(E) 8 PAGES TOUS NOS DOSSIES À LE SOLEIL.COM PHOTO LA PESSE, ALAIN OBEGE aymond Bédard, enseignant de quatrième secondaire en histoire à l École secondaire d Éducation internationale à McMasterville ors de la rentrée sco laire en septembre, près d un million d élèves du présco laire au secondaire ont été confiés à 90 000 enseignants à l emploi des écoles québécoises. Ces professionnels sont prêts, pour une nouvelle année, à remplir leur mission qui consiste notam ment à éduquer les jeunes, les accompagner dans leur chemi nement scolaire, leur donner des outils pour devenir des citoyens responsables et les préparer aux études supérieures. Le Soleil a profité de la Journée mondiale des enseignants, qui a eu lieu le 5 octobre, pour rap peler le rôle de ces acteurs clés de notre société, mais aussi leurs L 3591280 aspirations et les défis auxquels ils sont souvent confrontés. Nous avons rencontré neuf ensei gnants de Gaspé à Montréal, en passant par uébec et Saguenay, qui ont partagé leur expérience et raconté leur quotidien dans les moindres détails. Ils nous ont aussi parlé de ce qu ils aimeraient voir changer dans le système d éduca tion, pour le bien de leurs élèves, mais aussi pour le leur. Pour eux, c est un défi de tous les jours. Dans ce contexte d austérité budgétaire, les enseignants sont inquiets : réduction du nombre de professionnels de soutien en classe, activités parascolaires annulées, programmes d aide aux élèves issus de milieux défa vorisés amputés. Toutes ces coupes affecteront inévitablement la qualité de l enseignement, mais auront surtout des répercussions sur les élèves. ATIO MAÎTE-ÉLÈVES TOP ÉLEVÉ Depuis plusieurs années, les enseignants sonnent l alarme quant au ratio maître-élèves trop élevé, l intégration d un trop grand nombre d élèves en difficulté dans les classes régulières ils repré sentent 20 % de la clientèle sco laire par rapport à la quantité d éducateurs spécialisés, de psy chologues et d orthopédagogues ainsi que des réformes inadap tées aux réels besoins des élèves. Les enseignants ne se sentent pas considérés dans ces processus. De plus, ils remarquent une mécon naissance de leur profession dans l opinion publique. La Fédération des syndicats de l enseignement (FSE-CS), qui représente quelque 65 000 ensei gnants de la province, confirme ce «malaise» enseignant. «Ce qui revient beaucoup, c est la lourdeur de la tâche. Les profs nous disent qu ils sont débordés, ils travaillent un nombre d heures incalculable, ils ont beaucoup de paperasse, de bureaucratie à régler», soutient Maxime Garneau, conseiller aux communications à la FSE-CS. Comment faire pour porter le cha peau des enseignants en 2014? uel est leur rôle? Comment se sententils perçus par la société québécoi se? C est à ces questions que nous tenterons de répondre à travers des portraits, des données, des avis de spécialistes et des membres de nos institutions. Malgré les défis à relever au quotidien, c est la passion pour l enseignement qui les fait persévé rer. Maxime Garneau l a constaté : «On a des héros dans nos classes, des profs qui se donnent corps et âme pour faire réussir vos enfants.» Voyez dans nos pages le point de vue de Maurice Tardif, directeur du CIFPE, sur la condition enseignan te, ce que le ministère de l Éducation et la Fédération des commissions scolaires disent de la valorisation de, les grandes dates et des statistiques intéressantes. De plus, découvrez une vidéo illustrant le quotidien d une enseignante sur notre site Web. MAIE-ANNE DAYÉ

2 B1 POFESSION : ENSEIGNANT(E) SAMEDI 11 OCTOBE 2014 90 000 LES ENSEIGNANTS EN UELUES CHIFFES 55 000 enseignants (permanents, à forfait, à la leçon) enseignants permanents 20 000 5000 au préscolaire 48 000 au primaire 37 000 au secondaire enseignants non permanents MAIE-ANNE DAYÉ Collaboration spéciale mdaye@lesoleil.com Certains sont plutôt jeunes, d autres plus âgés, les uns ont parfois un statut précaire alors que d autres sont des permanents. u ils soient de Troisivières, de uébec, de Gaspé, de Saguenay ou de Saint-Hyacinthe, ils ont toutefois tous en commun d enseigner au préscolaire, au primaire ou au secondaire et de former les citoyens de demain. egards croisés sur certains d entre eux qui ont bien voulu aborder pour nous leur profession, qui est souvent leur passion. UÉBEC PHOTO LE SOLEIL, EICK LABBÉ «CÉE DES CITOYENS ÉUILIBÉS» NATACHA GOS-LOUIS LESSAD 28 ans ENSEIGNANTE AU PÉSCOLAIE École du Val-Joli PIEE-OLIVIE CLOUTIE 30 ans ENSEIGNANT DE SCIENCES AU SECONDAIE École privée Mont-Saint-Sacrement En couple et parents d une petite fille d un an et demi, Natacha Gros-Louis Lessard et Pierre-Olivier Cloutier se considèrent chanceux d avoir obtenu les postes qu ils occupent aujourd hui. Après une technique en garderie et un baccalauréat en enseignement, elle est maintenant enseignante au préscolaire à temps plein à l école primaire Val-Joli, à uébec, et est en voie d obtenir sa permanence. uant à lui, il a poursuivi des études en enseignement des sciences technologiques et aujourd hui il enseigne les sciences en quatrième et cinquième secondaire à l école secondaire privée Mont-Saint-Sacrement, qu il avait lui-même fréquentée. Tous deux se sentent choyés par leur profession. «Je pense que je suis une grande enfant», dit Natacha. «Je suis un éternel adolescent», enchaîne immédiatement Pierre-Olivier. Leurs postes leur collent à la peau, c est le moins qu on puisse dire. choisi d enseigner? la maternelle, il y a un petit côté magique qui me rejoint beaucoup. Je veux donner le goût aux enfants d aller à l école, on est là pour les motiver, que ce soit par les arts, les mathématiques, le français. On touche un peu à tout. PIEE-OLIVIE : Ces jeunes-là sont les décideurs de demain. J ai envie de les éveiller et de leur donner le goût d aller plus loin et les outils pour le faire. [...] Je veux créer des citoyens équilibrés. Elle les part, moi, je les finis, lance-t-il en riant. NATACHA : Avec Vous sentez-vous valorisé dans votre travail? NATACHA : J ai l impression qu il y a une vision négative, un peu comme si on ne faisait pas grand-chose. Oui, tout l apprentissage passe par le jeu, mais il faut que je réfléchisse pour mettre des activités en place pour la motricité fine, la motricité globale, faire apprendre les sons... Par contre, je suis valorisée par mes élèves qui me disent que je suis donc bien belle, donc bien bonne, qui me disent : Wow! quand je fais un dessin sur le tableau! PIEE-OLIVIE : Ceux qui s abreuvent de savoir, tu le vois dans leurs yeux. Tu n as pas besoin de merci ni de tape dans le dos, tu sais que tu as fait ta job. Ce qui est difficile parfois, c est avec les deux autres gangs : ceux pour qui l école ne les branche pas et les utilitaires, qui viennent à l école seulement pour chercher ce dont ils ont besoin. C est dur de les engager, les mobiliser. Est-ce que le salaire est à la hauteur de vos tâches? NATACHA : Je fais ce que j aime, alors c est dur pour moi de dire que je ferais autre chose pour être plus payée. PIEE-OLIVIE : C est un salaire qui ne se compte pas en dollars. En juin, on a gradué 150 jeunes de cinquième secondaire qui vont revenir nous voir l an prochain ou dans deux ans pour nous dire à quel point ils ont apprécié nos cours. Ça, c est un salaire. ue faudrait-il faire pour valoriser NATACHA : Plus de soutien pour les enfants qui ont des difficultés. Estce qu un retour des classes spéciales serait bon? Je ne sais pas. Je comprends que des groupes intégrés peuvent aider certains enfants, sauf que parfois, ça ralentit notre travail. PIEE-OLIVIE : Le nombre d élèves par classe. J avais une classe de 15 (des élèves qui voulaient faire des sciences plus fortes) et un groupe de 36. Dans le groupe de 15, ils ont progressé très rapidement parce que j avais plus de temps à accorder à chacun et la rétroaction est plus rapide aussi. Avoir de 24 à 28 élèves ferait toute la différence. C est la chose qui améliorerait ma qualité de vie au travail de façon exponentielle. MAIE-ANNE DAYÉ SAINTE-GENEVIÈVE-DE-BATISCAN «ECONNAÎTE NOTE ÔLE D INFLUENCE» FANCINE LAVOIE 51 ans ENSEIGNANTE DE FANÇAIS École secondaire Le Tremplin Francine Lavoie vient d entamer sa 27e année dans le milieu de l enseignement. Son enthousiasme est apprécié de tous et elle sait établir un contact privilégié avec ceux qui l entourent, comme l ont confirmé ses élèves et quelques parents de l école où elle enseigne. Après un baccalauréat en enseignement et quelques années de pratique, elle a fait une maîtrise en éducation. Ayant été conseillère pédagogique et déléguée syndicale, elle se consacre maintenant à 80 % en tant qu enseignante de français et d éthique et culture religieuse en quatrième secondaire. Le 20 % restant, elle l accorde à sa famille, pour assurer «l équilibre». On peut apporter quelque chose, faire une différence et se sentir utile. Je crois en nos jeunes au secondaire, je trouve qu ils ont un beau potentiel. Si on les écoute, si on les fait se sentir importants, on peut faire une différence dans leur vie. Ça fait 27 ans et je suis toujours aussi énervée avec mes élèves! ue faudrait-il faire pour valoriser Il faudrait que les parents soient plus engagés dans leurs écoles. La société devrait reconnaître plus le rôle d influence qu on a auprès des jeunes. Aussi, je pense que le gouvernement devrait reconnaître davantage le temps de préparation et de correction effectué par les enseignants. Avec l équité, on a obtenu un gain sur le plan salarial, mais il faut reconnaître aussi qu on a de plus en plus d enfants en difficulté. Si la tâche est trop lourde, on ne pourra pas donner autant d attention aux enfants. Pour faire PHOTO LE NOUVELLISTE, FANÇOIS GEVAIS un travail de qualité, on n a pas le choix d être à temps partiel, ou nous couper du temps de présence avec les élèves. uelle est la différence entre enseigner aujourd hui et il y a 25 ans? Je pense que malheureusement, dans beaucoup de milieux, l élève est trop enfant-roi. Il faudrait rappeler qu il y a un boss à l école, qui n est pas parfait, mais que l élève a du travail à accomplir. Le prof n a pas toujours tort et en tant que parent, il faut montrer à l enfant qu il n a pas toujours raison. Le prof a moins d autorité qu avant et le parent le sait. Entre l école rigide d il y a 25 ans et l école trop tolérante, il faut essayer de ramener ça à un juste milieu. uel message aimeriez-vous lancer aux jeunes enseignants en début de carrière? De ne pas lâcher, de croire en eux. Ce sont vraiment les premières années qui sont les plus difficiles. Il faut accepter qu on ne soit pas parfait et qu à un moment, on trouve notre couleur. Il faut aussi être patient et accepter de demander de l aide. Pour les profs avec plus d expérience, n ayez pas peur d aller vers les jeunes pour les aider dans leur plan de classe, par exemple. MAIE-ANNE DAYÉ

B1 3 POFESSION : ENSEIGNANT(E) SAMEDI 11 OCTOBE 2014 16 000 78 % ont des tâches d appoint (remplaçants, surnuméraires, suppléants) 45 ans sont des femmes. Les hommes se trouvent davantage au secondaire : 38 % des enseignants au secondaire sont des hommes âge moyen des enseignants et enseignantes PHOTO LE NOUVELLISTE, FANÇOIS GEVAIS COATICOOK GASPÉ «CE N EST PAS UN TAVAIL, C EST UN PLAISI» ÉIC LAIVÉE 38 ans ENSEIGNANT EN 5e ET 6e ANNÉE DU PIMAIE École Monseigneur-Durand Pour Éric Larrivée, l enseignement n est pas juste son métier, c est sa vie. «Tu peux sortir le professeur de l école, mais tu ne pourras jamais sortir le professeur de moi, il est toujours là. Je suis professeur de nuit, l été, au dîner, au souper», dit-il. Originaire de Lac-Mégantic, il vient d une famille composée d une vingtaine d enseignants sur quatre générations, dont sa mère. Il a baigné dans ce milieu depuis qu il est enfant. Aujourd hui enseignant à l école Monseigneur-Durand à Coaticook, il aime établir un lien avec ses élèves de cinquième et sixième année et sentir qu il peut avoir une influence positive sur eux. Comme je suis un toucheà-tout, j aime autant la menuiserie que le dessin et l enseignement m offrait la possibilité de changer de sujet toutes les heures. uand je viens à l école, ce n est pas un travail, c est un plaisir. J aime enseigner et voir l influence qu on a sur les enfants. Souvent, ils reviennent me voir les années suivantes pour me parler de leur été, leurs notes. Le contact avec les élèves, c est une des choses les plus intéressantes pour moi. uels sont vos défis au quotidien? L année passée, j avais un groupe en grande difficulté, des élèves qui ont terminé avec 35 %. Je suis très exigeant, pour moi et pour les autres, mais pour la première fois, j ai dû baisser mes critères. Je me suis rendu compte que mes élèves n auraient pas de plaisir là-dedans. Aussi, je veux donner le goût de la lecture aux élèves. Un élève qui se met à lire voit normalement augmenter ses notes de 10 %. Si je réussis à rattraper deux ou trois garçons qui ne lisaient pas avant, même s ils ne s améliorent pas tant que ça, au moins s ils se mettent à aimer l école... ue faudrait-il Diminuer le nombre d élèves par classe, faire en sorte qu il y ait plus de pédagogie, d orthophonie, de psychologie et de psychoéducation. Les services aux élèves, ça reste le problème principal des écoles québécoises. On se retrouve avec des cas de plus en plus lourds. Dans un monde où le gouvernement et les commissions scolaires nous parlent d adapter notre enseignement aux enfants, à 29, est-ce que je peux le faire pour chacun de mes élèves? Je n ai pas de temps pour faire du cas par cas. On a des beaux gros programmes faits par le Ministère, mais il y a trop de choses pour ce qu on peut enseigner correctement. On en a tellement à leur montrer qu on voit tout en surface, mais rien en profondeur. Des fois, on en rajoute en oubliant que la base, c est lire, écrire, compter et l histoire. PHOTO COLLABOATION SPÉCIALE GENEVIÈVE GÉLINAS MATENELLE 4 ans............ 18 5 ans............ 20 PIMAIE 1re année........ 22 Les gens pensent qu on est gras dur, qu on a deux mois de vacances et qu on se plaint parce qu on n a pas assez d argent. C est souvent ce qu on entend. Ils ne se rendent peut-être pas compte à quel point l enseignement, ce n est pas juste un métier, c est une vie. Je suis content, je suis payé pour faire quelque chose que j aime. Je pense que la vision s est améliorée, mais je ne pense pas que la population soit derrière nous. MAIE-ANNE DAYÉ PHOTO LA TIBUNE, ENÉ MAUIS ANNIE DUGAS 40 ans ENSEIGNANTE DE FANÇAIS AU SECONDAIE Polyvalente C.-E.-Pouliot 2e année......... 24 3e à 6e année..... 26 (20 dans le cas d un milieu jugé défavorisé) SECONDAIE 1re secondaire..... 28 2e secondaire...... 29 3e à 5e secondaire. 32 Source : Convention collective nationale, Fédération des syndicats de l enseignement (FSE-CS) Comment les enseignants sont-ils perçus par la société? «ÉLAGI LES HOIZONS» 400 000 exemplaires! Préparé par une équipe du journal Le Soleil, ce cahier spécial Profession : enseignant(e) est tiré à plus de 400 000 exemplaires et distribué dans tous les quotidiens du groupe Gesca à travers le uébec. Nous souhaitons par ce supplément faire mieux connaître la réalité des enseignants(es) des niveaux préscolaire à secondaire. Par leurs témoignages, des enseignants de plusieurs régions de la province nous expriment leur engagement et leur passion. Mais ils évoquent aussi leurs difficultés et les défis auxquels ils sont confrontés. Des person nalités du monde de l édu cation nous disent comment ils verraient la valorisation de cette profession. Bonne lecture! LA DIECTION L enseignement a toujours intéressé Annie Dugas. Celle qui voulait enseigner le français au collégial s est finalement tournée vers l école secondaire en raison du peu d offres d emplois dans les cégeps. Après huit années de travail contractuel, où elle complétait ses tâches avec de la mesure d appui et de l aide individualisée, elle a obtenu sa permanence l année dernière à la polyvalente C.-E.-Pouliot, à Gaspé. Issue d une famille d enseignants, elle savait d avance ce qui l attendait. «Ma mère me disait de ne pas choisir cette profession, mais je l ai choisie quand même. Je savais quels étaient les inconvénients de la tâche», raconte Annie Dugas, aujourd hui mère de deux enfants en bas âge. J aimais beaucoup la relation d aide. Même si j ai beaucoup aimé ma période de recherche au Trésor de la langue française, le contact avec les gens me manquait. [...] Aussi, j aime travailler avec les adolescents, je trouve qu ils sont souvent mal-aimés dans les médias, dans les émissions de télé. On a souvent beaucoup de préjugés envers les ados, mais moi, je trouve qu ils sont drôles, sympathiques. Oui, il y en a des paresseux, mais aussi d autres qui sont super vaillants. Combien d heures travaillez-vous réellement dans une semaine? Nous sommes payés pour 37,5 heures de travail, mais il y a des semaines où je fais facilement 60 heures. Je m implique dans l album de finissants, le financement, etc. Lorsque je suis revenue de mon congé de maternité en milieu d année, j ai dû laisser tomber quelques tâches à la maison, comme le ménage et des activités personnelles. Heureusement, mon conjoint garde les enfants quand j ai des activités comme le gala Méritas, le bal des finissants, les réunions le soir, les remises de bulletins. En fin d année, c est plus compliqué. ue voulez-vous apporter dans la vie des élèves? J essaie de leur faire aimer la langue française. Juste ça, c est beaucoup! J essaie de leur faire découvrir au moins un bon livre. Je veux aussi élargir leurs horizons et travailler contre les préjugés. J essaie d en faire des personnes plus averties, plus critiques. J aimerais qu ils se souviennent de ne pas tout tenir pour acquis, de critiquer, d analyser les informations. C est très ambitieux! J utilise beaucoup l humour pour passer les parties les plus difficiles du cours, mais aussi dans ma façon de faire de la discipline. Ça fonctionne parce que c est mon style et je trouve qu il est important quand on enseigne de le faire avec notre personnalité. ue faudrait-il uand on est formé dans un domaine, il faudrait pouvoir enseigner dans celui-ci. Ça m est déjà arrivé de devoir enseigner en arts plastiques et j ai souffert! Je n avais pas le choix, mais je n étais pas à l aise, car je n ai pas la fibre artistique. Beaucoup d enseignants font des changements de champs pour obtenir une permanence, mais ce n est pas idéal. [...] Aussi, je sais que c est difficile et que ça implique beaucoup de sous, mais si on veut que les élèves soient performants et qu ils apprennent bien, l idéal serait de ne pas dépasser 24 élèves par groupe. En Finlande, un professeur doit posséder une maîtrise pour enseigner. Ils sont deux enseignants par classe et 20 élèves par groupe : c est un choix de société. Il y a le monde idéal, et il y a le uébec!» MAIE-ANNE DAYÉ

4 B1 POFESSION : ENSEIGNANT(E) SAMEDI 11 OCTOBE 2014 SAGUENAY «IL FAUT SAVOI S ADAPTE» McMASTEVILLE ICHAD GOLEAU 48 ans ENSEIGNANT SPÉCIALISTE EN MUSIUE École primaire Sainte-Claire (Chicoutimi-Nord) École Saint-Isidore, Chicoutimi École Saint-Denis, Chicoutimi École Saint-Joseph, La Baie Être enseignant spécialiste en musique, c est être comme une «voiture tout terrain», illustre ichard Groleau. Pour enseigner dans quatre écoles différentes, à 20 groupes de 25 élèves chacun, cela nécessite effectivement une bonne capacité d adaptation. Après avoir terminé son baccalauréat en enseignement de la musique à Montréal, sa ville natale, et enseigné deux ans au collège privé Durocher à Saint-Lambert, il a migré vers le «oyaume», celui du Saguenay. Ce n était pourtant pas le paradis de l offre d emploi. Sept années de suppléances et de remplacements ont précédé son embauche à la commission scolaire des ives-du-saguenay. Aujourd hui, il a une tâche pleine dans quatre écoles et enseigne même la clarinette et le saxophone le soir à l Atelier de musique de Jonquière. Pourquoi avez-vous choisi d enseigner? Un spécialiste en musique est d abord un musicien en général et devient un musicien éducateur. J ai découvert que c était une passion pour moi d enseigner le saxophone et la clarinette, de partager mes connaissances. À l école, il y a toujours des jeunes qui ont de l affinité pour la musique, les arts et d autres qui sont plus sportifs. Il faut essayer de les faire aimer la musique, mais parfois ils ont moins d ouverture. C est un bon défi. Comment intéresser les jeunes à la musique? Pour être convaincant dans ce que tu enseignes, il faut que tu sois convaincu. Chaque fois que j enseigne la musique, je vois les yeux des élèves briller, je vois l impact que ça fait. La musique va chercher le domaine des émotions, et souvent je sens beaucoup d énergie venant des jeunes. Je sens que quand ils aiment une chanson, ils vont l apprendre très vite. Étant donné qu il y a beaucoup de contraintes, il faut vraiment aimer ce qu on fait. uels sont les défis à relever au quotidien? Ce qui n est pas facile au début, c est de s adapter. Nous, on travaille avec les groupes des enseignants titulaires. Moi, j ai mes critères sur la discipline et la gestion de classe qui ne sont pas nécessairement importants pour les enseignants réguliers. Étant donné qu on a 20 groupes différents de 20 enseignants différents avec des visions différentes, ce n est pas toujours facile, il faut être tolérant. De plus, dans les quatre écoles où j enseigne, je n ai pas de local de musique. C est déjà arrivé, mais ces temps-ci, à cause de la recrudescence d élèves, les écoles se sont remplies, il manque de locaux. C est souvent celui de musique qui est sacrifié. Alors, souvent on enseigne dans la bibliothèque ou dans les locaux d ordinateurs. Il y a beaucoup d ajustements à faire. J ai appris que la constance dans l enseignement, c est qu il n y a pas de constance. MAIE-ANNE DAYÉ AYMOND BÉDAD 57 ans ENSEIGNANT DE UATIÈME SECONDAIE EN HISTOIE École secondaire d Éducation internationale Après 33 ans de pratique, aymond Bédard était toujours aussi fébrile à l idée d amorcer une nouvelle année scolaire. Pour lui, l enseignement de l histoire est une passion et ce qui l anime chaque jour est d éveiller la curiosité des jeunes. L enseignant de 57 ans fait preuve d un dynamisme infatigable. Président de la Société des professeurs d histoire du uébec, il est aussi membre de trois comités à la Ville de Montréal, dont le comité de toponymie. Il joue aussi de la trompette au sein d un orchestre. Plus encore, son engagement au sein de l école et l élaboration d un projet scolaire lui ont valu le prix d histoire du Gouverneur général en 2011. J ai l impression d être utile. Je suis curieux, j apprends encore plein de choses et j aime communiquer. Si je peux donner aux élèves le goût d apprendre, la curiosité, des connaissances de base pour mieux comprendre le monde contemporain, tant mieux. Le rôle de l enseignant, c est de communiquer les connaissances avec son savoir à lui, sa façon de faire, sa pédagogie et sa personnalité. [...] Moi, j ai un privilège, je suis dans une école internationale, j ai l avantage d avoir des élèves forts et motivés. C est certain que je peux plus me permettre d enseigner que de faire de la discipline. Selon vous, quel est le rôle des enseignants dans notre société? Nous, les enseignants, on a un rôle citoyen. On forme la génération de demain! Les jeunes du primaire et du secondaire sont très influençables et on est un peu des modèles. Il faut montrer que l école, c est important, et qu on peut avoir du plaisir en apprenant. Ce n est pas plate, l école. uels sont les défis des enseignants aujourd hui? Il faut aimer enseigner. Plusieurs décrochent aujourd hui, car après cinq ans, ils ne sont plus capables. Les conditions ne sont pas extraordinaires, les salaires ne sont pas faramineux et quand tu as une demi-tâche, c est encore plus difficile. Ils changent d école chaque année. De plus, la relation d autorité est difficile aujourd hui parce que les parents sont très exigeants. ue faudrait-il C est vrai qu on a une vocation, mais on travaille fort et il faut qu il y ait une reconnaissance quelque part. Il faut améliorer les conditions de travail et de salaire. De plus, la formation continue, c est très important, mais il n y a pas d argent! Par exemple, on est 10 profs de sciences humaines dans l école, et deux seulement peuvent aller aux congrès. Aussi, il faudrait revoir la formation universitaire, c est-à-dire créer un meilleur équilibre entre le disciplinaire et le pédagogique. MAIE-ANNE DAYÉ PHOTO LA PESSE, ALAIN OBEGE SAINT-HYACINTHE «FAIE CONFIANCE À NOTE POFESSIONNALISME» 3587584 PHOTO LE UOTIDIEN, OCKET LAVOIE SOPHIE LAMONTAGNE 40 ans ENSEIGNANTE AU PIMAIE École Douville Originaire de Drummondville et mère de deux adolescentes, Sophie Lamontagne enseigne depuis 17 ans. Après un baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire, elle s est lancée dans un certificat en orthopédagogie. Elle a terminé ses études au bon moment : ouverture de la maternelle à temps complet et départs à la retraite massifs. Durant la première année, elle avait une tâche à 80 %. La deuxième année, elle occupait déjà un poste à temps plein. Depuis 11 ans maintenant, elle côtoie chaque jour des enfants du primaire «pour la magie, l émerveillement. Ils aiment apprendre, ils sont encore motivés», décrit-elle. venu avec la réforme et les changements de programme. On nous demande une technique d enseignement, après il faut changer. Ce sont toujours de nouvelles méthodes, de nouvelles modes qui nous sont imposées. J ai envie de dire : laissez-nous de la liberté! On est professionnels, on a fait un bac, on a été évalués, on a reçu des exigences et on les a respectées. Vous nous avez donné un diplôme! Il faut faire confiance à notre professionnalisme, c est ce qui manque parfois. uels sont vos défis au quotidien? Lorsqu il y a un enfant en crise, il faut être capable de le gérer et de calmer les autres; le petit coco qui arrive le matin et qui n a pas déjeuné; celui qui vit la séparation de ses parents... Il faut gérer l émotionnel avant d essayer de lui faire apprendre des choses. Un prof n est pas juste un prof : c est un psychologue, une infirmière, une maman, un papa. Le défi, c est d être capable de mettre le bon chapeau au bon moment. ue faudrait-il Si on croit en notre professionnalisme, on va être enclin à croire que les enseignants font leur possible avec ce qu ils ont. Il faut nous écouter quand on dit qu on n a pas besoin de tableau blanc interactif dans nos classes. Moi, j ai besoin de plus d aide dans ma classe, de plus de techniciens elle a 22 élèves, dont environ 7 ont des difficultés. uand ils nous disent qu il y aura de l anglais intensif en sixième année, ils n écoutent pas les profs. Tous les profs disent que c est impossible pour la majorité des élèves, dont une partie a des difficultés. C est nous qui sommes sur le terrain. MAIE-ANNE DAYÉ 38123 Des personnes engagées dans la réussite SS Groupe financier est fier de reconnaître le travail quotidien et soutenu des enseignantes et des enseignants. Grâce à leur engagement auprès des jeunes du uébec, ils participent activement à leur réussite scolaire. J ai toujours aimé les enfants. Je viens d une famille nombreuse et je me suis toujours occupée de mes cousins et de mes cousines. Déjà, quand j étais petite, je pensais à ma future famille. J ai choisi d être enseignante plutôt qu infirmière aussi pour pouvoir être présente auprès de ma famille. Saviez-vous ce qui vous attendait? Au début, ce n était pas si exigeant. uand j ai commencé à enseigner, on me laissait enseigner. Il n y avait pas le côté performance. Je ne sentais pas cette pression. C est PHOTO COLLABOATION SPÉCIALE MAIE-ANNE DAYÉ

B1 5 POFESSION : ENSEIGNANT(E) SAMEDI 11 OCTOBE 2014 PHOTO LA PESSE, OLIVIE PONTBIAND LE ÔLE DES PAENTS MONTÉAL «JE ME SENS UTILE AU UOTIDIEN» MAGALI HALLÉ 25 ans ENSEIGNANTE EN 2e ANNÉE DU PIMAIE École De la Petite-Bourgogne À peine a-t-elle quitté les bancs d école que Magali Hallé a déjà trouvé l endroit idéal pour laisser libre cours à sa créativité : l école primaire. Depuis la fin de ses études, elle enseigne à 16 frimousses de deuxième année à l école De la Petite-Bourgogne, qu elle décrit comme étant la plus défavorisée de la commission scolaire de Montréal. Sur ses 16 élèves, 13 ne parlent pas le français. Mais ce défi ne la rebute pas, au contraire : elle sent qu elle fait une différence dans leur vie. Elle se sent utile. J adore mon travail, je suis passionnée. Au départ, j avais choisi cette profession parce que j avais travaillé en animation et en camps de jour quand j étais plus jeune. Je trouvais que c était une profession qui avait l air intéressante, surtout pour la liberté. C était le trip d avoir une vingtaine d enfants pour moi, pour l année, et de pouvoir faire un peu ce que je veux tout en respectant le programme, bien sûr, mais en étant créative. Aussi, je l ai choisie pour les conditions de travail : l été de congé est non négligeable et surtout, il y a la possibilité de pratiquer à l étranger. uels sont vos défis au quotidien? Je suis dans une école très difficile. On n a pas de services et des élèves en grande difficulté qui sont intégrés dans nos classes. Par exemple, plus de la moitié de mes élèves ne parlent pas le français alors je me retrouve à faire de l adaptation scolaire. La tâche est extrêmement lourde. On ne compte pas nos heures. Par exemple, lorsqu il fait - 40 degrés dehors, certains enfants arrivent à l école sans mitaines. Une journée, ce n est pas si grave, mais quand ça fait une semaine, je ne peux pas les laisser comme ça. J ai donc acheté une dizaine de paires de mitaines. u est-ce qui vous donne envie de continuer? Je me sens utile au quotidien. C est une profession valorisante, car tu as un retour immédiat de ce que tu fais. Oui, je suis épuisée, mais voir le sourire des enfants quand je leur présente un projet que j ai mis des heures à préparer, ça n a pas de prix. Même s ils ont été tannants toute la journée, eh bien le petit câlin, le petit sourire et le petit «je t aime» à la fin de la journée réussissent à me faire tout oublier. Je suis retournée à l École De la Petite-Bourgogne parce que ces enfants-là ont besoin des professeurs. Plusieurs vivent des situations tellement difficiles à la maison que pour eux, l école, c est leur moment de répit. uand les congés arrivent, tu vois l anxiété monter pour certains d entre eux. ue faudrait-il Je trouve que la valorisation de, ça passe par l augmentation des salaires. On est sous-payés pour les heures qu on fait et l énergie qu on met et pour l importance de notre travail. L éducation devrait être une priorité. Aussi, il faudrait rehausser les exigences universitaires, car il y a des enseignants qui ne sont pas toujours de qualité. Pour avoir fait un stage à l étranger, je me suis rendu compte qu ici, il y a des lacunes. De plus, la formation manque de pertinence. C est très théorique et ça va dans tous les sens. On a des formations en didactique données par des linguistes qui n ont jamais vu d enfants de leur vie. Ça ne s applique pas à notre quotidien. MAIE-ANNE DAYÉ 3588213 À la lumière des neuf témoignages d enseignants recueillis pour ce cahier spécial, voici à quoi ressemble la journée type d un enseignant. Elle peut varier pour chaque enseignant selon l école dans laquelle il travaille et le niveau des élèves. 7h30 Arrivée à l école. Préparation de la classe, des plans de cours, consultation des courriels 8h Accueil des élèves, cours 10h15 écréation (souvent, les enseignants y font de la surveillance) 10h30 Cours 11h30 Dîner (durant cette période, les enseignants doivent parfois assister à des réunions, faire de la planification, répondre aux questions des élèves) 13h eprise des cours 14h écréation (surveillance) 15h15 Départ des élèves pour la maison. Préparation, planification, photocopies, plans d intervention, réunions, comités, etc. 16h00 et plus etour à la maison Soirs et fins de semaine Élaboration de projets pour les élèves ou correction. En moyenne, les enseignants interrogés disent faire une à deux heures de correction par soir, et ce chiffre augmente en période d examens. NOTE VIDÉO Voyez le quotidien d une enseignante videos.lesoleil.com Les parents sont-ils plus ou moins engagés qu avant dans le milieu scolaire? «Par rapport aux années 50, les familles d aujourd hui sont beaucoup plus petites, sans doute plus présentes, peut-être plus exigeantes, mais je pense que c est normal en tant que parents de vouloir le meilleur pour nos jeunes et de vouloir qu ils réussissent», soutient Gaston ioux, président de la Fédération des comités de parents du uébec (FCP). Cependant, «les parents ne prennent pas la place des enseignants et vice-versa», ajoute-t-il. CONFONTATION La plupart des enseignants interrogés dans ces pages témoignent d une bonne collaboration avec les parents, mais évoquent la relation de confrontation avec certains d entre eux. Maurice Tardif, directeur du Centre de recherche interuni versitaire sur la formation et enseignante (CIFPE) à Montréal, explique cette relation parents-enseignants ainsi : les parents, qui autrefois plaçaient leur confiance dans l autorité des enseignants, sont aujourd hui fragmentés. D un côté, il y a les interventionnistes, qui sentent le besoin d intervenir pour compléter le travail de l école plutôt que de s en remettre aux enseignants. Ceux-ci ont souvent des attitudes critiques par rapport à l école. De l autre, on trouve les laxistes, qui délèguent à l école la responsabilité de leurs enfants, mais n assument pas ce que les familles d avant assumaient, c est-à-dire toute l autorité parentale, les devoirs, l encadrement de l enfant. Il semblerait que cette faible participation soit attribuable en partie au manque de temps et à la méconnaissance du milieu scolaire. «Si vous aimez votre enfant, soutenez ses enseignants. Ce sont eux qui font la différence», insiste Maurice Tardif. Gaston ioux rappelle aussi l importance de l engagement des parents dans l école, soit en communiquant avec les enseignants, en leur posant des questions et en assistant aux réunions. «Il faut entretenir une relation privilégiée avec les enseignants, car c est le lien direct qu on a avec les jeunes.» MAIE-ANNE DAYÉ 3586806 POUUOI CHOISI LA CAISSE DESJADINS DE L ÉDUCATION? PACE UE LES MÉTIES DE L ÉDUCATION NE ESSEMBLENT À AUCUN AUTE. La Caisse de l Éducation vous offre un service hautement personnalisé, parce que nous savons qui vous êtes! Si vous travaillez dans le milieu de l éducation, vous avez droit à un traitement privilégié. Pour des conseils personnalisés, communiquez avec nous! 1 877 442-EDUC (3382) www.desjardins.com/caisseeducation

6 B1 POFESSION : ENSEIGNANT(E) SAMEDI 11 OCTOBE 2014 1960-1970 L ÉDUCATION DEPUIS 50 ANS 1965 Publication du rapport Parent qui recommande diverses réformes du système d éducation québécois Création du ministère de l Éducation S colarisation obligatoire jusqu à l âge de 16 ans C réation des cégeps Transfert de la formation des enseignants dans les universités (1969) M ontée du syndicalisme enseignant A mélioration des conditions de travail et de la rémunération 1980-1990 I ntégration des élèves handicapés et en difficulté dans les classes régulières éduction de 19,5 % du salaire des enseignants (1982) «GASTON IOUX À la maison, nous, les parents, on encourage nos jeunes et, de leur côté, les enseignants ont un rôle primordial d apprentissage. Ces gens-là ont la flamme, la vocation. C est important de les encourager, de les soutenir et de leur donner tous les outils nécessaires pour qu ils puissent bien travailler et enseigner à nos jeunes. Il faut valoriser l éducation. Malheureusement, on voit lors des sondages en période électorale que l éducation n est pas la priorité. Je pense qu il faut que l éducation devienne la priorité numéro un de la société. Tout part de là : un jeune éduqué va réussir, va diplômer, sera moins malade, aura un meilleur salaire, va payer plus d impôts. uand on valorise l éducation, on ne peut pas faire autrement que de valoriser enseignante en se disant que c est le point de départ de la santé d une société.» POPOS ECUEILLIS PA MAIE-ANNE DAYÉ «JOSÉE SCALABINI Premièrement, les enseignants ont besoin de valorisation. Deuxièmement, c est la tâche de l enseignant qui est débordante et enfin, il y a un manque de consultation et de considération de. L enseignant devrait être au cœur du système d éducation. Malheureusement, il est devenu un exécutant. On ne part plus de leur expertise ni de leur expérience vécue au quotidien avec les élèves, mais des gens en haut qui établissent de nouveaux programmes, de nouvelles politiques, sans consulter les enseignants ni leur donner les outils nécessaires pour faire leur travail. Ces dernières années, il y a eu jusqu à 800 millions de compressions en éducation. Ces derniers mois, on a annoncé encore 156 millions de coupes. Le gouvernement a toujours dit qu il coupait dans la bureaucratie, et que ça ne touchera pas le service direct aux élèves. C est faux : les commissions scolaires coupent des professionnels qui soutiennent les élèves. Ce sont des services directs aux élèves et ça se passe là, présentement. Ce n est pas vrai de dire qu on ne fait que couper dans du gras. Il n y en a plus de gras en éducation depuis plusieurs années et des élèves en difficultés, il y en a de plus en plus. Les enseignants sont à bout de souffle, n ont plus de temps, et on leur en demande de plus en plus en leur en donnant de moins en moins et c est ce qui vient miner la valorisation de.» Josée Scalabrini Présidente de la FSE-CS «YVES BOLDUC Les enseignants sont très importants, ils sont la pierre angulaire de notre système d éducation. J ai rencontré plusieurs enseignants dans mes tournées des écoles et chacun est dévoué pour ses élèves. Je pense qu ils ont des conditions de travail acceptables, mais ce sont des gens qui travaillent énormément. Ce que j ai vu dans les écoles généralement, c est que les gens se plaisent beaucoup à faire de l enseignement. Étant donné qu il y a des élèves en difficulté, ils reçoivent de l aide de l extérieur, soit des orthopédagogues ou d autres professionnels. [...] Je ne dis pas que c est parfait, il y a une amélioration à faire, il faut tenir compte de nos ressources actuelles, mais ces dernières années, une grande partie de l argent investi dans le réseau de l Éducation était au niveau des clientèles vulnérables avec de l aide pour les enseignants. Concernant l évaluation des enseignants, ce n est pas un dossier à court terme et ce n est pas non plus une priorité. Ce qui est important, c est de penser qu il pourrait y avoir un mécanisme d évaluation, une évaluation positive. Ce n est rien de punitif et ce n est pas relié à la rémunération. Ça serait à discuter avec les partenaires, soit les représentants syndicaux. Là, on est à l étape de la réflexion. On n est pas à l étape de la réalisation et ce n est pas notre priorité pour la prochaine année. La priorité est de valoriser les enseignants [...], mais il faut vraiment s attaquer à la réussite scolaire pour les élèves et, entre autres, diminuer le décrochage.» Yves Bolduc Ministre de l Éducation «NICOLE LÉGE Enseigner aujourd hui, c est passionnant, exigeant, très difficile, il faut un grand sens de l adaptation parce qu il y a beaucoup de problématiques de société qui arrivent à l école et les premiers intervenants sont les enseignants. Ce sont des gens formés, qui vivent déjà dans un contexte très normé, très rigoureux, il faut leur faire confiance. Oui, on peut toujours améliorer les formations, mais ils sont déjà très encadrés, il y a des directions d école. Déjà, avoir confiance en son enseignant, ça lui donne les coudées franches, une marge de manœuvre, et une estime du travail qu il peut faire avec ses élèves. C est un climat de base pour toute autre action. Je crois tellement au rôle des enseignants, mais aussi aux cadres et aux directions d école, tout ce qui entoure le milieu de l éducation, les parents aussi. Le plus beau défi, c est de faire équipe ensemble, ce qui n est pas toujours évident. Faire équipe ensemble pour le jeune, qui est pour nous l avenir de notre société. Nous vivons une rentrée scolaire sous le signe des coupures et de l improvisation du ministre. Ça n aide en rien à donner de l oxygène et de la vision au monde de l éducation présentement. Le ministre doit donner une opinion qui est porteuse de l éducation avec un grand E.» Nicole Léger Porte-parole de l opposition officielle en matière d éducation primaire et secondaire et de persévérance scolaire (a été enseignante durant 17 ans) EDOE LE BLASON DES ENSEIGNANTS Selon Maurice Tardif, directeur du CIFPE à Montréal, la précarisation des enseignants, en plus des salaires qui stagnent et la faible reconnaissance publique, font en sorte que n est pas très attractive. PHOTO LA PESSE, OLIVIE JEAN MAIE-ANNE DAYÉ Collaboration spéciale Il serait difficile de cacher le malaise enseignant ressenti actuellement dans les écoles québécoises. Les statistiques sont probantes : la précarité grandissante conduit environ un enseignant sur cinq à quitter après seulement quatre ou cinq années de travail dans le milieu. Comment en sommes-nous arrivés à cette situation? Maurice Tardif, directeur du Centre de recherche interuniversitaire sur la formation et enseignante (CIFPE) à Montréal, décrit cette réalité dans son plus récent ouvrage intitulé La condition enseignante au uébec du XIXe au XXIe siècle. Il note «une précarisation très importante [plus de 40 %] d une partie des enseignants qui, depuis 30 ans, doivent travailler à temps partiel et de manière instable dans plusieurs écoles». En d autres termes, un enseignant sur deux, qui cumule en moyenne 17 ans de scolarité, est précaire durant une période qui varie entre 5 et 15 ans. Cette précarité, en plus des salaires qui stagnent et la faible reconnaissance publique, fait en sorte que n est pas très attractive, selon Maurice Tardif. De surcroît, le nombre grandissant d élèves en difficulté dans chaque classe oblige l enseignant à intervenir sur plusieurs fronts, tant sur le plan scolaire que psychosocial. «Un enseignant est un spécialiste de l apprentissage, pas un spécialiste des troubles de comportement ni un psychologue», lance le directeur. UNE POFESSION DIVISÉE Le nombre d enseignants a peu varié depuis trois ans. On assiste plutôt à une division du travail parmi les professionnels des milieux scolaires, notamment à cause de l intégration des élèves en difficulté dans les classes régulières. L effectif des professionnels non enseignants (PNE), soit les orthopédagogues, les psychoéducateurs, les psychologues, les orthophonistes, les conseillers d orientation, les conseillers pédagogiques et les travailleurs sociaux, a augmenté de 16 % entre 1990 et 2000. De son côté, le personnel technique incluant les éducateurs spécialisés et les responsables des services de garde en milieu scolaire, par exemple, a connu une croissance exponentielle de 141 % durant la même période. Il faut noter cependant qu un nombre important du personnel technique est à statut précaire et est constitué souvent de femmes. La plupart des enseignants interrogés dans ce cahier (voir portraits) ont évoqué un manque de ces techniciens pour les soutenir. M. Tardif. Des programmes inadaptés à la réalité du travail sur le terrain, voilà ce que révèle une enquête réalisée par le directeur du CIFPE. «uelque 75 % des enseignants du uébec croient que les réformes de 1998 à 2008 n ont pas contribué à l apprentissage des élèves.» Alarmant, ce chiffre traduirait le manque de consultation des enseignants lors de l adoption de nouvelles mesures éducatives. «Les enseignants sont comme des ouvriers d usine : ils travaillent sur la chaîne de montage. Le boss décide d une réforme, il accélère la Pour mieux répondre aux chaîne de montage. tu es en bas, besoins criants des enseignants uand c est toi qui vois le proquébécois, il est impératif, selon duit passer, il faut que tu l attrapes! C est la M. Tardif, d investir davantage même chose pour les enseignants. Ils sont dans l éducation publique sur le plancher», affirme Maurice Tardif. À la condition instable des enseipour mieux répondre aux besoins gnants s ajoute la mise en place de criants des enseignants québécois, nombreuses réformes à la suite il est impératif, selon M. Tardif, des États généraux de 1996. «Beau- d investir davantage dans l éducoup d énergie a été investie dans cation publique. Il explique : «Les les réformes qui ne concernent pas meilleures écoles au monde selon l enseignement, par exemple la les standards internationaux sont décentralisation, l imputabilité, les dans les pays qui ont des systèmes contrats de performance», souligne publics comme en Finlande et en

SAMEDI 11 OCTOBE 2014 POFESSION : ENSEIGNANT(E) B1 7 1995-1996 Tenue d États généraux sur l éducation 1996 Loi sur l équité salariale : correctifs salariaux de 6,3 % 1997 éforme Marois Implantation de la maternelle à temps plein Fusion de 150 commissions scolaires pour en former 72 2000 enouveau pédagogique Le français, les mathématiques, les langues secondes, l histoire et les sciences s imposent comme les matières de base Approche «par projets» Développement des compétences 2008 Adoption du projet de loi 88 Le ministère de l Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) impose aux commissions scolaires ses buts et ses cibles quantitatives (la gestion axée sur les résultats) 3579075 Gaston ioux Président de la Fédération des comités de parents JOSÉE BOUCHAD «Les enseignants ont un rôle pivot. Ce qui fait la force du cheminement scolaire, c est une bonne communication et une équipe composée des parents et des enseignants. uand on se souvient d un prof qui nous a marqués, c est qu il nous a transmis de la passion, qu on se sentait en confiance. On ne valorise pas suffisamment l école publique. uand on sabre 800 millions $ depuis 2010 et qu on nous demande encore de couper cette année, on lance un très mauvais message à la société. Pour valoriser la profession, il faut valoriser l éducation publique en investissant en éducation et en mettant de l avant le rôle des enseignants, en poursuivant notre appui à leur formation continue, et en redoublant d ardeur pour bien communiquer l ensemble de tous les projets qui se font grâce à toutes nos équipes enseignantes.» L austérité n apas sa place en éducation. Josée Bouchard Présidente de la Fédération des commissions scolaires du uébec Suisse», fait-il remarquer. De plus en plus d enseignants quittent le réseau public pour se diriger vers l école privée. En parallèle, l école publique souffre et manque de financement pour assurer un service de qualité aux élèves. «Jusqu à maintenant, l éducation était un bien public. Si l éducation devient une marchandise, ceux qui ont de l argent vont se payer une marchandise de meilleure qualité. À long terme, on entrera dans une mécanique de division de l école. On va revenir en arrière, c est-àdire que l origine sociale des jeunes va déterminer leur parcours scolaire», s inquiète M. Tardif. Ce portrait aux traits sombres de ne s améliorera pas tant que des changements considérables ne seront pas opérés. L expert assure que des mesures doivent être prises : une plus grande consultation des enseignants dans les prises de décisions, une diversification de carrière par exemple, une implication auprès des universités dans la formation des nouveaux enseignants, une émulation (incitation à se dépasser), ainsi qu une collaboration plus soutenue des parents, suggère M. Tardif. Investissons pour l avenir. facebook.com/lacsq lacsq.org twitter.com/csq_centrale 1415-07

8 B1 POFESSION : ENSEIGNANT(E) SAMEDI 11 OCTOBE 2014 Un texte sur la formation des enseignants est disponible à lesoleil.com 3589936 E E fondsftq.com PLUS D AGENT DANS VOS POCHES Investissez dans votre EE, bénéficiez d économies d impôt supplémentaires et FAITES TOUNE L ÉCONOMIE D ICI. 1 800 567-FONDs (3663) FondsFT Pour Sandra Houde, originaire de uébec et étudiante au baccalauréat en enseignement des sciences et technologies au secondaire à l Université de Sherbrooke, l enseignement doit être une passion. PHOTO LE SOLEIL, YAN DOUBLET 3591288 DES ACTIVITÉS POU TOUTE LA FAMILLE! «J ai deux passions: enseigner et courir.» David Savard-Gagnon Enseignant dans Charlevoix Grand gagnant du marathon de Montréal 2013 MAATHON À ELAIS FSE 2014 Venez appuyer les profs en participant aux activités des journées Prof ma fierté! cet automne à travers tout le uébec. 18 octobre 25 octobre 1er novembre 8 novembre 15 novembre 22 novembre 29 novembre 6 décembre imouski Saguenay (Jonquière) ouyn-noranda Saint-Sauveur Longueuil (Saint-Hubert) Sherbrooke Trois-ivières uébec Plus de renseignements sur www.profmafierte.com J ENSEIGNE, JE PÉPAE L AVENI En collaboration avec : MAIE-ANNE DAYÉ Collaboration spéciale On dit souvent que pour devenir enseignant(e), il faut la vocation. Mais les salaires stagnent, les tâches sont lourdes et la précarité touche plus de 40 % des enseignants québécois. De quoi en décourager plus d un. D ailleurs, le décrochage des enseignants atteint près de 20 % des professionnels en début de carrière. À la lumière de ces constats, enseignante est-elle encore attrayante? Pour Sandra Houde, originaire de uébec et étudiante au baccalauréat en enseignement des sciences et technologies au secondaire à l Université de Sherbrooke, «il faut que ce soit une passion. Tu ne vas pas en enseignement parce que tu ne sais pas trop quoi faire dans la vie.» Elle sait qu elle veut exercer cette profession, car elle «aime le côté humain qu offre l enseignement et [a] le goût de transmettre son savoir». «LE SPECTE DE LA SUPPLÉANCE» La plus grande crainte chez les étudiants, dit-elle, est le spectre de la suppléance, qui peut durer plusieurs années avant l obtention d un poste. Elle soutient que pour faciliter l insertion des nouveaux enseignants sur le marché du travail, il faudrait réformer avant tout le programme d études qu elle suit actuellement. «Il n y a pas assez de cours pratiques sur les troubles d apprentissage et de comportement» qui peuvent les préparer à la réalité dans les classes, soit l intégration d un nombre de plus en plus élevé d EHDAA (élèves handicapés ou élèves en difficulté d adaptation ou d apprentissage). Aussi, elle croit que les enseignants expérimentés pourraient soutenir davantage les nouveaux arrivants. uant à Samuel Pouliot, originaire de L Île-d Orléans à uébec et étudiant de quatrième année au baccalauréat en enseignement de l univers social (géographie et histoire) au secondaire à l Université de Sherbrooke, ne fait pas l envie de tous. «uand je dis à mes amis, parents ou à des enseignants que je connais que je veux être enseignant, ils me disent : Tu n es pas chanceux», affirme-t-il. Ce n est pas ce qui l arrêtera. «La transmission des connaissances et la possibilité d améliorer la vie des gens» est son leitmotiv et le salaire n est pas sa motivation. «Mon but dans la vie, ce n est pas d avoir de l argent, c est d être heureux. Ça ne me dérange pas d être précaire pendant encore 10 ou 15 ans», soutient-il. Samuel Pouliot critique le programme d études en enseignement qui, selon lui, ne prépare pas suffisamment les futurs enseignants à la réalité du travail de terrain. «Je trouve qu on a trop de cours de pédagogie, de didactique, d évaluations et de psychologie. Il faudrait qu il y ait plus de cours dans notre discipline.» Contrairement à la Fédération des syndicats de l enseignement (FSE-CS), il prône la mise en place d un ordre professionnel, qui permettrait à son avis d améliorer les conditions de travail des enseignants en plus d éloigner les «mauvais» enseignants du système scolaire. Il est favorable à l abolition des commissions scolaires pour une «redistribution de la richesse des enve loppes gouvernementales», dit-il.