Cancers Bronchiques 18 Mars 2014 Faculté de Médecine et de Pharmacie de Dijon Dr Pascal FOUCHER
Les cancers bronchiques Problème de santé publique majeur dans le monde 5 millions de décès par an dans le Monde 39 500 nouveaux cas en France en 2011 (incidence : ~70 / 100 000) 27 500, soit 70 % des cas chez l homme (2 ème cause de cancer) 12 000 des cas chez la femme (3 ème cause de cancer) diminue chez l homme progresse la femme (x 3 en 20 ans!) En grande partie évitable inconnu avant le XX ème siècle facteur causal (95 %) connu depuis plus de 60 ans: tabac tabagisme = maladie à expression variable? Peu curable taux de mortalité ~ 51 / 100 000 en France 29 100 décès en 2011 en France (3/h) 21 000 chez l homme (1 ère cause de décès par cancer) 8 100 chez la femme (2 ème cause ex aequo de décès par cancer) progrès thérapeutiques faibles depuis 20 ans Dépistage possiblement efficace mais peu efficient Impact économique 2
Tendance chronologique 3
Evolution incidence et mortalité 4
Incidence et mortalité selon l année 5
Incidence et mortalité par âge 2012 6
Données utilisées Estimation nationale de l'incidence et de la mortalité par cancer en France entre 1980 et 2012 Etude à partir des registres des cancers du réseau Francim - Partie 1 : tumeurs solides Auteur(s) : Binder-Foucard F, Belot A, Delafosse P, Remontet L, Woronoff AS, Bossard N Editeur(s) : Institut de veille sanitaire 7
Mortalité Cancers USA Hommes 1972-2001 8
Mortalité Cancers USA Femme 1972-2001 9
Facteurs de risque TABAC: facteur étiologique (1950) effet de l'âge de début ++ effet de la durée : 2x = RR x 20!! effet de la dose (PA) : 2x = RR x 2 tabagisme passif : RR x 2.5 à 3 autres facteurs : tabac blond / brun, filtre À l origine de 95 % des cancers bronchiques chez l homme 70 % chez la femme Exposition professionnelle 10 % (amiante, arsenic, chrome, nickel, aluminium, hydrocarbures, radon, béryllium, cadmium, silice, radiations ionisantes, houille) 10
Tabac 100 milliards de cigarettes fumées chaque année en France. Tabac = 66 000 morts / an en France (7.5 / heure). 1 fumeur régulier sur 2 meurt prématurément des suites de son tabagisme, dont la moitié avant l'âge de 65 ans. 1 cigarette = - 11 minutes de vie. Première cause de mortalité évitable en France. Près de 50% des personnes âgées de 18 à 34 ans fument. Le tabac est responsable de 33% des cancers chez l'homme et 10% chez la femme. Un cancer de la vessie sur deux est provoqué par le tabac. 20 cigarettes fumées = seuil d'alerte à la pollution en ville. 8 millions de personnes dans le monde pourraient décéder chaque année à cause du tabac d'ici 2030 (OMS).
Tabac Entre 15 et 20 millions de Français fument
Tabac Augmentation importante chez les femmes
Dépistage National Lung Screening Trial (NLST) New England Journal of Medicine Août 2011 Dépistage randomisé RX vs scanner (2002 2004) 53 000 fumeurs de 55 à 74 ans, >30 PA, arrêt depuis moins de 15 ans 75 000 scanners : 1 060 cancers bronchiques / 346 décès 75 000 Rx : 941 cancers bronchiques / 425 décès 320 scanners pour un décès «évité» 96,4 % de faux positifs sur le scanner! Scanner faible irradiation efficace pour détecter précocement des cancers bronchiques. Diminution de 20 % du nombre de décès dans cette étude Oui, mais effet sur la survie pas aussi clair Biais d avance au diagnostic pas économiquement envisageable sans sélection de la population
Avance au diagnostic Dépistage Symptômes Survie Temps Première cellule tumorale Avance au diagnostic Décès
Prévention Prévention fondamentale arrêt du tabac +++ exposition professionnelle (amiante x RR par 5 à 50) diminution très lente du risque après l'arrêt Pas de retour au risque du non fumeur Non fumeur = 100 cig dans une vie!!!
Mode de découverte Radiographie en l absence de symptômes Pour une raison X Dépistage? Signes cliniques Radiographie
Diagnostic clinique Signes respiratoires Dyspnée (60%), toux (75%) Hémoptysies (30%) Douleurs (50 %) Infections, surtout si récidivantes Signes généraux AEG, amaigrissement (70 %), fièvre Maladie thrombo-embolique
Diagnostic clinique Extension loco régionale Pleurésie, péricardite Syndrome cave supérieur / dysphagie Pancoast-Tobias Adénopathie sus claviculaires Extension à distance Foie, os, cerveau, surrénales, (peau, muscles, reins, choroïde..) Syndromes paranéoplasiques
L imagerie
Tumeur bronche principale droite
Opacité ronde périphérique
Opacité ronde périphérique
Atélectasie LSDt
Epanchement pleural
Métastases osseuses
Hippocratisme digital
Tumeur primitive
Métastase pariétale
Scanner thoracique Cause Effet
Métastase hépatique
Métastase cérébelleuse
La pièce opératoire
Le diagnostic de certitude est anatomopathologique Fibroscopie bronchique (peut être normale) biopsies cytologie Cytoponction transpariétale Médiastinoscopie / Echo-endoscopie bronchique Thoracoscopie Ponction pleurale, biopsie pleurale Autres (métastases, adénopathie sus claviculaire, )
Les traitements
Eventail des traitements Chirurgie Chimiothérapie Molécules ciblées («biothérapies») Immunothérapie Radiothérapie Endoscopie interventionnelle cryothérapie, laser, thermocoagulation, prothèses, photothérapie...
Principes thérapeutiques Maladie localisée: traitement local Chirurgie quand possible (± chimio ± radiothérapie) Radiothérapie (tumeur, médiastin) Endoscopie interventionnelle Souvent non curateur Maladie diffuse: traitement général Chimiothérapie / thérapeutiques ciblées + traitement des symptômes Maladie localement avancée Chirurgie ± chimiothérapie ± radiothérapie
Les chimiothérapies Les thérapies ciblées
Le cadre général de prescription des chimiothérapies L AMM : Autorisation de Mise sur le Marché Les indications autorisées Les modalités de remboursement (!) Le RBU : Référentiel de Bon Usage (INCa) Les bonnes indications (médecine basée sur les preuves) Les choses Interdites Les données de la littérature Médicaments autorisés mais inefficaces Le coût
Le cadre général de prescription des chimiothérapies Exemples d AMM / AMM conditionnelles NAVELBINE «Cancer Bronchique non à petites cellules» ALIMTA «ALIMTA, en association avec le cisplatine, est indiqué dans le traitement en première ligne des patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules localement avancé ou métastatique, dès lors que l'histologie n'est pas à prédominance épidermoïde (voir rubriquepropriétés pharmacodynamiques). ALIMTA est indiqué en monothérapie dans le traitement de maintenance du cancer bronchique non à petites cellules, localement avancé ou métastatique immédiatement à la suite d'une chimiothérapie à base de sel de platine, dès lors que l'histologie n'est pas à prédominance épidermoïde chez les patients dont la maladie n'a pas progressé (voir rubrique Propriétés pharmacodynamiques). ALIMTA est indiqué en monothérapie dans le traitement en seconde ligne des patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules, localement avancé ou métastatique, dès lors que l'histologie n'est pas à prédominance épidermoïde (voir rubrique Propriétés pharmacodynamiques).»
Le cadre général de prescription des chimiothérapies L AMM : Autorisation de Mise sur le Marché Les indications autorisées Les modalités de remboursement (!) Le RBU : Référentiel de Bon Usage (INCa) Les bonnes indications (médecine basée sur les preuves) Les choses Interdites Les données de la littérature Médicaments autorisés mais peu efficaces Le coût (90 à 6000 par cure)
Le cadre général de prescription des chimiothérapies des cancers bronchiques Possiblement administrées avant (néoadjuvant) ou après (adjuvante) un autre traitement (chirurgie ou radiothérapie) Possiblement administrées en même temps que de la radiothérapie Traitement quasi exclusif des cancers bronchiques stade IV («généralisés»)
Le cadre général de prescription des chimiothérapies des CB stades IV A) Chimiothérapies «conventionnelles» Bithérapie si l état général le permet Meilleure réponse Meilleure survie Plus de toxicité Le plus souvent : Sel de Platine + autre chose Monothérapie si patients fatigués Protocoles adaptés chez le sujet âgé B) Thérapies «ciblées»
Chimiothérapies «conventionnelles» Tuent les cellules au moment de leur division Les cellules tumorales se divisent beaucoup Les cellules saines moins Mécanisme Brutal Toxique Parfois efficace Résistances D emblée Acquise
Thérapies «ciblées» Des récepteurs situés sur ou dans la cellule cancéreuse sont blocables par des traitements spécifiques Ces récepteurs sont anormalement hyper actifs Grande quantité Mutation activatrice Ils activent des voies de signalisation Favorisant la survie cellulaire Favorisant la prolifération cellulaire Cibles contre lesquelles on dispose d un traitement : Epidermal Growth Factor (EGFR) Vascular Endothelial Growth Factor (VEGF) Translocation EML4-ALK Réarrangement ROS 1 et RON Amplification de c-met Surtout les non épidermoïdes
Le cadre général de prescription des chimiothérapies des CB stades IV Les Sels de Platine (SdP) CISPLATINE Médicament de référence Plus efficace que le CARBOPLATINE (sauf CPC) Toxicités cumulatives Rénale (nécessité d une hyper-hydratation) Oreille (acouphènes, surdité) Neurologique (paresthésies extrémités) CARBOPLATINE En cas de contre-indication documentée (sauf CPC) Toxicité médullaire plus importante Pas d AMM dans les CBNPC!
Le cadre général de prescription des chimiothérapies des CB stades IV Les médicaments utilisables seuls ou associables aux SdP (pour les CBNPC) Gemcitabine (GEMZAR) (J1 et J8 /3 sem.) pas de chute des cheveux Pemetrexed (ALIMTA) (J1 / 3 sem.) Mieux toléré, pas de chute des cheveux Taxanes (TAXOL et TAXOTERE) (J1 / 3 sem.) Plus toxiques, chute des cheveux Vinorelbine (NAVELBINE) (J1 et J8 /3 sem.) Tolérance digestive difficile, voie orale possible Efficacité comparable
Le cadre général de prescription des chimiothérapies des CB stades IV Les médicaments utilisables seuls ou associables aux SdP (pour les CPC) Etoposide (VEPESIDE, ETOPOPHOS, J1 à J3 / 3 sem) Première ligne chute des cheveux voie orale possible en général en monothérapie (CELLTOP) Topotecan (HYCAMTIN) (J1 à J5 / 3 sem) Voie injectable ou orale, deuxième ligne Irinotecan (CAMPTO) Hors AMM, deuxième ligne Autres.
Le cadre général de prescription des thérapies ciblées dans le CB stade IV Les anti EGFR («TKI», voie orale) Erlotinib (TARCEVA) Gefitinib (IRESSA) Afatinib (GIOTRIF)(à venir) Les anti VEGF (injectables) Bevacizumab (AVASTIN) Pas seul, associé à une chimiothérapie Pas pour les épidermoides (saignements) Les anti EML4 -ALK (voie orale) Crizotinib (XALKORI) Les autres cibles: ROS1, C-MET, RON Crizotinib dans le cadre du programme ACSé
En pratique : la personnalisation des traitements
Le socle fondamental : l histologie et pathologie moléculaire. Les cancers bronchiques à petites cellules (20 %) Pas de thérapie ciblée Les cancers bronchiques non à petites cellules (80 %) Les Epidermoïdes Très peu de mutations exploitables Les autres (Adénocarcinomes majoritaires) Sans mutation Avec mutations activatrices (EGFR, EML4-ALK) 53
Les cancers bronchiques à petites cellules Première ligne La bithérapie est la règle pour les patients en bon état général SdP / étoposide (VP16, VEPESIDE ou ETOPOPHOS) Si état général altéré ou sujets très âgés Étoposide oral (CELLTOP) Radiothérapie associée si maladie locale Pas de thérapie ciblée
Les cancers bronchiques à petites cellules Deuxième ligne Reprise de la première ligne, si réponse supérieure à 90 jours Sinon, HYCAMTIN (per os, 5 jours / 3sem, AMM) Autres chimios
Le socle fondamental : l histologie et pathologie moléculaire. Les cancers bronchiques à petites cellules (20 %) Les cancers bronchiques non à petites cellules (80 %) Les Epidermoïdes Très peu de mutations exploitables Les Autres (Adénocarcinomes majoritaires) Sans mutation Avec mutations activatrices (EGFR, EML4-ALK) 56
Les Epidermoïdes
Les cancers bronchiques NPC de type épidermoïde Première ligne La bithérapie est la règle pour les patients en bon état général Sel de Platine GEMZAR, TAXOL, TAXOTERE, NAVELBINE X Pas d ALIMTA (AMM Conditionnelle) Si état général moyen ou sujets âgés GEMZAR seul (J1, J8, J15 /4 sem) NAVELBINE seule (J1, J8, J15 /3 sem) Carboplatine TAXOL hebdomadaire (4 sem)
Les cancers bronchiques NPC de type épidermoïde Maintenance de première ligne : non référentielle Deuxième ligne et ultérieures La monothérapie est la règle TAXOTERE TARCEVA (même si non muté!) NAVELBINE RCP: GEMZAR RCP : Etudes de Phase I RCP : autres molécules Hors AMM / RBU
Les cancers bronchiques NPC de type épidermoïde Si mutations activatrices EGFR ou EML4-ALK, attitude identique aux adénocarcinomes mutés MAIS TRES RARE
Les Non Epidermoïdes (Adénocarcinomes ++)
Les cancers bronchiques NPC de type non épidermoïde (adénocarcinomes ++ ) 1) ABSENCE DE MUTATION ciblable par un traitement Ou absence de connaissance du statut mutationnel 62
Les cancers bronchiques NPC de type non épidermoïde (adénocarcinomes ++ ) Première ligne La bithérapie est la règle pour les patients en bon état général Sel de Platine ALIMTA, TAXOL, TAXOTERE, NAVELBINE, GEMZAR (possiblement inférieur à l ALIMTA) Association optionnelle à l AVASTIN (anti VEGF) Si état général moyen ou sujets âgés NAVELBINE seule, IV ou per os (J1, J8, J15 /3 sem) GEMZAR seul, ALIMTA seul Carboplatine TAXOL hebdomadaire (4 sem) 63 Hors AMM / RBU
Les cancers bronchiques NPC de type non épidermoïde (adénocarcinomes ++ ) Maintenance de première ligne La mise en place d une chimiothérapie de maintenance est la règle pour les patients en bon état général, immédiatement après la 1 ère ligne Pour les patients N AYANT PAS PROGRESSE après la 1ere ligne ALIMTA seul (switch ou continuation) AVASTIN si utilisé en première ligne (continuation) Pour les patients STABLES après la 1 ère ligne TARCEVA seul (switch) 64
Les cancers bronchiques NPC de type non épidermoïde (adénocarcinomes ++ ) Deuxième ligne et ultérieures La monothérapie est la règle TAXOTERE ALIMTA TARCEVA (même si non muté!) NAVELBINE RCP: GEMZAR RCP : Etudes de Phase I RCP : autres molécules 65 Hors AMM / RBU
Les cancers bronchiques NPC de type non épidermoïde (adénocarcinomes ++ ) EGFR + 2) MUTATION activatrice de l EGFR 66
Les cancers bronchiques NPC de type non épidermoïde (adénocarcinomes ++ ) EGFR + Première ligne TARCEVA ou IRESSA ou GIOTRIF (TKI naifs) Deuxième ligne TARCEVA ou IRESSA ou GIOTRIF (TKI naifs) si pas reçu avant Chimiothérapie conventionnelle Troisième ligne RCP : (reprise d un TKI si donné en 1 ère ligne?) 67 Hors AMM / RBU
Les cancers bronchiques NPC de type non épidermoïde (adénocarcinomes ++ ) EML4-ALK + 3) Translocation EML4-ALK 68
Les cancers bronchiques NPC de type non épidermoïde (adénocarcinomes ++ ) EML4-ALK + Première ligne Chimiothérapie conventionnelle Plutôt à base de SdP + pemetrexed Deuxième ligne XALKORI (crizotinib) Troisième ligne RCP XALKORI possible si ROS1 + ou C-MET + (programme ACSé INCa) 69 Hors AMM / RBU
Conclusions 1 Traitement «à la carte» Haut degré de personnalisation On choisit l ensemble des «plats» avant de commencer le repas. Compliqué en 2014 Plus compliqué encore demain Nouvelles thérapies ciblées Autres mutations dans les épidermoïdes Probablement pas de nouvelle chimiothérapie conventionnelle 70
Conclusions 2 Traitements par voie orale +++ Patients Moins à l hôpital Plus à la pharmacie?? Problème de la gestion des effets secondaires 71
Conclusions 3 Le Pharmacien d officine et les traitements du cancer bronchique CB non petites cellules Avec altération chromosomique IRESSA TARCEVA GIOTRIF XALKORI Sans altération chromosomique NAVELBINE CB à petites cellules HYCAMTIN CELLTOP 72