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La Faculté de Droit Virtuelle est la plate-forme pédagogique de la Faculté de Droit de Lyon www.facdedroit-lyon3.com Fiche à jour au 12 novembre 2010 FIICHE PEDAGOGIIQUE VIIRTUELLE Matière : Droit de la famille Web-tuteur : Béatrice Kan-Balivet, actualisé par Amélie MARCELLIN SEANCE N 10- LE DIIVORCE POUR ALTERATIION DEFIINIITIIVE DU LIIEN CONJUGAL SOMMAIIRE I. LE CAS DU DIVORCE POUR ALTERATION DEFINITIVE DU LIEN CONJUGAL 2 Civ.2 ème, 26 septembre 2002 2 Ancien article 238 du Code civil 3 Article 237 du Code civil 3 Article 238 du Code civil 3 II. LA PROCEDURE DU DIVORCE POUR ALTERATION DU LIEN CONJUGAL 4 A. LES CONDITIONS 4 1. La compétence 4 2. Les demandes 5 Cass., avis, 3 avril 2006 5 3. La capacité 6 Articles 249 et s. du Code civil 7 Date de création du document : année universitaire 2005/06 Consultez les autres fiches sur le site de la FDV : www.facdedroit-lyon3.com

Article 252 du Code civil 7 B. LIEN AVEC LES AUTRES FORMES DE DIVORCE 8 2 I. Le cas du divorce pour altération définitive du lien conjugal Le mariage suppose une union quotidienne. Si les époux ne vivent plus ensemble depuis plusieurs années, il peut être remis en cause. Ce divorce, qualifié avant l entrée en vigueur de la loi du 26 mai 2004 de divorce pour rupture de la vie commune, est la consécration d une situation de fait. Ce mode de divorce était peu utilisé du fait en particulier des contraintes de sa procédure et de l importance des engagements que devait prendre le demandeur, puisque ce dernier devrait prendre à sa charge toutes les conséquences pécuniaires du divorce. Civ.2 ème, 26 septembre 2002 Sur le premier moyen, pris en sa première branche : Vu l'article 1123 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que la requête initiale en divorce pour rupture de la vie commune n'est recevable que si elle précise les moyens par lesquels l'époux assurera son devoir de secours ainsi que ses obligations à l'égard des enfants ; Attendu que, pour dire recevable la requête initiale en divorce pour rupture de la vie commune, l'arrêt, qui a prononcé le divorce de ce chef, retient qu'aux termes de sa requête intiale, M. X... a déclaré qu'il entendait exécuter ses obligations envers son conjoint, après la dissolution du mariage, en lui abandonnant sa part de propriété dans l'appartement commun ainsi que sa part du mobilier garnissant cet appartement et en lui versant une pension de 2 000 francs tant qu'il percevrait des revenus équivalents à ceux du moment et, durant l'instance, en lui versant une pension mensuelle de 3 000 francs ; Qu'en statuant ainsi, alors que la requête initiale ne précisait pas les moyens par lesquels l'époux entendait assurer son devoir de secours, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 septembre 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

3 Il était en outre très critiqué car il s agissait d un divorce par simple volonté de l un des époux à un moment où l autre conjoint est éventuellement hors d état de manifester sa volonté. Ancien article 238 du Code civil «Il en est de même (un époux peut demander le divorce) lorsque les facultés mentales du conjoint se trouvent, depuis six ans, si gravement altérées qu aucune communauté de vie ne subsiste plus entre les époux et ne pourra, selon les prévisions les plus raisonnables, se reconstituer dans l avenir.» Ce divorce a été remplacé en 2004 par le divorce pour altération définitive du lien conjugal. Le juge liquide une société conjugale qui n existe plus que juridiquement. Il s agit toujours d un divorce contentieux, conflictuel, puisque dans ce type de divorce, un époux est passif, tandis que l autre est actif. Article 237 du Code civil «Le divorce peut être demandé par l un des époux lorsque le lien conjugal est définitivement altéré.» Mais les conditions de ce divorce ont changé. Dans l ancien divorce pour rupture de la vie commune, le divorce était conditionné d une part, à une rupture de la vie commune et d autre part, à ce que le demandeur prenne en charge les conséquences du divorce. Ce divorce peut être prononcé lorsque le lien conjugal est définitivement altéré. L article 238 du Code civil apporte des précisions sur ce qu il faut entendre par altération définitive du lien conjugal. Article 238 du Code civil «L altération définitive du lien conjugal résulte de la cessation de la communauté de vie entre les époux, lorsqu ils vivent séparés depuis deux ans lors de l assignation en divorce.» Il faut donc d une part, une séparation. Aux termes de l article 238 al.1 er du Code civil, l altération définitive du lien conjugal résulte de la cessation de la communauté de vie entre les époux. Les termes de rupture et de séparation de fait ont été remplacés par ceux de «cessation de la communauté de vie». Seul compte le fait matériel d une vie séparée, fait dont la preuve doit être rapportée par le demandeur et est appréciée souverainement par les juges du fond.

4 Peu importe que la cessation soit intervenue d un commun accord, par la volonté d un seul ou même contre le gré des deux, c est son existence même qui est seule décisive. D autre part, cette séparation doit être prolongée. Il ne s agit plus des six ans exigés par la loi de 1975, mais de deux ans. Ce délai est préfix. Il ne peut donc être abrégé ou suspendue. Toutefois, en cas de reprise de la vie commune, le délai est interrompu. Si les époux se séparent à nouveau, le délai repart ab initio. Ces deux années de séparation doivent exister lors de l assignation. Cette exigence est levée lorsque celui qui a formé sa demande reconventionnellement à une demande de divorce pour faute qui est rejetée, il suffit que les deux ans de séparation soient consommés lorsque le juge statue. Le divorce pour rupture de la vie commune pouvait être prononcé, outre le cas de la séparation, en 1975, en cas d aliénation mentale de l un des conjoints, c est-à-dire d un époux qui a perdu son discernement de manière durable (Cf ancien article 239 du Code civil). On a beaucoup critiqué l opportunité d un tel divorce. Ce cas de divorce n existe plus depuis la loi de 2004. On peut reprocher au législateur qu un droit spécifique n ait pas été élaboré pour assurer la protection de ces êtres plus faibles. II. La procédure du divorce pour altération du lien conjugal Le législateur a opéré une distinction entre les dispositions générales et les dispositions spécifiques concernant les procédures applicables aux différents cas de divorce. A. Les conditions 1. La compétence Les deux juridictions appelées à connaître du divorce sont le juge aux affaires familiales, qui, depuis la loi du 8 janvier 1993, a remplacé le juge aux affaires matrimoniales créé par la loi du 11 juillet 1975, et le tribunal de grande instance. Le J.A.F., magistrat du TGI, est qualifié «d homme orchestre» du divorce. Ses fonctions, énoncées à l article 228 du Code civil, sont en effet multiples. Il est compétent pour prononcer le divorce. Il en règle les conséquences dans les divorces

5 contentieux ou homologue la convention présentée par les époux dans le divorce sur consentement mutuel. Il est également compétent, après le prononcé du divorce, pour statuer sur les conséquences du divorce : notamment pour statuer sur les modalités de l exercice de l autorité parentale, sur les modifications de la contribution à l entretien et l éducation des enfants, révision de la prestation compensatoire, ainsi que sur ses modalités de paiement. Le tribunal de grande instance, quant à lui, en formation collégiale n a plus qu un rôle résiduel dans le divorce. Il ne prononce le divorce que si le J.AF. lui renvoie l affaire. Le renvoi est de droit à la demande d une partie. 2. Les demandes En matière de divorce, la demande émane le plus souvent d un seul des conjoints. Toutefois, à cette demande principale l autre conjoint peut répliquer par le biais d une demande qualifiée de demande reconventionnelle. Il n existe pas nécessairement une concordance entre la demande principale et la demande reconventionnelle. La demande principale peut porter sur la séparation de corps et la demande reconventionnelle porte sur le divorce. L inverse est possible. Dans de telles hypothèses, le juge statue d abord sur la demande de divorce. Ce n est que s il ne fait pas le droit à la demande de divorce qu il statue sur la séparation de corps. Il n observe les deux demandes à la fois que si elles sont toutes les deux fondées sur une faute. Cass., avis, 3 avril 2006 Vu les articles L. 151-1 et suivants du Code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du nouveau Code de procédure civile, Vu la demande d'avis formulée le 5 janvier 2006 par le tribunal de grande instance de Niort, reçue le 9 janvier 2006, dans une instance opposant madame Jacqueline X... à monsieur Jean Y..., et ainsi libellée : "Les dispositions spécifiques transitoires de l'article 33 II b de la loi du 26 mai 2004 relative au divorce impliquent-elles que lorsqu'une demande de séparation de corps a été formée avant l'entrée en vigueur de cette loi et qu'une demande reconventionnelle en altération définitive du lien conjugal est formée sur le fondement de la nouvelle loi, le juge doive examiner en priorité la demande de séparation de corps pour faute, compte tenu des dispositions de l'article 246 nouveau du Code civil, ou bien que la demande de divorce sur le fondement de l'altération définitive du lien conjugal doive primer sur la demande de séparation de corps pour faute au vu des dispositions d'application immédiate de l'article 297-1 nouveau du Code civil?" Sur le rapport de madame le conseiller référendaire Trapéro et les conclusions de monsieur l'avocat général Sarcelet, EST D'AVIS QUE :

6 Lorsqu'une demande en séparation de corps pour faute a été formée avant l'entrée en vigueur de la loi n 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce et qu'une demande reconventionnelle en divorce pour altération définitive du lien conjugal est formée sur le fondement de la loi nouvelle, il y a lieu d'examiner en premier lieu la demande en divorce, en application du premier alinéa de l'article 297-1 du Code civil. Dans d autres cas, les demandes portent toutes les deux sur le divorce. Ainsi quand l un des époux a introduit une demande en divorce pour faute, l autre conjoint peut riposter par une demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal. Le juge examine en premier lieu l existence d une faute. S il décide de ne pas prononcer un divorce pour faute, il prononce le divorce pour altération définitive du lien conjugal, même si le délai de deux ans n est pas écoulé (articles 246 al.2 et 238 al.2 du Code civil). Quand l un des époux a introduit une demande principale en divorce pour altération définitive du lien conjugal, l autre conjoint peut riposter par une demande reconventionnelle en divorce pour faute. Le juge doit toujours d abord statuer sur le divorce pour faute et s il la rejette, il peut prononcer le divorce sur le fondement de la demande principale (article 246 du Code civil). Le défendeur peut également répondre par une demande en divorce accepté. Si les époux parviennent à se mettre d accord sur le principe du divorce, le divorce sera prononcé pour acceptation du principe de la rupture du mariage (article 247-1 du Code civil). Au-delà de ces demandes initiales, il existe des passerelles. Depuis le 1 er janvier 2005, il est possible à tout moment de la procédure de passer d un divorce pour altération définitive du lien conjugal ou pour faute à un divorce à un divorce accepté. Il existe cependant une passerelle, qui n oublie pas au même esprit. Quand une demande en divorce est introduite pour altération définitive du lien conjugal et que le défendeur invoque le divorce pour faute, le demandeur peut modifier le fondement de sa demande et invoquer les fautes de son conjoint. 3. La capacité La loi du 26 mai 2004 a précisé les règles relatives aux hypothèses de divorce concernant au moins un époux incapable. Elles sont énoncées aux articles 248 et suivants du Code civil. En cas de divorce pour altération de la vie conjugale, les dispositions varient selon le régime de protection de l incapable et selon qu il est demandeur et défendeur.

Articles 249 et s. du Code civil 7 Si l un des époux est placé sous tutelle et qu il est demandeur à l action, la demande est présentée par le tuteur avec l autorisation du conseil de famille ou à défaut, par le juge des tutelles. Préalablement, l avis du médecin traitant est sollicité et dans la mesure du possible l intéressé est auditionné par le conseil de famille ou le juge. De même, si ce majeur est défendeur, l action est diligentée contre le tuteur. Evidemment pour des raisons d incompatibilité, si le tuteur est le conjoint de l incapable, un tuteur spécial est nommé. Si l un des époux est placé sous curatelle et qu il est demandeur, il introduit personnellement la demande avec l assistance de son curateur, qui sera un curateur spécial, si ce dernier est son conjoint. Il en est de même s il est défendeur. La procédure débute par une requête initiale présentée au juge par l avocat de l un des époux sans que soient indiqués les motifs du divorce. L idée est de permettre au juge de prendre des mesures provisoires sans polluer le débat par des questions de fautes des époux. Mais dès cette requête, aux termes de l article 257 du Code civil, le juge peut prendre des mesures d urgence si le comportement de l un des époux l exige. Il peut ainsi autoriser l époux demandeur à résider séparément avec ses enfants mineurs. De même, pour garantir les droits de l un des époux, il peut ordonner toutes mesures conservatoires. Le juge peut aussi se prononcer, si cela est nécessaire, sur les modalités d exercice de l autorité parentale et sur la contribution aux charges du mariage. Ces mesures sont provisoires et sont caduques à l expiration d un délai de 4 mois à compter de leur prononcé. La deuxième étape de la procédure est une tentative obligatoire de conciliation préalablement à l instance judiciaire, laquelle peut être renouvelée pendant l instance. Article 252 du Code civil «Une tentative de conciliation est obligatoire avant l instance judiciaire. Elle peut être renouvelée pendant l instance.» Cette conciliation porte tant sur le principe du divorce que sur ses conséquences. Lors de cette phase, le juge entend les époux séparément, puis ensemble. La loi du 26 mai 2004 a rendu la présence de l avocat obligatoire, ce qui peut se comprendre au regard du fait que les époux ont besoin d être conseillé car le cas de divorce n a pas encore été choisi et que les intérêts débattus sont importants. La tentative de conciliation peut être suspendues et reprise sans formalité dans une limite de 8 jours. Si un délai de réflexion plus long paraît utile, le juge peut décider de suspendre la procédure et de recourir à une nouvelle tentative de conciliation dans les six mois au plus. Il ordonne alors, s il y a lieu, les

8 mesures provisoires qui tiennent compte des accords éventuels des époux. Il s'agit de mesures que peut prendre le juge lors de l'audience de conciliation pour assurer l'existence des époux et des enfants jusqu'à ce que le divorce passe en force de chose jugée (Article 254 du Code civil). Si la conciliation échoue, l époux peut introduire l instance en divorce en précisant son fondement, divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage, pour altération définitive du lien conjugal ou pour faute. L époux défendeur peut former une demande reconventionnelle. Toutefois, les époux sont liés s ils ont accepté le principe de la rupture du lien matrimonial pendant la conciliation. A peine d irrecevabilité de la demande, la demande introductive d instance doit contenir une proposition de règlement des intérêts pécuniaires des époux. Pendant l instance, les faits invoqués par les époux peuvent être établis par tout moyen. Toutefois, des restrictions ont été apportées dans un souci de paix des familles. Ainsi par exemple, les descendants ne pourront être entendus sur les griefs invoqués par les époux. Le droit à prestation compensatoire est ouvert aussi bien au demandeur qu au défendeur, selon la situation objective de disparité. Le droit exceptionnel à dommages-intérêts pour conséquences d une particulière gravité est ouvert au défendeur s il n a pas lui-même demandé le divorce de son côté. B. Lien avec les autres formes de divorce Une demande de divorce fondée sur l altération définitive peut se transformer en une autre forme de divorce dans deux cas : - D une part, selon le système des passerelles des articles 247 et 247-1 du code civil, il est toujours possible aux époux de convenir en cours de procédure d un divorce par consentement mutuel ou d un divorce par accord sur le principe. - D autre part, si le défendeur invoque reconventionnellement les fautes du demandeur, priorité est alors donnée à l examen du divorce pour faute (C. civ., art. 246), le demandeur étant autorisé à se placer lui aussi sur ce terrain. Ce n est qu après avoir écarté le divorce pour faute que le juge examine la rupture définitive, qu il peut en ce cas retenir si les époux sont séparés depuis deux ans lorsqu il statue, même si ce délai n était pas accompli lors de l assignation. (C. civ., art. 238 al 2).