GÉRER LES IMPACTS FISCAUX DES NOUVELLES RÈGLES COMPTABLES SUR LES ACTIFS

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GÉRER LES IMPACTS FISCAUX DES NOUVELLES RÈGLES COMPTABLES SUR LES ACTIFS 24 Eric TORT Expert-comptable diplômé Docteur en sciences de gestion Les modifications comptables relatives aux actifs apportées par les règlements CRC 2002-10 et 2004-06 ont entraîné des adaptations des règles fiscales applicables à compter de 2005 (1). Celles-ci ont fait l objet de l instruction administrative du 30 décembre 2005 (2) (4 A-13-05) commentant les adaptations apportées suite à la LFR pour 2004 (art. 42. I), aux décrets 2005-1442 et 2005-1702. Compte tenu de la nouvelle définition des actifs, les critères d inscription à l actif correspondent, au plan fiscal, aux quatre conditions prévues par le PCG (3) ( 3). Les contrats de location étant notamment exclus, il est précisé que cette nouvelle définition ne devrait pas entraîner, dans la plupart des cas, de modification des traitements antérieurs en dépit de la disparition du critère de propriété remplacé par la notion de contrôle ( 4 5). Pour des raisons de neutralité fiscale, il a été décidé, en outre, de maintenir un calcul fiscal distinct de l amortissement résultant des nouvelles règles comptables par le biais de la constitution d amortissements dérogatoires ( 83). En effet, la déductibilité fiscale reste conditionnée à la comptabilisation effective. Sur la notion de biens amortissables (4), il est souligné que les précisions apportées par les règles comptables ne devraient pas emporter de changements ( 87). Enfin, sont considérés, conformément au nouvel article 15 bis de l annexe II du CGI, comme des composants d une immobilisation corporelle les éléments principaux ayant une durée réelle d utilisation différente de celle de l immobilisation et devant être remplacés au cours de la durée réelle d utilisation de cette immobilisation ( 31). Selon ce même article, l application de la méthode par composants implique la comptabilisation séparée à l actif avec un plan d amortissement propre des différents composants identifiés dès l origine (ou à défaut lors d une constatation ultérieure) et lors du remplacement avec constatation en charge de la valeur nette comptable du composant remplacé ( 35). Résumé de l article Les nouvelles règles comptables sur les actifs ont donné lieu récemment à l adaptation de certaines dispositions fiscales (instruction 4 A-13-05) applicables dès la clôture de l exercice 2005. Dans ce contexte, cet article vise à indiquer quelques lignes directrices permettant aux entreprises de minimiser les incidences de ces changements ou au contraire de renouveler les pratiques antérieures en fonction des objectifs poursuivis. Dans ce contexte, les entreprises auront des choix à opérer en fonction des possibilités offertes par ces nouvelles dispositions et des différentes modalités de mises en œuvre : d une part, différentes méthodes sont ouvertes en matière de 1 re application des nouvelles règles (rétrospectives, prospectives), des options sont possibles en matière d activation de certaines dépenses ; d autre part, des modalités de décomposition et d amortissement des actifs peuvent être variables selon les entreprises en raison de l existence de mesure de simplification (pour les PME), de tolérance et de dérogation fiscales, du fait de l utilisation possible de seuils fiscaux de décomposition, de choix de nouveaux modes d amortissement L objet de cet article est de fournir des idées directrices selon des objectifs de minimisation des changements (I) ou de renouvellement des pratiques (II) au regard des impacts et des retraitements fiscaux consécutifs à la mise en place de ces nouvelles règles. Toutefois, précisons que certaines d entre elles demeurent incontournables ou inchangées comme l indique le tableau mis en annexe à la fin de l article. 1. Plus précisément, cf. 175 sur les dates exactes d entrée en vigueur selon les nouvelles dispositions. 2. Les n de paragraphe entre parenthèses renvoient aux n correspondants de de l instruction 4-A-13-05. 3. C est-à-dire caractère identifiable, valeur économique positive, contrôle et évaluation avec une fiabilité suffisante. 4. Ce sont les biens ayant une utilisation déterminable par une durée prévisible, finie et mesurable ( 86).

Fiscalité I La minimisation des impacts fiscaux liés aux nouvelles règles comptables : la recherche d un statu quo Face à l entrée en vigueur des nouvelles règles sur les actifs, certaines entreprises pourront souhaiter minimiser autant que possible les incidences de ces changements afin d éviter la multiplication des impacts et des retraitements fiscaux. Nous indiquons, ci-après, cinq leviers principaux permettant de limiter les effets de l application des nouvelles dispositions. a) Privilégier les méthodes prospectives sans impacts fiscaux à l ouverture Afin de minimiser les impacts fiscaux dans le bilan d ouverture, il sera approprié de retenir les méthodes prospectives en matière de 1 re application. En effet, contrairement aux méthodes rétrospectives, les méthodes prospectives n impactent pas en principe l actif net et sont donc normalement sans impact fiscal ( 167). En outre, elles ont l avantage d être généralement plus simples à mettre en œuvre. Ainsi s agira-t-il : d opter pour l application de la méthode de la réallocation des VNC en matière de 1 re décomposition des actifs sans reconstitution du coût amorti (5) conformément au 3.2. de l avis 2003-E du CU du CNC (CRC 2002-10) ; 5. Valable aussi ici pour les biens non décomposables dont les nouveaux plans d amortissement sont établis, de manière prospective, sur la base des VNC (art. 15-1 du CRC 2002-10 modifié par le 10 du CRC 2005-09). 6. La méthode rétrospective consiste en l activation des sommes concernées depuis l origine avec le cas échéant constatation rétrospective d un amortissement ( 166). Cf. annexe 5 de l instruction pour les options comptables. 7. N.B : il convient de prendre en compte également l importance du composant eu égard à l activité, c est-à-dire au nombre important de composants non significatifs au regard des critères précités. 8. Le PCG retient la durée effective d utilisation du bien par l entreprise tenant compte de sa nature et de son utilisation envisagée (y compris cession). 9. Dans ce cas, la règle de l amortissement linéaire minimal ne s applique pas à l allongement subséquent de durée. d utiliser la mesure de simplification du CRC 2004-06 (art. 17) permettant de procéder à un simple reclassement des VNC (sans modification de valeur) et une sortie d actifs des éléments non conformes. En matière d options comptables ( 165) et de charges à répartir ( 166), des méthodes rétrospectives et prospectives sont également possibles sur le plan comptable. En particulier, en cas d incorporation à l actif d anciennes charges à répartir, il est ainsi possible, suivant une méthode prospective, de n activer que le solde à l ouverture avec un amortissement sur la durée résiduelle (6). En tout état de cause, il est rappelé ici que l avis 2005-D du CU du CNC ( 1.2) préconise une application homogène de la méthode retenue (rétrospective ou prospective avec reclassement et réallocation des VNC) pour toutes les immobilisations à l ensemble des dispositions des règlements précités. Cela étant, en cas d établissement de comptes consolidés en IFRS, la méthode rétrospective de reconstitution du coût amorti lors de la 1 re décomposition pourra être néanmoins préférable dans la mesure où elle est compatible avec IFRS 1 (avis 2003-E CU du CNC, 3.1). b) Préférer la constitution de PGR à l identification d un composant de 2 e catégorie S agissant des dépenses d entretien faisant l objet de plans pluriannuels de gros entretien, les règles fiscales diffèrent du traitement comptable ( 41) qui prévoit la possibilité soit de l identification d un composant à l origine, soit de la comptabilisation de provision pour gros entretien (PGR). Sur le plan fiscal, il ne peut s agir, en effet, que de charges. Abstract Recent changes in accounting rules for assets have led to changes in certain tax provisons applicable as of yearend 2005 (ruling 4 A-13-05). As such, the following article aims to highlight some of the guidelines for companies to follow when choosing either to minimise the impact of such changes or to continue using existing procedures. Ainsi, pour des raisons pratiques, il sera certainement plus simple de constituer des provisions PGR déductibles fiscalement plutôt que d identifier un composant de 2 e catégorie nécessitant des retraitements extra-comptables afin d amortir fiscalement le composant concerné sur la durée de l immobilisation et de porter en déduction les coûts de remplacement ultérieurement activés avec neutralisation totale (ou partielle) des dotations comptables ( 42). En cas d établissement de comptes consolidés en IFRS, la question de l identification d un composant de 2 e catégorie se pose dans la mesure où les provisions PGR sont interdites dans le référentiel comptable international. c) Utiliser les seuils de signification en matière d approche par composants En ce qui concerne la mise en œuvre de l approche par composants, les entreprises auront intérêt à examiner de près leur fichier d immobilisation afin d identifier les biens potentiellement décomposables, c est-à-dire ceux constitués d éléments principaux ayant une durée réelle d utilisation différente de l immobilisation et devant être remplacés au cours de la période réelle d utilisation de cette immobilisation (art. 15 bis annexe II du CGI). Autrement dit, il est à souligner que l identification d un composant est subordonnée à l existence d un ou plusieurs remplacements prévus à la charge de l entreprise au cours de la période réelle d utilisation précitée et au caractère séparable de ce composant ( 34). A partir de là, les entreprises auront la possibilité de se référer aux seuils de signification introduits par l instruction (4 A-13-05) en dessous desquels il n y a pas d obligation de décomposition des actifs ( 32). Il s agit, d une part, des composants ayant une valeur unitaire inférieure à 500 euros et d autre part, de ceux représentant moins de 15 % du prix de revient total de l immobilisation (1 % pour les immeubles) (7). De plus, en termes de durée d utilisation (8) ( 33), il est également admis, au plan fiscal, la non-identification des éléments principaux ayant une durée d utilisation inférieure à 12 mois ou supérieure ou égale à 80 % de celle de l immobilisation (9). Sur le plan comptable, il s agira de s assurer que les seuils de signification précités sont acceptables. 25

26 d) Eviter autant que possible la déconnexion des durées d amortissement fiscales et comptables pour les actifs non décomposés S agissant des durées d amortissement, il n y a plus désormais coïncidence entre l amortissement comptable selon les durées d utilisation propres à l entreprise et l amortissement fiscal fondé sur les durées d usage ( 97). Dans le cas, a priori le plus fréquent, où la durée d utilisation comptable est supérieure à la durée d usage de référence ( 98), il y a lieu normalement de constituer un amortissement dérogatoire pour respecter la règle inchangée de l amortissement minimal (art. 39 B du CGI). Dans le cas contraire ( 99), il convient de réintégrer extra-comptablement l amortissement comptable excédentaire. Cela étant, les entreprises auront la possibilité suivant les cas : de conserver, d une certaine manière, l amortissement comptable sur des durées d utilité supérieures aux durées d usage (10). En effet, il est admis, dans ce cas, que les entreprises ne soient pas pénalisées par l application des dispositions de l article 39-B du CGI précité sauf cas manifestement abusif ( 98). L amortissement ainsi différé reste déductible au fur et à mesure de l amortissement comptable ; de maintenir plus exceptionnellement un amortissement (comptable) basé sur des durées (d utilité) inférieures aux durées d usage de référence sous réserve de justifier de circonstances particulières et dans la limite d une dérive maximale de 20 % par rapport aux usages professionnels ( 99) ; d utiliser les durées d usage fiscales dans les comptes individuels des entreprises ne dépassant pas, à la clôture de l exercice, 2 des 3 critères concernant le total du bilan (3 650 K ), le chiffre d affaires (7 300 K ) et l effectif (50). Cette mesure de simplification pour les PME introduite par l avis n 2005-D du CU du CNC ( 1.1.2-2) en faveur de l utilisation de durées d usage en comptabilité permet ainsi d éviter la comptabilisation d amortissement dérogatoire à raison de la durée pour les actifs non décomposés ( 101). e) Penser à se prévaloir, le cas échéant, de la tolérance et de la dérogation permettant d utiliser les durées d usage pour les actifs décomposables (hors immeuble de placement) Fiscalement, les biens comme les composants doivent être amortis suivant la durée normale d utilisation résultant des usages. Toutefois, en l absence d usage identifié pour les composants, la durée normale d utilisation correspond à leur durée de vie, autrement dit, en pratique, à la période à courir jusqu au remplacement en cohérence, dans la plupart des cas, avec la durée comptable ( 111). De la même manière, la structure doit être amortie sur la durée normale d utilisation, c est-à-dire la durée de vie correspondant dans la plupart des cas à l amortissement comptable ( 117). Toutefois, l entreprise aura la faculté de se prévaloir de la tolérance et de la dérogation suivantes : à l origine ou lors de la 1 re application de l approche par composants (11), il est admis, en effet, de retenir la durée d usage de la structure pour amortir le composant si celle-ci est inférieure à la durée normale d utilisation de ce dernier ( 111) ; par dérogation, il est admis, par ailleurs, de pouvoir utiliser la durée d usage fiscale du bien pris dans son ensemble (hors immeubles de placement) pour amortir la structure ( 117). Autrement dit, l entreprise aura la possibilité dans cette situation (tolérance applicable) : soit de retenir la durée d usage pour la structure et les composants des actifs 10. Cf. aussi l avis des auteurs de la Revue fiduciaire comptable (n 325, p. 36) considérant ici l amortissement dérogatoire comme non obligatoire. 11. En cas d identification de composants en cours de vie, il est considéré, sauf cas abusifs, l absence d infraction à la règle de l amortissement minimal ( 114) et la mise en place d un nouveau plan d amortissement sur la durée normale d utilisation résiduelle ( 115). Voir aussi le 113 pour les situations de renouvellement des composants. 12. En cas d utilisation de ladite méthode rétrospective, il est autorisé, au plan fiscal, de reconstituer, de la même manière, depuis l origine les amortissements dérogatoires ( 168). 13. La 1 re application des nouvelles règles comptables est considérée comme un changement de méthode au sens de l article 314-1 du PCG. (hors immeuble de placement) comme antérieurement, à charge pour elle de constater des amortissements dérogatoires correspondant à l écart avec les durées d utilité comptables ; soit d appliquer, de manière homogène, des durées d utilité au plan fiscal comme dans les comptes individuels voire consolidés. Les entreprises désireuses de limiter l impact de ces changements pourront également ne pas exercer les différentes options décrites au II (d) ci-après. II Le renouvellement des pratiques comptables en tenant compte des nouvelles dispositions fiscales : une opportunité de changement A contrario, certaines entreprises pourront souhaiter profiter de ces nouvelles règles pour procéder à des changements ciblés des modalités de comptabilisation de leurs actifs. A cet égard, nous envisageons ici quatre moyens possibles de renouvellement des traitements antérieurs poursuivant des objectifs variés de présentation du bilan, d unification des comptabilités et de minoration des charges de l exercice. a) Utiliser les méthodes rétrospectives des règlements comptables en vue d améliorer la présentation bilantielle En matière de 1 re application, le recours aux méthodes rétrospectives présente l avantage de pouvoir reconstituer les valeurs d origine des actifs avec recalcul rétrospectif des amortissements sur les nouvelles durées (12) ( 168) par une contrepartie en capitaux propres. Sur le plan comptable, le retraitement rétrospectif se traduit, en effet, par une inscription des impacts nets d impôts en report à nouveau sauf constatation directe en résultat pour des raisons fiscales (13). Sur le plan fiscal, il est admis que les variations positives et négatives d actif consécutives à l application de ces nouvelles règles soient prises en compte dans le résultat fiscal de l exercice, respectivement par une réintégration ou une déduction extra-comptables sauf cas de comptabilisation des impacts directement en résultat ( 167).

Fiscalité En outre, pour la 1 re application de l approche par composants aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2005 ( 171-172), une mesure d étalement des conséquences fiscales sur 5 ans a été introduite par la LFR 2004 (art. 237 septies du CGI) ( 169). Réservée aux seuls effets de la 1 re décomposition, cette mesure permet ainsi d étaler, de manière égale, sur l exercice et les quatre suivants, la minoration ou la majoration de bénéfice imposable subséquente à partir du tableau 2058-A. En outre, il est possible de renoncer à l étalement en cas de variation globale inférieure ou égale à 150 K ( 170). b) Mettre en place une décomposition des actifs avec des durées d utilité en fonction des caractéristiques propres de l entreprise Compte tenu de l homogénéité de définition des composants entre le PCG et le CGI, il est indiqué la possibilité de se référer, au plan fiscal ( 36), à l avis n 2003-E du comité d urgence du CNC en matière de première décomposition des actifs et aux études sectorielles dans le logement social (avis n 2004-11 du CNC) et dans l immobilier (position FSIF (14) ). Les entreprises auront ainsi la possibilité de mettre en place une décomposition d actif sur la base d études sectorielles avec concordance dans la plupart des cas avec les durées comptables ( 111) (durées d utilité propres à l entreprise). Qui plus est, en cas d établissement de comptes consolidés, il sera ainsi possible d adopter des décompositions et des durées d utilité similaires. En présence d usage identifié pour certains composants, il conviendra toutefois de s y référer fiscalement en pratiquant des amortissements dérogatoires afin de pouvoir bénéficier de la déduction maximale. S agissant des dépenses faisant l objet de plan pluriannuel de gros entretien, il sera indiqué ici d identifier, pour les motifs précités, un composant de 2 e catégorie lors de la 1 re décomposition tout en respectant les retraitements fiscaux nécessaires (cf. ci-avant). Globalement, il conviendra de prendre en compte les précisions générales apportées par l instruction 4 A-13-05 ( 36), à savoir : sauf erreurs manifestes, la décomposition comptable vaut décomposition fiscale sous réserve d une application homogène pour des actifs de même nature (hors cas particuliers dûment justifiés) ; il devrait y avoir, dans la plupart des cas, similitude de décomposition dans les comptes sociaux et consolidés ; la règle de l amortissement minimal ne sera pas opposée sauf cas manifestement abusifs. c) Aligner les modes et bases d amortissement comptable avec ceux pratiqués en consolidation et/ou en comptabilité de gestion Sur le plan comptable, les modes d amortissement doivent désormais traduire le rythme de consommations des avantages économiques attendus. Globalement, ces précisions comptables ne devraient pas avoir de conséquences sur les traitements actuels ( 102). En effet, il est toujours possible d utiliser un amortissement dégressif pour certains biens (avec constatation d un amortissement dérogatoire). En outre, aucune disposition fiscale ne s oppose à des modes d amortissement comptable linéaires et variables sous réserve du respect de la règle de l amortissement minimal précité. S agissant des modes variables, l entreprise aura ainsi la possibilité de mettre en œuvre des modes non linéaires de type unités d œuvre sous réserve d en justifier la pertinence au regard de la dépréciation de l actif ( 102). Leur utilisation est déjà admise sur le plan fiscal pour certains moules et le sera pour les biens et équipements sous conditions de traduire une dépréciation effective et définitive et d être évaluable de manière fiable sans variations aléatoires. Pour les autres biens, il s agira de pratiquer, suivant le cas, un amortissement dérogatoire pour se conformer à la règle de l amortissement minimal ou une réintégration extra-comptable de l amortissement excédentaire. Il s agit incontestablement là pour l entreprise d un moyen d aligner les modes d amortissement fiscaux avec ceux des comptes consolidés ou de la comptabilité de gestion. 14. FSIF : fédération des sociétés immobilières et foncières. 15. Les frais de recherche sont obligatoirement enregistrés en charge (art. 311-3 du PCG). 16. C est-à-dire des immobilisations incorporelles, corporelles et des stocks (acquis ou produits) nécessitant une longue période de préparation avant utilisation ou cession ( 63). Au niveau de la base amortissable, il existe, en l espèce, une distorsion entre les règles comptables basées sur la valeur brute minorée de la valeur résiduelle éventuelle ( 90) et les règles fiscales fondées sur le prix de revient de l immobilisation ( 91). Ainsi, en cas d écart lié à l existence d une valeur résiduelle en fin d utilisation (cas des loueurs de voitures, par exemple), il y a lieu de constituer un amortissement dérogatoire correspondant à la quote-part d amortissement non comptabilisée. D application obligatoire, cette disposition constitue, en quelque sorte, une opportunité permettant de mettre en phase la base d amortissement comptable avec la réalité économique en cas de cession programmée des actifs. d) Exercer les options nouvelles ou modifiées d inscription à l actif de certaines dépenses en vue de minimiser les charges de l exercice Afin de minimiser les charges de l exercice, l entreprise aura, en effet, la possibilité d exercer les options modifiées ou nouvelles en faveur de leur inscription à l actif de certains frais de développement, du coût des emprunts relatifs à des actifs éligibles et de certains frais d acquisition. Pour ce qui est des frais de développement (15), les six conditions d activation prévues par le PCG sont également applicables en matière fiscale. Il est souligné que le choix entre l activation (méthode préférentielle) ou l enregistrement en charge des dépenses de développement constitue une décision de gestion opposable à l entreprise pour l ensemble de ses projets ( 18). En matière de coûts d emprunt, les dispositions fiscales introduites par l article 38 undecies (annexe III du CGI) sont, en pratique, alignées sur les règles comptables avec, en particulier, un champ d application ( 63) et des natures de coût identiques ( 64). Selon le PCG et le CGI, les coûts d emprunt sont ainsi au choix de l entreprise comptabilisés en charge ou incorporés au coût d origine des actifs dits éligibles (16). Comme en matière comptable, il s agit d une option irrévocable et globale applicable à tous les coûts d emprunt et à tous les actifs éligibles ( 67). Du point de vue tant comptable que fiscal, les frais d acquisition d immobi- 27

diatement des charges ( 68). Cette option fiscale forcément en cohérence avec l option comptable est irrévocable et globale pour toutes les immobilisalisations (droits de mutation, honoraires, commissions et frais d acte, 69) sont soit incorporés au coût d acquisition de l actif soit déduits immé- tions (corporelles et incorporelles) (17) ( 70-71). Eric TORT Annexe : des retraitements inévitables et des traitements inchangés 28 Quelques modifications obligatoires incorporation au prix d achat des actifs immobilisés des frais directement engagés pour les mettre en état d utilisation et des coûts de démantèlement, d enlèvement et de restauration des sites en cas d obligation encourue et déduction des escomptes de règlement. alignement des règles comptables sur les dispositions fiscales avec la disparition des charges à répartir dans le PCG à l exception des frais d établissement et des frais d émission d emprunt ( 44) ; inscription de toutes dépenses en charge ou à l actif sous respect des conditions d activation. amortissement des immeubles de placements (18) sur les durées réelles d utilisation de chaque élément (durées comptables) ( 118) ; amortissement des autres immeubles selon la durée d usage de l immeuble pour la structure et selon les durées normales d utilisation au niveau des composants avec possibilité de retenir la durée d usage de la structure selon la tolérance précitée ( 123). pas d interdiction de principe, au plan fiscal, de constater une dépréciation complémentaire probable et non irréversible ( 144) ; justification du caractère probable de la perte par une dépréciation effective sur la base d une valeur de marché ou d une valeur d expertise indépendante (et non d une valeur comptable d usage (20) ) ; base de dépréciation déductible, abstraction faite des coûts de sortie contrairement aux règles comptables ( 145) et après amortissements dérogatoires ( 146). Quelques règles existantes reconduites (après éventuel aménagement) activation des écarts de conversion dans les comptes individuels ( 53) (méthode non préférentielle en consolidation) ; amortissement possible sur 12 mois des logiciels acquis comme auparavant ( 139). activation toujours possible des frais d établissement (méthode non préférentielle) avec amortissement sur 5 ans maximum ( 45) (traitement fiscal fonction du traitement comptable) ; répartition toujours possible sur le plan comptable et fiscal des frais d émission d emprunt sur la durée de l emprunt ( 48). maintien du régime de l amortissement dégressif pour les immobilisations éligibles ( 102) avec des adaptations pour les biens décomposés (structure = coefficient de majoration correspondant à la durée d usage fiscale de l immobilisation ; composants = coefficient de majoration correspondant à leur durée propre d amortissement (19) ). pas de changement s agissant de la distinction entre immobilisations et stocks ( 6) et de la tolérance fiscale prévoyant la déduction immédiate en charges des dépenses d acquisitions ayant une valeur unitaire maximum de 500 euros ( 7). 17. En matière de frais d acquisition, une option distincte est prévue pour les titres immobilisés ( 68). 18. Les immeubles de placement sont des biens utilisés pour en retirer des loyers ou valoriser le capital ( 120) et non affectés par l entreprise à sa propre exploitation (industrielle, commerciale, etc.) ( 118). 19. Il s agit de la durée d utilisation comptable ou de la durée fiscale en cas de durée plus courte résultant notamment de la tolérance précitée. 20. Sur le plan comptable, la valeur d usage est la valeur des avantages économiques futurs attendus de l utilisation de l actif et de sa sortie. Bibliographie Avis du comité d urgence du CNC n 2003-E du 9 juillet 2003 et n 2005-D du 1 er juin 2005. Règlements CRC n 2002-10 du 12 décembre 2002 et n 2004-06 du 23 novembre 2004. Loi de finances rectificative pour 2004 (art. 42. I). Instruction administrative du 30 décembre 2005 (4 A-13-05). Décrets n 2005-1442 du 14 novembre 2005 et n 2005-1702 du 28 décembre 2005. L. Geslin, Actifs : incidences fiscales des règles comptables, SIC, n 238, janvier 2006, pp. 12-14. PWC, Actifs : optimisation 2005 comment optimiser les nouvelles options comptables, BCF, 1/06, janvier 2006, pp. 59-85. RF, Définition, valorisation et dépréciation des actifs : quels changements fiscaux?, Revue fiduciaire, FH 3132, 13 janvier 2006. RFC, Actifs : les nouvelles règles fiscales, Revue fiduciaire comptable, n 325, février 2006, pp. 19-62. E. Tort, La comptabilisation des actifs, e-theque, 2 e édition 2006. E. Tort, Des précisions sur les modalités d application des nouvelles règles sur les actifs, Option finance, n 843 du 18 juillet 2005, p. 34. E. Tort, Les nouvelles règles comptables françaises relatives aux actifs, Option finance, n 823 du 28 février 2005.