PATHOLOGIE DE L ŒSOPHAGE

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PATHOLOGIE DE L ŒSOPHAGE Les lésions de l œsophage couvrent une gamme très étendue allant des cancers de très mauvais pronostic aux simples brûlures entraînées par des repas trop abondants ou épicés. I) - OESOPHAGITES Les lésions inflammatoires de l œsophage sont très répandues. Aux ETATS-UNIS et dans les autres pays occidentaux, l œsophagite concerne environ 5 % de la population adulte ; dans certaines régions la prévalence est beaucoup plus élevée, comme au Nord de l IRAN et dans certaines régions de la CHINE. A - REFLUX OESOPHAGIEN : Le reflux du contenu gastrique dans le bas-œsophage est la première et la plus importante cause d œsophagite. Beaucoup de facteurs favorisant sont impliqués : 1. Insuffisance des mécanismes anti-reflux oesophagien et particulièrement du tonus du sphincter inférieur de l œsophage (SIO). Les dépresseurs du système nerveux central. Hypothyroïdisme La grossesse Les maladies systémiques sclérosantes L exposition à l alcool ou au tabac La présence d une sonde naso-gastrique. 2. Présence d une hernie hiatale par glissement. 3. Vidange gastrique retardée. Les lésions anatomiques observées dépendent de l agent causal, de la durée du processus en cause et de son intensité. Il peut s agir d une simple congestion (rougeur) voire d une ulcération. Sur le plan histologique et dans les formes caractéristiques on note : La présence d un infiltrat inflammatoire polymorphe dans la couche épidermique (exostose). Hyperplasie de la couche basale. Elongation des papilles de la lamina propria avec congestion. B - ŒSOPHAGE DE BARRETT. L œsophage de BARRETT est une complication du RGO à long terme, il se voit chez un peu plus de 11% des patients qui présentent une symptomatologie de reflux. Dans l œsophage de BARRETT, la muqueuse malpighienne distale 1

est remplacée par un épithélium cylindrique, résultat d une agression prolongée. Sa pathogénie n est pas claire, l hypothèse proposée est celle d une croissance de cellules souches pluripotentes faisant suite à des lésions inflammatoires et à des ulcérations, ces cellules se différencieraient alors en un épithélium cylindrique qui est plus résistant aux attaques peptiques acides. ASPECTS MORPHOLOGIQUES : 1. MACROSCOPIE : la muqueuse est rouge, veloutée, localisée entre la muqueuse oesophagienne lisse, pâle et la muqueuse gastrique luisante et de coloration brunâtre. 2. HISTOLOGIE : l épithélium épidermique oesophagien est remplacé par un épithélium mètaplasique glandulaire complété de glandes muqueuses. Le diagnostic est plus facile lorsque la muqueuse glandulaire contient des cellules caliciformes intestinales. La recherche d une dysplasie est capitale, cette dysplasie représente un précurseur de malignité dans l épithélium glandulaire avec métaplasie intestinale. Elle se distingue en dysplasie de bas grade et en dysplasie de haut grade. La complication majeure est l apparition d un adénocarcinome qui est 30 ou 40 fois plus fréquentes que dans la population générale, chez les patients qui ont une muqueuse de BARRETT de plus de 2 cm. C - LES OESOPHAGITES INFECTIEUSES ET CHIMIQUES En plus du RGO, l inflammation oesophagienne peut apparaître dans des circonstances variées telles : L ingestion de substances irritantes (alcool, les acides ou alcalis caustiques, l ingestion de liquides bouillant et le tabac). La chimiothérapie anti-cancéreuse. Les infections bactériennes ou virales. Les infections mycosiques chez des patients présentant une immunodépression. Les étiologies infectieuses ou chimiques des oesophagites ont chacune leur propre spécificité, aboutissant dans tous les cas d inflammations aiguës sévères à une nécrose superficielle et à des ulcérations avec formation d un tissu de granulation et éventuellement d une fibrose. 2

II) - TUMEURS DE L OESOPHAGE A - TUMEURS BENIGNES : 1. Elles sont essentiellement d origine mésenchymateuse et siégeant dans la paroi oesophagienne : léïomyomes fibromes Lipomes Hémangiomes Neurofibromes et lymphangiomes 2. Les polypes muqueux sont en général constitués d un mélange de tissus conjonctif, vasculaires ou adipeux recouvert d une muqueuse saine réalisant les polypes fibro-vasculaires. 3. Les papillomes sont rares. B - TUMEURS MALIGNES : CARCINOME EPIDERMOIDE : Représente 90 / des cancers oesophagiens, survient chez l adulte de 50 ans, intéresse plus l homme que la femme (sexe ratio : 2/1 à 20/1). Se voit partout dans le monde, avec une incidence plus importante dans certaines régions (Nord de l IRAN, Asie centrale jusqu au Nord de la CHINE) avec une incidence de 100/ 100.000 habitants. 1. ETIOLOGIES ET PATHOGENIE : les facteurs favorisants l apparition du carcinome épidermoïde de l œsophage sont : ALIMENTAIRES : - Carence vitaminiques (A, C, riboflavine). - Carence en oligo-éléments (Zinc) - Contamination des aliments par les champignons. - Haute teneur en nitrites/ nitrosamines. MODE DE VIE : - Consommation d alcool. - Tabagisme. - Environnement. TROUBLES OESOPHAGIENS : - Oesophagite prolongée - Achalasie (relâchement sphinctérien). PREDISPOSITION GENETIQUE : - Maladie cœliaque prolongée. - Phacomatoses 3

- Kératose palmaire et plantaire. - Prédisposition raciale. 2. ASPECTS MORPHOLOGIQUES : MACROSCOPIE : 20 % localisés au 1/3 sup. 50 % localisés à la partie moyenne 30 % localisés au 1/3 inférieur. Les lésions débutantes se présentent comme des zones d épaississement, ou de petites Élevures blanc Ŕgrisâtres de la muqueuse. Au fil des mois et des années, ces lésions deviennent des masses tumorales et on va avoir alors 3 formes : - Forme végétant (60 %) : lésion exophytique polyploïde qui fait saillie dans la lumière. - Forme plane (15 %) : avec infiltration diffuse qui à tendance à s étendre dans la paroi oesophagienne entraînant une rigidité de la paroi avec rétrécissement de la lumière. - Forme ulcérée (25 %) : réalisant un cratère tumoral à fond nécrotique creusant profondément la paroi et les structures de voisinage. MICROSCOPIE : Dans le meilleur cas le diagnostic est porté chez le patient au stade de carcinome supérficiel de l œsophage avec une tumeur qui est limitée à la couche épithéliale (in situ ) ou qui est superficielle, envahissant la lamina propria ou la sous-muqueuse. La plupart des carcinomes épidérmoides sont moyennement ou bien différenciés. Indépendamment de leur degré de différenciation la plupart de ces tumeurs symptomatiques, lorsqu elles sont diagnostiquées sont volumineuse et ont déjà envahi la paroi et au-delà. L extension locale aux organes de voisinage est fréquente et précoce. 3. EVOLUTION : la survie à 5 ans des patients présentant un cancer superficiel de l œsophage est de 75 %. Elle est de 25 % pour ceux ayant eu une chirurgie curative pour lésion plus avancée, et 5 % de tous les patients présentant un cancer de l œsophage. 4

ADENOCARCINOMES : En raison de la confusion avec les cancers gastriques qui prennent naissance au niveau de la jonction gastro-oesophagienne, on pensait que les véritables adéncarcinomes oesophagiens étaient rares. Avec la meilleure connaissance de la muqueuse de BARRETT, il est apparu que la plupart des adénocarcinomes du tiers inférieur de l œsophage sont de véritables cancers oesophagiens plutôt que des cancers gastriques envahissant la jonction oeso-gastrique. MACROSCOPIE : généralement localisées à l œsophage distal et peuvent envahir le cardia de voisinage ; peuvent se développer sous forme de larges nodules de plus de 5 cm de diamètre ou peuvent être largement ulcérés ou très infiltrant. HISTOLOGIE : la plupart des tumeurs sont des adénocarcinomes mucosécrétants de type intestinal, plus rarement ils sont constitués de cellules isolées en bagues à chaton de type gastrique. 5