Infiltration foraminale L5-S1 radioguidée dans le traitement de la lombosciatique S1

Documents pareils
N oubliez pas de sauvegarder après avoir intégré ce fichier dans votre espace extranet!

LA LOMBALGIE CHRONIQUE : Facteurs de risque, diagnostic, prise en charge thérapeutique

La sciatique par hernie discale : traitement conservateur ou traitement radical? Disk herniation-induced sciatica: medical or surgical treatment?

LES DOULEURS LOMBAIRES D R D U F A U R E T - L O M B A R D C A R I N E S E R V I C E R H U M A T O L O G I E, C H U L I M O G E S

CEPHALEES POST-BRECHE DURALE. Post Dural Puncture Headache (PDPH)

le traitement de la douleur

Équivalence et Non-infériorité

Qu avez-vous appris pendant cet exposé?

Item 279 : Radiculalgie et syndrome canalaire

Accidents des anticoagulants

DISCECTOMIE ENDOSCOPIQUE SELECTIVE ET THERMO-ANNULOPLASTIE

Item 182 : Accidents des anticoagulants

LA HERNIE DISCALE LOMBAIRE

LE RACHIS : UNE ENTITE COMPLEXE IMPORTANTE A PRESERVER

Radiculalgie et syndrome canalaire

dmt Lombalgies et travail : Pour une stratégie consensuelle La lombalgie en chiffres Paris, 18 janvier 2002 notes de congrès La fréquence

Spondylarthropathies : diagnostic, place des anti-tnf et surveillance par le généraliste. Pr P. Claudepierre CHU Henri Mondor - Créteil

HERNIE DISCALE LOMBAIRE

HERNIE DISCALE LOMBAIRE

LOMBO-RADICULALGIES SCIATIQUE D ORIGINE DISCALE

OSSIFICATION DU LIGAMENT VERTEBRAL COMMUN POSTERIEUR ET DU LIGT JAUNE: MYELOPATHIE CERVICALE SUBAIGUE

Réflexions sur les possibilités de réponse aux demandes des chirurgiens orthopédistes avant arthroplastie

Le diagnostic de Spondylarthrite Ankylosante? Pr Erick Legrand, Service de Rhumatologie, CHU Angers

La sciatique par hernie discale Description médicale :

Lombosciatalgie aigue et chronique Quelle prise en charge? Dr Azizi Fatima Rabat

Docteur Isabelle SUTTER.

Cure de Hernie discale lombaire

La Méthode McKenzie. Dossier paru dans la Revue de Médecine Orthopédique, n 60, Mars Sommaire. Introduction Jean-Yves Maigne

Imagerie interventionnelle en pathologie ostéo-articulaire

Item 169 : Évaluation thérapeutique et niveau de preuve

Études. Coût de la chirurgie d une hernie discale

LA LOMBALGIE COMMUNE Définition-Epidémiologie-Prévention Diagnostic-Principes thérapeutiques

DIAGNOSTIC, PRISE EN CHARGE ET SUIVI DES MALADES ATTEINTS DE LOMBALGIE CHRONIQUE

Vignette clinique 1. Femme, 26 ans; caissière. RC : Dorsalgie depuis 18 mois. ATCD : Tabagisme 20 paquets/année; pas de maladies chroniques HMA :

Jérôme OSTALIER Gabor SAGI INSTITUT McKENZIE FRANCE

TMS les données belges relatives à la lombalgie

La colonne vertébrale (organisation générale et bases biomécaniques)

SYNDROME DU TUNNEL CARPIEN, EPICONDYLITE ET TRAVAIL : POINT DE VUE DU RHUMATOLOGUE

RAZAFINDRABE Rovasoa Harivony REEDUCATION FONCTIONNELLE ET PRISE EN CHARGE DES HERNIES DISCALES NON OPEREES. Thèse de Doctorat en Médecine

«Quelle information aux patients en recherche biomédicale? Quels enseignements en retirer pour la pratique quotidienne?»

Avis 29 mai XYZALL 5 mg, comprimé B/14 (CIP : ) B/28 (CIP : ) Laboratoire UCB PHARMA SA.

1985, 169, n 7, ,séancedu 22 octobre1985. ALBARÈDE et Jean-Claude DARRAS

Cette intervention aura donc été décidée par votre chirurgien pour une indication bien précise.

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE AVIS. 10 mai 2006

Avis 23 avril BARITEKAL 20 mg/ml, solution injectable Boîte de 10 ampoules de 5 ml (CIP : ) Laboratoire NORDIC PHARMA

Vivre son dos au quotidien

Le mal de dos est décrit par de nombreux auteurs

LES NOUVEAUX ANTICOAGULANTS

Table des matières. Remerciements...v. Préface... vii. Avant-propos... xi. Mode d utilisation du manuel et du DVD... xv

De la chirurgie du nodule aux ganglions

Algodystrophie du bras

De quoi s agit-il? Hernie discale lombaire. Hernie discale lombaire

SOMMAIRE. Numéro Spécial : Médecine Orthopédique. Revue interne de la S.I.R.E.R N spécial. Siège social : Clinique du Parc

Athénée Royal d Evere

DIAGNOSTIC, PRISE EN CHARGE ET SUIVI DES MALADES ATTEINTS DE LOMBALGIE CHRONIQUE

Ozonothérapie dans le traitement des atteintes musculosquelettiques d origine spinale

CHAPITRE 9 LES LOMBALGIES STRATEGIE D EVALUATION ET PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE. Bénédicte Jamard Arnaud Constantin et Yolande Esquirol

INTERVENTIONS INAMI au 1 er janvier 2014

Lombalgies, sciatiques, & Myothérapie. 1. Lombalgies & Lumbagos

Les lésions musculosquelettiques chez les éboueurs : des pistes de prévention à la gestion du retour au travail

Anatomie. Le bassin inflammatoire. 3 grands cadres. 4 tableaux. Spondylarthrite ankylosante. Spondylarthrite ankylosante 26/10/13

Résultat du traitement de la varicocèle chez l'adolescent par l'association coils-sclérosants.

Apport de la TDM dans les cellulites cervico-faciales

PRINCIPE ET FONCTIONNEMENT DES DÉFIBRILLATEURS AUTOMATIQUES IMPLANTABLES (DAI)

Les formes cliniques. Maxime Breban

Lombalgies non spécifiques - recommandations thérapeutiques fondées sur la médecine factuelle

UTILISATION ET PRECAUTION D EMPLOI DES AINS Professeur Philippe BERTIN, Chef de Service de Rhumatologie, CHU Limoges Octobre 2009

Document d orientation sur les allégations issues d essais de non-infériorité


COMMISSION DE LA TRANSPARENCE AVIS. 1 er octobre 2008

ALTO : des outils d information sur les pathologies thromboemboliques veineuses ou artérielles et leur traitement

SUAREZ VALENCIA Juan MARCHAND dmdpost.com Résumé Hélène Caillault

Foscolo (1), J Felblinger (2), S Bracard (1) CHU Hôpital central, service de neuroradiologie, Nancy (1) CHU BRABOIS, Centre d investigation clinique

l implantologie basale

Opération de la hernie discale. Des réponses à vos questions

Causes d insatisfactions du patient pris en charge en ambulatoire

Antiagrégants plaquettaire, anticoagulant et gestes en rhumatologie

Item 215 : Rachialgies

Évaluation (HTA) de l'imagerie 3D à faisceau conique (CBCT) pour l'imagerie dentomaxillofaciale. Emmanuel Charpentier, Anne-Florence Fay, Natalie

ACADÉMIE NATIONALE DE MÉDECINE 16, RUE BONAPARTE PARIS CEDEX 06 TÉL : FAX :

VACCINS ANTIPNEUMOCOCCIQUES

Référentiel concernant la rééducation en cas de lombalgie commune

Migraine et céphalées de tension: diagnostic différentiel et enjeux thérapeutiques

PRISE EN CHARGE DIAGNOSTIQUE

DENSITOMÉTRIE OSSEUSE : CE QUE LE RADIOLOGUE DOIT SAVOIR

Validation clinique des marqueurs prédictifs le point de vue du méthodologiste. Michel Cucherat UMR CNRS Lyon

ENFIN, UN SYSTÈME POLYVALENT D'IMAGERIE ORL ET DENTAIRE

INTERVENTIONS INAMI au 1 er janvier 2013

Migraine et Abus de Médicaments

COMMISSION DE LA TRANSPARENCE. Avis. 23 mai 2007

SYNTHÈSE DES RECOMMANDATIONS PROFESSIONNELLES. Spondylarthrites. Décembre 2008

Service d Urologie - Hôpital de la Conception - APHM. 2. Service de Gynécologie Obstétrique - Hôpital de la Conception - APHM. 3

Synthes ProPlan CMF. Service de planification et produits spécifiques de patient pour la chirurgie craniomaxillo-faciale.

Case report. Hernie de Spiegel: a propos d un cas. Open Access

E.D. C.A.S. Ensemble Défendons le Citoyen et l Avenir pour la Santé

Entérocolpodéfécographie associée à l'étude du temps de transit colique: procédure diagnostique pour exécution en même temps.

Maladies et Grands Syndromes Radiculalgies et syndromes canalaires (279) Professeurs P. Lafforgue, J.C. Peragut et R.

Collection Soins infirmiers

EXEMPLE DE METHODOLOGIE POUR L ELABORATION D UN PROTOCOLE DOULEUR Marie AUBRY Infirmière référente douleur Hôpital TENON AP-HP Paris XX e SOMMAIRE

Transcription:

:1937-41 Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2004 article original ostéo-articulaire Infiltration foraminale L5-S1 radioguidée dans le traitement JL Michel (1), S Lemaire (1), H Bourbon (2), C Reynier (1), A Lhoste (1), S Soubrier (2), JJ Dubost (2) et JM Ristori (2) Abstract Fluoroscopy guided L5-S1 transforaminal injection as a treatement for s1 radiculopathy :1937-41 Objective. To assess the efficacy of fluoroscopy guided L5-S1 transforaminal steroid injections for the treatment of S1 radiculopathy secondary to intervertebral disk disorder. Method. 41 patients were included : prospective study (20 patients) and retrospective study (21 patients). All patients suffered from S1 radiculopathy secondary to nerve root compression by intervertebral disk material, as demonstrated by lumbar spine CT. The patients underwent 2 fluoroscopy guided L5-S1 transforaminal injections of steroid (Hydrocotancyl 125 mg), at 8 days interval. Results. 60 % of patients showed significant improvement of their painful radiculopathy at day 8 (n:41), 60-67 % at day 30 (n:41) and 67 % at day 90 (n:18). Conclusion. Fluoroscopy guided L5-S1 transforaminal injection showed good efficacy in the treatment of S1 radiculopathy. Key words: Nerves, interventional procedures. Spine, interventional procedures. Spine, intervertebral disks. Fluoroscopy. Résumé Objectif. Évaluer l efficacité des infiltrations foraminales L 5 S 1 radioguidées de corticoïde sur les douleurs radiculaires S 1, en rapport avec un conflit discoradiculaire. Matériel et Méthode. Quarante et un patients ont été inclus : 20 patients évalués par étude prospective et 21 patients par étude rétrospective. Tous souffraient d une lombosciatique S 1 (radiculalgie monoradiculaire) en rapport avec un conflit disco-radiculaire prouvé par TDM lombaire. Ils ont bénéficié de 2 infiltrations par voie foraminale L 5 -S 1, radioguidées, de corticoïde (Hydrocortancyl 125 mg), à 8 jours d intervalle. Résultats. Amélioration significative de la radiculalgie pour 60 % des patients à J8 (n:41), 60 à 67 % à J30 (n:41) et 67 % à J90 (n:18). Conclusion. Bonne efficacité des infiltrations radioguidées par voie foraminale L-S 1 dans le traitement des sciatiques S 1. Mots-clés : Lombosciatique S1. Infiltration foraminale. Technique radioguidée. (1) Service de radiologie A, (2) Service de Rhumatologie. Hôpital Gabriel-Montpied, rue Montalembert, BP 69, 63003 Clermont-Ferrand-Cedex 1. Correspondance : JL Michel E-mail : jlmichel@chu-clermontferrand.fr Les infiltrations rachidiennes, épidurales et périradiculaires, par injection de corticoïdes sont actuellement très largement utilisées dans le traitement des lomboradiculalgies communes récentes non compliquées. Dans le cadre des lomboradiculalgies S1, les infiltrations périradiculaires se font habituellement au niveau du premier trou sacré postérieur, la voie foraminale L5-S1 étant utilisée pour le traitement des sciatiques L5. La pratique des infiltrations périradiculaires foraminales L5-S1 sous scopie dans le traitement des radiculalgies L5 nous a amené à constater que bien souvent il existait, lors de l injection de produit de contraste, une diffusion du contraste non seulement le long de la racine L5 dans son trajet foraminal mais également le long de la racine S1 homolatérale dans son trajet intracanalaire. Aussi nous avons cherché à savoir s il était possible d utiliser cette voie pour infiltrer la racine S1. Ce travail a donc pour but d évaluer l efficacité des injections cortisonées dans le traitement des lomboradiculalgies S1 par voie foraminale L5-S1. Matériel et méthode Population Quarante et un patients ont été inclus dans cette étude, 20 patients évalués en étude prospective et 21 en étude rétrospective : 22 hommes et 19 femmes, âgés de 25 à 65 ans (moyenne 45,6 ans) souffrant d une douleur radiculaire S1. Chez tous ces patients une hernie discale intracanalaire avait été au préalable identifiée par scanner lombaire et considérée à l origine d un conflit disco-radiculaire de topographie concordante avec la clinique. L ancienneté des symptômes variait de 3 à 12 semaines avec une médiane de 10,4 semaines (certaines sciatiques hyperalgiques nous ayant autorisé à réaliser un scanner dans un délai de trois semaines). Les critères d inclusion étaient l âge de 17 à 70 ans, la névralgie monoradiculaire de trajet S1 non compliquée cotée à au moins 40/100 sur une échelle visuelle analogique (EVA), la prépondérance de la radiculalgie sur la lombalgie et l ancienneté de la radiculalgie comprise entre 21 et 90 jours (1 er épisode ou récidive séparée d au moins 6 mois de l épisode précédent). N ont pas été inclus dans cette étude les sciatiques S1 symptomatiques d une affection autre que la hernie discale, celles relevant d un traitement chirurgical urgent, les injections épidurales de moins d un mois, les antécédents de nucléolyse ou de chirurgie discale en L5-S1, les accidents du travail, les patients souffrant d une infection locale ou générale, les patients sous anticoagulants, présentant une contre-indication aux dérivés corticoïdes, de même que la grossesse. Il n a pas été pratiqué d électromyographie avant et après infiltration. Technique d infiltration (fig. 1) Tous les patients ont bénéficié de deux infiltrations foraminales L5-S1 radioguidées à 8 jours d intervalle en ambulatoire. Les

1938 Infiltration foraminale L5-S1 radioguidée dans le traitement JL Michel et al. Fig. 1 : Fig. 1: Infiltration de la racine S1 gauche pour sciatique S1 par voie foraminale L5-S1 sous scopie : aiguille en place. L injection de produit de contraste montre l opacification autour des racines L5 et S1 gauches. Fluoroscopy guided L5-S1 transforaminal injection as a treatement for left S1 radiculopathy: needle in place. Contrast material injection shows opacification around the L5 and S1 roots. infiltrations ont été réalisées par un radiologue spécialisé en pathologie ostéo-articulaire, en salle radiologique avec table télécommandée et scopie numérisée, le patient étant allongé en procubitus oblique afin d obtenir une vue de trois-quarts du foramen intervertébral L5-S1. L abord du foramen L5-S1 sous radioscopie télévisée était pratiqué, dans des conditions d asepsie stricte, selon la technique classique : point d entrée cutané situé approximativement à 8 cm de la ligne médiane, se projetant en avant de l apophyse articulaire inférieure de la vertèbre sus-jacente, sous le pédicule, aiguille spinale 22G 88 mm ou aiguille longue de 120 mm à anesthésie spinale 22G orientée selon l axe du rayon directeur (inclinaison cranio-caudale pour dégager le foramen) et introduite avec précaution, en tenant compte notamment de la possibilité de rencontrer la racine L5 (survenue immédiate d une douleur élective le long du trajet radiculaire L5). L aiguille était considérée en bonne place lorsqu elle se situait à l intérieur du foramen intervertébral le plus près possible du corps vertébral tout en étant positionnée, dans cette étude, de façon aléatoire en position haute ou basse dans le foramen (audessus ou au-dessous de la racine L5). Il n a pas été pratiqué d anesthésie cutanée locale. Deux millilitres de produit de contraste (Iopamiron 200) étaient injectés afin d apprécier d une part la diffusion du produit de contraste et d autre part l absence d effraction vasculaire ou durale. Des clichés radiologiques numérisés étaient alors pratiqués de face et de profil pour confirmer la bonne position de l aiguille et l infiltration réalisée en injectant 5 ml d acétate de prédnisolone (Hydrocortancyl 125 mg). L injection du produit pouvait être indolore ou au contraire déclencher une douleur radiculaire. Il n était pas associé d injection périradiculaire d un anesthésique local au dérivé cortisonique. Dans les suites de l infiltration les patients étaient autorisés à recourir aux traitements antalgiques ou anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) de niveau 2, à la demande. Méthode d évaluation Évaluation clinique Le paramètre privilégié était la douleur, essentiellement radiculaire mais aussi lombaire, tant pour quantifier l efficacité du traitement que le retentissement de la pathologie sur le patient. Le traitement était considéré comme un succès si l échelle visuelle analogique (EVA) diminuait d au moins 50 % par rapport à l EVA à J0. Dans la série prospective (20 patients), à J0, le jour de la première infiltration, le rhumatologue investigateur demandait au patient de se situer sur une échelle visuelle analogique de la douleur de 100 mm. Les douleurs radiculaires et lombaires étaient évaluées séparément. À l aide d une échelle numérique le rhumatologue recueillait également oralement l indice de satisfaction globale du patient. Une réévaluation était ensuite réalisée au 8è jour avant la deuxième infiltration puis à J30 et J90. Pour les 21 patients évalués rétrospectivement l évaluation clinique était faite sur la comparaison des échelles visuelles analogiques des douleurs radiculaires et lombaires et échelle numérique de satisfaction globale, par rapport à J0, J8 et J30. Cette évaluation rétrospective était assurée par des cliniciens différents, alors que l évaluation prospective avait été confiée à un même clinicien (tous ces cliniciens étant issus du même service de rhumatologie et utilisant les mêmes critères d évaluation). Évaluation radiologique Nous avons étudié rétrospectivement la position de l aiguille dans le foramen sur les radiographies standard réalisées lors des infiltrations à J0 et J8, afin de déterminer si elle influençait le résultat sur la douleur radiculaire. Nous avons ainsi défini l aiguille en position haute ou basse par rapport à la racine L5 dans le foramen L5-S1. Dans notre étude, l aiguille était en position haute dans le foramen quand elle était située au-dessus de la racine, dans une zone décrite par certains auteurs comme «safe triangle» (1-3), délimitée par le pédicule en haut, la racine qui sort par le foramen en bas, et le côté correspondant au bord latéral du corps vertébral. Si l aiguille était sous cette zone, elle était considérée en position basse. L analyse statistique a été faite à l aide du «test unilatéral U de Mann-Withney». L espace de diffusion du produit de contraste a été apprécié afin de déterminer si le fait d obtenir une opacification de la racine S1 lors de l infiltration était prédictif de bons résultats. L analyse statistique a été faite par un test bilatéral non paramétrique. Résultats (tableau I) Parmi les 20 patients de l évaluation prospective, deux patients ont été perdus de vue et deux patients opérés entre J30 et J90 compte tenu du caractère hyperalgique de leur sciatique. À J8, la douleur quantifiée par échelle visuelle analogique a diminué d au moins 50 % (infiltration considérée comme efficace) chez 60 % des patients dans l étude prospective et 62 % dans l étude rétrospective pour la radiculalgie et chez respectivement 35 et 43 % des patients pour la lombalgie. À J30, les résultats étaient considérés comme un succès chez 60 % des patients pour la radiculalgie évaluée dans l étude prospective et chez 67 % pour les patients de l étude rétrospective. Pour la lombalgie, respectivement 25 et 33 % des patients se disaient significativement améliorés. Enfin à J90, 67 % des 18 patients (sur les 20 patients 2 avaient été perdus de vue) de la série prospective avaient une amélioration considérée comme un succès pour la radiculalgie et 28 % pour la lombalgie. L échelle numérique de satisfaction globale estimée par les patients était significative (amélioration globale > 50 %) dans 55 à 70 % des cas à J8 et d environ 70 % des cas à J30 pour tous les patients. À J90, 72 % des 18 patients de la série prospective se disaient significativement améliorés de façon globale.

JL Michel et al. Infiltration foraminale L5-S1 radioguidée dans le traitement 1939 Tableau I Résultats. Table I Results. I) ÉTUDE PROSPECTIVE Douleur radiculaire (EVA) Nombre de sujets a J8 N = 20 Nombre de sujets à J30 N = 20 Nombre de sujets à J90 N = 18 (2 patients ayant été perdus de vue) Diminution de 50 % 12 12 12 60 % 60 % 67 % Diminution de moins 7 7 4 de 50 % 35 % 35 % 22 % Augmentation 1 1 2 (patients opérés) 5 % 5 % 11 % Douleur lombaire (EVA) Nombre de sujets à J8 N = 20 Nombre de sujets à J30 N = 20 Nombre de sujets à J90 N = 18 Diminution de 50 % 7 5 5 35 % 25 % 28 % Diminution (EVA) 6 7 5 de moins de 50 % 30 % 35 % 28 % Augmentation (EVA) 4 6 6 20 % 30 % 33 % Stabilisation (EVA) 3 2 2 15 % 10 % 11 % EVA (moyenne) JO JO N = 20 J8 N = 20 J30 N = 20 J90 N = 16 (2 patients ayant été perdus de vue et 2 opérés) Douleur radiculaire 67 mm 35 mm 36,5 mm 23,1 mm Douleur lombaire 47,5 mm 38,5 mm 36,8 mm 31,3 mm Satisfaction globale (EN) Nombre de sujets à J8 N = 20 Nombre de sujets à J30 N = 20 Nombre de sujets à J90 N = 18 (2 patients) ayant été perdus de vue) Amélioration de 50 % 11 14 13 55 % 70 % 72 % Amélioration de moins 9 6 5 de 50 % 45 % 30 % 28 % II) ÉTUDE RÉTROSPECTIVE Douleur radiculaire (EVA) Nombre de sujets à J8 N = 21 Nombre de sujets à J30 N = 21 Diminution de plus de 50 % 13 14 62 % 67 % Diminution de moins de 50 % 8 5 38 % 24 % Augmentation 0 2 9 % Douleur lombaire (EVA) Nombre de sujets à J8 N = 21 Nombre de sujets à J30 N = 21 Diminution DE 50 % OU PLUS 9 7 43 % 33 % Diminution de moins de 50 % 11 11 52 % 52 % Augmentation 0 1 5 % Stabilisation 1 2 5 % 10 % Évaluation de la douleur J0 N = 21 J8 N = 21 J30 N = 21 (EVA) Douleur radiculaire 64 mm 31 mm 30 mm Douleur lombaire 50,2 mm 35,8 mm 34,1 mm Satisfaction globale (EN) Nombre de sujets à J8 N = 21 Nombre de sujets à J30 N = 21 Amélioration de 50 % 15 15 71 % 71 % Amélioration de moins de 50 % 6 6 29 % 29 %

1940 Infiltration foraminale L5-S1 radioguidée dans le traitement JL Michel et al. En ce qui concerne les résultats radiologiques, l analyse statistique unilatérale de Mann-Withney montrait que les infiltrations foraminales basses L5-S1 étaient significativement plus efficaces sur la radiculalgie que les infiltrations foraminales hautes. Par ailleurs l opacification périradiculaire S1 était retrouvée chez 46 % des patients (19 patients), avec 2 ml de produit de contraste, mais le test bilatéral ne montrait pas de différence significative sur la radiculalgie que l on obtienne ou non une opacification de S1 au cours du geste. Nous n avons pas eu à déplorer d incidents ou effets secondaires au cours ou au décours de ces infiltrations. Discussion Le recours à un traitement médical conservateur de première intention pour les lomboradiculalgies communes est bien établi, en cas de hernie discale, la guérison étant observée dans 70 % des cas au cours du premier mois (4) et dans 90 % des cas à un an (5). Dans l arsenal thérapeutique de la lomboradiculalgie commune les infiltrations de corticoïdes par voie épidurale ou périradiculaire sont largement utilisées, de nombreux travaux (6-10) ayant démontré la participation de phénomènes inflammatoires et vasculaires dans la genèse de la douleur radiculaire, justifiant l utilisation de dérivés cortisonés locaux pour la prise en charge de cette douleur. Si la voie périradiculaire par le premier trou sacré est largement utilisé pour infiltrer la racine S1, la voie foraminale L5-S1 pour traiter S1 peut également se justifier, nous semble-t-il, du fait notamment de considérations anatomiques en rapport avec la position haute du ganglion rachidien postérieur en S1 (dont le rôle est important dans la nociception et la genèse de la douleur radiculaire), de la proximité du conflit disco-radiculaire, mais aussi de la moins bonne efficacité des infiltrations S1 au niveau du 1 er trou sacré par rapport aux autres infiltrations périradiculaires notamment L4 et L5 ainsi que la moins bonne diffusion du produit de contraste au niveau du premier trou sacré (17). Aussi nous avons cherché à évaluer cette technique d infiltration S1 par voie foraminale L5-S1 en nous basant sur l autoévaluation de la douleur, plus particulièrement radiculaire, par le patient, sur une échelle visuelle analogique, méthode habituellement utilisée dans les essais thérapeutiques et considérée comme l une des plus fiable et sensible. L efficacité des infiltrations foraminales radioguidées L5-S1 sur la douleur radiculaire S1 est, dans notre étude, à court terme de 60 et 67 % (évaluation sur 41patients) et à moyen terme de 67 % (évaluation sur 18 patients), avec un indice de satisfaction de 70 à 72 %. En comparant ces résultats à une revue de la littérature des infiltrations on trouve dans une évaluation des injections périradiculaires (12), une efficacité (basée sur des critères identiques aux nôtres) de 50 et 52,5 % à court et moyen terme, l article précisant que les résultats sont moins bons pour les sciatiques S1 probablement en rapport avec un mauvais positionnement de l aiguille et, dans une autre étude (13), 65 % de bons résultats, mais là encore toutes radiculalgies confondues, traitées par voie périradiculaire ou inter épineuse. D autres résultats sont moins favorables puisque dans une étude prospective (14), à propos de 20 patients souffrant d une lomboradiculalgie d origine discale, traités par infiltrations périradiculaires, seuls 10 % des patients sont significativement améliorés de leur douleur à J30. La réalisation d infiltrations foraminales sous scanner retrouve 65 % de bons résultats à J8 et 42,5 % à moyen terme dans une série (15) et dans une autre étude rétrospective (16), à propos de 160 infiltrations foraminales, 52 % de résultats significatifs à moyen terme. La relative bonne efficacité de notre série peut, peut être, trouver une explication dans le fait que l injection est proche du conflit discoradiculaire et du ganglion rachidien postérieur S1. Sur le plan technique, l abord foraminal L5-S1 ne présente pas de particularité par rapport à la voie classiquement décrite, en tenant compte néanmoins que, dans notre étude, il est statistiquement plus efficace de placer l aiguille en position basse dans le foramen pour ce type d infiltration S1, en introduisant le plus profondément possible l aiguille dans le foramen intervertébral L5-S1. Par contre l opacification périradiculaire S1 lors de l injection du produit de contraste (indispensable avant l injection du corticoïde) ne paraît pas prédictif du résultat, tout en notant que l injection était limitée dans ce travail à 2 ml et qu une plus grande quantité aurait peut être modifié cette constatation. Conclusion Sur le plan technique, la voie d abord foraminale L5-S1 dans le traitement des lombosciatiques communes d origine discale S1 donne des résultats relativement bons en ayant le mérite d être simple, rapide, non agressive, peu irradiante et utilisable en ambulatoire. Ces résultats préliminaires mériteraient certainement d être confirmés par une étude prospective versus placebo. Références 1. Lutz GE, Vad VB, Wisneski RJ. Fluoroscopic transforaminal lumbar epidural steroids: An outcome study. Arc Phys Med Rehabi 1998;79:1362-6. 2. Manchikanti L. Transforaminal lumbar epidural steroid injections. Pain physician 2000;3:374-98. 3. Vad VB, Bhat AL, Lutz GE, Cammisa F. Transforaminal épidural steroid injections in lumbosacral radiculopathy. A prospective randomized study. Spine 2002;l27:11-16. 4. Weber H. The natural history of disc herniation and influence of intervention. Spine 1994;19:2234-8. 5. Saal JA, Saal JS. Nonoperative treatement of herniated lumbar intervertebral disc with radiculopathie:an outcome study. Spine 1989;14:431-7. 6. Gronblad M, Virri J, Ronkko S, et al. A controlled biochemical and immunohistochemical study of human synovial type phospholipase A2 and inflammatory cells in macroscopically normal, degenerated and herniated human lombar disc tissues. Spine 1996;21:2531-8. 7. Takahashi H, Suguro T, Okazima Y, Motegi M, Okada Y, Kakiuchi T. Inflammatory cytokines in the herniated disc of lumbar spine. Spine 1996;21:218-24. 8. Doita M, Katatani T, Harada T, Mizuno K. Immunohistologic study of the ruptured intervertebral disc of lumbar spine. Spine 1996;21:235-41. 9. Kang JD, Georgescu HI, Mc Intyre-Larkin LA, Stefanovic-Radic M, Donaldson WF, Evans CH. Herniated lumbar intervertebral discs spontaneouly produce matrix metallo-proteinases, nitric oxyde, interleukin-6 and prostaglandine E2. Spine 1996;21:271-7. 10. Kang JD, Georgesu HI, Mc Intyre-Larkin LA, Stefanovic-Racic M, Donaldson WF. Toward a biochemical understanding of human intervertebral disc degeneration and herniation.contributions of

JL Michel et al. Infiltration foraminale L5-S1 radioguidée dans le traitement 1941 nitric oxyde, interleukins, prostaglandine E2 and matrix metalloprotéases. Spine 1997;22:1065-73. 11. Vroomen P, De Krom M, Wilmink J, Kesler A, Knottnerus A. Lack of effectiveness of bed rest of sciatica. N Eng J Med 1999;340:418-23. 12. Viton JM, Rubino T, Peretti-Viton P, Bouvenot G, Delarque A. Évaluation à court terme des injections périradiculaires dans le traitement des lomboradiculalgies d origine discale. Rev Rhum 1998;65:211-6. 13. Kolsi I, Delecrin J, Berthelot JM, Thomas L, Prost A, Maugars Y. Efficacité des infiltrations péridurales de corticoïdes par voie périradiculaire ou interépineuse dans le traitement des sciatiques discales. Étude pilote prospective, randomisée, et à double insu. Rev Rhum 2000;67:134-9. 14. Quere S, Saint-Marcoux B, Pauffler A, et al. Évaluation prospective de l efficacité des infiltrations foraminales radioguidées. Rhumatologie 1998;50:89-94 15. Lutz GE, Vad VB, Wisneski RJ. Fluoroscopic transforaminal lumbar epidural steroids: An outcome study. Arch Phys Med Rehabi 1998;79:1362-6. 16. Berger O, Dousset V, Delmer O, Pointillart V, Vital JM, Caille JM. Évaluation de l efficacité des infiltrations foraminales de corticoïdes guidées sous tomodensitométrie, dans le traitement des radiculalgies par conflit foraminal. J Radiol 1999;80:917-25. 17. Maigne JY, Gourjon A, Maigne R. Taux de réussite des trois techniques d injection épidurale. Étude de l étalement d un contraste radio-opaque. Rev Rhum 1990;575-8.