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Transcription:

1e feuillet. Rep.N COUR DU TRAVAIL DE BRUXELLES ARRET AUDIENCE PUBLIQUE DU 13 SEPTEMBRE 2007. 8 e Chambre Allocations familiales Not. art 580,2 CJ. Contradictoire Définitif En cause de: VEV KINDERBIJSLAGFONDS VZW, dont les bureaux sont établis à 2000 Antwerpen, Brouwersvliet, 4 bus 3; Appelant, représenté par Me Nieuwdorp D. loco Me Van Laeken N., avocat à Kruibeke. Contre: Madame H.-C., domiciliée à [xxx] ; Intimée, représentée par Me Derclaye E., avocat à Bruxelles. La Cour, après en avoir délibéré, prononce l arrêt suivant : Vu la loi du 15 juin 1935 sur l emploi des langues en matière judiciaire, notamment l article 24,

2e feuillet. Vu les pièces de la procédure légalement requises et notamment : - la requête d appel reçue au greffe de la Cour du travail le 18 novembre 2005 dirigée contre le jugement prononcé le 11 octobre 2005 par la 15 e chambre du Tribunal du travail de Bruxelles, par défaut contre Madame M. H.-C. ; - la copie conforme du jugement précité, notifié aux parties par pli remis à la poste le 20 octobre 2005 ; - les conclusions déposées pour la partie intimée le 15 novembre 2006 et pour la partie appelante le 7 décembre 2006. Les parties ont été entendues à l audience publique du 14 juin 2007. Le ministère public a prononcé immédiatement un avis oral, concluant au fondement de l appel. L appel, introduit dans les formes et délais légaux, est recevable. I. OBJET DE L APPEL Par le jugement dont appel, le Tribunal du travail annule la décision du 1 er mas 2004 par laquelle le VEV Kinderbijslagsfonds (ci-après dénommé «la Caisse») réclame à Madame H.-C. une somme de 410,34 à titre de remboursement d allocations familiales indûment payées pour les mois de septembre et octobre 2003. Le jugement déclare non fondée la demande reconventionnelle du Fonds en remboursement de ce montant. Dans sa requête d appel, la Caisse reproche au premier juge d avoir annulé la décision de récupération en se fondant sur un manquement du Fonds à son obligation d information et sur une erreur de paiement commise par la Caisse. Elle conteste l un et l autre. Elle demande d annuler le jugement, de déclarer la demande originaire recevable mais non fondée, et de déclarer la demande reconventionnelle recevable et fondée, y compris les intérêts moratoires à partir du 1 er mars 2004. Madame. H.-C. demande de déclarer l appel recevable mais non fondé et de condamner l appelante aux dépens. II. FAITS Madame. H.-C. percevait des allocations familiales pour sa fille Isabelle Figueroa, née le 18 juin 1982. Celle-ci, étudiante, a obtenu son CESS le 15 septembre 2003, en seconde session, après avoir suivi, du 1 er septembre 2001 au 30 juin 2003 les cours d un enseignement technique de qualification au lycée «la Retraite» à Bruxelles.

3e feuillet. La Caisse a poursuivi le paiement des allocations familiales en septembre et octobre 2003 (2x205,17, soit 410,34 ). Le 13 novembre 2003, Madame H.-C. renvoie à la Caisse un formulaire «P7» pour la période indiquée du «1 er septembre 2002 jusqu au 30 juin 2006» ; elle y répond aux questions concernant, notamment, la participation à une deuxième session («oui») et la date du dernier examen (15 septembre 2003), l absence de travail pendant la période indiquée, et l absence d inscription comme demandeur d emploi. Le 1 er mars 2004, la Caisse notifie par recommandé un courrier rédigé comme suit : «Nous avons constaté que nous vous avons payé par erreur une somme de 410,34. (...) Vous n aviez pas droit à cette somme parce que Isabelle ne suit plus les cours (et elle n est pas inscrite comme demandeuse d emploi). Le paiement effectué était contraire à l article 62, 3 des lois coordonnées. Selon cet article il existe un droit aux allocations familiales jusqu à la fin des vacances d été (= 31/8/2003) (...) C est pourquoi nous vous demandons de verser 410,34 (...) dans les 14 jours suivant la date de cette lettre (...)» Il s agit de la décision litigieuse. III. POSITION ET MOYENS DES PARTIES A. Partie appelante : la Caisse Dans sa requête, la Caisse expose avoir appris le 18 novembre 2003 que l étudiante Isabelle avait cessé de suivre les cours le 30 juin 2003 et qu elle ne s était pas inscrite comme demandeuse d emploi. Elle en déduit que le droit aux allocations cessait donc le 31 août 2003 et que les allocations de septembre et octobre devaient être récupérées. Elle conteste avoir manqué au devoir d information et estime que l envoi du formulaire contenant toutes les informations nécessaires, même sous forme de questions, suffit ; elle observe notamment que la question n 5 porte sur l inscription comme demandeur d emploi. Elle fait valoir que l allocataire aurait pu s informer davantage et observe qu elle n a renvoyé le formulaire qu en novembre. Elle conteste avoir commis une erreur en poursuivant le paiement des allocations en septembre et octobre et soutient avoir respecté la réglementation en poursuivant ce paiement à titre provisionnel jusqu au mois civil suivant celui dans lequel elle a demandé la confirmation de la qualité d enfant bénéficiaire, le formulaire ayant été envoyé le 5 septembre 2003. Elle observe que si l intéressée avait renvoyé à temps le formulaire, c est à dire dès le 15 septembre, les paiements indus auraient pu être évités.

4e feuillet. Elle conteste donc les reproches fait à la Caisse et conclut que rien ne s oppose à la récupération réclamée pour septembre et octobre 2003. Dans ses conclusions, elle se réfère en outre à l article 10 de l arrêté royal du 30 décembre 1975 et précise sa demande reconventionnelle (intérêts à dater de la mise en demeure). B. Partie intimée : Madame. H.-C. Madame H.-C. reproche à la Caisse son manque d information et observe que le formulaire P7 indique seulement de répondre à la question si le jeune s est inscrit comme demandeur d emploi pendant la période indiquée ; il n indique pas que les allocations sont supprimées à défaut d inscription comme demandeur d emploi. Elle expose que Isabelle ne s était pas inscrite comme demandeuse d emploi parce qu elle avait fait de nombreuses démarches pour trouver un emploi dès la fin de ses études et qu elle a trouvé un emploi commençant le 5 novembre 2003 (pièce produite). Si elle avait été informée qu il fallait s inscrire comme demandeur d emploi pour bénéficier des allocations familiales en septembre et octobre, elle n aurait pas manqué de le faire. Elle conteste que le formulaire réponde aux exigences de la Charte de l assuré social (article 3). Par ailleurs, elle se réfère à la motivation du premier juge selon laquelle la Caisse a admis avoir commis une erreur en telle sorte que la décision ne peut rétroagir (art. 17, al.2 de la Charte). Elle souligne encore l inutilité de s inscrire comme demandeur d emploi dans son cas, puisqu elle avait trouvé un emploi, et qu il ne peut rien lui être reproché n étant pas restée inactive. IV. POSITION DE LA COUR A. Quant au droit aux allocations familiales 1. Selon les dispositions en vigueur au moment du litige : - le droit aux allocations familiales est accordé aux enfants qui suivent un enseignement (lois coordonnées du 19 décembre 1939, art. 62, 3) - si l'enfant ne reprend pas effectivement la fréquentation scolaire, les allocations familiales sont accordées pendant les vacances d'été ; ces vacances sont censées être terminées au plus tard le 30 septembre dans les enseignements supérieurs et le 31 août dans les autres enseignements» (AR du 30 décembre 1975, art. 10) ; - les allocations familiales sont accordées jusqu'à l'âge de 25 ans en faveur de l'enfant n'étant plus soumis à l'obligation scolaire, inscrit comme demandeur d'emploi et qui a terminé des études ou un apprentissage (Lois coordonnées du 19 décembre 1939, art. 62, 5) ;

5e feuillet. En l espèce, Isabelle a terminé les cours en juin 2003 ; elle ne s est pas inscrite comme demandeur d emploi. Par application des dispositions qui précèdent, elle n a droit aux allocations familiales que jusqu au 31 août 2003. B. Quant à l erreur 2. La loi prévoit que, afin de ne pas interrompre ou retarder le paiement des allocations familiales, le Roi peut prévoir le paiement provisionnel des allocations familiales (Lois coordonnées du 19 décembre 1939, art. 62, 5). En exécution de cette disposition, il est notamment prévu que l'organisme continue à payer les allocations familiales à titre provisionnel pour le mois civil suivant celui dans lequel il a demandé des «formules périodiques» (sic) devant confirmer la qualité d'enfant bénéficiaire (AR du 12 juin 1989, art. 9). En l espèce, le formulaire périodique a été envoyé en septembre 2003 ; la Caisse ne disposait d aucun élément indiquant que l enfant avait cessé de suivre des cours ; elle pouvait donc poursuivre un paiement provisionnel en octobre, sans que l on puisse considérer que ce paiement soit fautif. Les termes utilisés dans le courrier de la Caisse (paiement «par erreur») ne constituent pas en l espèce l aveu d une erreur fautive dans son chef mais bien l indication que le paiement s avère indu, l intéressée ne répondant plus aux conditions pour être bénéficiaire depuis fin août 2003. C. Quant au devoir d information 3. Le devoir d information est l une des obligations imposées par la loi du 11 avril 1995 instituant la Charte de l assuré social. L article 3 de la Charte prévoit en effet que «Les institutions de sécurité sociale sont tenues de fournir à l'assuré social qui en fait la demande écrite, toute information utile concernant ses droits et obligations et de communiquer d'initiative à l'assuré social tout complément d'information nécessaire à l'examen de sa demande ou au maintien de ses droits (...) Le Roi détermine, après avis du Comité de gestion ou de l'organe d'avis compétent de l'institution concernée, ce qu'il y a lieu d'entendre par information utile, ainsi que les modalités d'application du présent article». En exécution de cette disposition, il est prévu que «les institutions de sécurité sociale fournissent à l'assuré social, dans les matières qui les concernent, les informations utiles à l'octroi ou au maintien de l'assurabilité et à l'octroi de prestations ainsi que les coordonnées des personnes aptes à fournir des renseignements complémentaires. A cette fin, elles rédigent un document, actualisé régulièrement, décrivant les droits et obligations des assurés sociaux figurant dans la législation que l'institution doit appliquer. Sur demande, ce document est mis gratuitement à disposition des assurés sociaux.» (AR 19 décembre 1997, art. 2). 4.

6e feuillet. La Caisse soutient qu elle a fourni l information utile par le formulaire P7, en particulier parce que ce formulaire contient la question relative à l inscription comme demandeur d emploi et que l assuré est responsable pour avoir mis du temps à renvoyer le formulaire. La Cour ne peut suivre cette thèse : - l obligation d information introduite dans la Charte de l assuré social a pour objectif de permettre aux administrés de mieux faire valoir leurs droits à l égard de l administration et des institutions de sécurité sociale. Il s agit d éviter que le manque d information juridique suffisante ait pour effet de priver l assuré social de certains droits (voy. notamment, J. André in «Fout, schade en gemeenrechtelijk schadeherstel in de sociale zekerheid», Chr. D. S. 2006/09 p.501) ; - l information ne doit pas seulement être donnée «à la demande écrite», comme le soutient la Caisse en ses plaidoiries, elle doit aussi être donnée d initiative (Charte, art.3, ci-dessus) lorsqu elle est utile pour le maintien des droits de l assuré ; - par ailleurs, l information doit être donnée dans un langage compréhensible pour le public (Charte, art. 6). Or : - l information concernant l obligation de s inscrire comme demandeur d emploi pour continuer à pouvoir bénéficier des allocations de chômage est une information à caractère général, susceptible d intéresser tout étudiant terminant ses études, afin qu il puisse maintenir le bénéfice des allocations familiales ; - cette information ne figure pas sur le formulaire ; - le simple fait de poser une question ne constitue pas un langage compréhensible permettant à un assuré de se rendre compte du lien entre l inscription comme demandeur d emploi et le maintien du droit aux allocations familiales ; - aucun élément du formulaire n indique le délai endéans lequel ce formulaire doit être renvoyé ; - bien plus, aucun élément du formulaire, envoyé en septembre, n attire l attention sur le fait que, à défaut de suivre encore un enseignement, le droit aux allocations familiales a pris fin depuis fin août, sauf si le jeune s inscrit comme demandeur d emploi. 5. Les conséquences d une carence dans l information donnée par une institution de sécurité sociale sont clairement illustrées dans le cas d espèce : l étudiante a, de bonne foi, cherché (et trouvé) seule un emploi, sans s inscrire comme demandeuse d emploi, formalité qu elle eût à

7e feuillet. l évidence remplie si elle avait été correctement informée en temps utile par la Caisse. Il s agissait d une information simple, et à caractère général. Une indication claire à ce sujet dans le formulaire (il est envoyé chaque année) aurait suffi à cette fin. La carence dans l obligation d information de la Caisse est établie et constitue un comportement constitutif d une faute au sens de l article 1382 du Code civil. 6. Madame H.-C. invoque cette carence pour s opposer à l obligation de rembourser les allocations familiales payées pour septembre et octobre 2003. Il convient de souligner que la Charte elle-même ne prévoit aucune conséquence spécifique en cas de non respect de l obligation d information. Ainsi qu il a été constaté ci-avant, ce comportement constitue une faute de la Caisse, donnant lieu à la réparation du dommage qui en résulte. En l espèce, le dommage résultant directement du manque d information est la perte du droit aux allocations familiales pour septembre et octobre 2003, soit l objet de la décision notifiée le 1 er mars 2004, à laquelle s oppose Madame H.-C.. 7. En conclusion : - l appel est partiellement fondé et il y lieu de réformer le jugement en ce qu il annule la décision attaquée ; en effet, par cette décision, la Caisse a valablement constaté que les allocations payées en septembre et octobre 2003 n étaient pas dues au regard de la réglementation ; - l appel est non fondé pour le surplus : la faute de la Caisse consistant à ne pas avoir respecté son obligation de fournir d initiative à l assuré social tout renseignement complémentaire pour le maintien de ses droits, fait obstacle à la demande de récupération, cette récupération constituant le dommage à réparer; la demande reconventionnelle doit être déclarée non fondée et le jugement confirmé quant à ce, mais pour d autres motifs. PAR CES MOTIFS, LA COUR, Statuant après un débat contradictoire, Entendu Madame M. Bonheure, Premier Avocat Général, en son avis oral partiellement conforme,

8e feuillet. Reçoit l appel de la Caisse, Le dit partiellement fondé, Réforme le jugement entrepris en ce qu il annule la décision attaquée, Rétablit cette décision dans son principe, Dit l appel non fondé pour le surplus et, dans cette mesure, confirme, mais pour d autres motifs, le jugement entrepris, Met les dépens de l appel liquidés à 142,79 (indemnité de procédure) par Madame M. H.-C. à charge de la partie appelante. Ainsi jugé et prononcé à l audience publique de la 8 e chambre de la Cour du travail de Bruxelles, le 13 septembre deux mille sept, où étaient présents : M me SEVRAIN A. Conseillère présidant la chambre M. GALAND L. Conseiller social au titre d employeur M. VOLCKERIJCK D. Conseiller social au titre d employé M me GRAVET M. Greffière adjointe VOLCKERIJCK D. GALAND L. GRAVET M. SEVRAIN A.