Lettre spéciale de liaison @ Le 27 mai dernier se déroulait au centre culturel de Josselin, le forum annuel sur la gestion durable des bourgs et des espaces verts. A cette occasion, le Grand Bassin de l Oust a fait appel à Monsieur Louis DIARD, Louis DIARD botaniste et ancien responsable du jardin botanique de Rennes pour nous parler de gestion différenciée. Retour sur ce forum Botaniste, Spécialiste de la Gestion différenciée Après une formation horticole, il dirige pendant plus de 15 ans le jardin botanique de la ville de Rennes. Il réalise par la suite pendant plus de 20 ans l inventaire botanique des communes d IlleetVilaine. Il travaillera au Conseil Général d IlleetVilaine au service Espaces Naturels Sensibles jusqu en 2010. Il est désormais formateur et conférencier et accompagne certaine ville dans la mise en place d une gestion différenciée. Publications : Atlas de la flore vasculaire d IlleetVilaine, éditions Siloë, 2005 Rennes la campagne revient en ville, 1997 Bretagne vivante SEPNB Qu est ce que la gestion différenciée? La définition de la gestion différenciée pour M. DIARD repose sur l intégration de la biodiversité dans la gestion et l aménagement des espaces. La gestion différenciée apparaît ainsi comme une méthode de gestion des espaces verts en milieu urbain qui consiste à ne pas appliquer à tous les espaces la même intensité ni la même nature de soins. Ce concept se base sur une gestion à la fois environnementale et économe. La biodiversité dans la ville, qu y atil derrière la gestion différenciée des parcs urbains? Le Kaléidoscope rennais, en collaboration avec Christian Fayat La mise en place d une gestion différenciée apporte des réponses à de nombreux enjeux : des enjeux environnementaux, des enjeux économiques, des enjeux sociaux, des enjeux culturels et s intègre donc parfaitement dans une perspective de développement durable puisqu elle considère chacun des 3 piliers fondateurs (écologique, économique et sociale). Pour des espaces verts urbains plus écologiqueséléments de définitionapplications à quelques espaces verts publics de la ville de Rennes et proposition d aménagement 1992 MST AMVR Université de Rennes Les incidences sur les méthodes de travail sont également multiples. Le regard sur le patrimoine doit évoluer et certaines pratiques doivent notamment être remises en cause. Il est indispensable d acquérir de nouveaux savoirfaire et d élaborer un plan de gestion simplifiée. Tout ceci nécessite un réel changement de regard sur l entretien des espaces communaux. Monsieur Louis DIARD a clairement insisté sur la nécessité d implication des élus et de l affichage d une volonté politique forte pour mettre en œuvre durablement la gestion différenciée.
Il a montré par des exemples tirés de sa propre expérience mais aussi de villes et communes expérimentant cette méthode de gestion qu il est possible de faire rimer biodiversité avec économie et efficacité. La connaissance à la base de la gestion différenciée : Identifier les espaces En définissant différents niveaux d entretien par types de milieux (allant de l espace le plus soigné et fleuri à l espace le plus rustique et champêtre), Louis DIARD a illustré la possibilité d améliorer l organisation du travail pour mieux valoriser les espaces (aménagements paysagers, taille, tonte, choix des végétaux, arrosage,.) et ainsi dégager du temps, économiser des intrants (fertilisants, produits de traitement, eau, ) et surtout participer à la lutte collective pour la reconquête de la qualité de l eau et du bon état écologique des cours d eau. Le mot d ordre de Louis DIARD : «Mieux connaître pour mieux gérer» Les principes de la gestion différenciée ont ensuite été déclinés par types de milieux. La gestion différenciée englobe tous les types d espaces verts, du plus soigné au plus champêtre. Toutefois, Louis DIARD s est attaché à développer la gestion des espaces dits «plus naturels ou plus champêtres», à savoir : Les haies bocagères : L objectif consiste ici à conserver un maximum de haies existantes en favorisant l expression des différentes strates de végétation (herbacée, arbustive et arborescente). Les vieux arbres sont à conserver dans la mesure du possible car ils sont susceptibles de représenter un gîte pour certaines espèces (insectes, oiseaux, chiroptères, etc.). Les boisements : L objectif consiste ici à préserver aux abords des bois, des lisières composées de différents niveaux de végétation très riches d un point de vue faunistique et floristique.
Les milieux humides : En milieu urbain, on retrouve essentiellement 5 types de milieux humides, à savoir : les étangs, les mares, les marais, les cours d eau et les prairies humides. Les zones humides sont des espaces présentant une dynamique relativement rapide. La végétalisation des berges et la non tonte des abords de zones humides permettront de favoriser l expression d une plus large biodiversité et d améliorer l esthétisme des lieux. Les zones enherbées : L objectif consiste ici essentiellement à varier les hauteurs et fréquences de tonte afin de favoriser l apparition de fleurs aux endroits souhaités. Les zones enherbées sont représentées par 4 grands types, à savoir : les gazons traditionnels, les pelouses fleuries, les prairies fleuries et les mélanges fleuris. Le passage d un type à un autre pourra donc se faire aisément en intervenant sur le facteur tonte. Les zones minéralisées : Les zones minéralisées (murets alvéolaires, ilots directionnels, trottoirs sablés et gravillonnés, aires sablées) sont souvent des endroits désherbés. Plusieurs exemples sont développés notamment à la ville de Rennes ou certaines zones ne sont plus traitées (trottoirs, aires de jeux, cimetières, ) et ou l enherbement se fait progressivement. L enherbement se faisant au fur et à mesure, les premiers temps visuellement cela ne semble pas très esthétique mais rapidement (environ 23 ans) le résultat devient satisfaisant. Parfois, seul le passage fréquent des piétons limite la pousse et suffit à matérialiser un chemin.
Avant Avant Après Après Développer des espaces de vie pour la faune et la flore D une manière générale, tous ces espaces sont des espaces de vie et de développement potentiel pour la faune et la flore. Ainsi, en multipliant les habitats et microhabitats et en recréant des connexions entre les différents espaces, il est possible d obtenir un environnement de qualité tout en favorisant l expression d une biodiversité optimale. Plusieurs exemples ont ensuite été développés comme le quartier sud gare de Rennes, le bourg de La Gacilly ou encore de BazougeslaPérouse afin de montrer que la nature peut s inviter en ville par le biais de mur ou pied de mur végétalisé. La gestion des bords de route Pour M. DIARD, les bords de route sont également des lieux de vie pour la faune et la flore, les dépendances routières doivent donc être intégrées dans la mise en place de la gestion différenciée. L entretien des dépendances routières doit répondre à plusieurs objectifs, à savoir : Assurer la sécurité routière, maintenir en bon état la route et ses abords, donner l image d un lieu agréable et propre, préserver l environnement. La gestion des bords de route ne correspond pas dans ce cas, à une absence d entretien, mais à un entretien mieux adapté qui permet de concilier les enjeux de sécurité des usagers et de préservation de la biodiversité locale. La mise en place d une gestion différenciée contribue également dans ce cas à valoriser l image des départements et des communes avec les floraisons qui s échelonnent depuis le printemps jusqu'à l automne. Enfin, la gestion différenciée des bords de route permet l accomplissement des cycles biologiques des espèces animales et végétales. Les dépendances routières comprennent en général, 3 zones distinctes : l accotement, le fossé, le talus. Chacune de ces zones doit faire l objet d une gestion particulière ou la fréquence de passage sera le facteur d intervention principal.
M. DIARD précise que les modes de gestion actuels des bords de route font souvent apparaitre des dysfonctionnements portant atteinte au milieu naturel. Il insiste également sur le fait que le fauchage tardif ne correspond pas à une absence de fauchage mais à un fauchage qui tient compte de la diversité biologique des milieux et permet l accomplissement des cycles de développement des plantes et des animaux. Les plantes invasives En dernier lieu, M. DIARD intervient sur la problématique des plantes invasives. Une espèce invasive est une espèce introduite dans un milieu qui n est pas son milieu d origine et dont le développement va nuire à la biodiversité locale, à la santé humaine ou à certaines activités économiques. De nombreuses plantes invasives sont d ores et déjà référencées en Bretagne, des espèces invasives avérées (jussie, herbe de la pampa, élodée dense, ), des espèces invasives potentielles (vergerettes, impatience de l Himalaya, ) et des espèces invasives à surveiller (berce du Caucase, élodée du Canada, ). M. DIARD précise que les espèces invasives sont aujourd hui considérées comme la 2 ème cause de perte de la biodiversité dans le monde après la destruction et la fragmentation des habitats. Quelques exemples Renouée du Japon Herbe de la Pampa Impatience de l Himalaya Séneçon en arbre Conclusion En conclusion, Louis DIARD préconise d accompagner la mise en place du concept de gestion différenciée, d un plan de communication et de formation du personnel conséquent. Une bonne communication est un facteur crucial de réussite d un projet de commune sur la gestion différenciée. La gestion différenciée est une démarche nouvelle qui nécessite d être expliquée pour éviter les incompréhensions et les rejets en interne (élus, techniciens, ) comme en externe (particuliers, ). Développer l éducation à l environnement permet également de sensibiliser tous publics et d accompagner les changements de méthodes.