MOT D INTRODUCTION M. MOHAMMED TAWFIK MOULINE DIRECTEUR GENERAL DE L INSTITUT ROYAL DES ETUDES STRATEGIQUES RABAT

Documents pareils
Secrétariat d Etat auprès du Premier Ministre chargé des Technologies Nouvelles

Perspectives économiques régionales du Moyen-Orient et de l Afrique du Nord

Comité monétaire et financier international

L Union des Femmes Investisseurs Arabes est une entité dépendant de la Ligue Arabe.

LA SCENE MEDIATIQUE AU MOYEN-ORIENT

Approches macroéconomique et fiscale. Introduction à la première partie... 14

PUBLICATIONS Salto Youth EuroMed

Editorial. Chère lectrice, cher lecteur,

Comprendre les enjeux actuels. et les defis futurs. Carine Bouthevillain Gilles Dufrenot. Philippe Froute Laurent Paul. Preface de Michel Bouvier

Intervention de M. Assane DIOP Directeur exécutif, Protection sociale Bureau international du Travail, Genève ***

Programme CNRS-ERC- IREMAM- CERI. When Authoritarianism Fails in the Arab World (WAFAW) APPEL A CANDIDATURES

Quelle stratégie d Intelligence économique pour le dessein africain du Maroc? ASMEX DAYS, Casablanca, 24 mars 2015

Honorables invités, Mesdames et Messieurs,

CHARTE BUDGET PARTICIPATIF

Synthèse des réponses reçues du sondage du 8 février 2013

Présentation. L AFEM regroupe à ce jour près de 300 membres. Elle est constituée de femmes qui dirigent des sociétés morales: SA, SARL, SNC.

CLUB DE REFLEXION SUR LE MALI (CRM)

Réunion mondiale sur l Éducation pour tous UNESCO, Mascate, Oman mai 2014

Remarques d Ouverture par M. Mohammed Laksaci, Gouverneur de la Banque d Algérie, Président de l Association des Banques Centrales Africaines

Nous sommes interrogés sur la nature de la crise que nous rencontrons

INVESTIR AU TCHAD. Le Tchad est un pays d agriculture et d élevage, un pays dont le peuple est laborieux, un pays dont le sous sol est promoteur.

L histoire de l assurance en Algérie

PAYS INVITE D'HONNEUR :LA FRANCE

Sommaire INVESTIR AU MAROC

Réunion d experts Financement du développement en Afrique du Nord Rabat, Maroc, octobre 2010

NOTE D'INFORMATION SUR L'ÉMISSION OBLIGATAIRE DE $.US 1 MILLIARD SUR 10 ANS (JANVIER 2015)

Veuillez trouver ci-joint la communication de Monsieur le Gouverneur à l occasion du forum international des finances et des affaires tenu à

La coopération universitaire Union Européenne Maghreb dans le cadre des programmes d éducation Tempus et Erasmus Mundus

Sommaire INVESTIR AU MAROC

Investissement étranger à la Bourse de Casablanca

Paris Europlace Forum financier international 20 avril 2015 «FAVORISER LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE EN EUROPE»

La Bourse de Casablanca, la solution de financement de votre entreprise

Contrat d application pour l amélioration de la compétitivité logistique IMPORT-EXPORT

Note d actualité : Analyse de la loi de finances 2013

Réformes européennes et stabilité financière

Le FMI conclut les consultations de 2008 au titre de l article IV avec le Maroc

à l accès aux fonctions publiques selon le mérite ; à l accès à l eau et à un environnement sain ; au développement durable.»

Les relations commerciales entre les pays méditerranéens

Logistique et transport de marchandises au Maroc : État des lieux et enjeux. Professeur Mustapha EL KHAYAT

JUNIOR ESSEC CONSEIL NATIONAL DU NUMÉRIQUE. Thème de la journée de consultation : Loyauté dans l environnement numérique Junior ESSEC 09/01/2015

demain Aujourd hui ACDIC A. PRESENTATION DE L ACDIC B. 10 ANS D ACTIONS. Des actes concrets, des effets, des impacts C. DES ACQUIS ET ATOUTS CERTAINS

QU EST- CE QU UNE CONSTITUTION

Observatoire des Fonctions Publiques Africaines (OFPA)

Promulgue la loi dont la teneur suit : TITRE I

République arabe d'égypte

Démarche & ses étapes (information) III. Présentation des orientations et des actions du schéma de développement culturel d Alsace Bossue

Contact : Jérôme Sainte-Marie, Directeur du Département Opinion / 11

Nouvelle stratégie européenne d action pour la jeunesse «Investir en faveur de la jeunesse et la mobiliser»

Le Maroc face à la crise de La zone euro : enjeux et orientations de politiques publiques

PAUVRETE(S) ET DEVELOPPEMENT

UNE ANNEE 2013 SOUS LE SIGNE DE L ACTION DOSSIER DE PRESSE

Considérations sur la crise et le marché intérieur 1

JOURNAL OFFICIEL DE LA REPUBLIQUE ALGERIENNE N 05

TABLE DE MATIERES. Pourquoi les Organisations doivent-elles être accréditées?...

La culture du résultat au sein des systèmes statistiques nationaux des Etats membres d AFRISTAT

Automne 2014 LE POINT SUR LA SITUATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE DU QUÉBEC

lj~ion DE L'EUROPE_OCCIDENT ALE Plate-forme sur les interets europeens en matiere de securite La Haye, 27 octobre 1987

Evaluation du projet Fonds pour la consolidation de la paix, Welthungerhilfe Butembo République Démocratique du Congo

«La France d après», c est un clin d œil au slogan de Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle de Il ne s agira pas cependant ici de

Annexe 1 L Agenda politique d Istikshaf

EOLIEN EN MER : Projet de Saint Nazaire. 15 Novembre Instance de Suivi et de Concertation

Croissance plus lente dans les pays émergents, accélération progressive dans les pays avancés

Patrick K. N'Gouan TRESOR PUBLIC EN CÖTE D'IVOIRE. Des origines ä nos jours. Preface de Joseph Y. Yao

N 362. Votre Revue de Presse Du 24/ 03 /2015. tel : Fax: CONECT 2015

Conseil économique et social

Investissements des entreprises au Québec et en Ontario : amélioration en vue?

CAMPAGNE NATIONALE DE SENSIBILISATION «Pour un meilleur partenariat Banques/Petites et moyennes entreprises au service du Développement Humain»

ORIGINES ET CONTOURS, FONDEMENTS ET TRAJECTOIRE DES ENTREPRISES COLLECTIVES AU QUÉBEC ET DANS LE MONDE

Forum Pan-Africain des Secrétaires Généraux de Gouvernements

Acronymes. Introduction

Sommaire : c) Champions d assiduité et d engagement. ville qui a été choisi pour vendre notre produit. Population ciblée

Royaume du Maroc. La masse salariale et ses impacts sur les équilibres économiques et financiers

LICENCE Administration publique Parcours : MANAGEMENT PUBLIC 2 ème année

Partage des coûts vs gratuité

SONDAGE EXCLUSIF Harris Interactive pour LCP-Assemblée nationale

SEA SUN & ESS LES CAHIERS DE VACANCES DU CJDES CAHIER #1 SUR LE STATUT DE MUTUELLE EUROPEENNE TOUT COMPRENDRE #SME #EUROPE #MUTUELLES #ESS

Réunions publiques janvier Présentation du Débat d Orientation Budgétaire

ETUDE AFRIQUE AUPRES DU RESEAU BPIFRANCE EXCELLENCE

Les contributions des acteurs territoriaux à la promotion de la cohésion sociale et du développement durable aux niveaux local, national et mondial

Synthèse. Loyauté et réciprocité des échanges entre l Union Européenne et les pays tiers. Propositions et axes de réflexion des IEEC

«France-Allemagne, une convergence énergétique est-elle possible?»

Le mouvement coopératif et mutualiste: un réseau d entreprises et un mouvement ouvert aux autres

Présentation du projet de jumelage

Loïc Blondiaux Le Nouvel Esprit de la démocratie Actualité de la démocratie participative Le Seuil, coll. «La République des Idées», 2008

Résumé Comme d autres, nous faisons le constat que la France se trouve au bord d une grave crise de surendettement

pas de santé sans ressources humaines

Toronto (Ontario) Le vendredi 26 octobre 2007 L ÉNONCÉ FAIT FOI. Pour de plus amples renseignements, s adresser à :

Les conséquences de l'uem sur le système monétaire international

devant le Conseil de surveillance de la normalisation comptable

DECLARATION UNIVERSELLE DE L UNESCO

FIN-INTER-01 LE CONTEXTE

Le monitoring des médias

Consultations prébudgétaires

LE COMMERCE EXTÉRIEUR CHINOIS DEPUIS LA CRISE: QUEL RÉÉQUILIBRAGE?

REVUE DE LA DEFENSE DU BURUNDI : LEÇONS TIREES

LE PMI, LEVIER DE DEVELOPPEMENT DES PÔLES DE COMPETITIVITE

La plateforme IRM. La maitrise des risques. L accès à la plateforme

«Les Arabes sont musulmans, les musulmans sont arabes.»

Banque Européenne. pour la Reconstruction et le Développement. Tunisie

Comité du développement et de la propriété intellectuelle (CDIP)

Transcription:

CONFERENCE-DEBAT «QUELLES PERSPECTIVES DE LA TRANSITION POLITIQUE EN EGYPTE?» MOT D INTRODUCTION M. MOHAMMED TAWFIK MOULINE DIRECTEUR GENERAL DE L INSTITUT ROYAL DES ETUDES STRATEGIQUES RABAT MERCREDI, 16 JANVIER 2012

Institut Royal des Etudes Stratégiques (IRES) Avenue Azzaitoune, Hay Riad, Rabat 10100 Téléphone : +212 (0) 537.71.83.83 Fax : +212 (0) 537.56.40.79 Email: contact@ires.ma Site Web: www.ires.ma 2

C est avec un immense plaisir que nous vous accueillons aujourd hui à l Institut Royal des Etudes Stratégiques (IRES) dans le cadre de cette conférence-débat consacrée à la question de la transition politique en Egypte et ses perspectives. Je tiens, tout d abord, à remercier notre conférencier Monsieur Abou-Bakr Mohamed HEFNY MAHMOUD, Ambassadeur de la République Arabe d Egypte, d avoir répondu favorablement à notre invitation, malgré son agenda serré. Ses éclairages seront certainement utiles pour comprendre les transformations sociopolitiques à l œuvre en Egypte et pour mieux cerner les défis qui interpellent la transition démocratique dans ce pays, presque deux ans après le déclenchement de la «révolution du 25 janvier». Cette rencontre s inscrit dans le cadre du cycle de conférences, lancé par l Institut depuis mars 2011, auquel ont pris part des ambassadeurs et des experts maghrébins et européens, dans le but de cerner les principales mutations sociopolitiques dans la région sudméditerranéenne et d en apprécier les incidences directes et indirectes sur le Maroc. Son organisation vise, ainsi, à approfondir la connaissance du contexte régional du Maroc, conformément à la mission permanente de veille stratégique de l Institut et en ligne avec le volet géopolitique de son programme d études «Compétitivité globale et positionnement du Maroc dans le système mondialisé». L Egypte a connu, le 25 janvier 2011, l un des évènements les plus marquants de son histoire moderne, avec le déclenchement d un mouvement de contestation population d une ampleur inédite, qui a conduit en l espace de quelques jours seulement à l effondrement du régime en place depuis 30 ans. 3

Si l effet de contagion de la «révolution tunisienne» n est pas négligeable, il n en demeure pas moins vrai que des facteurs endogènes ont constitué les racines structurelles du soulèvement populaire en Egypte. Il s agit, notamment du blocage du système politique et des résultats loin d être probants de la politique économique menée par le pays, avec toutes les conséquences que cela a générées en termes d étouffement des libertés publiques, d exacerbation des inégalités sociales et de marginalisation d une large frange de la population, en particulier les jeunes. Le mouvement de contestation en Egypte a conduit progressivement à l amorce d un processus démocratique qui s est soldé par l organisation d élections présidentielles, jugées crédibles par la communauté internationale, et l adoption d une nouvelle Constitution suite au référendum des 15 et 22 décembre 2012. Néanmoins, les perspectives politiques en Egypte demeurent entachées d incertitudes. La mise en place d institutions constitutionnelles bénéficiant d un consensus général, la stabilisation des relations entre le gouvernement et l armée ainsi que la gestion délicate de certaines questions connexes, dont notamment celle des minorités religieuses, constituent des enjeux de taille de nature à conditionner l avenir de la transition démocratique en Egypte. D autres défis à relever résident dans le redémarrage de l économie égyptienne et la résorption des déséquilibres élevés des finances publiques et des comptes extérieurs. Outre la nécessité d impulser l activité touristique et de développer les investissements étrangers, un programme de réformes suffisamment solide et bénéficiant du soutien du FMI devient primordial, pour assurer le bien-être de la population égyptienne tout en consolidant la solvabilité de l Etat égyptien. Le Maroc a suivi de près les transformations qu ont connues certains pays de son voisinage, dont notamment la Tunisie et l Egypte, en respectant la volonté des peuples en matière d édification de régimes démocratiques répondant à leurs aspirations légitimes. 4

De par son poids dans le monde arabe, l Egypte a toujours constitué un partenaire important du Maroc. Les relations commerciales entre les deux pays ont connu un tournant décisif avec la conclusion de l Accord d Agadir, qui a favorisé une progression soutenue de leur commerce bilatéral. Force est de constater, cependant, que cette progression a été au prix d un déséquilibre commercial au détriment du Maroc, passant de près de 1 milliard de dirham entre 2002 et 2006 à 2,7 milliards dirhams entre 2007 et 2011. De plus, ce déficit n est que faiblement résorbé par les investissements directs de l Egypte au Maroc qui demeurent faibles, avec un stock se chiffrant à 689 millions de dirhams seulement entre 2001 et 2010. Au-delà du déséquilibre des relations commerciales, le potentiel de la coopération bilatérale n est pas totalement mobilisé. Les deux économies, en dépit des multiples opportunités de coopération qui leur sont offertes, n arrivent pas encore à enclencher une réelle dynamique de complémentarité, condition nécessaire pour maximiser les retombées de leurs politiques d ouverture et réussir leur insertion dans les courants d échanges et d investissements internationaux. Toutefois, les perspectives qui se profilent sont prometteuses et seraient de nature à rendre plus étroites les relations de coopération entre le Maroc et l Egypte, pourvu que les deux pays s activent à élargir le spectre de leur partenariat et renforcent leur concertation sur les grandes questions stratégiques d intérêt commun, au premier rang desquelles figurent la question palestinienne et la stabilité au Moyen-Orient. De même, les deux pays pourraient jouer un rôle significatif en termes de concrétisation du projet de Grande Zone de Libre Echange Arabe (GAFTA) ou encore en termes de redynamisation de l intégration euroméditerranéenne. Pour examiner de près les différents aspects évoqués précédemment, il serait utile d apporter des éléments de réponse aux questionnements suivants : 5

Quels sont les acquis de la «révolution du 25 janvier», presque deux ans après son déclenchement? Quelles sont les principaux obstacles endogènes à surmonter pour asseoir sur des bases solides le processus de transition démocratique en Egypte? Quelles sont les perspectives ouvertes sur le plan politique, économique et social? Quelles sont les répercussions des transformations politiques en Egypte sur les fondements de sa politique étrangère en général et ceux concernant plus particulièrement les questions des Territoires occupés et de la Syrie ou les relations avec les grandes puissances occidentales, notamment les Etats Unies d Amérique? Quelles sont les priorités de l agenda gouvernemental en Egypte en termes de relance de la croissance économique et de création d emplois dans un environnement international peu porteur et dans un contexte interne marqué par des revendications sociales élevées des populations? Sur quelle nouvelle approche de partenariat le Maroc et l Egypte devraient-ils s appuyer pour renforcer leurs relations bilatérales? Quel nouveau rôle les deux pays pourraient-ils jouer au niveau arabe et euro-méditerranéen? Ce sont-là quelques questionnements que nous nous proposons d examiner dans le cadre de cette conférence. La présence d experts relevant d horizons disciplinaires variés constitue une opportunité idoine pour élargir le débat et approfondir la réflexion sur les différentes facettes de cette thématique. Je vous remercie de votre attention et sans trop tarder je donne la parole à Monsieur l Ambassadeur Abou-Bakr Mohamed HEFNY MAHMOUD. 6