Le glucagon. Cette hormone est connue depuis 1923 mais considérée comme antagoniste de l insuline, et donc hyperglycémiante, depuis les années 50.

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Transcription:

Le glucagon Cette hormone est connue depuis 1923 mais considérée comme antagoniste de l insuline, et donc hyperglycémiante, depuis les années 50. Le glucagon est un polypeptide de 29 acides aminés appartenant à la famille des sécrétines. sa séquence est: his-ser-glu-thr-phe-thr-ser-asp-tyr-ser-lys-tyr-leu-asp-serarg-ala-glu-asp-glu-asp-phe-val-glu-trp-leu-met-asn-thr. BIOSYNTHESE Dans le pancréas humain, la biosynthèse du glucagon aboutit à un ARN messager codant pour le proglucagon (PG), long peptide comportant 160 acides aminés puis à un gros peptide prédominant inactif stocké dans des vésicules de sécrétion, le fragment proglucagon majeur (MPGF) contenant les résidus 72 à 158 du proglucagon, au GRPP (polypeptide lié à la glicentine) inactif correspondant au résidus 1 à 30 du PG, au glucagon (position 33 à 61 du PG) et à l IP1 en position 64 à 69 du PG. Lorsque les cellules sont stimulées par une baisse de la glycémie, le MPGF est clivé par un découpage enzymatique (trypsines) en 3 peptides: - un peptide correspondant aux résidus amides 72 à 107 du PG - un peptide IP2 correspondant aux résidus 111 à 122 du PG - le GLP2 comprenant les acides aminés en position 126 à 158 du proglucagon Ce processus différentiel donne à partir du PG 72 à 108 le produit final biologiquement actif, le glucagon. Cette hormone est contenue dans les granules de sécrétion des cellules A du pancréas. Ces granules sont formés d un noyau central dense et d un halo périphérique clair. Elle est également produite par les cellules endocrines de la muqueuse intestinale. Cependant, le clivage du proglucagon diffère alors de celui qui se produit dans les cellules A: on obtient un gros peptide, la glicentine (PG 1-69) qui est elle même découpée en GRPP et en oxyntomoduline (PG 33-69). Les résidus 78 à 158 du PG sont clivés en trois peptides: - le GLP1 correspondant aux résidus 78 à 107 du PG - l IP2, petit peptide de 12 acides aminés (PG 111-123) - le GLP2 Ces différents peptides sont tous sécrétés dans le sang en réponse aux sucres et aux lipides. Cependant, seule l activité biologique du GLP1 et de l oxyntomoduline à pu être caractérisée. MODE D ACTION Le récepteur au glucagon a été caractérisé en 1993. C est une protéine de 485 AA dont la séquence est identique à 42 % a celle du récepteur du GLP1. Ceci permet d ailleurs au glucagon de se fixer sur le récepteur au GLP1. Par ces deux récepteurs différents (R-glu + R GLP1), il exerce son action sur les cellules B. Ce récepteur utilise comme second messager l adénylate cyclase et le calcium, donc 2 voies différentes de signalisation

intracellulaire. Des récepteurs ont été identifiés au niveau hépatique, rénal, cervical, adipeux et musculaire (muscles lisse intestinaux) ainsi que sur les cellules B pancréatiques. Les cellules A sont apparemment dépourvues de récepteurs. L expression des R-glu est favorisée par le glucose et inhibée par le glucagon ainsi que les agents qui augmentent le taux d AMPc intracellulaire. Au niveau hépatique, une augmentation du flux de glucose stimule la production de récepteurs alors que les inhibiteurs de la glycolyse augmentent leur transcription. La fixation du glucagon sur son récepteur provoque l activation de protéines kinases dépendantes de l AMP cyclique intracellulaire qui phosphorylent 13 enzymes liées au métabolisme intermédiaire qui sont ainsi, à une exception près, activées. Parmi celles ci, des protéines kinases augmentant la teneur du récepteur à insuline en sérine et thréonine phosphorylée, ce qui s oppose à son action tyrosine kinase et génère une insulino-résistance transitoire. PRINCIPALES ACTIONS DU GLUCAGON SUR LE METABOLISME Cette hormone, comme l insuline, agit au niveau glucidique, lipidique et protéique. Au niveau glucidique, le glucagon: - augmente la glycogénolyse hépatique (activation de la phosphorylase) - diminue la glycogenèse (inactivation de la glycogène synthase) - inhibe la glycolyse (inhibition de la 1 - phosphofructokinase) -stimule la néoglucogénèse par activation de la fructose 1, 6 diphosphatase Au niveau lipidique, cette hormone augmente la cétogénèse hépatique grâce à l activation de la triglycéride lipase. Cette dernière étant également activée dans les adipocytes, le glycérol et les acides gras formés ainsi à partir des triglycérides dans le tissu adipeux sont relâchés dans le sang et peuvent gagner le foie. Au niveau protéique, le glucagon accroît la capture des acides aminés par les hépatocytes (par augmentation de l extraction splanchnique) et favorise ainsi la néoglucogénèse à partir des acides aminés. En plus de tous ces effets, le glucagon stimule la production d insuline, permettant ainsi l entrée dans les cellules du glucose produit par voie hépatique. Ainsi, il active la synthèse et la libération hépatique de glucose et, indirectement, l entrée du glucose produit dans les cellules grâce à l insuline! La demi-vie du glucagon est de 3 à 6 mn. La majeure partie du pool circulant de cette hormone est détruite par les hépatocytes après internalisation du couple hormone-récepteur. Les cellules tubulaires rénales détruisent les molécules restante par protéolyse. C est la raison pour laquelle l insuffisance rénale ou hépatique ainsi que l obstruction biliaire prolongent la demi vie du glucagon. La synthèse et la libération du glucagon sont sous le contrôle des différents substrats métaboliques circulant et du taux d insulinémie:

Stimulent la sécrétion gastrine - GIP - VIP - CCK stimulation β adrénergique stimulation vagale diminution de la glycémie avec basse insulinémie repas protéique (asparagine, alanine, glycine) Inhibent la sécrétion insuline somatostatine sécrétine acides gras libres hyperglycémie état post prandial immédiat Signalons également que les facteurs activant la sécrétion d adrénaline, de cortisol, d hormone de croissance ou de β endorphines (exercice, infection, stress, jeûne) stimulent également la production de glucagon. IMPORTANCE DANS LA PATHOLOGIE DIABETIQUE Le glucagon a surtout été impliqué dans l étude du diabète insulino dépendant qui s accompagne d une hyperglucagonémie. Une infusion de somatostatine supprime cet état et contre le développement d une acidocétose. Le glucagon est impliqué dans l hyperproduction de corps cétoniques et la néoglucogénèse hépatique caractérisant le diabète ID. Des dérivés de la somatostatine diminuent l hyperglucagonémie et contribuent à un meilleur contrôle de ce type de diabète. Une mutation du gène du glucagon (Gly40Ser) a été impliquée dans 5 à 8 % des diabète NID. Cependant, cette mutation est très inégalement répartie dans les populations et ne semble pas se retrouver dans l hémisphère la population nord européenne ou américaine. Chez le lapin rendu diabétique NID par ligature du canal pancréatique, il apparaît une hyperglucagonémie corrélée à l hyperglycémie ainsi qu une augmentation de la réserve pancréatique en glucagon (multipliée par 3 par rapport au témoin après 450 jours de ligature) d où un déséquilibre entre la synthèse, la libération et le stockage de l hormone. A long terme, l immunohistochimie révèle une forte immunoréactivité des cellules A ainsi qu une augmentation de leur nombre aboutissant à une nésidioblastose de type A. Ces dérégulations montrent bien le rôle prépondérant du glucagon dans le cas d un diabète NID.

Cellules A (A) immunoréactives pour le glucagon dans un îlot de Langerhans (I), situées en périphérie et à l intérieur de l îlot. (x 480). Les cellules A (A) ont une forme et une taille variées. (x 1200).

De la biosynthèse à la bio-activité du glucagon