Particularités anatomiques et physiologiques des thons. Les adaptations à la nage Le corps des thons est allongé et fusiforme, leur nageoire caudale fine et profondément fourchue est très efficace à grande vitesse (Fig.1) (Aleyev, 1977). Fig.1. : Le thon albacore, Thunnus albacares (Bonnaterre, 1788), yellowfin tuna en anglais. Des expansions latérales des vertèbres terminales limitent la flexibilité latérale du corps et permettent aux thons de produire des mouvements natatoires puissants. Une paire de petites carènes au niveau de l'insertion de la caudale accompagnées d une carène centrale de plus grande taille chez les thons les plus évolués, vient recouvrir ces expansions de manière hydrodynamique. Pour une nage plus rapide, les thons replient leur nageoire dorsale antérieure dans un sillon creusé sur leur dos. De la même façon, les nageoires pectorales s'encastrent dans une dépression dans les flancs du poisson. Le système musculaire des thons est très développé et particulièrement évolué. Il est formé de muscles blancs et de muscles rouges (comme les mammifères) dont le rendement métabolique est plus élevé (Sharp et Dizon,
1978 ; Cayré et al., 1988). Une importante vascularisation permet un fonctionnement optimal de ces muscles rouges. -334-
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La thermo-régulation Mis à part quelques requins de la famille des Lamnidae, les thons du groupe des thunini sont les seuls poissons à posséder un système de régulation thermique (Cayré et al., 1988). Ce système thermorégulateur s appuie essentiellement sur un système circulatoire «échangeur de chaleur à contre courant», le rete mirabile, qui permet de conserver ou d évacuer la chaleur produite par l activité musculaire. Trés efficace chez le thon rouge et le patudo, ce système est également présent chez l albacore adulte et, dans une moindre mesure, chez le listao (Sharp et Dizon, 1978 ; Cayré, 1990). La thermorégulation a manifestement d importants avantages : elle permet notamment de meilleures performances musculaires et un accroissement des facultés de récupération lors d un effort intense et prolongé (Sharp et Dizon, 1978). Mais son intérêt écologique principal est certainement de permettre une large émancipation des variations thermiques du milieu. Ainsi, grâce à leur système de thermorégulation, les thons peuvent, d une part, coloniser des habitats variés dans une large gamme de températures (selon Sund et al. - 1981-, on trouve des albacores entre 18 C et 31 C) et, d autre part, effectuer de fréquentes incursions dans les couches sub-thermoclinales froides. Ces mouvements verticaux pourraient jouer un rôle important d appuis à la thermorégulation physiologique en permettant soit le réchauffement du corps dans dans les eaux superficielles, soit son refroidissement dans les eaux profondes (Sharp et Dizon, 1978 ; Holland et al., 1992 ; Cayré, 1988). Les adaptations de la vessie natatoire Les aspects hydrostatiques jouent un rôle important dans la capacité des thons à effectuer des mouvements verticaux rapides (Sharp et Dizon, 1978). Ainsi, la flottabilité négative des thons leur permet une descente «planée» en profondeur. Elle facilite également les plongées rapides. La vessie natatoire est bien développée chez les thons plongeant en profondeur (le patudo et dans une moindre mesure l albacore). Elle permet d assurer une flottabilité nulle pour chasser en profondeur ou positive pour remonter (Bard et al., 1997). Il était couramment admis que la vessie natatoire des thons se développait tardivement, interdisant l accés aux eaux profondes aux jeunes animaux. Or, des différences de développement de la vessie natatoire ont récemment été mises en évidence chez de jeunes patudos selon qu ils évoluaient en bancs monospécifiques ou en bancs mixtes avec des listaos de la même taille (Pereira, 1995 in Bard, 1997). En développant plus tôt leur vessie natatoire, les animaux évoluant en bancs monospécifiques seraient plus rapidement adaptés aux plongées profondes que les animaux nageant en bancs multispécifiques avec des listaos qui chassent prés de la surface. De telles observations n ont pas été faites sur l albacore. Il se pourrait néanmoins que les caractéristiques physiologiques des albacores présentent une variabilité analogue, entraînant une hétérogénéité dans leur aptitude aux plongées profondes. -336-
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