Kosovo quel statut?
Allons-nous voir en 2006 la naissance d un nouvel État en Europe? Aujourd hui sous tutelle internationale, le Kosovo, région de l ex-yougoslavie, pourrait bel et bien accéder à l indépendance. Mais forme-t-il une nation ou n est-il qu une province de Serbie? Le Kosovo est aujourd hui surtout un casse-tête pour la communauté internationale. (d'après "le Dessous des Cartes" mai 2006)
Emplacement Le Kosovo est un petit territoire enclavé au cœur des Balkans, sous tutelle internationale depuis 1999.
Une province autonome yougoslave Le Kosovo était une province de l'ex-yougoslavie (soit la réunion des républiques de Slovénie, de Croatie, de Bosnie-Herzégovine, de Macédoine, de Serbie et du Monténégro). Le Kosovo fait parti des deux provinces autonomes, créées en 1974 au sein de la république de Serbie, en raison de certains particularismes culturels et ethniques.
Une province autonome yougoslave Ainsi, au nord de la Serbie, on distingue la Voïvodine et sa minorité hongroise ; et au sud, le Kosovo sa minorité albanaise.
les Populations du Kosovo Deux millions d'habitants vivent au Kosovo, ils sont majoritairement albanais (à 88 %), mais on distingue aussi plusieurs minorités telles que des Serbes (8 %), des Roms, des Turcs, des Ashkalis, et des Bosniaques.
l'arrivée des Serbes Les Serbes sont des slaves, implantés dès le VIII e siècle au Kosovo.
la Présence chrétienne Au XIV e siècle, pendant le règne de Douchan, de nombreux monastères orthodoxes attestent de la présence de populations serbes orthodoxes au Kosovo. D ailleurs, la bataille du "champ des merles" en juin 1389, dite Kosovo Polje en serbe, demeure un symbole de la résistance des Serbes contre les Ottomans.
Origines lointaines Les Albanais ne sont pas des Slaves, ils écrivent avec l'alphabet latin, et seraient descendants des Illyriens présents dans la région au deuxième millénaire avant notre ère.
l'islam au Kosovo Les Kosovars sont des musulmans sunnites convertis à l'islam pendant la période ottomane.
les Minerais Le Kosovo a une superficie de 11 000 km², riche en zinc, en lignite, en argent, et en plomb.
les Inégalités Malgré les nombreuses ressources, celles-ci ne profitent pas aux Kosovars dans leur ensemble. Ils demeurent la population la plus pauvre d Europe avec un revenu moyen par habitant de 893 euro en 2005 (contre 5624 euro pour les Croates ou 27 733 euro pour les Allemands).
les Mesures discriminatoires La paupérisation du Kosovo remonte à l'époque yougoslave, et au manque d investissements de Belgrade dans la province autonome. Par ailleurs, en 1989, le gouvernement de Milosevic supprime le parlement et le gouvernement autonome kosovar, licencie un quart des fonctionnaires albanais, tout en imposant la fermeture de journaux et de radios en albanais.
la "Serbisation" du Kosovo Afin de reprendre le contrôle du Kosovo, le pouvoir central décide de s attaquer à la base ethnique. Il s agit donc pour Belgrade de rendre les 200 000 Serbes du Kosovo majoritaires en chassant les 1,8 million d'albanais.
la Guerre au Kosovo L'armée serbe intervient au Kosovo en 1998 pour vider la province de sa population albanaise, en la poussant vers la Macédoine ou l'albanie par centaines de milliers. Les forces de l'otan ripostent en bombardant les positions serbes et les centres de commandement à Belgrade pour mettre fin à l'épuration ethnique.
Protectorat international Depuis la résolution 1244 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, le Kosovo est placé en 1999 sous protectorat international, avec à Pristina, un Haut représentant pour diriger la MINUK, qui assure un gouvernement de transition.
les Forces internationales L'OTAN déploie les troupes de la KFOR et procède à un découpage militaire en cinq secteurs attribués à la France, aux États-Unis, au Royaume-Uni, à l Allemagne et à l Italie. Ainsi, depuis 1999, le Kosovo relève de jure de la souveraineté de la République de Serbie. Or de facto, celle-ci ne peut plus l'exercer.
Une séparation des peuples Malgré la fin de la guerre, les forces internationales sont toujours présentes, ne réussissant pas à rétablir un Kosovo multiethnique.
Une séparation des peuples Désormais, ce sont les 120 000 Serbes restants qui subissent les discriminations. Ceux de Leposavic, de Zubin Potok, ou de Mitrovica, profitent au moins de la proximité de la Serbie, mais ceux de Gorazdevac, ou de Velika Hoca, ne peuvent envisager de sortir de leur enclave sans une protection militaire.
Séparation monétaire Dans les lieux de population serbe, la monnaie en cours est le dinar serbe, alors que dans le reste du Kosovo, l'euro est devenu la monnaie d échange.
Quel avenir? Les Serbes du Kosovo souhaitent le retour du territoire sous une administration serbe, alors que les Albanais n envisagent que l'indépendance. Or le Kosovo doit également faire face à d autres difficultés, telles que le chômage, qui touche déjà plus de la moitié des moins de trente ans alors que cet tranche d âge représente 63 % de la population.
Aujourd hui quelles sont les options institutionnelles? La communauté albanaise réclame l'indépendance, mais ce n'est pas une option acceptable pour la Serbie, car aucun dirigeant de Belgrade ne voudra(it) être le "bradeur" d'un territoire national serbe. Mais en même temps, les Serbes du Kosovo ne peuvent plus compter sur la mère patrie, qui n'a plus ni les moyens politiques de gérer le Kosovo, ni ceux de s'opposer à l'indépendance qui se dessine. Alors des "standards", ont été fixés pour le Kosovo : il faut une bonne gouvernance, la lutte contre le crime organisé, le retour des réfugiés et des déplacés, le respect des droits de toutes les communautés.
Mais pour le moment, la société du Kosovo manque de règle et justement d'état, les polices et les armées occidentales ne sont pas capables de lutter efficacement contre le crime organisé et les vendettas familiales, qui restent une tradition. Alors, tout le monde s'emploie à croire que "le train de l indépendance est en route, même si l'on ne sait pas si les Serbes vont monter dedans". On parle d'indépendance "conditionnelle". Belgrade propose "moins que l'indépendance mais plus que l'autonomie".
Alors quelle sera la viabilité d'un tel État? Est-ce qu il aura(it) une voix à l'onu? Est-ce qu il faudra maintenir une présence internationale pour assurer la sécurité, alors que la prolongation de la tutelle n'est déjà plus souhaitable sur place? Ce qui est sûr aujourd hui, c'est qu'il n'y aura pas de retour à la situation d'avant 1999. L'indépendance du Kosovo pourrait s'échanger avec Belgrade contre la garantie que la Serbie entrera dans l'union européenne, et que le Monténégro ne fera pas sécession. Donc tout est lié. Il faudrait en fait montrer aux Albanais qu'ils ont gagné, et aux Serbes qu'ils n'ont pas perdu.