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CONSEIL D ORIENTATION DES RETRAITES Séance plénière du 29 mars 2017 à 9 h 30 «Architecture du système de retraite et liens financiers entre régimes» Document N 3 Document de travail, n engage pas le Conseil Les concours budgétaires et fiscaux au système de retraite Secrétariat général du Conseil d orientation des retraites

Les concours budgétaires et fiscaux au système de retraite En 2016, environ 14 % des recettes du système de retraite est d origine budgétaire ou fiscale ; la majorité (près de 12 %) est constituée d impôts et taxes affectées (ITAF) et le restant (un peu plus de 2 %) provient de subventions, contributions et prises en charge par l État. Cette part peut être particulièrement élevée pour certains régimes financés essentiellement par affectation fiscale ou bénéficiant de subventions d équilibre notamment en raison de leur situation démographique défavorable. Les deux premières parties de cette note sont successivement consacrées aux ressources fiscales et budgétaires du système de retraite en 2016. Dans une perspective plus historique, la troisième partie décrit les évolutions de ces ressources et met en exergue la fiscalisation accrue du financement des retraites depuis 2006. 1. Les impôts et taxes affectées (ITAF) en 2016 En 2016, les ITAF représentaient 12 % des recettes du système de retraite y compris Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Ces ressources peuvent être réparties en trois catégories : les ITAF qui assurent une part importante du financement de certains régimes ; les ITAF concourant au financement de dispositifs de solidarité via le FSV ; les ITAF compensant aux régimes de salariés les allègements de cotisations. 1.1. Les ITAF assurant une part importante du financement de certains régimes En situation démographique défavorable, les régimes des exploitants agricoles base et complémentaire bénéficient de taxes sur le tabac et sur les alcools et boissons non alcoolisées. Ces ressources représentent plus du tiers des recettes de ces régimes. Plus marginalement, 6 % des ressources du régime de base des salariés agricoles proviennent de droits sur le tabac 1. C est donc une fiscalité comportementale, ayant notamment pour objectif d orienter les modes de consommation, qui est dédiée en partie au financement des régimes de retraite agricole. Jusqu en 2014, le RSI bénéficiait d une fraction de contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S et C3S additionnelle). Près de 20 % des ressources de ce régime était assuré par cette recette fiscale calculée sur le chiffre d affaires des entreprises. À partir de 2015, l intégration financière du RSI à la CNAV a conduit à affecter à cette dernière une part de C3S (41,7 %). Dès 2017, l intégralité du rendement de cette taxe qui a diminué dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité est versé à la CNAV, soit 3,7 Md. Un autre régime d indépendants, la CNBF (caisse nationale du barreau français), est abondé par des ressources fiscales via les droits de plaidoirie (environ 27 % des recettes). 1 Ces ressources peuvent être considérées comme une compensation des allègements pour les régimes de salariés agricoles, au même titre que la CNAV (voir 1.3). 1

Enfin, parmi les régimes spéciaux, la CNIEG (caisse nationale des industries électriques et gazières) bénéficie de la contribution tarifaire d acheminement (CTA) qui, avec près de 1,1 Md, assure environ 13 % de son financement. 1.2. Les ITAF finançant le FSV Le financement du FSV a beaucoup évolué depuis sa création en 1993 (voir le document n 15). En 2016, le FSV est quasiment intégralement financé par des recettes sur les revenus du capital : CSG, prélèvement social et prélèvement de solidarité. Ces ressources ne reposant pas sur le facteur travail contribuent donc au financement de dispositifs de solidarité pris en charge par le fonds. En 2016, une part résiduelle de taxe sur les salaires (voir infra) est versée. À compter de 2017, cette part est nulle. 1.3. Les ITAF compensant les pertes de recettes à la CNAV Le total des impôts et taxes affectés à la CNAV en 2016 s élève à un peu moins de 15 Md. Hors C3S (voir 1.1), les ITAF s élèvent à 13,5 Md répartis comme suit. L intégralité du rendement du forfait social, soit 5 Md environ. Cette contribution correspondant à un élargissement d assiette. Elle s inscrit dans la lutte contre les niches fiscales et sociales et vise notamment à compenser les exemptions d assiette (voir 3.b). Elle permet de faire contribuer au financement de la protection sociale des revenus d activité (intéressement, participation, etc.) jusqu alors non soumis aux prélèvements sociaux. Son assiette et son taux ont fortement augmenté depuis sa création en 2009. La répartition de cette taxe entre ses affectataires a été modifiée depuis 2009. Elle est désormais affectée à la CNAV au détriment de la CNAM puis du FSV, dont le financement a beaucoup évolué en 2016. Une part importante (61,1 %) de taxe sur les salaires, pour un montant de 8,4 Md. Cette taxe est due par les entreprises non soumises à TVA. Dédiée à la compensation des allègements de cotisations sociales, sa répartition entre risques sociaux a beaucoup évolué. Son affectation à la CNAV a généralement avoisiné les 60 %. En 2017, cette part diminue à 38,48 % (le reste étant partagé entre la CNAM et la CNAF). Le FSV en bénéficiait également jusqu en 2016. Les contributions sur les avantages de préretraite d entreprises et sur les indemnités de mise à la retraite (200 M ). Ce total d ITAF est à mettre au regard des pertes de recettes pour la CNAV induites par les allègements de cotisations et les exemptions d assiette (voir 3). 2

2. Les transferts budgétaires de l État en 2016 En 2016, les transferts de l État représentent un peu plus de 2 % des recettes du système de retraite. Ils sont répartis en deux catégories : les subventions d équilibre aux régimes spéciaux et les prises en charge de cotisation. La contribution d équilibre de l État employeur au régime de la Fonction publique de l État (FPE) est considérée comme une cotisation. 2.1. Les subventions d équilibre aux régimes spéciaux La grande majorité des transferts de l État au système de retraite est composée de subventions d équilibre à certains régimes spéciaux, qui s élèvent au total à plus de 7 Md en 2016. Ces subventions constituent presque toutes les recettes des régimes fermés (ex-seita, Caisse de retraite des régies ferroviaires d outre-mer), 80 % des ressources du régime des mines, dont le ratio cotisants/retraités est très défavorable. Pour la CPRPSNCF et à la CRPRATP, plus de la moitié des dépenses est assuré par la subvention de l État. Le tableau ci-dessous en dresse la liste. Régime Montant en LFI 2016 (M ) Part dans les recettes du régime en 2016 CPRPSNCF 3 216 60 % FSPOEIE 1 336 74 % Retraite des mines 1 294 82 % ENIM 825 78 % CRPRATP 653 57 % Régimes de retraite de la SEITA 161 96 % Opéra de Paris 14 38 % Comédie française 3 66 % Régies ferroviaires d outre-mer 3 100 % Source : PLFSS 2017, annexe 6. 2.2. Les prises en charge de cotisations Outre les allègements généraux évoqués précédemment (compensés par des ITAF), d autres exonérations de cotisations, dites ciblées, ont été instaurées afin de favoriser l emploi et induisent des pertes de recettes pour les régimes de retraite de salariés. Ces pertes de recettes font parfois l objet de contreparties financières, au titre de la prise en charge de cotisations. a) La CNAV S agissant de la CNAV, ces exonérations sont essentiellement dirigées en faveur : de populations spécifiques (environ 0,5 Md ) : apprentissage pour l essentiel, mais aussi contrats de professionnalisation et de formation agricole ; 3

de certaines zones géographiques (environ 0,5 Md ) : entreprises et travailleurs implantés en outre-mer pour l essentiel, mais aussi bassins d emplois à redynamiser, zones de revitalisation rurale, zones franches urbaines, etc. ; de certaines entreprises ou secteurs économiques (environ 0,4 Md ) : déduction forfaitaire dans le cadre de services à la personne, travailleurs occasionnels demandeurs d emploi, jeunes entreprises innovantes, jeunes entreprises universitaires, etc. S y ajoutent les exonérations sur les heures supplémentaires et complémentaires, qui ont fortement diminué après 2012 (voir 3 b) et s élèvent en 2016 à 160 M. Au total, la CNAV a reçu en 2016 1,5 Md de compensation par l État au titre de ces mesures ciblées. D autres mesures ciblées, induisant près de 1,5 Md de pertes de recettes, ne font en revanche pas l objet de compensation. Il est à noter qu en 2017, les exonérations pour aide à domicile pour public fragile (700 M ) et aide à création ou reprise d entreprises pour les chômeurs (150 M ), jusqu ici non compensées à la CNAV, sont désormais prises en charge par l État. Le total de compensation augmenterait pour s élever à près de 2,4 Md en 2017. b) La MSA salariés Des compensations sont également versées au régime des salariés agricoles pour un montant de 230 M en 2016, dont 180 M relatifs aux exonérations au titre des travailleurs occasionnels du secteur agricole. Si en 2016 la part de la fiscalité dans le financement des retraites s avère prépondérante, cela n a pas toujours été le cas notamment lorsque la voie budgétaire avait été retenue pour compenser les allègements de cotisations. 3. Fiscalité ou budget : les évolutions de la compensation des pertes de recettes 3.1. Le principe de compensation Compte tenu du coût des dispositifs d exonération de cotisations sociales, les pouvoirs publics ont garanti leur compensation à la sécurité sociale. La loi du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale dite loi Veil prévoit ainsi que toute mesure d exonération mise en place à partir de 1994 doit être compensée par l État. Elle a été élargie aux réductions d assiette et contributions de sécurité sociale par la loi du 13 août 2004. Enfin, elle a été renforcée par la loi organique de 2005. La compensation peut prendre deux formes : des crédits budgétaires ou l affectation de recettes fiscales. 4

3.2. L évolution des exonérations de cotisations sociales (hors allègements généraux) a) Les exonérations ciblées Instaurées en 1979 pour les apprentis et les chômeurs créateurs ou repreneurs d entreprises, les exonérations ciblées ont vu leur champ s élargir au cours des années 1980 : contrats de qualification, exonération en faveur des jeunes exploitants agricoles, contrats aidés, recherche, aménagement du territoire, sport professionnel, etc. Ces exonérations sont compensées par voie budgétaire. b) Les exonérations sur les heures supplémentaires Elles ont été mises en œuvre dans le cadre de la loi Travail, Emploi, Pouvoir d Achat (dite TEPA) de 2007 à 2012, et compensées par voie fiscale pour un peu plus de 2 Md par an : TVA brute collectée par les producteurs de boissons alcoolisées, droits de consommation sur les tabacs et contribution sociale sur l impôt sur les sociétés. Après 2012, le dispositif est pour l essentiel supprimé et le bénéfice de la déduction forfaitaire patronale restreint aux entreprises de moins de 20 salariés. En 2013 et 2014, la compensation beaucoup plus faible a pris la forme d une affectation de TVA nette avant d être prise en charge par l État à compter de 2015. c) Les exemptions d assiette Ces exemptions renvoient à des dispositifs d exclusion de certaines rémunérations de l assiette soumise aux prélèvements. Elles induisent également des pertes de recettes pour la sphère sociale. D un point de vue contributif, contrairement aux mesures d exonérations qui sont neutres sur les droits des assurés les assiettes exemptées sont aussi exclues du calcul des droits sociaux. Elles sont de quatre catégories : les dispositifs de participation financière (intéressement, participation, plan d épargne entreprise) ou d actionnariat salarié (stock-options, actions gratuites) ; les accessoires de salaire (chèques restaurants, chèques vacances, service à domicile) ; la prévoyance complémentaire et la retraite supplémentaire ; les indemnités lors de la rupture du contrat de travail. Les exemptions d assiette ne donnent généralement pas lieu à compensation par le budget de l État. L obligation de compensation ne porte en effet que pour les mesures instaurées après 2004, ce qui n est pas le cas de la plupart de ces dispositifs, assez anciens. L intéressement et la participation ont ainsi été créés par ordonnances en 1959 et 1967, puis l épargne salariale en 1967 et l actionnariat salarié en 1970. Ils ont été complétés au début des années 2000 : PERCO dans le cadre de la réforme de 2003, actions gratuites en 2005, CESU préfinancé en 2005, etc. À compter de 2008, afin de solliciter ces assiettes, d autres contributions ont été instaurées : contributions sur les stock-options et actions gratuites (affectées à la branche famille ou maladie) et surtout le forfait social (voir 1.3), affecté en 2016 à la CNAV. 5

3.3. Les allègements généraux de cotisations sociales a) Les évolutions du dispositif Les allègements généraux de cotisations sociales ont initialement été institués par une loi du 27 juillet 1993, prévoyant une diminution des cotisations patronales d allocations familiales afin de favoriser l emploi des personnes peu qualifiées. Le dispositif a par la suite beaucoup évolué, le législateur instaurant une réduction dégressive de cotisations (maladie, vieillesse, accidents du travail-maladies professionnelles et famille). Les deux types de mesures ont ensuite été fusionnés sous forme de «ristourne Juppé» en 1996. En 1998 puis en 2000, cet allègement a été complété par des exonérations applicables aux entreprises réduisant la durée du travail. À compter de 2000, ces mesures continuent de s appliquer aux entreprises n ayant pas conclu d accord de mise en place des 35 heures. Les autres entreprises font l objet d un accompagnement via une aide structurelle cumulable avec l allègement bas salaires portant la réduction totale de cotisations à 26 points au niveau du SMIC puis dégressive jusqu à 1,8 SMIC. La forme actuelle des allègements généraux trouve son inspiration dans la loi du 12 juin 2003 qui fusionne la «ristourne Juppé» avec les allégements «Aubry 2». Il s est agi dans un premier temps d une réduction unique de 26 points de cotisations pour les salaires au niveau du SMIC, qui décroît au-delà de ce niveau pour s annuler à 1,7 SMIC. Le dispositif a ensuite été modifié : limite ramenée à 1,6 SMIC en 2005, taux de réduction augmenté à 28,1 points pour les entreprises de moins de 20 salariés (PLF 2007) et annualisation en 2011. Après 2012, le dispositif «zéro charges au SMIC» est élargi à d autres cotisations dans le cadre du pacte de responsabilité : FNAL, CSA et AT-MP pour la partie mutualisée et sous certaines conditions. Le pacte instaure également des réductions de cotisations familles. En 2016, les allègements généraux de cotisations sociales concernent un peu moins de 11 millions de salariés, dont le salaire est compris entre 1 et 1,6 SMIC, et 1,8 million d employeurs. Ils.représentent environ 21 Md de moindres recettes pour les différents régimes de sécurité sociale tous risques confondus, dont 8,2 Md pour la CNAV. b) La compensation Le mode de compensation des allègements généraux de cotisations sociales a connu plusieurs étapes : Avant 2000, ces allègements ont été compensés par le budget de l État. De 2000 à 2003, le coût des allègements a été pris en charge par le fonds de financement de la réforme des exonérations de charges sociales (FOREC). Ce fonds était financé par l intégralité du produit de la contribution sociale sur les bénéfices des sociétés, de la taxe générale sur les activité polluantes, des droits sur les alcools et de la taxe sur les véhicules de société et par l essentiel des droits de consommation sur le tabac et une fraction de la taxe spéciale sur les conventions d assurance. En 2004 et 2005, le budget de l État a repris à sa charge le financement de ces allègements. 6

De 2006 à 2010, la compensation a été assurée par un panier de recettes («premier panier Fillon»). Tous risques confondus, ce panier était constitué essentiellement de taxes sur la consommation : taxes sur les alcools et boissons non alcoolisées, sur le tabac, TVA brute ; mais aussi contributions sur les véhicules terrestres à moteur et taxe sur les salaires. Depuis 2011, les recettes compensant ce panier sont définitivement affectées à la sécurité sociale, leur dynamique pouvant être différente de celle des exonérations : taxe sur les salaires, prélèvements sociaux sur les revenus du capital (jusqu en 2015), C3S, forfait social, et contributions sur avantages de préretraite d entreprises et sur les indemnités de mise à la retraite. 3.4. Les conséquences sur les recettes de la CNAV : une fiscalisation croissante Compte tenu de leur coût, c est le mode de compensation des allègements généraux de cotisations sociales qui détermine pour l essentiel la structure de financement de la CNAV (voir le graphique suivant). Jusqu en 2005, une part croissante des ressources de la CNAV provenait du budget de l État (pour atteindre 8 % en 2004 et 2005), alors que les ITAF contribuaient de manière résiduelle au financement de la CNAV (moins de 1 %). À partir de 2006, le financement de la CNAV est profondément modifié : la part des ITAF a augmenté fortement en 2006 puis a continué à croître, résultant du choix de compensation par taxes affectées et non plus par voie budgétaire. La fiscalisation de la CNAV a été d abord accentuée en 2007 sous l effet de la compensation des exonérations pour les heures supplémentaires. La part des ressources fiscales a représenté environ 10 % jusqu en 2014. La suppression du dispositif TEPA en 2012 et des ressources fiscales correspondantes a été compensée par la hausse des prélèvements sur les revenus du capital et du forfait social. À partir de 2015, cette tendance se poursuit avec l affectation d une nouvelle ressource (C3S) pour compenser l obligation faite au régime général d équilibrer financièrement le RSI. En 2015 et 2016, la part des ressources de la CNAV issue de la fiscalité s élève à 12 %, à laquelle s ajoutent des recettes en provenance du budget de l État (visant à compenser les exonérations sur les heures supplémentaires et mesures ciblées) représentant 1 % des ressources de la CNAV. 7

Part des impôts et taxes affectées et prises en charge par l État (y compris FOREC) dans les ressources de la CNAV de 1994 à 2016 Source : rapports de la CCSS 8