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Transcription:

[TRADUCTION] Citation : W. F. c. Commission de l assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 537 Appel No. AD-13-697 ENTRE : W. F. Appelante et Commission de l assurance-emploi du Canada Intimée DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Division d appel Appel MEMBRE DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE : Pierre LAFONTAINE DATE DE LA DÉCISION : Le 30 avril 2015 MODE ET DATE DE L AUDIENCE: Audience en personne tenue le 27 avril 2015 à Cornwall (Ontario) à 10 h (heure de l Est)

DÉCISION [1] L appel est accueilli et le dossier est renvoyé à la division générale (section de l assurance-emploi) pour la tenue d une nouvelle audience. INTRODUCTION [2] Le 7 mars 2013, un conseil arbitral a déterminé que : - l appelante avait perdu son emploi en raison de sa propre inconduite aux termes des articles 29 et 30 de la Loi sur l assurance-emploi (la «Loi»). [3] L appelante a déposé une demande de permission d en appeler devant la division d appel le 10 mai 2013. La permission d en appeler lui a été accordée par le Tribunal le 9 janvier 2015. MODE D AUDIENCE [4] Le Tribunal a tenu une audience en personne pour les raisons suivantes : - la complexité de la ou des questions faisant l objet de l appel; - les renseignements au dossier, y compris le besoin de renseignements supplémentaires; - le fait que l appelante est représentée. [5] L appelante et son représentant, Me Roberto Ghignone, étaient présents à l audience. L intimée a choisi de ne pas être présente, mais a déposé des observations écrites. L employeur n était pas présent, bien qu il ait été dûment avisé de l audience. DROIT APPLICABLE [6] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l Emploi et du Développement social (la «Loi») prescrit que les seuls moyens d appel sont les suivants :

a) le conseil arbitral n a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d exercer sa compétence; b) il a rendu une décision entachée d une erreur de droit, que l erreur ressorte ou non à la lecture du dossier; c) il a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. QUESTION EN LITIGE [7] Le Tribunal doit déterminer si le conseil arbitral a commis une erreur de fait ou de droit lorsqu il a conclu que l appelante avait perdu son emploi en raison de sa propre inconduite en vertu des articles 29 et 30 de la Loi. OBSERVATIONS [8] L appelante fait valoir les arguments suivants à l appui de son appel : - Le conseil arbitral a commis une erreur de droit en se fondant sur des communications privilégiées pour conclure que l appelante avait commis une inconduite. - Le conseil arbitral a omis de tenir compte du fait que la divulgation avait été faite dans le contexte d une relation avocat-client, un droit fondamental que la Constitution garantit à toute personne. - Le conseil arbitral a fondé sa décision sur une conclusion de fait et de droit erronée lorsqu il a conclu que l avocat de l appelante était un tiers et que la transmission de renseignements à l avocat avait constitué un manquement à la politique de confidentialité. - Les communications que l appelante a eues avec son avocat visaient à obtenir un avis juridique professionnel concernant sa situation d emploi et se voulaient confidentielles.

- Le conseil arbitral a mal appliqué le critère relatif à l inconduite en application des articles 29 et 30 de la Loi. - La divulgation a été faite dans le but d obtenir un avis juridique; il était déraisonnable de la part du conseil arbitral de conclure que l appelante aurait dû se rendre compte que la divulgation du diagramme entraînerait son congédiement. L appelante a cru à bon droit que tout ce qu elle disait à son avocat resterait strictement confidentiel et ne pourrait être utilisé contre elle. - Le conseil arbitral n a pas suffisamment motivé ses conclusions et a omis de fournir un raisonnement et une analyse liant la preuve à ses conclusions. La décision renferme simplement une citation du droit applicable et des faits et conclut que l appelante était exclue du bénéfice des prestations d assurance-emploi. [9] L intimée invoque les arguments suivants à l encontre de l appel : - Rien n indique, dans la preuve, que le conseil arbitral ait fait montre de partialité ou de parti pris dans son traitement de l appelante ou dans ses délibérations concernant l appel de cette dernière. - En entendant les observations orales de l appelante et en prenant connaissance des observations écrites de cette dernière, en évaluant les éléments de preuve, en tirant une conclusion de fait et en rendant une décision reposant sur ces conclusions et sur le droit applicable, le conseil arbitral a agi dans les limites et dans l exercice de ses compétences dans cette affaire. - Le conseil arbitral a appliqué la législation et la jurisprudence, si bien qu aucune erreur n a été commise ni dans l interprétation ni dans l application du droit. - Le conseil arbitral semble avoir évalué la preuve qui lui a été présentée et sa décision n apparaît ni abusive ni arbitraire.

NORME DE CONTRÔLE [10] Les parties font valoir que la norme de contrôle d une décision rendue par un conseil arbitral et un juge-arbitre sur une question de droit est celle de la décision correcte et que la norme de contrôle applicable à une question mixte de fait et de droit est celle de la raisonnabilité Martens c. Canada (PG), 2008 CAF 240; Canada (PG) c. Hallée, 2008 CAF 159. [11] Le Tribunal reconnaît que la Cour d appel fédérale a déterminé que la norme de contrôle applicable à la décision d un conseil arbitral ou d un juge-arbitre concernant les questions de droit est la norme de la décision correcte Martens c. Canada (PG), 2008 CAF 240 et que la norme de contrôle applicable à une question mixte de fait et de droit est la raisonnabilité Martens c. Canada (PG), 2008 CAF 240, Canada (PG) c. Hallée, 2008 CAF 159. ANALYSE [12] Il s agit d un appel que l appelante a interjeté à l encontre de la décision du conseil arbitral qui a maintenu la décision de l intimée de refuser à l appelante le bénéfice des prestations d assurance-emploi au motif que cette dernière a été congédiée en raison de son inconduite, aux termes des articles 29 et 30 de la Loi. [13] L appelante était employée par l employeur depuis 11 ans et, au moment de son congédiement, elle occupait le poste de spécialiste de la paye et des avantages sociaux. L appelante a signé une entente de confidentialité avec l employeur au moment de son embauche (pièces AD-24 et 25). Par la suite, l appelante a soulevé auprès de son employeur des préoccupations au sujet de sa charge de travail, y compris le fait qu elle effectuait des tâches qui n étaient pas incluses dans sa description de travail. Ainsi, l appelante s estimait sous-rémunérée. [14] Après l annulation d une séance prévue de médiation avec l employeur, l appelante a fourni des renseignements liés à son emploi à son avocat dans le but d obtenir un avis juridique au sujet de ses droits en tant qu employée dans le contexte de sa plainte pour harcèlement et compte tenu de son niveau de rémunération.

[15] La question en litige réside dans un diagramme comparant la progression de son salaire à celle de huit autres employés que l appelante a envoyé à son avocat. Ce diagramme n a jamais été divulgué à quiconque, hormis l avocat de l appelante. [16] L employeur a considéré que l appelante avait enfreint l entente de confidentialité en fournissant ce diagramme à son avocat, un tiers allégué. Le 21 novembre 2012, l appelante a été congédiée pour ce motif sans indemnité de départ ni salaire tenant lieu de préavis. [17] Dans le témoignage qu elle a livré devant le conseil arbitral, l appelante a déclaré ce qui suit : [Traduction] «La demanderesse déclare avoir travaillé pendant 11 ans pour l employeur et avoir accompli un travail remarquable concernant la paye, les avantages sociaux et les pensions. La demanderesse estimait qu elle était débordée de travail et insuffisamment rémunérée. Elle a déclaré avoir créé le diagramme/tableau en 2005 et l avoir montré à son directeur exécutif et supérieur immédiat. On ne lui a alors pas dit que ces renseignements étaient confidentiels. Lorsqu elle a envoyé le tableau/diagramme à son avocat, elle n a pas eu le sentiment qu elle contrevenait à l entente de confidentialité qu elle avait, a-t-elle dit, signée 11 ans auparavant. La demanderesse était absente, en congé lié au stress, et, pendant son absence, personne ne l a remplacée, si bien que lorsqu elle est retournée au travail, sa charge était très lourde. Elle avait 185 courriels à examiner et traiter. Les accusations de harcèlement n ont pas été bien reçues par le directeur exécutif et, quand le temps est venu de la médiation, la demanderesse a demandé à ce que son avocat soit présent, et la médiation a été annulée. La demanderesse a donc eu le sentiment que sa seule ressource était son avocat, de sorte qu elle envoyait tout renseignement à son avocat pour étayer ses dires. [ ] La demanderesse a déclaré qu elle avait un dossier d employée exemplaire et qu elle avait l intention de travailler là jusqu à sa retraite. Elle a convenu du fait qu elle avait bel et bien signé une entente de confidentialité et qu elle occupait un emploi dans lequel des renseignements délicats et confidentiels étaient traités. La demanderesse estimait que son avocat faisait partie de son processus de réflexion et qu en sollicitant l assistance de ce dernier elle n enfreignait ni ne contrevenait à l entente de confidentialité.» [18] Dans une entrevue obtenue par l intimée le 7 janvier 2013 (pièce AD-2-27), l appelante a dit ce qui suit :

[Traduction] «La demanderesse a confirmé qu elle avait bel et bien signé des ententes de confidentialité, mais que son avocat lui a dit que les avocats ne sont pas considérés comme des tiers car ils constituent une partie assimilée à leurs clients. La demanderesse a indiqué que, puisque sa ressource est aussi un avocat et que l avocat est confidentiel, elle n a en fait livré aucun renseignement confidentiel. La demanderesse a ensuite demandé à certains des autres employés mentionnés dans le diagramme s il était correct d envoyer des renseignements les concernant, ce à quoi ces derniers ont acquiescé.» (C est le soussigné qui souligne.) [19] Lorsqu il a rejeté l appel, le conseil arbitral a présenté les brèves conclusions suivantes : [Traduction] «Nous tenons pour avéré que l employeur et la Commission énoncent l inconduite comme motif du congédiement du fait que la demanderesse n a pas respecté la politique de confidentialité de l employeur ni l entente de confidentialité qu elle a signée en communiquant des renseignements confidentiels à un tiers. Le tiers en question, son avocat, n était pas un employé du centre, de sorte qu il n était pas en droit de recevoir de l information confidentielle. [ ] Dans le cas en instance, nous en arrivons à la conclusion de fait que la demanderesse a commis une erreur en communiquant des renseignements confidentiels concernant d autres employés, renseignements auxquelles elle avait accès en raison du poste empreint de respect qu elle occupait. Nous tenons pour avéré que la demanderesse a délibérément fait abstraction de l effet que ses actes auraient sur son poste. La demanderesse aurait dû se rendre compte du fait qu en écartant ou en ne respectant pas la politique de confidentialité de l employeur et l entente de confidentialité, elle s exposerait à un congédiement.» (C est le soussigné qui souligne.) [20] Le Tribunal estime que le conseil arbitral a fait fi des éléments de preuve produits par l appelante, et ce, sans explication, dans sa conclusion relative à la question de l inconduite. C est une erreur que de présumer que la version des événements fournie par l intimée est correcte ou de privilégier la version des événements présentée par l employeur. Le conseil

arbitral avait le rôle et le devoir d évaluer la preuve qui lui a été produite, puis de tirer une conclusion et, surtout, de la justifier. [21] Il est bien établi que le conseil arbitral doit analyser l intégralité de la preuve et, s il décide d écarter certains éléments de preuve ou de ne pas attribuer de valeur probante à ce que ces éléments semblent révéler ou dégager, il doit clairement expliquer pourquoi Bellefleur c. Canada (PG), 2008 CAF 13. L omission de ce faire constitue une erreur de droit. [22] Qui plus est, le conseil arbitral a manifestement insuffisamment motivé ses conclusions et omis de présenter un raisonnement et une analyse liant la preuve à ces conclusions. [23] À la lumière de ce qui précède, le critère juridique s appliquant à la question de l inconduite n a pas été appliqué ni interprété correctement. Cela constitue une autre erreur de droit. [24] Pour ces motifs, le Tribunal renvoie le dossier à la division générale du Tribunal (section de l assurance-emploi) de manière qu un membre puisse procéder à une nouvelle audience. CONCLUSION [25] L appel est accueilli et le dossier est renvoyé à la division générale (section de l assurance-emploi) pour la tenue d une nouvelle audience. [26] Le Tribunal ordonne que la décision rendue par le conseil arbitral le 7 mars 2013 soit retirée du dossier. Pierre Lafontaine Membre de la division d appel