1. Veau abattu, présentant une diarrhée colique avec une hyperthermie à 40,3 C. Photo : crédit Pathologie du bétail, ENVA (à confirmer auteur au pdf)

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Transcription:

1. Veau abattu, présentant une diarrhée colique avec une hyperthermie à 40,3 C. Photo : crédit Pathologie du bétail, ENVA (à confirmer auteur au pdf) Yves Millemann, Guillaume Belbis Pathologie médicale du bétail et des animaux de basse-cour, ENV d Alfort, 7, avenue du Général-de-Gaulle, 94704 Maisons-Alfort Cedex 0,05 CFC par article lu Viroses gastro-intestinales Actualités sur les viroses digestives du veau La pathologie digestive du veau, qui demeure importante en élevage bovin, est multifactorielle. En plus du traitement et de la vaccination, des mesures de prophylaxie sanitaire sont à préconiser dans tous les cas. 1 Résumé fde nombreux agents pathogènes concourent à l apparition de diarrhées chez le veau, à côté de facteurs prédisposants dans l élevage, essentiels à l expression clinique. Des virus majeurs, coronavirus et rotavirus, sont connus depuis longtemps comme des acteurs importants de la genèse de ces troubles et continuent de participer à ces affections de façon significative. En plus de ces virus, d autres, au premier rang desquels les torovirus, sont considérés comme Les diarrhées néonatales représentent une source majeure des pertes économiques des élevages bovins et la cause première de la mortalité néonatale dans la plupart des pays [Radostits et al. Non référencé? question pour l auteur au pdf, 12]. En effet, les diarrhées survenant dans les premiers jours de vie sont souvent associées à une toxémie ou à une septicémie, assombrissant le pronostic. Les diarrhées néonatales des veaux constituent une affection automno-hivernale d intérieur s aggravant fréquemment au cours de la saison de vêlage (photo 1). Les cas sont généralement plus nombreux de décembre à avril, avec un pic observé en France entre janvier et mars [15]. Les conditions d élevage à cette période favorisent en effet, d une part, la transmission d agents parasitaires ou infectieux, et, d autre part, leur survie dans l environnement des animaux. Les causes de diarrhée sont très variées. Une simple modification alimentaire ou un stress (allotement) peuvent provoquer son apparition. Parallèlement, des virus, des bactéries ou des parasites sont susceptibles d en être responsables. Les principaux agents pathogènes retrouvés sont, en général, au nombre de quatre, d après les données publiées : une bactérie (ETEC ou Escherichia coli entérotoxinogène, avec comme marqueur essentiel les fimbriæ F5, mais aussi, notamment en France, CS31A), un parasite (Cryptosporidium parvum) et deux virus (rotavirus et coronavirus) (tableau 1). Toutefois, selon les régions et les conditions d élevage, d autres micro-organismes susceptibles d intervenir dans les diarrhées des veaux. Il convient de les connaître et de les rechercher le cas échéant. Néanmoins, ces virus émergents peuvent ne jouer qu un rôle marginal, qui n a pas toujours été clairement démontré. peuvent être considérés comme d intérêt : des bactéries comme les salmonelles (surtout Typhimurium), d autres colibacilles ou des clostridies, des parasites comme Giardia, et, enfin, des virus divers. La lutte contre les viroses digestives passe par la connaissance des facteurs de risque des diarrhées néonatales et leur correction, afin d adapter la lutte à la situation de chaque élevage [13]. Les virus intestinaux les plus fréquents chez le veau sont les rotavirus (tableaux 2 et 3 complémentaire sur WK-Vet.fr). Responsables d une maladie plus sévère, les coronavirus sont aussi relativement fréquents. À côté des deux groupes majeurs que sont les coronavirus et les rotavirus, des genres variés ont été retrouvés associés à la pathologie intestinale chez des veaux diarrhéiques et/ou ont vu leur action démontrée expérimentalement [27]. Le cas du pestivirus de la diarrhée virale bovine-maladie des muqueuses (BVD-MD) est particulier (encadré). Différents virus entéropathogènes 1. Coronavirus et rotavirus : des valeurs sûres en pathologie du veau Rotavirus Les rotavirus sont de petits virus à ARN bicaténaire, non enveloppés, très résistants dans le milieu extérieur, notamment en présence de matières organiques, pouvant ainsi probablement être retrouvés d une saison de vêlage à l autre. Sept sérogroupes ont été décrits, de A à G. Les souches isolées chez les veaux diarrhéiques sont essentiellement du groupe A (GARV) et les descriptions d affections bovines avec d autres groupes de rotavirus sont rares. Signalons, toutefois, la description d épisodes aigus, dus à des rotavirus du groupe B, de diarrhée liquide chez des vaches laitières, associés à une chute brutale, importante et durable (1 semaine) de la production laitière [18]. Les génotypes des rotavirus du groupe A sont définis sur la base des gènes codant les protéines VP7 (19 génotypes G) 2 Le Point Vétérinaire / 2011 / Maladies infectieuses des ruminants

Actualités sur les viroses digestives du veau Tableau 1 Principaux agents responsables de diarrhée chez le veau (1) BACTÉRIES VIRUS PARASITES E. coli (colibacilles) : ETEC, EPEC, EHEC Salmonella Clostridium Campylobacter Rotavirus Coronavirus Virus BVD-MD Torovirus (Breda) Calicivirus (norovirus) Autres Cryptosporidies Giardies Coccidies (animaux de plus de 3 semaines) Candida Toxocara Strongyloides BVD-MD : diarrhée virale bovine-maladie des muqueuses. En gras figurent les agents pathogènes les plus souvent rencontrés. (1) Liste non exhaustive. et VP4 (27 génotypes P). Les génotypes plus fréquents chez les bovins sur les différents continents demeurent, d une part, les génotypes G6 et G10, d autre part, les génotypes P5 et P11 [2, 6, 36]. Les rotavirus sont certainement les virus les plus universels en pathologie digestive du veau, retrouvés très fréquemment dans toutes les conditions d élevage, avec des prévalences de contamination très élevées. Seuls, ces virus sont responsables de diarrhées bénignes, avec une morbidité élevée mais une létalité faible. Les affections intercurrentes, la mauvaise qualité du colostrum, des conditions d environnement et d hygiène dégradées et la présence d une omphalophlébite sont des facteurs d aggravation bien connus. Parfois, dans des conditions expérimentales drastiques, un fort taux de létalité est cependant possible. Le rôle de cofacteur des rotavirus est suspecté dans la gastro-entérite paralysante (GEP) aux côtés des colibacilles CS31A. Points forts POINT_FORT_TEXTE. POINT_FORT_TEXTE. POINT_FORT_TEXTE. POINT_FORT_TEXTE_fin. Il convient de noter le caractère zoonotique de ces rotavirus [25]. Au sein du groupe A, les génotypes G6, G8 et G10, d une part, P5, P11, P15 et P21, d autre part, sont d importance épidémiologique en médecine humaine, les gènes contribuant au génome de souches humaines. Les souches des groupes B (responsables de diarrhées chez l adulte) et C (responsables de diarrhées chez l enfant ou l adulte) sont de plus réputées pour avoir un réservoir animal, notamment bovin [25]. Coronavirus Les coronavirus bovins (BCoV) sont des virus d assez grande taille, à ARN monocaténaire et enveloppés, ce qui en fait des agents pathogènes moins résistants que les rotavirus dans le milieu extérieur. Ils résistent toutefois et demeurent infectieux dans l environnement jusqu à 3 jours en présence de matière organique [4]. Les coronavirus animaux sont répartis en trois groupes antigéniques, le BCoV faisant partie du groupe 2. Plusieurs souches ont été décrites chez les bovins, sur la base de leur tropisme et/ou de la pathologie déterminée. Ainsi sont distingués le coronavirus respiratoire (BRCoV), isolé des poumons de cas fatals de pneumonie, le coronavirus entérique ou entéropathogène (BECoV), isolé de diarrhée néonatale ou chez l adulte. Ce dernier a de plus été subdivisé, dans un dessein clinique, en souches isolées de diarrhées néonatales (BCoV-CD pour Calf Diarrhea) et en souches provenant de cas d entérite hémorragique hivernale (BCoV-WD pour Winter Dysentery) [4]. Les auteurs s accordent en général à reconnaître qu il n est pas possible de distinguer, sur le plan antigénique ou génétique, les souches CD responsables d atteintes néonatales et celles WD à l origine de dysenterie hivernale. En revanche, la question reste en suspens en ce qui concerne les souches respiratoires et entériques. Cela dit, toutes les souches appartiennent à un seul et même sérotype, les deux ou trois sous-types décrits, déterminés à partir de propriétés biologiques et antigéniques, comprenant chacun des souches des trois syndromes cliniques [32]. Tableau 2 Évaluation du pouvoir entéropathogène de virus chez le veau Genre viral Production de diarrhée chez Isolement plus fréquent des veaux des veaux chez des veaux gnotobiotiques (1) conventionnels diarrhéiques Association avec la pathologie intestinale Rotavirus ++ ++ +++ +++ Coronavirus ++ ++ + +++ BVDV + +++ + Adénovirus + + + Torovirus (virus Breda) +++ + + Calicivirus (norovirus) + - + Parvovirus (bocavirus) +/- + Astrovirus - - (1) À flore contrôlée (EOPS, exempts d organismes pathogènes spécifiés). + à +++ : démonstration ou découverte fréquente à très fréquente ; - : absence de démonstration ; BVDV : virus de la diarrhée virale bovine. D après [27, 39, Giusti et al 1998 non référencé? (question pour l auteur)]. Le Point Vétérinaire / 2011 / Maladies infectieuses des ruminants 3

ENCADRÉ Place du pestivirus de la diarrhée virale bovine-maladie des muqueuses Ce virus occupe une place à part. Il n est pas un virus digestif majeur, au même titre que le rotavirus et le coronavirus. Cependant, sans être émergent comme d autres virus entériques, il est d une grande importance épidémiologique (1 % d infectés permanents immunotolérants [IPI] en moyenne dans la population bovine générale) et clinique (syndromes graves, dont l impact économique est considérable) (1). Le pestivirus de la maladie des muqueuses (BVDV) est présent dans le tube digestif des IPI comme des infectés transitoires. L importance exacte de son rôle dans les diarrhées néonatales est controversée. La différenciation clinique entre maladie des muqueuses néonatale et diarrhée néonatale due à une infection aiguë par le virus BVD est délicate. (1) Voir l article Virus de la diarrhée virale bovine : de la diversité à la singularité de A. Mauroy et coll., dans ce numéro. (2) Notion discutable concernant ces virus. Après les rotavirus, les coronavirus sont les virus les plus fréquemment rencontrés en pathologie digestive du veau. Cinq à 30 % des veaux sont porteurs permanents asymptomatiques (portage établi après maladie ou en l absence de signes cliniques). Des animaux plus âgés, notamment des adultes, peuvent servir de relais, excréter et pérenniser l infection dans un troupeau. Plus de 90 % de séroprévalence est régulièrement rapportée chez les bovins de tous les continents, suggérant que la très grande majorité d entre eux sont exposés au cours de leur vie [4]. La transmission emprunte en général la voie orofécale, mais la contamination par aérosol est possible, le BECoV étant excrété à la fois au niveau des muqueuses nasales et oculaires et par le tractus gastro-intestinal [4]. Chez le veau, les diarrhées sévères dues aux coronavirus bovins apparaissent entre 5 jours et 3 mois d âge (photos 2 et 3). À côté de la forme digestive néonatale, une forme spécifique de l adulte (EHH) peut être observée, concomitamment ou non, ainsi que des troubles respiratoires. Les lésions observées, plus graves qu avec des rotavirus, concernent à la fois l intestin grêle et le gros intestin. Les coronavirus du groupe antigénique 2 auquel appartient le BCoV peuvent infecter d autres ruminants domestiques ou sauvages, mais aucun potentiel zoonotique n a été mis en évidence [4]. 2. Autres virus : des virus qui émergent dans les diarrhées? La description de quelques cas cliniques avec isolement d agents pathogènes ne suffit pas à attester de l intervention causale de ces derniers, même si leur pouvoir Toutefois, l augmentation de l incidence des diarrhées néonatales dans un cheptel constitue un signe d appel (mineur) de la circulation du BVDV dans ce troupeau et le BVDV doit être suspecté pour tout cas de diarrhée néonatale résistant aux traitements, même mis en œuvre précocement et adaptés sur la base des données épidémiocliniques de l élevage. En effet, un IPI atteint de diarrhée néonatale guérit moins bien, les vaches infectées par le BVDV peuvent avoir un colostrum de moins bonne qualité et les veaux primo-infectés par le BVDV après leur naissance sont également plus sensibles à toutes les infections intercurrentes. En tout état de cause, si l intervention du BVDV est suspectée (à partir d éléments analytiques), il convient d aborder la problématique BVD de manière globale dans l élevage (2). (1) Voir les postulats de Koch dans les articles Étiologie infectieuse du syndrome hémorragique jéjunal de M. Lallemand et Importance des facteurs de risque dans l expression clinique des maladies infectieuses chez les ruminants de C. Saegerman et coll., dans ce numéro. (2) Voir les articles Apport de la biologie moléculaire au diagnostic de laboratoire des maladies infectieuses chez les bovins de Ph. Nicollet et coll. et Place du laboratoire dans le diagnostic des maladies infectieuses des bovins de Ch. Audeval, dans ce numéro. délétère a été établi expérimentalement (1). Il convient de rester prudent quant à l émergence possible de certains de ces virus pour lesquels des descriptions ponctuelles ont été faites, et qui n ont parfois pas été évoqués de nouveau depuis assez longtemps (par exemple, pour les adénovirus, les dernières descriptions significatives de cas cliniques datent du milieu des années 1990). Et ce pour plusieurs raisons : leur intervention demeure spéculative ou leur pouvoir pathogène est peu élevé (astrovirus), ou encore des considérations épidémiologiques variées sont à prendre en compte (infection seulement temporaire d élevages d une région, fréquence très faible, importance limitée en l absence de cofacteurs, etc.). Adénovirus bovins (BAV) Au moins dix sérotypes de ces virus à ADN ont été décrits chez les bovins [35]. L infection par ces virus paraît très répandue, mais peu connue, car elle reste la plupart du temps subclinique. Les BAV sont de plus souvent isolés conjointement avec d autres virus et/ou bactéries. Ils semblent responsables de maladies variées, incluant une pneumonie, une entérite, une pneumo-entérite, une conjonctivite, une kératoconjonctivite, un syndrome du veau faible, une polyarthrite et des avortements. Le sérotype 3 semble plus souvent associé à des infections respiratoires, les sérotypes 6 et 10 à des infections digestives (notamment chez le jeune, mais aussi et surtout chez de jeunes bovins de 5 à 10 mois) [1, 5]. L infection par les sérotypes 1, 4 ou 7 donne plutôt lieu à des pneumo-entérites. Les lésions digestives observées chez les animaux qui présentent une infection à adénovirus sont celles d une entérite nécrotique, fibrineuse ou hémorragique, associées ou non à l atteinte du côlon et des préestomacs. Les lésions microscopiques consistent essentiellement en des inclusions intranucléaires dans l endothélium vasculaire de la lamina propria et de la sous-muqueuse de l intestin grêle [35]. Un diagnostic peut être établi sur la base d examens sérologiques (Elisa notamment) ou à l aide de la PCR (polymerase chain reaction) (2), y compris dans des systèmes multiplexes, non disponibles en routine à ce jour dans les laboratoires [31]. Torovirus (Coronaviridæ) Les espèces bien étudiées dans ce genre incluent quatre torovirus : chez les bovins, le virus de Breda (BoTV), chez les équins, le virus de Berne, ainsi qu un torovirus humain et un torovirus porcin. Un virus proche du virus Breda a été détecté en France (et appelé Lyon-4) [20 + publi française? question pour l auteur au pdf]. 2 4 Le Point Vétérinaire / 2011 / Maladies infectieuses des ruminants

Actualités sur les viroses digestives du veau 2. Diarrhée chez un veau, avec du sang et des lambeaux de muqueuse. 3. Énophtalmie prononcée liée à une déshydratation supérieure à 10 %. Photos : crédit Pathologie du bétail, ENVA (à confirmer auteur au pdf) Le virus Breda, désormais classé dans la famille des Coronaviridæ, comprend deux sérotypes (BoTV-1 et BoTV-2) et a été isolé initialement chez des veaux diarrhéiques atteints d une entérite aiguë, dans les premiers jours de vie. Depuis, il a été retrouvé dans plusieurs pays (États-Unis d abord, puis Canada, Belgique, France, Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud, etc.), chez des veaux de quelques jours (essentiellement de 2 à 5 jours, parfois jusqu à 4 mois d âge) et présentant des diarrhées légères à sévères, selon leur statut colostral [19]. Il a été isolé également de cas de diarrhées chez des vaches adultes, et son intervention au côté du coronavirus bovin a été envisagée. Le virus Breda peut être retrouvé chez les veaux soit seul, soit, plus fréquemment, associé à d autres agents pathogènes (coronavirus bovin et colibacilles surtout) [17]. Enfin, il a été démontré qu il est possiblement responsable de diarrhées en conditions expérimentales [20]. Les principaux animaux sources de BoTV dans l environnement sont les veaux diarrhéiques. Les autres sources sont constituées par des veaux plus âgés, voire des adultes, excrétant de façon intermittente. La contamination semble intervenir essentiellement par voie orale, mais la voie nasale est possible. De nombreux bovins présentent des anticorps dirigés contre les torovirus, avec des séroprévalences contrastées selon les pays : 55 % au Royaume-Uni, près de 95 % en Allemagne ou aux Pays- Bas [17]. Les lésions macroscopiques sont peu spécifiques, avec une déshydratation, une congestion et un amincissement de la paroi de l intestin grêle. Sur le plan microscopique, une atrophie des villosités avec nécrose focale des cellules épithéliales est retrouvée sur le jéjunum, l iléon, voire le gros intestin (côlon notamment). Les lésions s étendent profondément, atteignant les cryptes. Cette atteinte concomitante des villosités et des cryptes semble caractéristique de l infection par le BoTV. Le diagnostic de laboratoire fait intervenir des méthodes Elisa ou RT-PCR, non disponibles en routine [20, 21]. Enfin, soulignons que le BoTV a été isolé d échantillons nasaux de veaux présentant des symptômes respiratoires, et qu il est donc soupçonné d intervenir également comme agent prédisposant, voire comme causal, dans les affections respiratoires du veau [22]. Calicivirus Ces virus ont été isolés initialement chez des veaux atteints de diarrhée. Au sein des Caliciviridæ, sont identifiés, d une part, les norovirus bovins (BNoV), dont deux génotypes ont été décrits, et d autre part, le calicivirus entérique bovin (BECV) [3, 29]. Les différents génotypes de norovirus bovin qui ont été décrits constituent un groupe à 3 part (génogroupe III), ce qui paraît écarter en l état des connaissances le potentiel zoonotique de ces virus [3]. Toutefois, il existe une communauté antigénique partielle avec les norovirus humains [28]. Stables dans l environnement et relativement résistants à l inactivation par des agents physiques (ultraviolets, température) comme chimiques (éthanol, hypochlorite), ces virus sont transmis surtout par voie orofécale, la voie respiratoire semblant pouvoir jouer un rôle [33]. Les lésions observées affectent l intestin grêle uniquement. Sur le plan anatomopathologique, des lésions d atrophie villeuse, d hyperplasie des cryptes, ainsi qu un œdème de la sous-muqueuse sont observés. Le diagnostic peut s appuyer sur l utilisation d examens complémentaires, essentiellement en vue d une RT-PCR. Une RT-PCR en temps réel a été proposée récemment, mais là encore ces méthodes ne sont pas disponibles en routine [29]. Bocavirus (Parvoviridæ) Ce parvovirus a été retrouvé dans le tractus intestinal de veaux diarrhéiques dans les années 1960. De la famille des Parvoviridæ, (parvovirus bovin de type 1, BPV1), il constitue le premier représentant du genre Bocavirus (Bo pour bovin et Ca pour canin), le bocavirus humain récemment décrit étant actuellement très étudié [14]. Les veaux convalescents peuvent présenter des retards de croissance et excréter le virus BPV1. La maladie chez le veau s exprime cependant rarement et ne semble pas régulièrement observée sur le terrain. Pathogénie La diarrhée induite par les agents entéropathogènes peut résulter d une augmentation des sécrétions et/ou d une diminution de l absorption, liées à l action des agents eux-mêmes ou de leurs toxines. Les virus entériques pour lesquels la pathogénie a été étudiée (coronavirus et rotavirus principalement, mais aussi torovirus) provoquent la diarrhée néonatale essentiellement en détruisant les cellules épithéliales absorbantes, on parle alors de diarrhée entéro-invasive [27]. Après une phase d adhésion suivie d une invasion des cellules entérocytaires, les virus provoquent des lésions muqueuses, avec notamment une destruction des villosités (atrophie villeuse), qui débouchent sur une malabsorption : une diminution de l absorption de l eau et des électrolytes ainsi que du lactose est notée. Les lésions muqueuses sont plus ou moins marquées en fonction de l agent concerné, plus ou moins étendues (intestin grêle seul ou avec le gros intestin), avec ou sans atteinte des cryptes (figure). Cela conditionne au moins partiellement la sévérité clinique de chacune de ces infections, au côté des facteurs liés à l hôte (immunité passive notamment). Ainsi, la destruction des villosités est plus intense avec les coronavirus ou les torovirus qu avec les rotavirus. Par contraste, les astrovirus isolés d intestins de veaux (sans diarrhée, même pour des veaux gnotobiotiques infectés expérimentalement) n affectent que les cellules M des plaques de Peyer [39]. Le Point Vétérinaire / 2011 / Maladies infectieuses des ruminants 5

De plus, lors d infection à rotavirus (et à un degré moindre à coronavirus), une hyperplasie compensatoire des cellules des cryptes se met en place : en plus de la diminution de l absorption, une augmentation des sécrétions survient donc puisque les cellules des cryptes ont également des fonctions sécrétoires. Lors d atteinte par des torovirus, les villosités et les cellules des cryptes sont affectées concomitamment. L inflammation liée à l infection virale contribue également dans ce dernier cas à l augmentation des sécrétions. Enfin, la poursuite de l alimentation conduit à la présence dans l intestin grêle de veaux malades de nutriments en excès par rapport aux capacités diminuées d absorption. Cela contribue donc à une fuite hydrique d origine osmotique, ainsi qu à des fermentations bactériennes indésirables dans le gros intestin. La diarrhée induite par une infection virale est pâteuse à liquide, fétide, avec parfois une présence de sang. Elle apparaît peu prédictive d une cause précise. La diarrhée due aux virus est donc généralement de type mixte, à la fois par malabsorption et stimulation des sécrétions. De plus, souvent, d autres agents pathogènes, bactériens ou parasitaires, sont présents simultanément. Les conséquences de la diarrhée ne sont pas spécifiques du type d agent pathogène majoritairement en cause : en raison de la pathogénie de la diarrhée infectieuse, l animal affecté présente avant tout une déshydratation et une dénutrition, avec une acidose, toutes deux plus ou moins marquées. L âge d atteinte joue un grand rôle dans la gravité de la diarrhée. Diagnostic Le diagnostic de suspicion repose avant tout sur l âge du veau atteint, chacune des affections digestives néonatales du veau ayant un moment privilégié d apparition et d expression clinique (tableau 4). Les rotaviroses sont ainsi en principe celles qui interviennent le plus précocement, suivies des coronaviroses et des toroviroses. Il est impossible d établir un diagnostic clinique précis sans recourir aux examens complémentaires. Différentes possibilités s offrent au praticien, notamment des tests réalisables au chevet du malade (dont l avantage majeur est l aspect pédagogique, avec une sensibilité de 93 % et une spécificité de 100 % pour les rotavirus et les coronavirus, d après les valeurs fournies par les producteurs) ou des prélèvements qui peuvent être traités à la clinique ou au laboratoire (technique immuno-enzymatiques ou PCR) (tableau 5, photo 4). Enfin, face à l émergence d une flambée de diarrhées néonatales dans un élevage, l existence d un défaut de transfert colostral doit être envisagée. Si les kits Midland autrefois utilisés sur le terrain pour évaluer les concentrations en IgG sur le colostrum ou sur le sang des veaux ne sont plus commercialisés, d autres méthodes sont disponibles pour le vétérinaire de terrain, comme la réalisation FIGURE Rôle schématique des villosités et des cryptes, et altérations induites par les différents virus entéropathogènes Lait non digéré Cellules matures des villosités : absorption, digestion Lait non digéré Torovirose : destruction importante des villosités avec atteinte des cryptes, maldigestion/malabsorption Rotavirose : destruction moyenne des villosités : maldigestion/malabsorption Hyperplasie des cryptes : sécrétion accrue Lait non digéré Coronavirose : destruction importante des villosités, maldigestion/malabsorption Cellules jeunes, indifférenciées des cryptes : prolifération et sécrétion La largeur de la flèche bleue figure l intensité de l absorption survenant au niveau des villosités, celle de la flèche jaune, l amplitude des sécrétions dans les cryptes. 6 Le Point Vétérinaire / 2011 / Maladies infectieuses des ruminants

Actualités sur les viroses digestives du veau du dosage des IgG par immunodiffusion radiale par le test IDRing BOV IgG Test Plates (3) [37]. Ce test est réalisable à la clinique, mais nécessite un temps d incubation de 16 heures. D autres modalités diagnostiques, comme le dosage des protéines totales à l aide d un réfractomètre, peuvent également être utilisées. Moyens de lutte 1. Thérapeutique Lors de diarrhée néonatale, et a fortiori lors d origine virale, la première mesure à mettre en œuvre est l instauration de mesures importantes de fluidothérapie. La pose d une voie veineuse à demeure (cathéter) permet de passer plusieurs litres de perfusion sur la journée par l éleveur, et ainsi d améliorer les chances de guérison. Un certain nombre de traitements adjuvants peuvent être envisagés (pansements digestifs, anti-inflammatoires non stéroïdiens, etc.). De plus, face à une diarrhée d origine virale, le traitement ne devrait pas, en principe, faire intervenir d antibiotique 4 4. Test des cinq valences avec un résultat positif pour le coronavirus. Photos : crédit Pathologie du bétail, ENVA (à confirmer auteur au pdf) (3) IdBiotech, 63500 Saint-Yvoine, France. [10, 11]. Cependant, quel que soit l agent pathogène initial en cause, la diarrhée est fréquemment (dans environ 30 % des cas) associée chez le veau à une toxémie et/ou à une bactériémie qui compliquent le tableau clinique et qui assombrissent le pronostic [9]. E. coli est alors souvent incriminé. Dans le cadre de l usage raisonné et prudent des antibiotiques en élevages, il convient alors de n utiliser ces molécules qu à bon escient : quand l animal présente des signes généraux (hyperthermie prononcée, congestion ou pétéchies) et des risques de septicémie, attestés en particulier par une hyperthermie ou un test paraclinique (par exemple, test Uriscreen ) (photo 5) [8]. En cas de suspicion clinique de septicémie, associée ou non à une confirmation paraclinique, un traitement antibiotique visant le micro-organisme le plus fréquemment retrouvé dans ce cas de figure (approche probabiliste, en l occurrence le colibacille) et agissant à différents niveaux doit être mis en œuvre (un traitement systémique en raison du risque de septicémie et un traitement par voie orale pour agir au niveau intestinal, lieu initial de multiplication). Ainsi, l administration per os de colistine (98 % de sensibilité, Résapath 2008) et parentérale de b-lactamines à spectre large (céphalosporines) ou de fluoroquinolones est proposée. 2. Prophylaxie sanitaire Lors de diarrhée néonatale, et ce quelle que soit l étiologie précise, plusieurs mesures sanitaires non spécifiques sont proposées pour limiter son incidence dans le troupeau. La détection et la hiérarchisation des facteurs de risque dans l élevage doivent être réalisées. En termes de prophylaxie sanitaire, deux axes principaux sont envisagés : - rompre les cycles de transmission des entéropathogènes, en séparant quand c est possible les veaux à naître des sources infectieuses (malades, veaux âgés, vaches, etc.), et en assurant un nettoyage et une désinfection rigoureux des locaux et du matériel ; Tableau 4 Éléments du diagnostic différentiel des entérites virales du veau GENRE VIRAL ÂGE D ATTEINTE (PIC) TYPE DE DIARRHÉE SIGNES ASSOCIÉS AUTRES FORMES CLINIQUES PARTICULARITÉS DES LÉSIONS DIGESTIVES Rotavirus 1 jour à 2 mois (4 à 14 jours) Liquide, non hémorragique - - Atteinte uniquement de l intestin grêle, atrophie villeuse modérée Coronavirus 3 à 30 jours (5 à 10 jours) Variée, liquide à pâteuse, pouvant être hémorragique Troubles respiratoires possibles Entérite hémorragique hivernale (adultes), affections respiratoires Atteinte de tout l intestin, atrophie villeuse sévère Adénovirus 6 jours à 5 à 10 mois Nécrotique, hémorragique (sérotype 10) Troubles respiratoires, arthrites Syndrome du veau mou Tout le tractus digestif peut être touché, lésions hémorragiques et nécrotiques (atteinte de l endothélium) Torovirus (virus Breda) 2 jours à 4 mois (2 à 5 jours) Diarrhée aiguë variée (jaune verdâtre, puis brun à grisjaune ou jaune très liquide) Troubles respiratoires possibles Affections respiratoires? Intestin grêle et côlon, atteinte des villosités et des cryptes Calicivirus (norovirus) Quelques jours à 2 mois (3 semaines) Diarrhée modérée (+ sévère chez les veaux de 3 semaines que chez les nouveau-nés), non hémorragique Anorexie - Intestin grêle uniquement, atrophie villeuse, hyperplasie des cryptes œdème de la sousmuqueuse Parvovirus (bocavirus)? Diarrhée modérée Retard de croissance? Non déterminé Astrovirus? Pas de diarrhée - - - Le Point Vétérinaire / 2011 / Maladies infectieuses des ruminants 7

- assurer aux veaux la meilleure immunité possible, en leur assurant un confort optimal et surtout en leur garantissant à tous la fourniture d un colostrum de bonne qualité, de préférence naturel, suffisamment tôt et en quantité suffisante (2 % du poids vif dans les 2 heures qui suivent la naissance, puis 10 % dans les 12 à 24 heures) [13]. Lorsqu un défaut de transfert d immunité colostrale est mis en évidence, il peut être lié à des insuffisances à deux niveaux (qui constitueront les leviers à tenter de maîtriser) : - le colostrum est de bonne qualité : revoir la gestion de la distribution (et notamment la quantité reçue et le moment de la toute première buvée) ; - le colostrum est de mauvaise qualité : la gestion du parasitisme chez les mères (prioritairement) ou la présence de carences en oligo-éléments (secondairement) sont envisagées (la composition de la ration de tarissement n influençant par fortement la teneur en IgG du colostrum) [38]. Si le colostrum apparaît de qualité médiocre, il est possible de recourir à des produits du commerce. Cependant, leur concentration en IgG est faible (moins de 30 g par dose en France) et est souvent suffisante uniquement en complément d un colostrum de qualité moyenne. De plus, leur coût est relativement élevé. 3. Prophylaxie médicale La meilleure prophylaxie face aux diarrhées néonatales demeure la mise en œuvre d une vaccination. Différents vaccins sont disponibles, variant selon le spectre de protection (rotavirus et coronavirus, associés ou non à E. coli), mais également selon la nature des antigènes : inactivés ou vivants (tableau 6). Chaque type de vaccin présente des atouts, mais également des limites. Les vaccins inactivés, utilisés chez les mères en fin de gestation, permettent une immunité systémique passive 5. Uriscreen négatif à gauche et positif à droite avec mousse. Photos : crédit Pathologie du bétail, ENVA (à confirmer auteur au pdf) des veaux à la suite de la buvée colostrale, associée également à une immunité locale par le biais d IgA. Cependant, plusieurs paramètres peuvent être à l origine, sur le terrain, d impression d échecs vaccinaux. Cette modalité de protection nécessite, en effet, la réalisation de la vaccination à un moment adapté, si possible, par exemple, avant le démarrage de la saison de vêlage et en se fondant sur la connaissance des dates de mise bas prévisionnelles (notamment en élevage laitier). La vaccination doit être pratiquée chez des animaux en bonne santé : vaches déparasitées, correctement alimentées, etc. De plus, elle n exonère pas de la fourniture aux animaux de conditions d élevage de qualité, sans lesquelles le veau est immunodéprimé et à risque d exprimer une maladie quelle qu elle soit. Enfin, toute cause de diminution du transfert de l immunité passive peut être à l origine d une insuffisance de protection. Les vaccins vivants (il en reste un seul commercialisé en France), quant à eux, permettent une immunisation active 5 Tableau 5 Prélèvements envisageables en fonction de l agent suspecté dans les diarrhées du veau AGENT PRÉLÈVEMENTS MÉTHODE MISE EN ŒUVRE ET OBSERVATIONS Rotavirus Coronavirus Virus BVD-MD Fèces Sur animal mort : iléon Fèces Sur animal mort : iléo-côlon Écouvillonnage nasopharyngé, sang (IPI seulement) Sur animal mort : iléo-côlon, nœuds lymphatiques, rate, caillette, rectum, poumon (avorton) 8 Le Point Vétérinaire / 2011 / Maladies infectieuses des ruminants Recherche Elisa BVT immuno-enzymatique et test latex Rotavirus du groupe A uniquement (mais ce sont les principaux!) Recherche Elisa BVT Recherche immuno-enzymatique, immunodiffusion en gélose Test adulte/veau : communauté antigénique Sensibilité 10 6 particules/g Recherche immuno-enzymatique en 24 heures (Ag), culture cellulaire ( gold standard : 8 à 21 jours), immunofluorescence sur coupes d organes (1 à 3 jours de délai, congélation possible) Adénovirus Fèces Possibilité d utiliser des kits Elisa de médecine humaine RT-PCR multiplex développée pour adénovirus + norovirus + astrovirus chez l homme Calicivirus Fèces Possible de recourir à des kits Elisa en raison de la communauté antigénique avec les calicivirus humains. Le kit commercial utilisable, mais à compléter avec RT-PCR RT-PCR développée pour les identifier fondée sur des amorces de groupe Torovirus Fèces Elisa et RT-PCR été décrites pour établir le diagnostic de l infection par ces virus Possibilité d une RT-PCR multiplex à développer pour la pratique bovine : calicivirus et adénovirus (+ astrovirus) IPI : infecté permanent immunotolérant ; RT-PCR : reverse transcriptase-polymerase chain reaction. D après [5, 7, 19, 31, 34].

Actualités sur les viroses digestives du veau Tableau 6 Vaccins dirigés contre la rotavirose et la coronavirose et modalités d utilisation NOM COMMERCIAL LABORATOIRE PRODUCTEUR VALENCES PRÉSENTES Coroniffa RC Merial Rotavirus bovin souche IFFA Coronavirus bovin souche Inra Imocolibov Merial Antigènes K99, Y et 31A de E. coli Rotavec Corona Intervet SP Rotavirus sérotype G6P5 Coronavirus Mébus Adhésines F5 (E. coli) Scourguard 3 Pfizer Rotavirus bovin Coronavirus bovin E. coli souche b41 Trivacton 6 Merial Rotavirus bovin Coronavirus bovin Antigène K99 (F5) de E. coli O101 Antigène Y de E. coli O117 Antigène 31A de E. coli O78 Antigène F41 de E. coli O101 CARACTÈRE ATTÉNUÉ/ INACTIVÉ Inactivé Inactivé Inactivé Atténué sauf valence colibacillose (inactivée) Inactivé CONDITIONS D UTILISATION Immunisation passive des veaux par vaccination des vaches gestantes, injection SC PV en 2 injections ; PV1 : 1 à 3 mois avant MB ; PV2 : jours précédant MB (VL) ou le jour de la MB (VA) Rappel 2 à 6 semaines avant MB (VL) ou le jour de chaque MB (VA) Immunisation passive des veaux par vaccination des vaches gestantes, injection SC PV : 1 injection 2 à 6 semaines avant vêlage Rappel 2 à 6 semaines avant chaque MB Immunisation active des mères pour protection colostrale des veaux 1 seule injection (même en PV), IM, 3 à 12 semaines avant vêlage Immunisation passive des veaux par vaccination des mères gestantes Injection IM, PV en 2 injections, PV1 dans la seconde moitié de la gestation, PV2 2 à 3 semaines avant vêlage Rappel annuel 3 semaines avant vêlage Immunisation passive des veaux (1) par vaccination des mères gestantes, injection SC PV en 2 injections, PV1 1 à 2 mois avant vêlage, PV2 le jour du vêlage ou les jours précédents Rappel le jour du vêlage ou les jours précédents pour les vaches allaitantes, 10 à 15 jours avant vêlage pour les laitières SC : par voie sous-cutanée ; IM : par voie intramusculaire ; PV : protocole vaccinal ; MB : mise bas ; VL : vaches laitières ; VA : vaches allaitantes. (1) Le lait de la vache doit être donné pendant 3 semaines, ce qui est peu envisageable en élevage laitier. Rota-corona (vaccin vivant modifié) considéré généralement comme inefficace ou seulement de manière marginale [Smith 3ème édition 1404 non référencé (question pour l auteur au pdf)]. www.wk-vet.fr Compléments de lecture : Références complémentaires En savoir plus Tableau ou passive du veau selon la modalité de réalisation de la vaccination (vaccination des mères ou du veau directement). Cependant, la vaccination des veaux nouveaunés doit être réalisée le plus rapidement possible après la naissance, en différant de 2 heures la prise colostrale pour limiter les interférences avec les anticorps colostraux : une surveillance accrue des vêlages doit alors être envisagée pour limiter la prise de colostrum par les veaux après vêlage. Le choix des types de vaccins et des valences est, pour des raisons économiques, fondé sur les résultats des analyses de laboratoire réalisées dans l élevage. Une comparaison entre les souches contenues dans le vaccin et celles qui circulent dans l élevage doit être envisagée pour limiter les échecs vaccinaux. Enfin, une vaccination contre d autres agents pathogènes impliqués directement (salmonelloses, entérotoxémies, etc.) ou indirectement (BVDV) dans les diarrhées en élevage peut également être envisagée en fonction des risques rencontrés dans le troupeau. Conclusion L étiologie des diarrhées du veau est multifactorielle, et fait intervenir, à côté de facteurs environnementaux ou liés à l hôte, des agents pathogènes bactériens, parasitaires et viraux. La contamination des veaux nouveau-nés est quasi inévitable en élevage et s accroît au cours de la saison de vêlage. En plus des rotavirus et des coronavirus, d autres virus peuvent être impliqués, mais n apparaissent pas émergents (CF. DEFINITION TOMA ET THIRY?), leur intervention n étant évoquée dans des cas cliniques que de façon sporadique. Leur implication concrète en élevage est donc incertaine, mais ils sont toutefois à garder à l esprit pour des recherches complémentaires éventuelles, dans des situations complexes où : - les hypothèses majeures (coronavirose ou rotavirose, voire colibacillose(s) ou cryptosporidiose) ont été explorées rigoureusement ; - la vaccination semble ne pas obtenir de résultat en dépit d une mise en œuvre rigoureuse ; - le transfert de l immunité colostrale a été évalué précisément ; - les facteurs de risque d expression clinique des diarrhées ont été investigués sérieusement en collaboration avec l éleveur. Le diagnostic de ces viroses digestives repose sur l âge d apparition, l existence de symptômes associés et la mise en œuvre d examens complémentaires permettant de confirmer l intervention de ces virus dans l affection rencontrée. Les mesures de prophylaxie sanitaire visant à l amélioration globale du statut sanitaire du troupeau et à un bon transfert d immunité passive sont à préconiser dans tous les cas, au risque de voir échouer les prises en charge médicales proposées. Ces dernières comportent une fluidothérapie (orale ou parentérale selon la gravité) et une vaccination, si nécessaire, adaptée à la situation. Le Point Vétérinaire / 2011 / Maladies infectieuses des ruminants 9