Processus d apprentissage

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Master MEEF UE25 Tronc commun Processus d apprentissage Tiffanie Dujardin MCF en Psychologie Cognitive ESPE de l Académie de Rouen - Université de Rouen Laboratoire de Psychologie et Neurosciences tiffanie.dujardin@univ-rouen.fr 1 Plan 1. Définition générale d aujourd hui 2. Conceptions philosophiques 3. Le behaviorisme 4. La théorie de la Gestalt 5. Le cognitivisme 6. Le constructivisme 2 1

1. Définition de l apprentissage Qu est-ce qu apprendre? - C est acquérir et s approprier des connaissances, construire de nouvelles compétences, modifier sa façon d agir et de penser. Apprentissage = modification stable et durable des savoirs, des savoir-faire ou des savoir-être d'un individu 3 2. Conceptions philosophiques Depuis toujours, la philosophie s intéresse aux fondements de la raison, à l esprit, à la pensée humaine. Deux conceptions opposées: innéistes VS empiristes. Innéistes: certaines connaissances sont innées, la nature (hérédité) est un facteur suffisant pour appréhender l esprit. Empiristes: l esprit est à la naissance une table rase, les idées viennent de la perception et de l entendement. C est l expérience vécue qui produit l esprit. Platon et Aristote, peints par Raphaël 4 2

2. Conceptions philosophiques Limites de la «psychologie philosophique»: - Apprendre = savoir, pas de processus d apprentissage, c est l accès à la connaissance, pas la construction de la connaissance - Subjective: basé sur l introspection (analyse de son propre esprit); pas de preuves basées sur des mesures objectives. Cette méthode amène des hypothèses mais peut aussi mener à des mauvaises interprétations. - Ne concerne que l homme : limité aux êtres doués de langage. Qu en est-il de l enfant ou de l animal? 5 3. Le behaviorisme John Broadus Watson (1879-1958) Débuts du behaviorisme: 1913. Ne formule pas d hypothèses sur ce qui se passe au sein du système mental («boîte noire»). Seuls les comportements sont objectivables. Situation: stimulations particulières Caractéristiques de l environnement Mécanismes mentaux Réponse de l individu Caractéristiques du comportement 6 3

3. Le behaviorisme Le conditionnement Ivan Pavlov (1849-1936) Apprentissage = modification d un comportement suite à la répétition massive du stimulus. 7 3. Le behaviorisme Le conditionnement opérant Burrhus Frederic Skinner (1904-1990) Boîte de Skinner: Créer un environnement standard pour étudier les lois générales de l apprentissage et éliminer les manipulations humaines pouvant stresser les animaux Apprentissage = modification du comportement suite à son renforcement 8 4

3. Le behaviorisme Au quotidien Ces gestes automatisés permettent d effectuer certaines activités rapidement et sans effort. (Itinéraire pour aller au travail, s arrêter à un carrefour...) MAIS aller contre un geste automatisé demande un effort et un contrôle Les limites Il donne une vision simpliste de l apprentissage surtout s il s agit d apprentissages complexes, ne tient pas compte de la capacité de contrôle ni de la compréhension L homme se crée des représentations et donne de la signification aux situations d apprentissage. Les processus cognitifs ont eux aussi leur importance 9 4. La théorie de la Gestalt Gestalt = bonne forme Principe de base: le tout est supérieur à la somme des parties. Ce ne sont pas les éléments d une stimulation mais la relation entre ces éléments qui donne le sens à une situation. 10 5

4. La théorie de la Gestalt La compréhension résulte du rapport dynamique qu entretiennent les éléments. La suppression ou l'addition d'une partie dans une figure peut changer ou non la structure selon la fonction qu'elle y remplit. Une partie dans un tout est autre chose que cette partie isolée ou dans un autre tout. Apprentissage = repérage des indices pertinents et de leur organisation dans une situation complexe. Erreur = mauvaise compréhension globale de l environnement, mais l élève est actif. 11 4. La théorie de la Gestalt Les implications de la Gestalt sur les situations d apprentissage. insight de Koelher : compréhension globale, soudaine et directe de la situation, résultant de l organisation interne spontanée d une perception ou d une représentation. 12 6

4. Le théorie de la Gestalt Un exemple d insight (Koelher). Consigne: comment faire 4 triangles avec 6 allumettes identiques? 13 5. Le cognitivisme Emergence de la psychologie cognitive (années 60), pour développer l informatique : on étudie les activités mentales afin de programmer les ordinateurs. Le cerveau humain est un système de traitement de l information capable d un certain nombre d opérations ; il est capable de discriminer, identifier, stocker et récupérer de l information, de catégoriser, de mettre en relation, de faire des inférences Ces opérations diffèrent selon ce que le système a à faire : apprendre, raisonner, évaluer, résoudre un problème 14 7

5. Le cognitivisme Pour les cognitivistes, nous ne nous contentons pas d assimiler des données brutes, nous les sélectionnons, les organisons et les ré-utilisons. De nombreux domaines sont ainsi pris en compte pour l apprentissage : la perception, l attention, la mémoire, les représentations, les stratégies de résolution de problème La perception : notre cerveau fait un tri parmi la masse considérable de données issues de l environnement. On parle de traitement de l information perçue. Ce tri se fait via un système attentionnel. La mémoire : il existe plusieurs types de mémoire (notamment mémoire de travail et mémoire à long terme), et nos connaissances sont organisées et non accumulées de manière aléatoire. 15 5. Le cognitivisme Les représentations : nos connaissances et nos expériences vont nous permettre de nous forger des représentations des choses de l environnement et mener à la construction des concepts. Quelquefois, les représentations sont éloignées de la réalité et peuvent mener à des erreurs Il est important de tenir compte des représentations de l élève afin de le confronter à des informations nouvelles en vue d un changement de conceptions. La résolution de problème : on s intéresse ici aux stratégies utilisées par une personnes pour résoudre un problème. (résolution par analogie, par imitation, par déduction, par essaiserreurs ) Apprentissage = se construire des représentations les plus proches de la réalité, en engageant au mieux nos processus cognitifs 16 8

6. Le Constructivisme Comment se développent les connaissances de l enfant? Jean Piaget (1896-1980) Le constructivisme est développé par Piaget dès 1923, en réponse au courant behavioriste qui «limite trop l apprentissage à l association stimulus-réponse». L apprentissage repose sur l interaction entre l individu et son environnement, entre sa structure intellectuelle et les informations qu il reçoit de son environnement. L élève est activement impliqué dans son évolution et dans ses apprentissages. 17 6. Le Constructivisme Le concept de stades Les structures mentales de l enfant s organisent à mesure que l enfant grandit : à chaque âge correspond une compréhension particulière du monde (on parle de stades). Le concept de conflit cognitif Pour Piaget, l apprentissage est une reconstruction interne des acquisitions instables (nouveautés) provoquées par l environnement : on apprend car un déséquilibre se crée. A Typical 10-month-old on Piaget's A-not-B task.mp4 18 9

6. Le Constructivisme Le processus d équilibration Pour Piaget, l apprentissage est avant tout un processus dynamique d adaptation, une recherche d équilibre entre le sujet et son environnement, où l enfant est amené à réviser ses propres théories. L apprentissage repose sur deux processus complémentaires : L assimilation et l accommodation. 19 6. Le Constructivisme L assimilation consiste en une interprétation des situations nouvelles à partir des schèmes existantes, l enfant agit directement sur l environnement. Assimilation: On assimile les objets à une action particulière. Les schèmes déjà connus sont suffisants pour résoudre le problème actuel. EX: écrire avec un stylo que l on n a jamais utilisé, mais qui a les mêmes caractéristiques que nos stylos habituels. 20 10

6. Le Constructivisme L accommodation est une modification des schèmes existants en fonction des caractéristiques de la nouvelle situation: c est l environnement qui agit sur l enfant. Accommodation: On tient compte des particularités des objets: les structures internes se transforment en fonction des modifications du milieu (ajustement de soi au réel). EX: écrire avec un stylo plume pour la première fois Une fois qu une connaissance est accommodée, par répétition, elle devient assimilée. 21 6. Le Constructivisme conserv_liquide_yves_5ans.mov.mp4 La place de l erreur Chez les constructivistes, l erreur est positivée, et est porteuse de sens, il ne s agit plus d une faute ou d une mauvaise réponse mais plutôt d un obstacle qu il faut franchir. L origine de l erreur réside dans une difficulté à s approprier le contenu enseigné. Elle est un indice du stade dans lequel se situe l enfant. 22 11

6. Le Constructivisme Les limites - Pouvoir excessif accordé à l action («schèmes»), peu d intérêt pour les processus cognitifs. - Intérêt exclusif aux structures logico-mathématiques, opératoires. - Incapacité à expliquer l importante variabilité des performances observées par rapport aux stades. - Peu d importance accordée à l échange avec autrui : la variable sociale à un rôle prépondérant des les apprentissages, notamment scolaires. 23 L origine de l apprentissage est sociale. Lev Vygotsky (1896-1934) La spécificité des activités humaines est d être socialement médiatisées, notamment par le langage. Selon Vygotsky, l enfant est un «apprenti de la pensée», stimulé sur le plan cognitif et guidé par des personnes plus âgées ou plus expérimentées. 24 12

Par quels processus l enfant s approprie les connaissances? Selon Vygotsky, chaque fonction mentale supérieure apparaît toujours deux fois au cours du développement de l'enfant : 1) dans une activité collective soutenue par le groupe social et par l'adulte, elle se situe donc à un niveau interpsychique, interindividuel. 2) elle apparaît à un niveau intrapsychique et devient une propriété intériorisée de la pensée de l'enfant. Par ailleurs, cet apprentissage ne peut se faire que si l on travaille dans la zone proximale de développement 25 Ce que l apprenant n est pas prêt/apte à apprendre (trop difficile) inaccessible ZPD Ce que l apprenant pourrait apprendre avec l aide d un guide (à enseigner: motivant, stimulant) ennui L apprenant Ce que l apprenant sait déjà: ne pas l enseignant (trop ennuyeux) 26 13

«Zone Proximale du Développement» Identifier ce qui est mâture (niveau intrapsychique) et ce qui est en train de le devenir (niveau interpsychique) par le guidage. Zone Proximale de Développement : proposer des exercices légèrement au-dessus des capacités des enfants, mais leur donner des indices. Il s agit d une zone qui comprend les compétences, les connaissances et les notions qu une personne est sur le point d acquérir, mais qu elle ne maîtrise pas encore sans aide. 27 Le guide amène l apprenant dans la ZPD en : - Évaluant les aptitudes et le potentiel de l apprenti - Encourageant sa participation - Favorisant la transition de la dépendance à l autonomie - Evitant l ennui et l échec Si certaines frustrations sont tolérables, l apprenant ne doit toutefois pas être ni totalement dépassé ni passif, mais doit prendre une part active dans son apprentissage. 28 14

Interactions dissymétriques de guidage Dans les interactions dissymétriques, un sujet novice est aidé par un sujet expert (enfant plus avancé ou un adulte). Il est actif et il trouve la réponse par lui-même. Le bénéfice cognitif concerne les deux sujets. L intervention du tuteur : processus d étayage qui rend l enfant capable de résoudre un problème, de mener à bien une tâche ou atteindre un but qui auraient été, sans cette assistance, au-delà de ses possibilités. L interaction sociale dissymétrique ne se réduit pas à une simple imitation et conduit au progrès cognitif du novice au cours de l apprentissage. 29 Interactions dissymétriques de guidage Barnier (1989) a montré que le guide bénéficie également de cette aide apportée au novice. Travail de mise en mots qui le place en situation d apprentissage en aidant au développement de sa réflexion et de sa capacité à abstraire. Son expérience: 36 enfants de 6-7 ans et 7-8 ans: 12 élèves de CE1 seuls, 12 dyades (1 élève de CE1 aidant, 1 élève CP aidé), 12 témoins. Les élèves de CE1 passent des tests (repérage spatial et lecture des émotions d autrui) avant et après un entraînement (immédiatement après et huit jours après). 30 15

Interactions dissymétriques de guidage Les enfants sont divisés en trois groupes: - Les tuteurs (expliquent à l enfant) - Les individuels (expliquent à l adulte) - Les témoins (ont passé les tests mais pas d entraînement): pour s assurer de l absence d un effet d apprentissage entre les deux phases. 31 Interactions dissymétriques de guidage Résultats: 7 La progression est plus forte du pré-test au post-test 2 dans le groupe de tuteurs. Les tuteurs continuent à progresser alors que les enfants du groupe d individuels régressent sensiblement. 6 5 4 3 2 1 0 Pré-test Post-test 1 Post-test 2 Tuteurs Individuels Témoins 32 16

Interactions dissymétriques de guidage L'aide fournie par le tuteur peut bénéficier : - au tutoré, parce qu elle lui fournit des éléments de compréhension du problème favorisant une réponse plus pertinente ; - au tuteur, parce qu elle le pousse à expliciter les exigences résolutoires de la tâche, à prendre du recul par rapport à l action directe, à prendre conscience de ce qu il faut faire pour mener la tâche à bien. ATTENTION : toutes les interactions dissymétriques de guidage ne conduisent pas à un progrès cognitif du tuteur. 33 Interactions symétriques de résolution conjointe Interactions sociales symétriques : situations dans lesquelles les sujets ont un statut et un rôle explicitement égalitaires (Sorsana, 1999) Les sujets doivent, de façon égalitaire, résoudre un problème ensemble. Attention, cela ne signifie pas qu ils ont des niveaux cognitifs identiques Le but = conflit socio-cognitif où les sujets doivent dépasser les oppositions en acceptant de coopérer activement à la recherche d une solution commune, les réponses des élèves doivent être incompatibles. 34 17

Interactions symétriques de résolution conjointe Perret-Clermont (1996): l effet du conflit socio-cognitif sur le développement de la conservation des liquides (tâche piagétienne). 100 enfants âgés de 5ans 6 mois à 7ans 5 mois Pré-test : tâche de conservation en individuel. Entraînement : interaction symétrique de groupe d enfants de niveau différent dans une tâche de conservation des liquides. Post-test : tâche de conservation individuelle une semaine plus tard et un mois plus tard. 35 Interactions symétriques de résolution conjointe Répartition des enfants en 3 groupes pour l entraînement : 1. «non-conservants» : les enfants qui reconnaissent l égalité des quantités de liquides (leur jugement repose sur la configuration perceptive des niveaux de liquide). 2. «intermédiaires» : oscillent entre des réponses de conservation et de non-conservation. 3. «conservants» : affirment la conservation des quantités de liquide quels que soient le nombre et la nature des transvasements effectués ; ils résistent aux contre-suggestions de l expérimentateur. 36 18

Interactions symétriques de résolution conjointe Résultats: Dans la condition «entraînement», 24 des 37 enfants progressent tandis que ce n est le cas que pour 2 de 12 enfants de la condition «contrôle». Le progrès constaté au posttest immédiat apparaît durable 1 mois plus tard, au post-test 2. Niveau au posttest 1 Condition entraînement NC au pré-test I au pré-test Condition contrôle NC au pré-test NC 11 9 I au pré-test I 9 2 1 1 C 8 7 0 1 Totaux 28 9 10 2 ATTENTION : toutes les coopérations lors de résolution de problème ne conduisent pas à un progrès cognitif du tuteur. 37 Parmi les présupposés favorables à l apprentissage coopérant, on peut ranger : la sollicitation des interactions entre pairs comme élément facilitateur d apprentissages, la responsabilisation motivante et favorable pour l image de soi, d enfants placés en position de moniteurs, une façon d apprendre en expliquant à d autres, qui peut permettre un travail de consolidation et d appropriation de connaissances, une façon de faire face à différentes formes d hétérogénéité. 38 19

Bibliographie Astolfi, J-P. (2014). L erreur, un outil pour enseigner. Collection Pratiques et enjeux pédagogiques. ESF Editeur. 11 ème édition. Barnier, G. (1989). L effet-tuteur dans des situations mettant en jeu des rapports spatiaux chez des enfants de 7-8 ans en interaction dyadique avec des pairs de 6-7 ans. European Journal of Psychology of Education, IV, 3, pp. 385-400 Bedin, V., & Fournier, M. (2014). Apprendre. Pourquoi? Comment? Editions Sciences Humaines. Crahay, M., & Dutrévis, M. (2011). Psychologie des apprentissages scolaires. Bruxelles: de boeck. Goanac h, D., & Golder, C. (1995). Profession enseignant. Manuel de psychologie pour l enseignement. Hachette Education. Houdé, O., & Leroux, G. (2011). Psychologie du développement cognitif. PUF. Lieury, A. (2010). Psychologie pour l enseignant. DUNOD. Piaget, J. (1964). Six études de psychologie. Folio essais. Perret-Clermont (1996). La construction de l intelligence dans l interaction sociale. Berne : P.Lang. Vygotsky, L.S. (1978). Mind in Society. The Development of Higher Psychological Processes. Cambridge, Massachusetts: Harvard University Press. 20