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UNIVERSITE CLAUDE-BERNARD LYON I INSTITUT DES SCIENCES ET TECHNIQUES DE LA READAPTATION ================== Directeur de l Institut des Sciences et Techniques de la Réadaptation Professeur Yves MATILLON Du bébé bien porté à l enfant bien portant : Quelques réflexions sur les expériences de portage en psychomotricité. Mémoire présenté pour l obtention du Diplôme d Etat de Psychomotricien par Juin 2012 Directeur du Département Psychomotricité Jean Noël BESSON N 1139

Président Pr. GILLY François-Noël Vice-président CA M. BEN HADID Hamda Vice-président CEVU Vice-président CS M. LALLE Philippe M. GILLET Germain U.F.R. de Médecine Lyon Est Directeur Pr. ETIENNE Jérôme U.F.R de Médecine Lyon-Sud Charles Mérieux Directeur Pr. KIRKORIAN Gilbert Secrétaire Général des services M. HELLEU Alain Secteur Santé Comité de Coordination des Etudes Médicales (C.C.E.M.) Pr. GILLY François Noël U.F.R d Odontologie Directeur Pr. BOURGEOIS Denis Institut des Sciences Pharmaceutiques et Biologiques Directrice Pr. VINCIGUERRA Christine Institut des Sciences et Techniques de Réadaptation Directeur Pr. MATILLON Yves Département de Formation et Centre de Recherche en Biologie Humaine Directeur Pr. FARGE Pierre

Secteur Sciences et Technologies U.F.R. Des Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives (S.T.A.P.S.) Directeur Pr. COLLIGNON Claude Institut des Sciences Financières et d Assurance (I.S.F.A.) Directeur Pr. MAUME-DESCHAMPS Véronique IUFM Directeur M. BERNARD Régis IUFR de Sciences et Technologies Directeur M. DE MARCHI Fabien Ecole Polytechnique Universitaire de Lyon (EPUL) et IUT LYON 1 Directeur Pr. FOURNIER Pascal Ecole Supérieure de Chimie Physique Electronique de Lyon (CPE) Directeur M. PIGNAULT Gérard Observatoire de Lyon Directeur M. GUIDERDONI Bruno IUT LYON 1 Directeur M. VITON Christophe

SOMMAIRE INTRODUCTION... 6 PARTIE 1 : ELEMENTS THEORIQUES... 7 A- Le portage... 8 1- Définition... 8 2- Les différents types de portage mère-enfant... 9 a- Le désir... 9 b- La grossesse : «tu portes la vie»... 10 c- La voix et le regard... 11 d- Les expériences de corps à corps... 13 e- Le holding, le handling, l objet presenting... 15 B- La sécurité interne... 17 1- Définition... 17 2- Lecture psychomotrice de la sécurité interne... 20 a- L Axe... 20 b- Narcissisme... 21 c- Attachement et séparation... 23 d- Tonus... 24 C- Les effets et les qualités du portage... 26 1- Un modèle de portage : la première relation mère - bébé... 26 a- Base d une relation affective... 27 b- Partage et communication émotionnelle... 27 c- L enroulement, la symétrie et les coordinations... 29 d- La contenance... 30 PARTIE 2 : ELEMENTS CLINIQUES... 33 A- Et s il y avait trop de portage pour Louis?... 34 1- Présentation... 34 2- Louis... 34 3- Louis et sa mère... 35 4- Analyse... 35 B- Troubles de l attachement et portage... 37 1- Cadre d intervention... 37 a- L institution... 37 b- Emilie... 38 Présentation... 38 L observation psychomotrice... 38

Projet de soin... 39 2- Le suivi... 39 a- Ma première rencontre avec Emilie... 39 b- Ses appuis et le sol... 39 c- Le poupon qu elle ne peut pas porter... 40 d- La confiance s installe, début d une régulation tonique... 40 e- Son rapport à l objet... 41 f- La difficulté à s installer... 41 g- L apparition du doudou, de la sucette : vers un nouvel attachement... 41 h- Difficulté accrue de la séparation... 42 i- Insécurité et fragilité des enveloppes sensorielles... 42 j- Intériorisation d un portage à vivre de façon moins traumatique... 43 3- Analyse et mise en lien... 43 C- Lorsque tout ne va pas de soi, les défaillances de portage : problème de sécurité et de relation... 45 1- Cadre d intervention : Jules en manque de portage?... 46 a- Présentation... 46 b- Cadre et déroulement de la prise en charge... 48 2- Le suivi... 48 a- Ma première rencontre avec Jules... 48 b- Le miroir ou comment se regarder?... 49 c- Une rencontre difficile... 49 d- Un défaut de communication... 50 e- «Il est insupportable»... 50 f- L éclatement... 50 g- Les rassemblements... 51 h- Les rencontres en corps à corps... 52 3- Analyse et mise en lien... 53 PARTIE 3 : LE PORTAGE EN PSYCHOMOTRICITE... 57 A- Les différentes formes de portage de l enfant... 58 1- La voix et le regard... 58 2- Le projet thérapeutique... 61 3- Le portage de la relation mère-enfant... 64 CONCLUSION... 67 BIBLIOGRAPHIE REMERCIEMENTS

INTRODUCTION Au cours de mon stage en crèche, je me suis rendue compte que les enfants sont beaucoup manipulés. En effet les auxiliaires de puériculture sollicitent les enfants pour les changer, les nourrir, les endormir, les déplacer, les consoler C est alors que je me suis souvenue de mon voyage en Afrique noire au cours duquel j avais remarqué que les enfants étaient portés en permanence jusqu à leur deux ans. Cette pratique est également fréquente en France, il est courant de croiser dans la rue des enfants portés en écharpe par un de leurs parents. Mais, c est dans les maternités que le portage a le plus de succès. Surtout dans les unités pour enfants prématurés dans lesquelles la méthode kangourou 1 est fortement encouragée. Ce portage, cette relation mère-enfant me questionne. Que recherche la mère en portant son enfant si près d elle? Toutes les mères peuvent-elles porter leurs enfants ainsi? Quels sont les bénéfices que l enfant peut retirer de cette expérience? Le portage n existe-t-il que de cette façon-là? Par extension : n entendons-nous pas dans le langage courant, «Comment vous portez vous?» ou «Au revoir portez-vous bien!» ou bien «J ai peur que l on me laisse tomber.». Ces expressions sont les témoins d un portage antérieur ou actuel. Le portage n est pas que physique et ne se limite pas à l enfance. Ainsi, peut-être nous continuons tous à être porté et/ou nous même à porter quelqu un. Finalement, quels sont les bénéfices de ce portage? En quelques années, l enfant passe d un être vulnérable à une personne indépendante. Il acquiert des éléments dont il a besoin pour se construire. Je choisis ici de m intéresser à un de ces éléments acquis par l enfant afin de se différencier, de devenir autonome et indépendant : le sentiment de sécurité interne. Ainsi j essaierai au cours de cet écrit d expliquer comment les expériences de portage mère-enfant participent-elles à la construction du sentiment de sécurité interne de l enfant? Dans un premier temps, je définirai le portage et la sécurité interne. Puis j expliquerai les effets du portage dans la construction du sentiment de sécurité interne de l enfant nécessaire à l acquisition de son autonomie. Dans un second temps, je relierai ma problématique aux regards de ma clinique auprès d enfants en carences de portage. Enfin, je ferai part de mes expériences et réflexions concernant le portage en psychomotricité. 1 Méthode de portage en écharpe en peau à peau. 6

PARTIE 1 : ELEMENTS THEORIQUES 7

A- Le portage 1- Définition J entends portage au sens de porter quelqu un. Ici, je centre mon attention sur une mère (ou celle qui en tient lieu, c'est-à-dire la figure d attachement de l enfant qui peut être la mère biologique, la mère adoptive, le père ou la soignante référente. C est la personne avec qui l enfant a une relation privilégiée.) Dans mon écrit, je désigne ainsi la personne qui porte l enfant. Je définis «porter» au sens de procurer de l aide, amener du réconfort à l enfant et lui apporter un appui. Tout d abord, le portage nécessite deux personnes : le porteur et le porté. La relation entre ces deux acteurs impose une asymétrie. Cette asymétrie se traduit par la dépendance du porté vis-à-vis du porteur. Le porté est dépendant du porteur dans la découverte du monde, dans sa mobilité. En effet, le porteur peut aussi porter dans le sens de transporter, d amener à. La situation de portage est une sorte de servitude, ce qui peut faire vivre au sujet porté une perte de son identité. Il peut se sentir «objeifier». Par ailleurs le porteur ne peut entendre et répondre à tous les besoins du porté. Le portage comme un porté de corps à corps impose une relation dans l espace intime proche des deux protagonistes. E.T. Hall (1978) décrit qu à cette distance nous voyons l autre dans ses détails, nous avons une image quelque peu déformée. Le dialogue est établi en partie par des chuchotements. La communication est surtout réalisée avec le toucher, le regard, le tonus, la respiration. C est une expérience très fusionnelle. Le portage peut être également une contenance par la voix, par le regard ou un soutien au travers d une prise en charge par exemple. Quelque soit le portage (en corps à corps, par le regard, par la voix ) une interaction spécifique entre deux personnes est présente. Cette interaction met en jeu l attachement, l écoute, la tonicité, l attention des deux protagonistes l un envers l autre. Au travers du portage, les concepts de contenance, soutien, indifférenciation/individuation sont présents. La mère porte son enfant. Il y a ici une notion de charge également. Les enfants demandent que les parents fassent des efforts pour eux, qu ils donnent de leur temps et de leur énergie, qu ils engagent leurs responsabilités. 8

2- Les différents types de portage mère-enfant a- Le désir Dans le langage courant, le désir est «l action de désirer ; l envie». 2 «Désirer : souhaiter, avoir envie de.» 3 Ainsi le désir peut être définit par la volonté d obtenir quelque chose ou de faire quelque chose. Le désir se définit plus ou moins comme un souhait, une envie, un besoin spécifique à l Homme. " Dans la conception dynamique psychanalytique, un des pôles du conflit défensif : le désir inconscient tend à s accomplir en rétablissant, selon les lois du processus primaire, les signes liés aux premières expériences de satisfaction. " 4 Le désir est lié à des traces mnésiques et trouve son accomplissement dans la " reproduction hallucinatoire de perceptions devenues les signes de ces perceptions ". 5 Il s agit seulement de reproduction hallucinatoire car l épreuve de réalité montre que le désir n est jamais réellement satisfait. D un point de vue psychomoteur, le désir se manifeste comme une tension plus visible et palpable. Nous en voyons des manifestations au niveau de la posture, de l attitude, du comportement, mais aussi au niveau des mimiques faciales, du regard, de la voix et de la gestualité. Certaines manifestations sont moins visibles pour autrui, comme le rythme cardiaque, la pression artérielle, la température corporelle, la respiration, l activation de zones cérébrales spécifiques. Le projet d avoir un enfant se situe au carrefour des désirs du père et de la mère. Chacun d eux a en lui un enfant imaginaire, celui qu il a été. Ainsi, ils portent chacun leur enfant imaginaire. Ils souhaitent tous les deux inconsciemment que leur enfant ressemble à celui qu ils ont été pour qu il vienne réparer l enfant imaginaire en eux. Or, le désir d enfant constitue un projet commun des parents. Cela sous-entend de prendre en compte l altérité et le désir de l autre. Pour Bydlowski M., le désir d enfant «serait la traduction naturelle du désir sexuel dans sa fonction collective d'assurer la reproduction de l'espèce et dans sa fonction 2 Dictionnaire Larousse. 1997. Larousse bordas. Paris 3 Dictionnaire Larousse. 1997. Larousse bordas. Paris 4 J. LAPLANCHE et J-B PONTALIS vocabulaire de la psychanalyse. 2004, Presse Universitaires de France, Paris, P 120 5 J. LAPLANCHE et J-B PONTALIS vocabulaire de la psychanalyse. 2004, Presse Universitaires de France, Paris, P121 9

individuelle de transmission de l'histoire personnelle et familiale» 6. Le désir d enfant est un mouvement naturel et universel. Le désir d enfant peut être motivé par le désir de perpétuer l espèce. C est une composante collective. Mais il peut également être motivé par le désir de transmettre son histoire, son nom C est une composante personnelle. Il peut venir pour réparer l enfance et les failles narcissiques des parents. Ici il s agit de l enfant idéal. Or l enfant qui né est l enfant réel et reste une épreuve de réalité qui dépasse toujours les choix que ses parents ont eus pour lui. D un point de vue psychanalytique, le complexe d'œdipe de la petite fille culmine dans le désir longtemps retenu de recevoir en cadeau du père, un enfant, de mettre au monde un enfant pour lui. Ainsi chez la femme, le désir d enfant fait intervenir la dimension œdipienne. Mais le désir est aussi présent sur le versant du même sexe, par identification à la mère préœdipienne. Ici il s agit du désir d enfant œdipien. Comment le désir d enfant pour les parents est-il une expérience de portage pour l enfant à venir? L enfant est conçu du désir d enfant de ses parents. Le désir est une forme de portage dans le sens où au moment de sa conception, les parents ont pu désirer la venue de cet enfant. Ils portent l enfant dans le sens où ils l inscrivent dans leur généalogie, dans leurs histoires. Ils décident de porter ensemble leur attention et leur désir sur cet être en devenir. Le désir d enfant fait porter une marque à l enfant, comme il porte leur nom. Il permet également aux parents de porter psychiquement un futur enfant, de le rêver. Il s agit de prémices de portage. Puis-je me risquer à dire que l enfant est aussi porteur? En effet, l enfant porte le désir de ses parents, de ce couple, leurs rêves et leurs amours. Le désir d enfant est quelque chose qu il doit porter mais qui est aussi à l origine de sa conception. Il est fait par le couple et pour le couple, comme renforcement narcissique. Le temps de la grossesse est nécessaire pour que l enfant se développe, pour que le couple naisse à la parentalité et qu il se sente prêt à porter physiquement cet enfant. C est aussi le temps de la rencontre entre le désir d enfant et l enfant porté, entre l enfant idéal, œdipien, imaginaire et l enfant réel. b- La grossesse : «tu portes la vie» Il est courant d entendre quelqu un dire à une femme enceinte «Tu portes la vie!». En effet une femme enceinte porte un être vivant en développement dans son utérus. C est un moment unique pour la femme mais également pour le couple. Au cours de la grossesse, un 6 BYDLOWSKI M. (1997), La dette de vie, Itinéraire psychanalytique de la maternité, Paris, puf. P143 10

ensemble de modifications physiques et psychiques influent sur la femme et le couple afin de les préparer à l arrivée de leur enfant. Ces modifications seront plus ou moins bien vécues selon les ressources physiques et psychiques de la femme enceinte et suivant les circonstances de la grossesse. Tous ces changements participent au processus de parentalité tout comme l ensemble des examens (prise de sang, échographie, amniosynthése, visite gynécologique ) du suivi de grossesse. La grossesse est un portage particulier puisque la mère porte l enfant en elle. En plus de le porter physiquement, elle lui apporte tout ce dont il a besoin pour se développer (nutriments, oxygène, sang ) Mais elle le porte aussi psychiquement ; en effet dès qu elle sent les premiers mouvements de son fœtus, elle y met du sens. Celui-ci est perçu comme vivant. Elle attribue une attention et une intention à son enfant. Pendant la grossesse, le père porte autant sa femme que son futur enfant. Il découvre sa femme en tant que future mère et se découvre lui-même en tant que futur père. Au cours du troisième trimestre de grossesse, les parents sont dans la perspective de la naissance. Il s agit souvent pour la mère d une phase de repli émotionnel et d attitudes régressives. Cette phase correspond à l émergence d un état interne très particulier que Winnicott a défini comme «préoccupation maternelle primaire». Cet état se développe dans la dernière partie de la grossesse pour perdurer ensuite dans les premiers mois de vie de l enfant. Il va permettre à la mère de pouvoir s identifier au bébé, et d être ainsi au plus juste dans l adaptation à ses besoins. La mère va devoir porter son enfant différemment, dans les bras, par le regard, la voix et le toucher, la tonicité. c- La voix et le regard L enfant est né. Il est très dépendant de son environnement. Sa mère doit tenir compte de ses besoins physiologiques : lui donner de la chaleur, à manger et à boire, respecter son sommeil, assurer sa sécurité. Elle devra également lui donner de la tendresse, lui permettre de découvrir le monde extérieur et ne pas trop le stimuler. La satisfaction des besoins psychologiques est également au premier plan: l enfant a besoin d être reconnu, compris dans ses pleurs et ses gazouillis, respecté, admiré dans ses performances, encouragé dans ses tentatives de découverte. Pendant que la mère assure tous ces besoins, et pour les assurer entièrement, elle parle et regarde son enfant. La voix et le regard de la mère apportent un portage à l enfant comme une contenance et un soutien. La voix et le regard sont des notions qui font intervenir l espace et la distance. Ils permettent également une communication et rassemblent autour d un unique point. 11

In-utéro, l enfant perçoit la voix de sa mère. A la naissance, il reconnait la et y est très sensible. Il s apaise rapidement à l écoute de la voix de sa mère et dirige son regard vers celleci. La voix est «l ensemble des sons produits par l air des poumons lorsqu ils font vibrer les cordes vocales» 7. Elle comporte une musicalité, une prosodie et est le support de la communication verbale et non-verbale. La contenance donnée par la voix de la mère participe à la construction de l enveloppe psychique. Elle permet de contenir le psychisme du bébé. «Contenir : - renfermer, avoir en soi, - empêcher quelque chose de s étendre ou d avancer au-delà des limites» 8. Grâce à la voix, la mère explique, rassure, encourage, reçoit et contient la vie émotionnelle et pulsionnelle de son enfant. Par sa voix, elle soutient le Moi de son enfant et maintient ainsi son sentiment de continuité d existence. La voix constitue une enveloppe sonore. L enveloppe peut être imagée comme une membrane qui peut «maintenir les parties du corps ensemble, au service d une cohésion, tout comme les affects, les représentations, les pensées» 9. L enveloppe résulte de l intériorisation de la fonction contenante de l objet (la voix de la mère). Nous parlons d intériorisation lorsque le processus d introjection repose sur des relations. D après Ciccone A., cette intériorisation nécessite une identification adhésive de l enfant à la voix de sa mère, c'est-à-dire une sorte d agrippement sensoriel. Ces éléments mis bout à bout formeront une première sensation de continuité. Puis l identification deviendra projective, elle consiste pour l enfant à projeter ses émotions incontenables dans l espace mental de sa mère pour ensuite pouvoir les reconnaitre comme siennes. Ces processus aboutissent à l intériorisation. Nous comprenons que par le biais de la fonction contenante de sa voix, de ses interprétations, la mère contient les éléments psychocorporels de son enfant et y donne un sens. Cela participe à la construction de l être au monde de son bébé. Le regard participe aussi à la contenance. En effet, un regard bienveillant apporte du réconfort. Il peut être enveloppant. Mais le regard a aussi un rôle verticalisateur, soutenant c'est-à-dire «action de soutenir, d apporter un appui.» 10. Dès les premiers jours de la vie, le regard a un rôle étayant, le bébé suit du regard. Puis, il va accrocher son regard à celui de sa mère. Cela va lui permettre de stabiliser son regard mais aussi sa tête et l ensemble de son corps. L accrochage par le regard contribue à la stabilité motrice ainsi qu à l ancrage postural. L enfant prend appui par le regard sur sa mère. Elle le soutient. 7 Dictionnaire Larousse. 1997. Larousse bordas. Paris 8 Dictionnaire Larousse. 1997. Larousse bordas. Paris 9 PEREZ Morgane. La fonction contenante dans le soin psychomoteur. Université Claude Bernard Lyon 1. 2011 10 Dictionnaire Larousse. 1997. Larousse bordas. Paris 12

G. Haag parle «d interpénétration des regards» 11. Le bébé et sa mère se regardent. Cela constitue une bonne expérience pour le bébé. G.Haag explique qu il s agit de jonctions psycho-toniques et psycho-motrices : le bébé est porté à la fois physiquement et psychiquement. Ces jonctions laissent une trace et contribuent à la construction du corps et du psychisme. G.Haag parle de Moi-Corporel. L enfant construit les limites de son corps grâce au contact dos. Par le biais du regard et des informations sensorielles (bouche-mamelon et contact dos) l enfant se construit un arrière-plan, un fond. Le corps se ferme et devient alors contenant. Cette expérience assure un premier sentiment d enveloppe, de continuité d existence et de sécurité. L intégration des limites corporelles permet à l enfant de construire son unité psychocorporelle. L étayage par le corps et la psyché de sa mère sont nécessaires à l acquisition de ses propres appuis physiques et psychiques indispensables à son bon développement. Le portage de l enfant est donc réalisé par cette contenance psychique et cet étayage permis par la voix et le regard. Le portage passe aussi par des expériences de corps à corps. d- Les expériences de corps à corps Les expériences de corps à corps comprennent toutes les situations dans lesquelles l enfant est proche de sa mère pour les soins, les moments de tendresse, les bercements, l alimentation Ces types d expériences peuvent s installer spontanément entre la mère et son enfant ou suivre des méthodes, telle que le portage en écharpe ou la méthode kangourou. A la naissance tous les repères sensoriels acquis pendant la grossesse disparaissent, il n a plus d enveloppe et le bébé est soumis à la pesanteur. Ce vécu peut être à l origine de grosses angoisses. Ainsi lorsque le nourrisson est porté contre le corps de sa mère, il retrouve des éléments qu il connaît. Son ouïe, son odorat, son système vestibulaire, son système sensoriel, son toucher sont stimulés et constituent une continuité avec sa vie intra-utérine. Pour Gauberti, cela permet à l enfant d éprouver ses limites corporelles et de construire sa première structuration spatiale. Il est en sécurité contenu par le corps de sa mère, sa voix, son regard et également son attention psychique. Toutes les stimulations tactiles, perceptives donnent à la peau une réalité perceptive qui étaye sa fonction de frontière entre le dedans et le dehors du corps. Ces expériences posent les fondations d un Moi corporel, prémices d un Moi-psychique. Dans cette situation de sécurité, l enfant semble moins agressé par l environnement et a donc une expérience positive de celui-ci. Les bébés portés acquièrent la sécurité nécessaire dans les bras de leur mère ce qui leur permet de s ouvrir plus facilement sur le monde 11 HAAG G., 1988, Réflexions sur quelques jonctions psycho-toniques et psycho-motrices dans la première année de la vie, Neuropsychiatrie de l Enfance, n 36, P2 13

extérieur. Les expériences en corps à corps, dans la symbiose mère-enfant mettent le bébé dans un constant bien être sans cesse renouvelé. Lors des expériences de corps à corps, la mère porte son enfant dans le respect de sa courbure naturelle du dos du bébé (en cyphose) ; elle soutient également sa tête jusqu à ce que son enfant puisse le faire seul. Souvent la mère porte son enfant de façon à lui permettre de rassembler ses bras dans l axe de son corps. Son dos s arrondi et sa tête se place naturellement dans l axe de sa colonne vertébrale. Cette position est proche de son enroulement naturel in utéro. Les expériences de corps à corps permettent des variations toniques harmonieuses, un dialogue tonique avec la mère. En effet le bébé communique avec son corps et la mère est au plus proche de celui-ci pour recevoir les messages de son enfant. D après Ajuriaguerra «Dès la naissance, l enfant s exprime par le cri, les réactions toniques axiales, tout le corps parle [ ] L enfant réagit aux actions extérieures par la prestation hypertonique ou par l apaisante relaxation. Les relations à autrui ne se font que sous l angle tension-détente.» 12 Au niveau relationnel, ce portage permet un échange riche sensoriellement et émotionnellement. Ce type de portage près du corps de la mère, l engage beaucoup de façon corporelle et sûrement psychique. «Ces expériences de corps à corps sont autant indispensable au nourrisson pour qu il vive qu à sa mère pour qu elle investisse sa fonction maternelle» 13. En étant plus proche psychiquement, elle peut ainsi filtrer les expériences de son bébé, lui assurer une sécurité physique et psychique afin qu il construise les bases de son Moi. En situation de portage, la rencontre est facilitée car la mère et le bébé sont proches l un de l autre. De plus cela permet à la mère de «prolonger illusoirement l état fusionnel, symbiotique des mois de grossesse [ ] Il faut que le corps de son enfant fasse trace, s inscrive sur la surface de sa peau, pour oublier le sentiment de complétude des mois où son enfant était en elle.» 14 Elle prolonge pour un temps le sentiment de ne faire qu un avec son enfant. Ce sentiment est tel que dans certaines ethnies le nom du porte bébé (de l écharpe de portage) est le même que celui du placenta. Les expériences de corps à corps sont riches pour l enfant et l apaise. Le bébé se sent bien et la mère se sent compétente et est valorisée narcissiquement dans son rôle de mère. 12 AJURIAGUERRA J., L organisation psychomotrice et ses troubles, in J. DE AJURIAGUERRA. Manuel de psychiatrie de l enfant. Paris. Masson.1970. P 238 13 G AUBERTI M., (1993), Mère et enfant : A corps et à vie. Paris, Masson, P6 14 GAUBERTI M., (1993)., Mère et enfant : A corps et à vie. Paris, Masson, P6 14

Dans cette situation, la mère entend mieux les besoins de son enfant et peut y répondre facilement. Or le portage peut être compliqué, ce n est pas si aisé que cela peut paraitre de porter un enfant si près de son corps. Certaines mères sont en difficulté, cela dépend de leur histoire, de leur culture, du rapport qu elles ont à leur corps et de l image qu elles ont de cet enfant. Le portage est également présent dans la situation alimentaire. Lors de l allaitement, il y a une part utilitaire et une part non utilitaire. L allaitement comprend l activité de succion par laquelle l enfant se nourrit, mais il favorise également les contacts peau à peau entre le bébé et sa mère. La part non utilitaire du contact de la mère procure à l enfant un environnement émotionnel d amour et de sécurité, dans lequel tout son être peut s épanouir. N oublions pas que c est l attitude de la mère, la façon dont elle le nourrit pendant l allaitement qui importe, plus que le mode de nourrissage. La faim, comme les autres besoins de l enfant, demande la «présence maternelle marquée par le désir et le plaisir». 15 Pendant la situation d allaitement, la mère oppose la chaleur de son corps et de sa présence au froid et à la solitude, le plein de ses seins au vide, le bercement de ses bras et de sa voix à l immobilité et au silence, l intention de son regard à l absence de celui-ci. Cette situation offre à l enfant un portage, une enveloppe très riche d un point de vue corporel mais aussi psychique. Cette expérience ne sera bénéfique à l enfant que si elle s inscrit dans une régularité. C est ce que Winnicott appelle le «holding». e- Le holding, le handling, l objet presenting Pour Winnicott il faut un environnement capable de subvenir aux besoins de l enfant qu il définit par le holding, le handling et l objet présenting. Un environnement en capacité d assurer ces fonctions est défini comme «suffisamment bon». Une mère qui procure ces soins à son enfant est dite «mère suffisamment bonne». Elle peut assurer les fonctions vitales de son enfant, être contenante et lui permettre d intégrer ses expériences. Les capacités maternelles sont à l origine de la création du sentiment d omnipotence de l enfant. L enfant a le sentiment de créer sa mère. La régularité des soins maternels participent à la construction du «sentiment d une continuité d existence.» La mère anticipe les besoins de son enfant et y répond de façon adapté. La régularité des soins maternels participent à la construction du «sentiment d une continuité d existence». «L existence psycho-somatique est un accomplissement et même si elle est fondée sur une tendance innée à grandir, elle ne peut être effective sans la présence humaine qui participe 15 GAUBERTI M.,(1993), Mère et enfant : A corps et à vie. Paris, Masson, P7 15

activement au holding et au handling» 16. Ainsi Winnicott explique que c est par le biais des fonctions maternelles que la mère participe au développement physique et psychique de son bébé. La première fonction est le Holding définit comme «l ensemble des soins de la mère donné à l enfant pour répondre à ses besoins physiologiques spécifiés selon ses propres sensibilités tactiles, auditives, visuelles, sa sensitivité à la chute et qui s adaptent aux changements physiques et psychologiques de l enfant. L aspect essentiel du maintien est le fait de tenir physiquement l enfant. Le centre de gravité du nourrisson ne se situe pas dans son propre corps, mais entre lui et sa mère.» 17 C est un environnement capable de porter physiquement et psychiquement l enfant. Le holding se met notamment en place grâce à la présence chaleureuse et affective de la mère tant physiquement que psychiquement. Le holding participe à la continuité du sentiment d existence du bébé en préservant au maximum les soins dans la continuité du développement intra-utérin. Le holding a une fonction de maintien et de soutien. En effet, la mère soutient son enfant dans le respect des courbures du dos du nouveauné et de son hypotonie, elle l aide à lutter contre la gravité et par la même elle lui épargne les angoisses de chutes déstructurantes. Par le biais du portage et des portés, la mère prodigue aussi un maintien psychique, elle soutient le Moi de l enfant et participe à la construction de son Self. Le bébé peut intégrer ces différentes expériences car sa mère le porte sans arrêt. Il y a toujours une partie d elle psychiquement avec l enfant. Elle s adapte à son enfant. Winnicott précise que «La cohésion des différents éléments sensori-moteurs provient du fait que la mère porte son nourrisson, quelques fois physiquement et au sens figuré, sans cesse.» 18 Winnicott nous dit ainsi qu elle peut porter son enfant psychiquement même quand il n est pas dans ses bras. Elle contient ses angoisses, elle met des mots sur ses émotions. Elle lui parle, elle le regarde et fait ainsi exister son Moi. Le Moi du bébé s affermit vers un état dans lequel les instincts seront ressentis comme faisant partie du self et non de l environnement. Le Ca devient alors un facteur de renforcement du Moi ou vrai self. La mère suffisamment bonne rend possible l accomplissement de des expériences d omnipotence du bébé, un vrai self commence à prendre vie. Les réponses de la mère sont adaptées à l enfant. La seconde fonction importante dans le développement de l enfant est le Handling. Le handling signifie le maniement. C est la manière dont l enfant est traité, soigné, caressé, 16 WINNICOTT D.W, (1996), La mère suffisamment bonne, Paris, éditions Payot et Rivages, 2006 17 WINNICOTT D.W, (1996), La mère suffisamment bonne, Paris, éditions Payot et Rivages, 2006 18 WINNICOTT D.W, (1996), La mère suffisamment bonne, (2006), éditions Payot et Rivages, Paris P104 16

habillé, lavé, nourri et manipulé par sa mère. Les conditions et effets du handling participent au développement du fonctionnement mental ainsi qu à la reconnaissance de l interaction et de la relation soma-psyché. Grâce au handling l enfant apprend à différencier ce qu il lui appartient et ce qui appartient à l environnement. Il intériorise ses limites corporelles. Il construit son schéma corporel. La troisième et dernière fonction est l objet presenting. Il s agit de la présentation de l objet c est à dire la façon dont la réalité est présentée à l enfant via sa mère. C est la phase des premières relations objectales permettant à l enfant, par leurs qualités, de s approprier et d utiliser les objets. C est la capacité de la mère de présenter l objet à son bébé au bon moment. Elle conforte son enfant dans son sentiment d omnipotence. Nous pouvons comprendre que «L enfant hérite d un processus de maturation, ainsi il va aller de l avant dans la mesure où il existe un environnement facilitateur c'est-à-dire qui évolue d un Handling à un holding plus la présentation de l objet.» 19. Cet environnement est porteur pour l enfant, il lui permet de se développer dans sa globalité. Winnicott insiste sur le maintien physique lors du portage et ajoute que porter un enfant est un savoir-faire à la fois psychique et corporel mais qu il est avant tout un savoir être. Il explique que le but du holding est d aider l enfant à acquérir sa capacité d exister seul sur ses propres appuis corporels et psychiques sans être débordé par l angoisse et sans se désorganiser. B- La sécurité interne 1- Définition Le mot "sécurité" vient du préfixe privatif "se-" et de la racine latine "cur", qui signifie "souci". Autrement dit le terme "sécurité" signifie l absence de souci. Le dictionnaire Larousse nous donne la définition suivante : «confiance, absence d inquiétude, sureté.» 20. Le sentiment de sécurité interne est une construction théorique pour définir la possibilité d un enfant d exister séparé de sa mère. Comment un jeune enfant devient autonome et sécure? Cela passe par la création d une relation sécurisante. Cette relation se construit d après Pinelli par «les soins d abord, le corps à corps, la parole et l écoute ensuite la mère donnera à son bébé l assurance qu il existe, qu il est quelqu un à part entière et qu elle va l aider à grandir» 21. Grâce aux soins du corps suffisamment bons, l enfant s est construit une bonne connaissance de son corps, de ses 19 WINNICOTT D.W, (1996), La mère suffisamment bonne, (2006), éditions Payot et Rivages, Paris P208 20 Dictionnaire Larousse. 1997. Larousse bordas. Paris 21 PINELLI A. (2010) Porter le bébé vers son autonomie.. Toulouse. Erés. Coll 1001 BB, P 34 17

capacités il peut donc expérimenter sans se mettre en danger. Le sentiment de sécurité interne de l enfant repose donc en partie sur la connaissance qu il a de lui-même. Il a construit cela grâce aux soins primaires maternels. Nous comprenons qu à travers les soins et leur relation, la mère aide son enfant à devenir sujet. D après D. Robin, la sécurité interne se construit d abord par le portage comme lutte contre la chute. Pour lui, l important dans le portage est de maintenir une continuité, une permanence de la présence, de l humeur, de la façon de s occuper de l enfant au risque de voir apparaitre chez l enfant un trouble de l attachement. En effet, Bowlby montre l existence d un lien proche entre l attachement et la sécurité interne. Il parle de l importance de la relation avec la mère pour que le bébé trouve une base de sécurité. La recherche de la proximité avec la figure d attachement, personne qui sécurise et répond aux besoins de l enfant, est nécessaire dans les premiers mois de vie. A travers la recherche de proximité, l enfant trouve une base de sécurité dans l autre et intériorise une sécurité de base. Mais il cherche aussi la séparation, la découverte du monde. Un bon processus d attachement produit de la séparation (de la prise de risque). Le sentiment de sécurité interne se rapproche de ce que Winnicott appelle la continuité d existence. Vulnérables et dépendants, les enfants nécessitent une attention de tous les instants et des soins particuliers. Afin de survivre, ils sont soumis à la présence de quelqu un qui puisse réunir pour eux des conditions de survie. Il s agit de la mère qui maintient son attention sur son bébé. Elle entraîne ainsi par moment un fusionnement, l illusion de ne faire qu un. Winnicott décrit cela comme «L expérience la plus simple est aussi la plus fondamentale, à savoir le contact non actif entre la mère et son enfant, tous deux ont le sentiment de ne faire qu un alors qu en fait ils sont deux. Cette expérience permet au bébé d être, ce qui lui donnera par la suite la possibilité d agir, de faire et de subir. C'est-à-dire l expérience du Soi.» 22 Cela est possible dans la mesure où la mère a offert la possibilité à son enfant de ne faire qu un avec elle. Ensuite elle aide son enfant à s individualiser. Au début, la mère répond aux besoins corporels de son enfant puis au fil du temps elle répond de plus en plus aux besoins du Moi. Au fur et à mesure du développement de l enfant, la mère va pouvoir être «suffisamment défaillante». Elle permet ainsi à l enfant de créer, de penser, d anticiper et ainsi de se construire psychiquement. La mise en route de la pensée est un processus. L enfant se rend compte du besoin qu il a de sa mère. Plus tard, il pourra aller vers l indépendance, se détacher de sa mère car il aura bien intériorisé les qualités maternelles : sa contenance et sa sécurité. Les attitudes de la mère entretiennent alors le Self de son enfant. 22 WINNICOTT D.W, (1996), La mère suffisamment bonne, (2006), éditions Payot et Rivages, Paris P59 18

La mère est présente pour décrypter, symboliser l environnement à son enfant et ainsi assurer la «continuité de son sentiment d existence». Elle donne du sens aux stimuli environnementaux ou internes non symbolisés afin de maintenir la sécurité interne de son enfant. Les carences maternelles entraînent des ruptures de ce sentiment d existence qui se traduisent par des angoisses que Winnicott appelle «menaces d annihilation». Coeman élargit un peu ce concept. Pour lui, «la sécurité de base» est «Une disposition interne fondamentale pour une expression sereine, posée et efficace de la vie ; se met en place et se développe tout au long de l existence, de la fécondation jusqu à la mort.» 23. Pour lui cette acquisition ne dépend pas que du rapport à la mère et à l entourage mais aussi de «l histoire généalogique», de l enjeu de la fécondation, de la vie utérine et de la naissance. Il dit que la sécurité de base est composée d un «état de sécurité» et d une «dynamique de sécurité». L état de sécurité est le noyau de la sécurité de base construit dans la dynamique relationnelle de la mère et l enfant, permettant à celui-ci d exister. La dynamique de sécurité s exprime au travers du désir de l enfant «de découvrir, de se confronter, de s exprimer dans son sexe, de pouvoir se passer de l approbation systématique d autrui, de pouvoir vivre les différences sans se sentir annihilé.» 24 Nous voyons ici l importance de la sécurité interne de l enfant pour qu il puisse exister et s affirmer dans la rencontre de l autre. Pour S. Robert Ouvray, ce sentiment se rapproche de ce qu elle appelle «sentiment de continuité d être et de vivre». Il se construit par la liaison de quatre grands niveaux d organisations : tonique, sensoriel, affectif et représentatif. Ces quatre systèmes d organisations s articulent les uns aux autres dans le même espace-temps psycho corporel. De plus elle ajoute qu ils s étayent les uns aux autres dans une continuité temporelle. Ainsi chaque stimulation constitue une unité événementielle pour l enfant et un épisode cohérent d une expérience. L enfant se développe ainsi à travers des unités expérientielles qui s articulent, s accordent entre elles et fondent le sentiment de continuité de vivre. Nous voyons ici l importance d un lien entre des stimulations entre elles et avec la représentation. Mais également de l importance de l inscription temporelle pour construire le sentiment de sécurité interne. 23 COEMAN A. et Raulier H de Frahan M. De la naissance à la marche. ASBL Etoile de l herbe. Millau. (2004) P35 24 COEMAN A. et Raulier H de Frahan M. De la naissance à la marche. ASBL Etoile de l herbe. Millau. (2004) P40 19

Le sentiment de sécurité interne influe sur le comportement et la manière d être de l enfant. Il conditionne sa façon de se séparer de sa figure d attachement et d entrer en relation avec les autres. Le sentiment de sécurité interne se construit grâce à la constitution d une enveloppe psychocorporelle. Anzieu parle de Moi-peau. La peau devient une membrane contenante et protectrice qui délimite le Moi et le non-moi. L'enfant ressent alors qu il possède un dedans, un dehors, et un volume. Nous voyons progressivement se dessiner l unité psychocorporelle qui donne naissance au sentiment de continuité d'existence mais également au schéma corporel et à l image du corps. Le Moi-peau de l enfant est là pour maintenir sa vie psychique mais également pour faire pare-excitation aux stimulations intérieures et extérieures qui pourraient le déborder et le désorganiser. Le Moi-peau s étaye sur les expériences corporelles, les expériences de portage. «L appui externe sur le corps maternel conduit le bébé à acquérir l appui interne sur sa colonne vertébrale, comme arête solide permettant de se redresser.» 25 Cet appui interne pourrait maintenir ensemble les différentes parties du psychisme et donnerait à l enfant un sentiment de cohésion de son Moi. J appellerai cet appui interne l axe. 2- Lecture psychomotrice de la sécurité interne a- L Axe Lorsque nous parlons de l axe nous faisons référence à une ligne droite imaginaire, orientée verticalement qui passe par le centre de gravité et autour de laquelle s effectuent les mouvements de rotation. L axe corporel est au centre du corps et du maintien de la posture et de l équilibre. Il constitue le repère fondamental de l orientation spatiale et de la localisation des différentes parties du corps. L existence de cet axe nous offre une assise, un soutien, pour s ouvrir aux autres et à la relation. C est à partir de cet axe que vont se développer les schèmes moteurs, les coordinations, la découverte de l environnement. Pour F. Leplat, l axe serait le lieu de la mise en place de la fonction temporelle, dans sa dimension corporelle : «l axe critère de départ tonique, lieu où pulsent les grands rythmes biologiques et où l origine vient s ancrer dans le premiers aléas de la vie émotionnelle à la source de la posture» 26. Nous comprenons alors que l axe n est pas la colonne vertébrale. En effet d après Coeman, cet axe passe par le trou occipital, le centre de la vertèbre L3, les articulations coxo- 25 ANZIEU D. (1985).Le moi-peau. Paris. Dunod. 2004. P122 26 Conférence : Mme Leplat. La fonction de la maturation et de la régulation tonico posturale comme support à une motricité d action et de relation structurante. 2010 20

fémorales, le centre du genou et le centre des malléoles. Par le biais des mouvements d enroulement / redressement et torsion se met en place la force tonique dans la musculature profonde. Cela permet les mouvements des membres pour la découverte de l environnement et des autres. Cette force tonique participe à la constitution psycho-dynamique de l axe. «Elle va qualifier l axe comme repère, comme point d appui, comme déterminant de la structure individuelle.» 27 L axe corporel s appuie sur la colonne vertébrale mais nous voyons aussi qu il dépend des facteurs relationnels. Nous voyons ici apparaître en filigrane la notion de sécurité interne. L axe est solide et stable, il offre à l enfant un appui interne qui lui permet de rencontrer l extérieur. L enfant se sent tenu en lui, il peut donc s ouvrir aux autres. Les divers expériences et mouvements vont se répartir par rapport à cet axe et vont alors créer la subjectivité de l enfant. Pour G.Haag, l axe se construit au cours de la deuxième étape de la construction de l image du corps, la première étant la constitution de la première enveloppe. Cette deuxième étape passe par la construction de la partie haute du corps, de la tête à la ceinture. Il s agit de la formation de l axe, du sentiment de verticalité. Ce processus se met en place grâce à un phénomène relationnel vécu dans le corps c'est-à-dire l assimilation d un côté du corps aux fonctions maternelles. Au cours de cette étape, l enfant relie la partie du corps qu il assimile aux fonctions maternelles (le côté maman) et la partie du corps qu il assimile à lui-même (le côté bébé). Pendant cette étape, l enfant joue à rejoindre ses deux mains. Il joue la jonction, l articulation entre les deux parties de son corps au niveau de l axe. Cela «formerait en quelque sorte la soudure, le squelette interne, le lien profond qui attache» 28. Ainsi, nous voyons que l axe participe au sentiment de sécurité interne comme appui interne, mais également en tant que partie non négligeable de l image du corps dans l articulation des deux hémicorps et des premières coordinations. L observation de l axialité d une personne nous donne des indications sur la constitution de son image du corps et de ses appuis internes : base de sa sécurité interne. b- Narcissisme En référence au mythe de Narcisse, le narcissisme est l amour porté à l image de soimême. Freud, dans Pour introduire le narcissisme 29, lui accorde une place dans le développement sexuel normal du sujet. C est l unification des pulsions sexuelles sur un objet total, le Moi. Selon Freud, le narcissisme secondaire correspond au fait que«le sujet 27 COEMAN A. et Raulier H de Frahan M. De la naissance à la marche. ASBL Etoile de l herbe. Millau. (2004) P32 28 HAAG G. La mère et le bébé dans les deux moitiés du corps, in Neuropsychiatrie de l Enfance, n 33, 1985 29 DESSUANT P. (1983). Le Narcissisme. Paris. Presses Universitaire de France. 21

commence par se prendre lui-même, son propre corps, comme objet d amour. 30» Le sujet prend son corps comme objet d amour tel qu il a été aimé par ses parents. Il intériorise cette relation. S. Robert-Ouvray parle de «trois mouvements d enroulement, d axialité et de symétrie pour globaliser et unifier l unité psychocorporelle du bébé assurant ainsi sa base narcissique psychomotrice» 31. L hypotonie axiale du bébé l entraîne à s enrouler sur lui-même, à se regarder le nombril. Cet enroulement est indispensable à la vie psychique. L enfant reçoit des stimuli internes et externes qu il analyse petit à petit. Il se construit alors son centre corporel et son noyau psychique. L enfant se construit peu à peu son Moi qui lui permettra plus tard d après S. Robert-Ouvray de «se replier sur lui-même». Le regard de la mère participe aussi au soutien de la base narcissique de son enfant. En effet, le bébé se voit dans le regard maternel. Il se crée ainsi une image de lui-même à travers le regard chaleureux de la mère. De plus, cette image s articule avec des sensations provenant du dos ; cela permet à l enfant d intégrer progressivement l axe. La construction narcissique se termine par la coordination psycho-corporel, c'est-à-dire l assemblage et la mise en sens des sensations que l enfant a reçu pendant ses premiers mois. La coordination permet aussi la liaison des différentes parties du corps entre elles. Ces coordinations psychiques et motrices favorisent l émergence et l ancrage du «sentiment de continuité d être et de vivre» 32. L enfant sent petit à petit qu il forme un tout unique et solide. Ce sentiment est indispensable pour sa survie physique et psychique, tout comme le besoin d attachement. 30 J. LAPLANCHE et J-B PONTALIS. (2004), Vocabulaire de la psychanalyse., Presse Universitaires de France, Paris 31 ROBERT-OUVRAY Suzanne (2007). L enfant tonique et sa mère. Paris. Desclée de Brouwer P78 32 ROBERT-OUVRAY Suzanne (2007). L enfant tonique et sa mère. Paris. Desclée de Brouwer 22

c- Attachement et séparation Les ethnologues montrent l existence d un besoin absolu et inné de l enfant, le besoin d attachement. C est un besoin de contact social considéré comme inné et propre à l espèce. Bowlby montre qu entre l enfant et la mère, les comportements d exploration du milieu et les comportements d attachement sont étroitement liés. Il décrit cinq systèmes comportementaux : «sucer s accrocher suivre pleurer sourire» qui définissent la conduite d attachement. Cette conduite a donc pour but de maintenir la mère à proximité du bébé et le bébé à proximité de la mère. Il y a en effet des conduites d attache et des conduites d appel. L attachement a pour but de maintenir la mère à distance accessible : ni trop près, ni trop loin. Dès le début de sa vie, le bébé utilise ses compétences pour répondre aux sources de stimulations et il recherche la proximité. Au fur et à mesure de son développement, il devient plus sélectif dans sa recherche de personnes. Bowlby dit que «l enfant se construit progressivement une représentation interne de ses figures d attachement ce qui va lui permettre de mieux tolérer leur absence et d anticiper leur retour» 33. Bowlby considère que la figure d attachement est la personne qui occupe une place privilégiée dans la vie de l enfant. Il s agit souvent de la mère, mais l enfant peut multiplier les figures d attachement (père, frères et sœurs) cela ne mettra pas en péril son attachement pour la figure principale. La figure d attachement assure une continuité, une cohérence et une certaine prévisibilité dans les soins et la relation. S. Robert-Ouvray dit que «L attachement se fait principalement par le toucher, la tendresse, le portage, le serrer dans les bras et dans la satisfaction des besoins. Il passe essentiellement par le canal de la tonicité.» 34 Ici S. Robert-Ouvray, nous rappelle que l attachement passe par le Holding, le Handling et le dialogue tonico-émotionnel. Ce processus d attachement commence dès la grossesse. Ce n est pas un processus simple, il engage notamment le détachement. C est en intégrant ces deux processus (l attachement et le détachement) que l enfant crée son autonomie.. S. Robert-Ouvray dit que c est par l intégration des deux pôles opposés attachement/séparation que l enfant accède à son autonomie. Pour elle, «Est autonome une 33 BOWLBY J., 1978, Prototypes de chagrin chez l homme, in J. BOWLBY. Attachement et perte. Tome 2 : La séparation, angoisse et colère. Paris. Presse Universitaire de France. 1978. P 43 34 ROBERT-OUVRAY Suzanne (2007). L enfant tonique et sa mère. Paris. Desclée de Brouwer P193 23