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Transcription:

Délibération Délibération de la Commission de régulation de l énergie du 10 mars 2016 portant avis sur le projet d ordonnance modifiant les modalités d accès des tiers aux stockages souterrains de gaz Participaient à la séance : Philippe de LADOUCETTE, président, Catherine EDWIGE, Hélène GASSIN et Jean-Pierre SOTURA, commissaires. Le point 10 de l article 167 de la loi n 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoit la possibilité pour le gouvernement de légiférer par ordonnance afin «de modifier les obligations de détention de stocks de gaz naturel par les fournisseurs, les modalités d'accès aux infrastructures de stockage de gaz naturel et les missions des gestionnaires de réseaux de transport de gaz naturel en matière de stockage de gaz naturel ainsi que celles de la Commission de régulation de l'énergie, prévues aux articles L. 121-32, L. 134-1, L. 421-4 à L. 421-12 et L. 431-3 du code de l'énergie, afin de renforcer la sécurité de l'approvisionnement gazier et, si nécessaire pour l'atteinte de cet objectif, de réguler les tarifs des capacités de stockage souterrain de gaz naturel». Le 8 février 2016, la ministre de l écologie, du développement durable et de l énergie et le ministre de l économie, de l industrie et du numérique ont saisi la CRE pour qu elle rende un avis sur le projet d ordonnance pris sur le fondement de ces dispositions. Ce projet d ordonnance prévoit que le revenu des opérateurs de stockage sera régulé. Les capacités de stockage seront commercialisées aux enchères, et la différence, positive ou négative, entre les recettes des enchères et le revenu régulé des opérateurs de stockage sera compensée via l introduction d un terme tarifaire dédié dans les tarifs d utilisation des réseaux de transport de gaz. 1. Rappel du contexte Les stockages souterrains de gaz naturel ont un double rôle : ils sont indispensables pour assurer la sécurité d approvisionnement et essentiels au bon fonctionnement du marché du gaz. Les dispositions relatives à l accès aux stockages souterrains de gaz sont définies au titre II du livre IV du code de l énergie. En particulier, de manière à assurer la continuité d alimentation des clients finals en cas de pointe de froid ou de rupture d approvisionnement, l article R. 421-15 du code de l énergie impose des obligations individuelles de stockage aux fournisseurs : tout fournisseur desservant des clients finals raccordés au réseau de distribution est tenu de disposer, au 31 octobre de chaque année, d un volume minimal de gaz en stock et d un débit de soutirage associé. Dans le cadre d une réflexion sur une refonte globale du système d accès des tiers aux stockages, la Direction générale de l énergie et du climat (DGEC) a lancé, en mars 2015, une consultation publique portant sur deux mécanismes envisageables pour répondre aux objectifs de sécurité d approvisionnement et de bon fonctionnement du marché du gaz. La CRE a répondu à cette consultation publique en se prononçant en faveur d une régulation du revenu des opérateurs de stockage et d une commercialisation aux enchères des capacités de stockage. 1 1 Réponse de la CRE du 16 avril 2015 à la consultation publique de la DGEC relative à l accès des tiers aux stockages souterrains de gaz naturel. 1/6

2. Analyse de la CRE sur les objectifs de la réforme du stockage Comme la CRE l a indiqué dans sa réponse à la consultation publique de la DGEC, la réforme de l accès aux stockages a pour objectif de maintenir le niveau de sécurité d approvisionnement en gaz assuré par le système actuel, tout en supprimant ses deux défauts principaux : le manque de transparence sur les tarifs de stockage et la complexité liée au système d obligations individuelles des fournisseurs. Cela suppose : o la régulation des revenus des opérateurs afin de garantir la transparence des tarifs de stockage, et assurer que la sécurité d approvisionnement est garantie au coût le plus juste pour le consommateur final ; o la suppression du système actuel d obligations individuelles de stockage qui est d une grande complexité, aussi bien pour la définition et le calcul par fournisseur de ces obligations que pour la vérification par l administration de leur respect. Le projet d ordonnance transmis à la CRE vise à répondre à ces objectifs en introduisant une régulation du revenu des opérateurs de stockage et en prévoyant l allocation aux enchères des capacités de stockage. La CRE considère que cette réforme, pour être efficace, doit mettre en œuvre un cadre opérationnel assurant une répartition claire des responsabilités entre le gouvernement, la CRE et les opérateurs de stockage : le gouvernement est compétent pour les sujets relatifs au rôle des stockages en matière de sécurité d approvisionnement. Il en est ainsi : o de la définition du périmètre des infrastructures de stockage régulées, qui doit être fondée sur les besoins en capacités de stockages nécessaires pour assurer la sécurité d approvisionnement à court, moyen et long terme ; o de la définition de l assiette de la compensation, collectée à travers une composante additionnelle au tarif de transport. Cette composante vise en effet à affecter, entre les utilisateurs du réseau de transport, les coûts du stockage liés à son utilité en matière de sécurité d approvisionnement ; o de la mise en œuvre de l obligation de dernier ressort, qui a vocation à garantir que les capacités de stockage nécessaires à la sécurité d approvisionnement seront souscrites ; la méthodologie de calcul du revenu régulé des opérateurs de stockage, ainsi que les évolutions annuelles de ce revenu doivent relever de la compétence de la CRE. A partir du moment où il est décidé que les revenus des opérateurs de stockage sont régulés, la CRE considère qu il serait plus efficace de réguler les opérateurs de stockage selon les mêmes modalités que celles applicables aux autres opérateurs d infrastructures régulées (réseaux de transport et de distribution de gaz et d électricité, terminaux méthaniers). Le cadre législatif applicable pour les opérateurs de stockage devrait donc reprendre les principes énoncés dans les articles L. 452-1 et suivants du code de l énergie : en particulier, les coûts des opérateurs sont couverts sous réserve qu ils correspondent à ceux d un opérateur efficace, la méthodologie peut prévoir des dispositifs incitatifs pluriannuels ; l approbation des règles de commercialisation des capacités, y compris des prix de réserve des enchères, doit relever de la compétence de la CRE. L objet même de cette réforme est de passer d une allocation administrée des capacités de stockage à une allocation fondée sur un mécanisme de marché. Ces règles de commercialisation doivent être proposées à la CRE par les opérateurs de stockage, qui sont en mesure d adapter finement ces règles aux évolutions du marché et qui doivent être incités financièrement à maximiser le revenu tiré des ventes de capacités de stockage. La CRE dispose de l expérience nécessaire s agissant des mécanismes d allocation de capacités (par exemple aux interconnexions de gaz et d électricité). 2/6

3. Description et analyse du projet d ordonnance 3.1. Dispositions relatives au périmètre des infrastructures de stockage régulées L article 2 du projet d ordonnance prévoit que les infrastructures de stockage considérées comme nécessaires à la sécurité d approvisionnement à moyen et long terme sont listées dans la Programmation Pluriannuelle de l Energie (PPE). Dans l attente de la prochaine PPE, l article 16 du projet définit la liste des sites entrant dans ce périmètre. L ensemble des capacités de stockage actuellement en service, sous cocon ou même en cours de développement a été intégré au périmètre initial du dispositif défini par l article 16 du projet d ordonnance. Les capacités de stockage régulées représentent un volume de 154 TWh, alors que les capacités de stockage souscrites ont été de l ordre de 115 TWh ces deux dernières années. Ce choix protège les opérateurs de stockage contre tout risque de coût échoué au démarrage du dispositif, et au minimum jusqu à la prochaine PPE. Il conduit à faire supporter aux consommateurs de gaz, par le biais de la compensation assurée par les tarifs de transport, les coûts de tous les projets décidés précédemment par les opérateurs de stockage dans un cadre non régulé. 3.2. Dispositions relatives à la fixation du revenu autorisé des opérateurs de stockage L article 5 du projet d ordonnance prévoit que la méthodologie de calcul du revenu autorisé des opérateurs de stockage est définie par décret, après avis de la CRE. Cette méthodologie peut mettre en œuvre une régulation incitative destinée à encourager les opérateurs à définir leurs offres commerciales de manière à maximiser les ventes de capacités, à améliorer la qualité du service rendu et la performance des installations de stockage, et à encourager les opérateurs de stockage à la recherche d efforts de productivité. Le projet d ordonnance donne compétence à la CRE pour calculer les revenus annuels autorisés des opérateurs de stockage, sur la base des informations fournies par ces derniers. Elle soumet sa proposition aux ministres chargés de l économie et de l énergie, pour approbation. La CRE constate que le projet d ordonnance lui octroie un rôle extrêmement limité dans la régulation des revenus des opérateurs de stockage. La CRE effectuerait le calcul annuel du revenu autorisé des opérateurs, sur la base des informations fournies par ceux-ci. Le gouvernement fixe par décret la méthodologie à appliquer et approuve le calcul annuel qui lui est transmis par la CRE. Au regard des dispositions du projet d ordonnance, la CRE ne sera pas en mesure de définir une régulation incitative pluriannuelle, ni de comparer la performance des opérateurs de stockage français avec celles d autres opérateurs européens. Dans ces conditions, la CRE considère qu il serait plus simple que les opérateurs effectuent eux-mêmes ce calcul et le soumettent pour approbation aux ministres. La CRE considère toutefois que, pour garantir l efficacité de cette réforme, la méthodologie de calcul du revenu autorisé devrait être fixée par la CRE sur la base de principes généraux définis dans le projet d ordonnance. Cela permettrait à la CRE de fixer le revenu autorisé sur une base pluriannuelle, de façon similaire aux dispositions du code de l énergie pour la tarification des réseaux de transport de gaz (articles L. 452-1 et suivants du code de l énergie). 3/6

3.3. Dispositions relatives aux modalités d enchères L article 4 du projet d ordonnance prévoit que les capacités de stockage régulées sont commercialisées selon un mécanisme d enchères, à l exception des capacités nécessaires à l exercice des missions des opérateurs de transport de gaz et des prestataires de conversion de gaz H en gaz B. L article 5 prévoit que les modalités d enchères sont proposées par les opérateurs et approuvées par la CRE après consultation publique. La méthodologie de fixation des prix de réserve des enchères, définis par catégorie de produits, est définie par arrêté après avis de la CRE. Sa mise en œuvre par les opérateurs est contrôlée par la CRE. Les opérateurs sont les plus à même de proposer une offre commerciale adaptée et susceptible de répondre aux attentes de leurs clients en raison notamment des contraintes opérationnelles liées au stockage. En particulier, les opérateurs de stockage sont en mesure d évaluer le niveau de prix auquel le marché est prêt à acheter un produit spécifique. Il est donc logique que les opérateurs de stockage proposent les modalités d enchères. Par ailleurs, la CRE considère que les prix de réserve sont indissociables des modalités d enchères (produits de stockage, calendriers de commercialisation, dispositifs d enchères, etc.). Ces modalités ne peuvent être appréciées et définies que dans leur ensemble. Par conséquent, la CRE considère que les prix de réserve doivent être soumis par les opérateurs à la CRE. En outre, l existence, dans le projet d ordonnance, de deux processus distincts pour, d une part, la fixation des prix de réserve, et, d autre part, la définition des autres modalités d enchères, pose question en terme de calendrier, le second processus ne pouvant, pour les raisons évoquées plus haut, avoir lieu si l arrêté relatif aux prix de réserve n est pas paru. La CRE considère en conséquence que l ordonnance ne devrait pas prévoir que le prix de réserve est déterminé par voie réglementaire. Elle devrait simplement énoncer le principe selon lequel les prix de réserve sont fondés sur la valeur marché du stockage, afin de garantir la réservation effective des capacités. 3.4. Dispositions relatives à la compensation des opérateurs de stockage à travers les tarifs d utilisation des réseaux de transport L article 5 du projet d ordonnance prévoit la compensation des opérateurs de stockage de la différence entre leurs revenus autorisés et leurs recettes. Le calcul de cette compensation est effectué par la CRE. Les montants de compensation sont collectés ou reversés à travers les tarifs d utilisation des réseaux de transport de gaz, les gestionnaires de réseaux de transport jouant le rôle d intermédiaires entre leurs clients et les opérateurs de stockage. Lorsque les recettes prévisionnelles des opérateurs sont inférieures à leurs revenus autorisés, la CRE détermine la méthodologie de calcul et le montant de la contribution due par les utilisateurs du réseau de transport, qui doit tenir compte de la modulation hivernale des flux en sortie du réseau. Un traitement spécifique peut être prévu pour les capacités interruptibles. 4/6

Le système d enchères avec compensation prévu par le projet d ordonnance permet d affecter les coûts du stockage entre ce qui peut être considéré comme sa valeur marché, correspondant au revenu des enchères, et les coûts relatifs à la sécurité d approvisionnement, collectés via la compensation. La CRE est favorable aux dispositions du projet d ordonnance prévoyant qu elle calcule chaque année le montant de la compensation. Elle considère en effet qu il est de son ressort de s assurer de la couverture des revenus autorisés des opérateurs de stockage. Par ailleurs, un décret est prévu pour définir les conditions d application de cet article. S agissant de la compensation, la CRE considère qu il revient au gouvernement de décider sur quels utilisateurs du réseau de transport il convient de la faire porter, dans la mesure où elle reflète la valeur sécurité d approvisionnement du stockage. Le décret précité devrait donc définir l assiette de la compensation. Enfin, la CRE constate une asymétrie entre les dispositions prévues par le projet d ordonnance dans le cas où les recettes des enchères sont inférieures aux revenus autorisés des opérateurs de stockage et celles prévues dans le cas où les recettes sont supérieures aux revenus. Cette différence n est pas justifiée : tant les modalités de compensation que la régulation incitative éventuellement applicable peuvent fonctionner de manière symétrique. 3.5. Dispositions relatives au niveau de remplissage considéré comme nécessaire pour assurer la sécurité d approvisionnement L article 3 du projet d ordonnance prévoit que le ministre chargé de l énergie définit un volume minimal de gaz qui doit être stocké sur le territoire au 1 er novembre de chaque année pour assurer la continuité de fourniture des clients, et un débit de soutirage associé. L autorité administrative vérifie, à l issue du déroulement des enchères, que les capacités correspondantes ont été souscrites par les acteurs de marché, et déclenche, dans le cas contraire, un mécanisme d obligations de dernier ressort des fournisseurs (article 6), qui sont alors tenus de souscrire, dans un délai d un mois, les capacités de stockage manquantes. Le prix de vente des capacités souscrites dans ce cadre est majoré. L article 7 du projet d ordonnance introduit par ailleurs un contrôle annuel, par l autorité administrative, du remplissage des capacités souscrites. S agissant du mécanisme d obligations de dernier ressort prévu par le projet d ordonnance, la CRE est favorable à ce que le prix de vente des capacités manquantes à souscrire soit majoré. En effet, elle considère que ce prix doit avoir un caractère dissuasif pour inciter les acteurs de marché à souscrire les capacités de stockage lors des enchères. 3.6. Autres dispositions Possibilité de résilier ou de renégocier les contrats pluriannuels en vigueur Le II de l article 4 du projet d ordonnance prévoit qu à compter de l entrée en vigueur du dispositif, les contrats pluriannuels souscrits antérieurement à la mise en œuvre des enchères peuvent être résiliés ou renégociés de plein droit. Cette possibilité de résiliation semble en contradiction avec l objectif d assurer la sécurité d approvisionnement, qui passe par la maximisation des souscriptions de capacités de stockage. Par ailleurs la CRE estime qu il est nécessaire d encourager la souscription de capacités pluriannuelles supplémentaires dans le futur. Le projet d ordonnance devrait prévoir la possibilité de commercialiser aux enchères une partie significative des capacités de stockage pour des durées supérieures à un an. 5/6

3.7. Synthèse Les stockages souterrains de gaz ont un rôle essentiel à la fois pour la sécurité d approvisionnement, qui relève de la compétence du gouvernement, et pour le bon fonctionnement du marché, qui relève de la compétence de la CRE. La régulation des opérateurs de stockage est donc complexe, puisqu elle met en œuvre des compétences conjointes du gouvernement et de la CRE. Le projet d ordonnance ajoute à cette complexité naturelle en ne fixant pas un partage de responsabilités clair entre le gouvernement et la CRE. De ce fait, il renvoie à un nombre considérable de textes réglementaires et de délibérations de la CRE (environ dix la première année), rendant le processus extrêmement lourd alors même que le calendrier de mise en œuvre de la réforme est contraint. Cette complexité est inutile et risque de compromettre l efficacité de la réforme. Elle disparaîtrait largement si la CRE était en mesure d exercer normalement ses compétences déjà largement éprouvées en matière de définition du revenu autorisé d opérateurs d infrastructures régulées et de définition de règles d allocations de capacités fondées sur des mécanismes de marché. 4. Avis de la CRE La CRE est favorable au principe de la réforme du système d accès aux stockages, fondée sur la régulation du revenu des opérateurs de stockages et la commercialisation des capacités aux enchères. La CRE estime que sa charge d activité ne saurait être alourdie par des tâches purement calculatoires si elle se trouve privée de la compétence pour définir la méthodologie de calcul du revenu autorisé. Aucun élément ne justifie à cet égard une approche différente de celle des tarifs de transport de gaz. La CRE est, en conséquence, défavorable aux modalités de mise en œuvre de cette réforme proposées dans le projet d ordonnance. Pour que la réforme soit efficace, le projet d ordonnance doit être modifié sur les deux points suivants : - l ordonnance ne doit mentionner que des principes généraux de fixation du revenu autorisé des opérateurs de stockage, et laisser à la CRE la compétence de fixer la méthodologie de calcul du revenu autorisé et de mettre en œuvre une régulation incitative de ce revenu dans des conditions similaires à celles en vigueur pour le transport de gaz ; - la fixation des prix de réserve des enchères doit être incluse dans les modalités de commercialisation des capacités proposées par les opérateurs et approuvées par la CRE. Fait à Paris, le 10 mars 2016 Pour la Commission de régulation de l énergie, Le Président Philippe de LADOUCETTE 6/6