Les usages des circuits courts par les producteurs : analyses des composantes du métier et des impacts sur le territoire



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Transcription:

Fédération Régionale des Civam Rhône-Alpes Université Lumière Lyon 2 CFPPA «Le Valentin» 86 rue Pasteur 26500 Bourg lès Valence 69635 LYON Cedex Les usages des circuits courts par les producteurs : analyses des composantes du métier et des impacts sur le territoire Mémoire présenté par Elisa Tabet Diplôme de Master 2 de Sociologie Appliquée au Développement Local Maitre de stage : Jean-Yves Morgantini Directrice de mémoire : Béatrice Maurines Mémoire soutenu le 15 septembre 2009

Remerciements Avant d ouvrir ce mémoire, je tiens à exprimer ma gratitude envers tous ceux qui ont grandement contribué à son élaboration. En premier lieu j adresse un grand merci à Béatrice Maurines, ma référente universitaire et directrice du master SADL qui m a permis d être impliquée dans le projet de recherche LIPROCO et qui m a apporté tout au long de ce stage un précieux soutien. Je remercie sincèrement mes référents de stage, Jean-Yves Morgantini et Réjane Morgantini, pour leur accueil et leur convivialité, des valeurs chères aux Civam. Je tiens également à remercier les personnes qui composent le comité de pilotage pour leur écoute et leurs suggestions. Merci aussi à Anne Carton, directrice du CRDR pour son appui méthodologique. Merci aux chercheuses du projet LIPROCO et plus spécialement à Emilie Lanciano avec qui j ai réalisé mes premières enquêtes dans le Vercors. Je remercie aussi très spécialement tous ces hommes et ces femmes, agriculteurs(trices) et paysan(ne)s qui m ont ouvert la porte de leurs fermes avec chaleur et qui m ont livré des morceaux de leurs vies. Enfin des remerciements très personnels à Thomas pour ces merveilleux moments d échanges au CFPPA, notre maison de stage, à Joseph avec qui je découvre le monde agricole au quotidien et à Claire pour son soutien inconditionnel et ses précieux conseils. 2

Sommaire Remerciements 2 Sommaire.3 Résumé. 5 Partie introductive. 6 Introduction.... 7 1. Contexte et questionnements à l origine de la commande.... 8 2. Méthodologie et technique d enquête... 9 3. Questionnements sociologiques.. 13 Partie I. Les usages des circuits courts par les producteurs... 15 L agriculture dans la Drôme et la valorisation de ses produits : données de cadrage 16 1. Mise en perspective des pratiques professionnelles et sociales des producteurs en circuits courts..20 1.1. Les pratiques agricoles diversifiées..20 1.1.1 L agriculture biologique et les producteurs en circuits courts... 22 1.1.2 Des petites exploitations diversifiées.... 28 1.2. Des pratiques économiques dans un métier pluriel.. 36 1.2.1 L emploi pour les producteurs en circuits courts.... 36 1.2.2 Emploi et activité : de la création au maintien....40 1.2.3 Un métier pluriel au regard de la viabilité économique...44 1.3. La qualité de vie des producteurs en circuits courts...53 1.3.1 La qualité au centre des pratiques sociales et professionnelle.. 53 1.3.2 La recherche de liberté et d autonomie....54 1.3.3 Qualité, autonomie et recherche de sens...54 1.3.4 Qualité et reconnaissance identitaire.....56 Conclusion...58 2. Une Typologie des producteurs en circuits courts..59 2.1. Précis méthodologique pour la construction de la typologie... 59 2.2. Présentation des 4 typologies de producteurs en circuits courts... 60 Conclusion 70 3

Partie II. Le développement des circuits courts sur un territoire : un enjeu de développement local durable 71 1. Pratiques agricoles en circuit court et durabilité...73 1.1 Les pratiques sociales et professionnelles des producteurs en circuits courts au regard de l agriculture durable..... 73 1.2 Les circuits courts comme outil d une de l'agriculture alternative 74 1.3 L agriculture alternative à l épreuve de l évaluation. 76 2. Le marché local des circuits courts : le déploiement de dynamiques économiques plurielles..79 2.1 Les circuits courts dans une perspective d économie solidaire.79 2.1.1. Le rôle de l économie solidaire dans le développement des circuits courts..80 2.1.2. Des valeurs propres à l'économie solidaire au sein du marché des circuits courts 80 2.1.3. La confiance au cœur de l échange marchand...81 2.2 Des stratégies économiques alternatives...82 2.2.1. Concurrence et stratégies de différenciation par la diversité 83 2.2.2. Stratégies d alliance..84 2.2.3. Le risque de récupération des valeurs alternatives des circuits courts..86 3. L encastrement des pratiques sociales et professionnelles des producteurs sur un territoire..88 3.1 La notion d encastrement...88 3.2 La sociologie appliquée à l étude de l économie plurielle.89 3.3 L encastrement des liens....90 3.3.1Liens entres producteurs et consommateurs.....90 3.3.2Liens entre producteurs.91 3.4 Lien social et autonomie.. 92 Conclusion. 93 Partie III. Vers un espace partenarial autour de l accompagnement des producteurs commercialisant en circuits courts...94 1. Les circuits courts de commercialisation : un sujet de recherche et un objet politique....95 1.1 Un sujet de recherche : le projet LIPROCO 95 1.2 Un objet politique : le Plan Barnier....96 2. Recommandations sur l observatoire des circuits courts 99 Conclusion générale.106 Index des sigles /. 107 Bibliographie..108 Sommaires des Annexes....110 4

Résumé La FR Civam Rhône-Alpes a le projet de créer un observatoire territorial des circuits courts dans la Drôme. Il s agit d un dispositif partenarial pour des échanges de savoirs et d expériences à deux niveaux : horizontaux, entre les organismes de développement agricoles et ruraux du département et transversaux entre producteurs en circuits courts et organismes. L objectif est d observer les producteurs en circuits courts pour mieux développer ces filières sur le territoire. Dans le cadre du stage, une première enquête auprès d un échantillon de producteurs vise à effectuer un «débroussaillage» du complexe paysage des circuits courts sur le territoire drômois. Nous sommes partis de l hypothèse que les pratiques des producteurs en circuits courts sont non-conventionnelles et qu elles créent des dynamiques de développement durable sur le territoire. A travers les données de terrain et des regards sociologiques en particulier, mais aussi agronomiques et économiques, nous proposons de répondre à cette problématique. Dans un premier temps, il s agit de mettre en perspective les données empiriques afin de mieux cerner ces acteurs et comprendre comment ils utilisent les circuits courts dans leur métier. Dans un deuxième temps, à partir des concepts d agriculture durable, d économie solidaire et d encastrement, nous proposons une analyse théorique des circuits courts comme vecteurs de développement local durable. Enfin l analyse de quelques points du contexte institutionnel et les éléments dégagés dans les parties précédentes, donnent lieu à des recommandations pour la mise en œuvre effective du projet d observatoire de la FR Civam Rhône-Alpes. Mots clés : producteurs, circuits courts, diversité, autonomie, durabilité, agriculture durable, économie solidaire, liens sociaux. 5

Partie Introductive Cette étude est réalisée dans le cadre du diplôme de fin d étude du master 2 sociologie appliquée au développement local (SADL) à l université de Bron à Lyon 2. Elle est commandée par la FR Civam Rhône Alpes situé à Bourg lès Valence dans la Drôme. 6

Introduction On observe depuis une quinzaine d'années, un essor des démarches de commercialisation agro-alimentaires qui se structurent, se nourrissent et se développent sur le terreau des ressources «locales». Ces dynamiques se veulent alternatives aux démarches homogénéisantes de l'industrie agro-alimentaire conventionnelle. Au sein des territoires, la palette des acteurs qui co-produisent ces démarches agricoles innovantes est large : il s agit des producteurs, des consommateurs mais aussi des entreprises, de commerçants, sans oublier les organismes de développement et les collectivités territoriales qui s'intéressent de plus en plus à ces filières émergeantes. Le panel de ces démarches est très large : du traditionnel marché de producteurs fermiers, à la vente à la ferme jusqu'au plus innovant point de vente collectif ou AMAP (Association pour le Maintien d'une Agriculture Paysanne). Aussi diversifiée qu'elles paraissent, ces démarches de valorisation des produits agricoles sont définies par la notion unitaire de circuits-courts. Elles touchent aussi à des enjeux territoriaux très divers : renforcer et revaloriser le métier de paysan, légitimer une agriculture durable, paysanne, respectueuse de l'environnement et de l'humain, créer de nouveaux réseaux de solidarité, apporter une meilleure réponse aux attentes des consommateurs en matière d alimentation... Bref toutes ces démarches recèlent en elles des réponses locales à des enjeux sociétaux. Ces démarches de circuits courts font florès en France, dans les territoires ruraux et périurbains. Ce développement a conduit d une part, les organismes de développement agricole locaux, à s y intéresser de plus près pour mener des actions sur leur territoire, d autre part, le monde de la recherche à s'en saisir pour en faire un objet d'étude, d'investigation et d'analyse. C est justement à l intersection du développement agricole local et de la recherche en sciences sociales que se situe ce mémoire sur le développement des circuits courts. Pour ce faire, l entrée analytique choisie est le premier maillon qui forme ces circuits courts : le producteur. Ainsi, à la croisée des regards sociologiques en particulier, mais aussi agronomiques et économiques, nous nous proposons d analyser vingt et une expériences de producteurs qui commercialisent en circuits courts. Des expériences professionnelles et sociales qui seront analysées à l échelle micro de l exploitation et à l échelle méso du territoire en terme de développement local durable. 7

1. Contexte et questionnements à l origine de la commande La structure de stage : la FR Civam Rhône-Alpes La Fédération Régionale des Civam Rhône-Alpes (FR Civam R-A), est une association qui développe des projets agri-ruraux. Bien qu elle soit la tête de réseau en région, le mouvement CIVAM en Rhône- Alpes n'a pas un maillage homogène sur la région mais concentre ses actions dans les départements de la Drôme et de l'ardèche. Cette association s inscrit dans un vaste réseau associatif constitué par le mouvement Civam. Il se décline à l'échelon national, régional, départemental, et micro-local (le groupement Civam, constitués d agriculteurs et de ruraux). La mission générale du mouvement Civam consiste à «accompagner les initiatives des agriculteurs et des ruraux pour des campagnes vivantes, et progresser vers une plus grande durabilité, en plaçant les valeurs de solidarité, de respect et de solidarité au centre de l action». J ai choisi de faire les 5 mois de stage prévus par le master professionnalisant SADL à la FR Civam R- A, car je souhaitais connaitre une expérience de développement local en milieu rural dans le champ agricole. La problématique de l agriculture comme levier de dynamique territoriale m a fortement intéressée. De sucroit ce stage se déroulait dans la Drôme, mon territoire de vie auquel je suis très attachée. Dans le cadre de mon stage, la FR Civam R-A souhaitait mieux cerner une catégorie d agriculteurs : ceux qui valorisent leurs produits en circuits courts sur le territoire drômois. Le paysage des circuits courts en Drôme est dense et relativement opaque sur certains aspects, pour la FR Civam R-A et plus généralement pour les organismes de développement agricole et rural. De ce fait, la FR Civam R-A, en partenariat avec la Chambre d agriculture e la Drôme et le conseil général a monté un projet d «Observatoire des circuits courts dans la Drôme» 1. Parallèlement à cela, la FR Civam R-A s est impliquée comme partenaire socio-technique, dans un projet de recherche au niveau rhônalpin, nommé «Lien Producteurs Consommateur» (LIPROCO) 2. Ce projet cherche entre autre, à étudier le développement des circuits courts et leurs impacts sur le territoire. C est dans l articulation de ces deux projets que nous avons défini ma mission de stage avec mon référant, le directeur de la FR Civam R-A. En terme très général, ma mission de stage visait à faire une enquête auprès de producteurs drômois destinée à créer l'observatoire des circuits courts en Drôme puis à mutualiser les données empiriques et théoriques avec les chercheurs du projet LIPROCO. 1 Le descriptif du projet est présenté en Partie III du mémoire, p 94 2 Idem, le descriptif du projet LIPROCO est approfondi en Partie III p 95 8

La commande de stage La commande initiale portait sur deux niveaux : d une part comprendre comment les agriculteurs organisent l ensemble de leur métier pour commercialiser en filières courtes. D autre part, mettre en lumière la structuration sur le territoire des initiatives de commercialisation en circuits courts. Une commande qui peut être mise sous forme de questionnement comme suit : - Comment et pourquoi les agriculteurs intègrent-ils les circuits courts dans leur projet agricole? - Comment et pourquoi les circuits courts se développent dans la Drôme? Pour répondre à cette double commande nous avons élaboré une méthodologie d enquête de terrain. L objectif général de l enquête était d apporter des éléments d analyse sur les producteurs en circuits courts et sur le développement de ces démarches au niveau du territoire, afin de fournir les premiers matériaux au futur observatoire. Des objectifs spécifiques ont ensuite été définis : - Etablir un état des lieux du poids des différentes démarches en circuits courts dans le Drôme. - Rendre plus lisible les actions portant sur les circuits courts des diverses structures de développement agricole et rural. - Etablir un diagnostic de l usage des circuits courts par les producteurs en Drôme. Une synthèse de la méthodologie opérée est présentée en Annexe 1. Pour chacun de ces 3 objectifs, sont présentés les enjeux, les moyens à mettre en œuvre et les ressources à rechercher. Au niveau du dispositif «humain» de cette enquête, il faut ajouter qu un autre stagiaire en agronomie a été impliqué. Un comité de pilotage a aussi été constitué pour orienter cette méthodologie et définir plus finement les objectifs du projet d observatoire. J étais chargée de présenter les avancées de l enquête de terrain et d animer ce comité de pilotage qui a été réuni quatre fois au cours du stage. 2. Méthodologie et technique d enquête Les étapes méthodologiques Le travail d étude s est articulé autour de trois grandes phases durant le stage : 1. Phase de définition : définir les circuits courts, spécifier la commande et organiser des premières réunions de concertation en comité de pilotage sur les objectifs d une coordination départementale pour accompagner les porteurs de projets en circuits courts. 2. Phase exploratoire : faire des entretiens avec des personnes-ressources. Il s agissait de chargés de missions des structures de développement agricole. Ces échanges recouvraient deux objectifs. Premièrement, mieux cerner leurs missions et rôles dans le développement des 9

circuits courts et obtenir des informations sur les producteurs en circuits courts. Deuxièmement, diffuser le projet d observatoire auprès de ces structures et déterminer leur implication potentielle. De nombreuses références à ces structures rencontrées viendront étayer les analyses. 3. Phase d enquête de terrain : faire des entretiens auprès d un échantillon de producteurs, retranscrire et traiter les données. L objectif était d identifier et de qualifier les pratiques des producteurs en circuits courts. Il faut ajouter une démarche transversale à ces phases successives via le suivi des réunions du projet LIPROCO. Les concepts et hypothèses ainsi que certains outils méthodologiques ont été co-produit avec les chercheurs. Les outils d enquête Pour le déroulement de ces phases d enquête, nous avons construit une série d outils méthodologiques qui ont ensuite été validé par le comité de pilotage. Les principaux outils sont explicités ci-dessous. Commençons par la définition des circuits courts, qui loin d être arrêtée, impliquait une réflexion collective sur la qualification de ceux qui rentraient dans le champ de l enquête. Définition des circuits courts étudiés L'expression «circuit court» ne dispose pas d'une définition stricte. Ainsi, «la notion de circuits longs ou de circuits courts ne renvoie pas à la distance physique entre le producteur et le consommateur, mais au nombre d'intermédiaires entre la production et la consommation» (François et al., 2000: ANDA, 2001) Un circuit court est ainsi généralement admis comme un système de vente mobilisant au maximum un intermédiaire» 3 Au-delà d un intermédiaire, on parle de circuits longs. Au sein des circuits courts il faut bien faire la distinction entre la «vente directe» qui concerne les produits vendus sans intermédiaire et la «vente indirecte» qui est un circuit avec un intermédiaire. Nous utilisons dans ce mémoire le terme de modalité pour designer un type de circuit court. Pour clarifier notre propos, un tableau définissant toutes les modalités de circuits courts étudiées est présenté en Annexe 2. Inventaire et échantillon Dans le cadre des entretiens avec les structures il s agissait entre autre d obtenir leurs différentes bases de données. L objectif était de recenser le plus grand nombre de producteurs en circuits courts. Cependant cette opération d inventaire à rapidement trouvé sa limite dans l impossibilité d être exhaustive, tant les producteurs en circuits courts non référencés sont nombreux. Nous avons constitué 3 L. Chaffote, Y. Chiffoleau,, Vente directe et circuits courts : évaluations, définition et typologie. Les cahiers de l'observatoire CROC, février 2007, n 1, 8 p. 10

un inventaire non-exhaustif de 454 producteurs qui présente diverses informations (coordonnés, types de circuits courts utilisés, type de produits, label). Cela nous a néanmoins permis de sélectionner notre échantillon de producteurs pour réaliser la phase d enquête de terrain. Il faut donc préciser que les producteurs interrogés adhèrent tous au moins à un réseau associatif 4, ce qui est un premier biais à la représentativité de l échantillon. Pour identifier et qualifier les pratiques des producteurs en circuits courts, l hétérogénéité des profils était recherchée. Voici les critères d hétérogénéité utilisés dans la sélection de notre échantillon : Modes et lieux de commercialisation. Pluralité des modes de commercialisation en circuits courts et articulation de circuits courts et de circuits longs. Démarches de commercialisation individuelle et collective. Variété des productions (viticole, apicole, maraichère, laitière, céréalière, élevage) Variétés des opérations de transformation (par un tiers, dans des ateliers de transformation collectif ou privé) Equilibre entre pratiques culturales certifiées en agricultures biologiques et non-certifiées Variété des contextes de l expérience (périurbain, rural profond, zone touristique ). Représentation des cinq entités du département de la Drôme (Drôme des collines, Drôme Provençale, Vercors drômois, Vallée de la Drôme, Diois) Trame d entretien La phase principale qui constitue la substance de ce mémoire est bien la phase d enquête auprès des producteurs via des entretiens semi-directifs. Cinq grands thèmes constituent la grille d entretien auprès des producteurs : parcours avant l installation, description de l activité, mode de commercialisation, relations avec les consommateurs, inscription dans des réseaux professionnels ou institutionnels. La trame d entretien en Annexe n 3 présente de façon détaillée chacun des axes. Il y a un «cheminement», dans les questions posées : des plus objectives (pratiques agricoles) au plus subjectives (les pratiques sociales). Il s agit là d une trame, servant, de relance ou d invitation à poursuivre la présentation sur des aspects qui n auraient pas été abordés. Dans les faits, la chronologie n est pas toujours respectée puisque les personnes rencontrées évoluent librement dans la présentation de leurs pratiques. Les entretiens durent en moyenne 1H 15. Nous 4 Civam, Agribiodrôme, Accueil paysan, Bienvenue à la ferme, Association producteurs du parc du Vercors (APAP). 11

avons fait le choix d en faire des retranscriptions partielles afin de gagner du temps et d avoir un matériau relativement synthétique pour l analyse. Ceci nous conduit à justifier le choix de l entretien semi-directif. Justification méthodologique Pour comprendre les pratiques sociales et professionnelles des producteurs en circuits courts, nous avions le choix entre deux techniques d enquête sociologique : le questionnaire et l entretien. Or, «questionnaire et entretien s inscrivent dans des démarches méthodologiques différentes. Chaque technique représente une situation interlocutoire particulière qui produit des données différentes : le questionnaire provoque une réponse, l entretien fait construire un discours» 5. Nous avons choisi de procéder par entretiens semi-directifs pour les raisons suivantes. Il s agissait de privilégier le point de vue des producteurs et le sens qu ils donnent à leur propre expérience. C est à dire, faire du producteur le principal générateur d information et d analyse. Ce mode d investigation nous paraissant être le plus adapté à une étude large n ayant pas d objectifs arrêtés sur certains points particuliers : «connaitre l ensemble des pratiques d acteurs». Limites de l enquête Trois limites à ce dispositif d enquête peuvent être développées. Leur évocation permettra au lecteur de comprendre certaines faiblesses de ce mémoire. Il y a peu d éléments qui traitent des diverses modalités de circuits courts, bien que cet angle d analyse soit compris dans la commande de stage. Deux raisons à cela : il fallait circonscrire l objet d étude, et dans le cadre d un mémoire de sociologie, le choix opéré a été de privilégier l analyse en terme de pratiques d acteurs. L enquête a révélé qu un producteur utilise systématiquement plusieurs modalités de circuits courts, cette imbrication rendant l analyse par modalité profondément complexe. Il y a aussi peu d éléments sur le contexte territorial. Les analyses mises en perspectives, ne sont pas systématiquement mises en lien avec les spécificités du territoire. Ce travail n est donc pas un diagnostic territorial des circuits courts dans le Drôme. Enfin, un sentiment plus personnel relatif au fait que nous étions deux stagiaires. Nous avons dû travailler en partenariat et construire ensemble la méthodologie d enquête afin de mutualiser nos données et rendre compte de manière cohérente au comité de pilotage de nos avancées et questionnements. Nous sommes de formation disciplinaire différente et avons des contraintes 5 A. Blanchet, A. Gotman, sous la direction de F. De Singly, L enquête et ses méthodes : l entretien, sociologie 128, Nathan Université, Nathan, Paris, 1992, p 40. 12

universitaires et des questionnements personnels aussi très différents. Des compromis ont été faits, des deux cotés et (à mon sens), cela nous a conduit à rassembler énormément d informations éparses. Je trouve que des données plus «sociales» (sur l identité, les liens sociaux, l ancrage sur le territoire) auraient pu être plus finement approfondies et auraient enrichi ce présent travail. 3. Questionnements sociologiques La problématisation Pour répondre à la commande opérationnelle de départ, il s agit de porter l analyse sur un double niveau : - au niveau micro des acteurs pour comprendre leurs pratiques socio-économiques. - au niveau méso du territoire pour analyser l impact de ces pratiques. De ce double niveau d enquête, découle une problématique de développement local : En quoi les producteurs qui commercialisent en circuits courts construisent-ils des pratiques professionnelles et sociales non-conventionnelles? Dans quelle mesure ces pratiques professionnelles et sociales sont-elles vectrices de développement local durable sur un territoire? Les hypothèses de recherche Un corps d hypothèses de recherche cadre cette problématique et constitue l architecture de ce mémoire en trois parties. - Les pratiques des producteurs en circuits courts sont alternatives au modèle agricole conventionnel Le postulat est que les producteurs construisent des pratiques professionnelles mais aussi sociales qui sont en ruptures (non en opposition) avec le modèle agricole conventionnel. Trois points de rupture apparaissent : technique (au niveau des pratiques culturales), professionnel (au niveau des compétences) et éthique (au niveau du sens attribué). C est l alternativité des pratiques qui confère à ces projets agricoles leur efficacité sociale et économique. - Les pratiques des producteurs en circuits courts engendrent des dynamiques de développement durable sur le territoire. Cette hypothèse sous-tend que ces pratiques socio-professionnelles ont des répercutions sur les sphères sociétales d un territoire (environnementale, économique et sociale). Plus précisément, le caractère alternatif de ces pratiques va dans le sens des préceptes du développement durable. 13

- Pour renforcer les dynamiques territoriales engendrées par les circuits courts, il faut renforcer les pratiques des producteurs. Cette dernière hypothèse s oriente sur la direction à donner aux projets de développement des circuits courts. Le postulat ici est que les producteurs sont au cœur des dynamiques en circuits courts qui constituent un levier de développement durable. Ces acteurs ont besoin d être accompagnés et soutenus par les institutions et les structures de développement local pour améliorer l efficacité économique et sociale de leurs pratiques. La posture de recherche Ce travail de recherche en sociologie appliquée au développement local se structure comme suit. La première partie de ce travail se situe dans une démarche compréhensive à travers la mise en perspective des données empiriques sur les pratiques issues des entretiens avec les acteurs. La seconde partie est analytique car il s agit d analyser théoriquement les impacts des pratiques déclinées précédemment en terme de développement durable. Le corpus théorique de cette partie est constitué de concepts sociologiques tels que l encastrement, l hybridation, issus du courant de la nouvelle sociologie économique. La troisième partie plus descriptive met en relief les composantes du projet de la FR Civam Rhône- Alpes, d «observatoire des circuits courts dans la Drôme». Le contexte institutionnel et les éléments dégagés dans les parties précédentes donnent lieu à des recommandations pour la mise en œuvre effective de ce projet. Pour clore cette partie introductive, je souhaite spécifier que ce travail se nourrit de trois types de savoirs : le savoir sensible des agriculteurs 6, le savoir technique et théorique des chargés de missions rencontrés et des chercheurs côtoyés. Je précise donc que ce mémoire s adresse également à ces trois types d acteurs. Certaines parties sont plus orientées vers l analyse opérationnelle et d autres plutôt axées sur de la théorie, mais je me suis attachée à allier tout au long de ce mémoire : - Des analyses issues de l enquête de terrain visant à apporter des clés de réflexion opérationnelles pour le projet de la FR Civam Rhône-Alpes. - Des données spécifiques issues du contexte drômois faisant écho à une perspective plus large de développement durable local des circuits courts. - Des théories sociologiques et d autres disciplines (économie et agronomie) qui viennent étayer les dires des acteurs et apporter une épaisseur théorique à l enquête de terrain. A la demande du comité de pilotage, des encarts synthétiques viennent clore les diverses parties et les notions clés sont en caractères gras. Cela permet une lecture transversale plus rapide. 6 Un savoir de la praxis au sens d'hannah Arendt, La crise de la culture, Folio, Paris, 1972 (1954), 357p. 14

Partie I. Les usages des circuits courts par les producteurs Dans ce chapitre, il s agit de soumettre à l analyse les usages que font les producteurs des circuits courts. Si nous parlons des usages c est parce il s agit pas dans ce travail de mettre en exergue une multitude de clés de réflexion permettant de comprendre «comment et pourquoi des producteurs intègrent les circuits courts dans leur projet agricole et dans leur projet de vie». En premier lieu, il s agit d apporter aux lecteurs quelques éléments du contexte agricole du territoire d enquête. Ces données de cadrage permettent de dresser un état des lieux des circuits courts dans le Drôme et d apporter des éléments de compréhension aux deux parties suivantes. En première partie, nous mettrons en perspective des pratiques sociales et professionnelles de producteurs en circuits courts. Ces analyses sont issues d entretiens réalisés auprès d échantillon de 21 agriculteurs drômois qui commercialisent leurs produits en circuits courts. L objet de cette partie est de soumettre à l analyse leurs pratiques agricoles, économiques et sociales dont découlent : des savoirs, des valeurs, des réflexions, des motivations, des compétences, des stratégies, des relations Bref, des savoirs-faire et des savoirs-être qui sont alternatifs vis-à-vis du modèle agricole conventionnel. En second lieu, une typologie des producteurs rencontrés sera présentée. Cette modélisation recouvre un objectif double : synthétiser les diverses pratiques mises en lumière en première partie et rendre compte de l hétérogénéité de la population, en proposant quatre trajectoires particulières. 15

L agriculture dans la Drôme et la valorisation de ses produits : éléments de cadrage Des productions très diversifiées En Drôme, les productions sont très diversifiées, tant sur le plan des produits que des pratiques et des revendications aux différentes familles de l agriculture (conventionnelles, raisonnées, fermières, paysannes, biologique). La majorité des productions françaises y sont représentées 7. Cette diversité s est maintenue par la pression des composantes pédo-climatiques, topologiques, mais se sont aussi construites par les savoir-faire des femmes et des hommes des différents territoires. Les types de structures présentes dans le département vont des exploitations extensives de l arrière pays au relief escarpé, aux exploitations intensives de plaine, souvent petites en taille et à des productions spécialisées. Les activités dominantes sont la production fruitière, la viticulture qui tient une place majeure avec plus de 83 % du vignoble en Appellation d Origine Contrôlée (AOC) ainsi que les grandes cultures (oléagineux et céréales). Structure des productions agricoles des exploitations de la Drôme en 2005 100% 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Données AGRESTE Drôme Autres animaux Lait Volailles et œufs Autres végétaux Maraîchage et horticulture Céréales et plantes industrielles Vins Fruits 7 Source enquête de l agreste sur les exploitations agricoles, 2005. Les sources du paragraphe suivant sont issues de ce même mémento, ainsi que du Mémento agricole et rural d Agreste Drôme 2006. 16

La Drôme se compose de 5 entités territoriales diversifiées, d où cette diversité de production. L'agriculture constitue une activité essentielle dans le département. Sa production, de l'ordre de 630 millions d euros, la place au tout premier rang de la Région Rhône-Alpes. A titre de comparaison il y a deux fois plus d emplois dans le secteur agricole dans la Drôme qu en Rhône-Alpes (2,3% d emploi dans l agriculture sur l emploi total). La surface agricole utilisée (SAU) de la Drôme est conséquente. Elle correspond à 26% de l ensemble de la surface du territoire mais reste en deçà du pourcentage régional qui est de 37% de SAU. Par contre en nombre d exploitations, la Drôme est le département qui de loin, regroupe le plus d exploitations (7 113 exploitations en 2007). L'agriculture drômoise est donc composée de petites exploitations en surface (moyenne de 33 hectares contre 54 hectares au niveau national) qui se sont maintenues, alliant souvent la polyculture avec des productions spécialisées telles que l'aviculture, les fruits et légumes, les vins, les semences, les plantes aromatiques, l'élevage... La Drôme a connu une régression moins importante (- 20 %) qu au niveau régional (- 27 %) ou national (- 24 %) du nombre d exploitations entre 2000 et 2007. Les démarches qualités Les producteurs du département jouent la carte de la qualité à travers un éventail important de certifications. La Drôme possède 51 AOC 8 et 4 IGP 9 sur son territoire. En 2007, 27% des producteurs ont des produits AOC, alors que la moyenne est de 3% en Rhône-Alpes et 5% sur le territoire national. Le département est aussi le premier de France en Agriculture Biologique (AB). Le recensement agricole de 2008, comptabilisait 4600 structures professionnelles en Drôme dont 615 en agriculture biologique, soit 13, 4 % des exploitations professionnelles. La surface agricole utile (SAU) biologique de la Drôme est de 10,7 %, soit 5 fois plus que la moyenne nationale qui est de 2 %. Mais si l on comptabilise les exploitations non professionnelles on arrive à plus de 20 % de la production en AB, ce qui place la Drôme, au premier rang national tant par sa surface cultivée en AB que par le nombre de ses exploitations (à la deuxième place vient le Gard avec 367 exploitations certifiées AB). Symbole de la force de l AB au niveau agricole, un périmètre phare dans le développement local de l AB, nommée la «Biovallée» a été défini par un zonage créé sur une partie de la région du Diois. Anciennement Pôle d excellence rurale, cette zone est désormais un «grand projet de développement Rhône-Alpes», bénéficiant de subventions régionales et servant de vitrine à la politique agricole mise en place par le départementale pour promouvoir l agriculture biologique. 8 AOC : Appellation d origine contrôlée 9 IGP : Indication Géographique Protégée 17

Les structures de transformation L agriculture dans la Drôme est aussi fortement marquée par les nombreux savoir-faire de transformation qui sont liés à ses produits. Que ce soit en transformation fermière, collective ou industrielle, le territoire offre beaucoup de produits élaborés, en regard à sa production de matières brutes. Ainsi, la transformation fromagère, la vinification, la distillation (huiles essentielles), la fabrication de l huile d olive, la biscuiterie, la fabrication de nougat sont des transformations très ancrées sur le territoire. Cependant, pour certaines productions, notamment pour les fruits, les ateliers de transformation collectifs se trouvent à l extérieur du territoire, (alors qu il y a trois ateliers de presse en Ardèche). La transformation dans les fermes est une réponse à ce déficit, mais elle nécessite une organisation car c est une activité chronophage nécessitant de multiples manipulations, une formation adéquate et surtout, de lourds investissements et des réglementations contraignantes. La transformation au sein même des fermes est pourtant un enjeu fort qui permet aux producteurs de commercialiser eux-mêmes leurs produits finis directement au consommateur ou à un intermédiaire. Les deux projets d atelier de transformation collectifs recensés (à Nyons et à Die) montrent bien que le déficit de l existant est réel. Notons enfin que les coopératives assurent une grande partie de la transformation dans certaines filières (olive, vin, lait ). Or dans certains systèmes coopératifs, le principe du «tout venant», oblige les producteurs à donner la totalité, du moins une très grande partie de leur production. Ce principe s avère être un frein à la commercialisation en filières courtes pour les producteurs souhaitant utiliser les deux systèmes. Une part importante de commercialisation en vente directe 30,0% Agriculteurs ayant une activité de vente directe sur l'exploitation 25,0% 20,0% 15,0% 10,0% 2000 2005 2007 Source : Agreste 2000, 2005, 2007 Drôme Rhône- Alpes France Selon la statistique agricole nationale, la proportion d agriculteurs drômois se déclarant avoir une activité de vente directe entre 2000 et 2007 est passée de 21% à 27%. Il faut toutefois prendre ces chiffres du recensement agricole avec réserve car : 18

- ces statistiques peuvent englober à la fois des producteurs qui vivent uniquement de ce mode de commercialisation et des producteurs qui vendent accessoirement un produit par an, - ces statistiques ne comptabilisent pas les exploitations non-professionnelles ayant très souvent recours aux circuits courts de commercialisation, - de surcroît les statistiques de 2005 et 2007 sont issues d enquêtes partielles. Ces chiffres sont donc peu pertinents en valeur absolue et ne reflètent pas la réalité du paysage drômois des producteurs en circuits courts. Mais on peut néanmoins en conclure que l activité de vente directe est très supérieure à la moyenne nationale (près du double), et que la tendance est très nettement à la hausse dans le département entre 2005 et 2007. 19

1. Mise en perspective des pratiques professionnelles et sociales des producteurs en circuits courts 1.1 Des pratiques agricoles et organisationnelles diversifiées Les analyses de cette partie sur les pratiques agricole sont issues des données d enquête de terrain. Le tableau page suivante «Tableau synthétique des caractéristiques des exploitations visitées», rend compte de ces résultats. Il comporte 4 types de données : les grands types de production, les pratiques de transformation, les surfaces associées (en colonnes) et les pratiques en agriculture biologique (en couleurs de caractères). 20

LEGENDE des couleurs PRODUCTE URS Cédric maraichè re arboricole apicol e NATURE DE LA PRODUCTION animale (élevage) X (0,3 ha parc à truites) laitière céréalièr e vinicole Autre Atelier (professionnel) TRANSFORMATION cuisine du lieu de vie Brice X (1,2) 1,2 ha X (12 ha oliviers, presse à huile d'olive + nectar Paul abricotiers) tapenade 12 ha Marc et Christine Stéphane Hubert X (2 ha) X( 10 ha abricotiers, pêchers, cerisiers) X (truites et escargots) X( 0,8 parc à lapins angoras) X (12 ha céréales) abattoir et produits dérivés atelier de tissage et confection confiture ailleurs nectar groupemen t pour la transformat ion de la laine Julien X (volailles) X tuerie, découpe 35 ha Nicolas GAEC La grange Elisabeth et Claude Christelle et Fabien Marie et Frédéric Joelle et René Dany Francine Magalie et Serge Christèle Emmanuelle Cécile Lilianna et Luc X (0,3 ha) X ( 8 ha noyers, pêchers, abricotiers) X ( 1 ha noyers) X (1 ha abricotiers) X (8 ha noyers) X (20 ha tilleuls et noyers) X (3,5 ha) X (0,2 ha) X (4 ha) X (volailles) X (volailles) X (moutons, volailles) X (chèvres angoras) X (1 ha parc escargots) Label AB En conversion Pas le label AB aaaa X (moutons) X (40 ha prairie pour les vaches) X (50 ha prairieva ches) X (chèvres) X (vaches) X 12 ha X (accue il à la ferme) X (accue il à la ferme) X (accue il à la ferme) Aline et Jean- Luc TOTALE PAR FILIERE DE PRODUCTIO N 3 7 3 8 5 1 1 3 fromagerie fromagerie cave de vinification fromagerie Gite atelier de tissage et confection + gîte miellerie abattoir, surgelation et crème miellerie miellerie Gîte confiture repas pour la table d'hôte repas pour la table d'hôte produits dérivés du miel produits dérivés du miel produits dérivés du miel bocaux épicerie fine repas pour la table d'hôte * La surface totale ne correspond pas à la surface agricole utile mais aux surfaces possédées par les agriculteurs. Par contre pour chaque production il s'agit de la SAU donc leur addition est souvent en deçà de la surface globale. abattoir abattoir groupemen t pour la transformat ion de la laine abattoir SURFAC E GLOBAL E * 3000 m carré 24 ha inconnu 0,8 ha 12 ha 42 ha 80 ha 14 ha 1, 5 ha 8 ha 12 ha 6 ha 12 ha 2 ha 0, 2 ha 7 ha 3000 mètres carrés 70 ha Moyenne des surfaces globales : 16,5 ha 21

1.1.1 Les producteurs en circuits courts et l agriculture biologique La corrélation entre production bio et vente en circuits courts ne peut être établie à priori car ici encore les données officielles manquent ou restent imprécises. D après le recensement d Agribiodrôme, 550 producteurs sont en bio ou en conversion et parmi eux, 283 agriculteurs labellisés AB 10 valorisent leurs produits en vente directe. Il faut bien noter que ce chiffre ne tient donc pas compte de la vente indirecte. Nous pouvons avancer le fait qu au moins la moitié des exploitations en agriculture biologique drômoise commercialisent en filières courtes (Plus de 283 sur 615 exploitations). Dans les entretiens menés aussi bien avec les structures de développement agricole qu avec les producteurs, transparaissent les complexes relations qui se nouent entre production AB et locale. Il s agit dans cette première partie de tracer les contours des convergences, divergences de l agriculture bio/local, qui est un sujet de recherche en soit et un enjeu socio-économique et politique de taille. Le Grenelle de l environnement a fixé des chiffres très ambitieux pour développer l AB : à l horizon 2012, un objectif de 20 % de produits biologiques, dans la restauration collective publique 11.Et la part de la surface agricole consacrée à l agriculture biologique doit atteindre 20 % d ici 2020. L exemple des injonctions du Grenelle de l environnement met en lumière le fait que le label AB comme tout processus de labellisation, porte en lui le sceau de l exclusion. Ainsi le risque que court l agriculture fermière de proximité non certifiée AB est d être concurrencé par des exportations de produits biologiques européens à prix concurrentiels. C est pourquoi est née «Bio et Local, c est l idéal», une campagne que menée depuis trois année consécutives, par Corabio, 12 pour développer l agriculture biologique locale en Rhône-Alpes et sensibiliser sur ces enjeux bio/local avec les collectivités territoriales, de plus en plus nombreuses à inscrire leur action politique dans une perspective de développement durable. 1.1.1.1 Les agriculteurs certifiés AB Dans les enquêtes faites auprès des agriculteurs en circuits courts, l adoption ou non de la certification AB est analysée comme un moyen au service de fins de nature très diverses. Voici quelques uns des usages de l AB par les producteurs en circuits courts rencontrés. Parmi les 21 agriculteurs interrogés pour l enquête, 6 ont le label AB et 2 sont en conversion, donc 48% des exploitations interrogées sont certifiées (ou en voie de l être). 10 Source : base de données d Agrobiodrôme 11 Circulaire signée par le premier ministre en 2008 Grenelle de l environnement. 12 Corabio est la coordination Rhône-Alpes de l'agriculture biologique. 22

D après le tableau précédent, parmi les 8 producteurs en agriculture biologique, toutes les filières de production sont représentées hormis les céréales. Dans tous les cas, la motivation premièrement évoquée est la volonté d apporter une preuve de la qualité de leur produit aux consommateurs. Etayons cette motivation première par les arguments évoqués par les producteurs interrogés. Une seule agricultrice répond que c est uniquement par conviction éthique et/ou militante. En effet elle déclare ne trouver aucune plus-value à être certifiée AB et nature & Progrès au niveau financier et technique, et ce, tant au niveau de la production que de la commercialisation. Pour elle, ces labels constituent avant tout, un symbole d appartenance à une autre manière de concevoir les pratiques culturales, le rapport à la terre et à la nature. Dans ce cadre (unique parmi les agriculteurs interrogés), on peut avancer le fait que c est essentiellement un choix guidé par des valeurs éthiques. Les 7 autres agriculteurs répondent de manière beaucoup plus pragmatique. Certes, les valeurs sont systématiquement invoquées mais elles ne sont qu une composante du choix parmi d autres, de nature plus stratégique. Cette question de stratégie induit un calcul coût/avantage donc une certaine rationalité économique. On peut relever cinq facteurs stratégiques principaux: le partage des valeurs l opportunité, la demande des consommateurs, la demande des intermédiaires, une différenciation sur le marché des circuits courts. Voici deux exemples d installation en certification bio où ces facteurs stratégiques sont hybridés. Un maraicher a fait de le choix de la conversion du fait de la conjonction de 3 facteurs : il partage les valeurs de la bio, il a eu l opportunité de racheter une terre déjà exploitée en bio et dans son projet c était un moyen de vendre plus facilement ses produits. «Mon prédécesseur était en bio et il m a aidé dans l installation la première année. Je n avais jamais semé une graine, donc je ne me voyais pas démarrer en utilisant des produits chimiques, autant démarrer comme un jardinier c est à dire, naturellement. Et puis ça permettait aussi, même si je n en suis pas si sûr aujourd hui, de vendre plus facilement». (Brice, 35 ans, maraicher dans la vallée de la Drôme) Un pisciculteur s est installé en bio d une part parce qu il défend les valeurs de la bio, d autre part parce que les gens ont besoin d une certification, surtout pour le poisson, car «la pisciculture est très décriée [ ], les gens sont anti-poisson d élevage, il faut regagner la confiance des gens». (Stéphane, 29 ans, pisciculteur et héliciculteur dans le Vercors). Et enfin, il avait remarqué qu on trouvait peu de poissons bio à des prix abordables et s est placé sur ce créneau pour approvisionner les PVC 13 et les magasins bio. C est pour se démarquer de ces confrères 14 et déjouer la concurrence locale, qu il a choisi de différencier sa production de poissons via le label AB. 13 PVC : point de vente collective 14 Sur 7 pisciculteurs commercialisant en circuits courts, dans la Drôme, 5 sont situés dans le Vercors drômois. 23

Le facteur de la demande des consommateurs ou d un intermédiaire est déterminant pour les agriculteurs qui se convertissent. Dans les 3 cas suivants, il est important de préciser qu avant la conversion, les pratiques culturales étaient très proches des critères de l agriculture biologique. Des viticulteurs ont des pratiques «bio» depuis l installation voici 15 ans, mais ils ne commencent la conversion qu actuellement et uniquement pour une partie du domaine car il y a un changement dans la demande des consommateurs, «actuellement, les gens veulent du label et des preuves, nous avons donc cru bon d officialiser nos pratiques». (Christelle et Fabien, viticulteurs dans le crestois). On retrouve le même schéma pour un arboriculteur en agriculture raisonnée en conversion «Quand on est en contact avec les gens, ils n arrêtent pas de nous demander [de passer en bio]». Nicolas, 38 ans, éleveur et arboriculteur dans le Diois Un GAEC 15 dans le Vercors a été incité par la laiterie qui voulait créer une gamme de lait bio. C était une opportunité pour le GAEC car la laiterie a aidé financièrement à la conversion et elle proposait un prix d achat plus élevé. De ce fait, la partie de fromage en vente indirecte est passée en bio elle aussi, ce qui a plu aux intermédiaires en circuits courts (restaurateurs et supermarchés) avec lesquels ils travaillent. «On a été motivé au début. Et puis sur nos produits les gens trouvent que c est un plus. Ca marche bien en ce moment le côté eh bio, bio-mode».( Nanou, 47 ans, partie commerciale d un GAEC laitier dans le Vercors.) Pout les producteurs en circuits courts, l installation et la conversion en certification AB est motivée par des valeurs éthiques mais aussi par une conjonction de facteurs stratégiques tels que : la faisabilité technique, une différenciation sur le marché des CC, l effet de mode, la demande des consommateurs et/ou des intermédiaires en vente indirecte. 1.1.1.2 Certification AB et commercialisation en filières courtes Les deux exemples suivants illustrent la congruence entre production AB et commercialisation en filières courtes. Un oléiculteur certifié AB ne trouvait pas de filières de commercialisation en circuits longs pour valoriser financièrement ses produits certifiés. «Donc j y suis venu par sauts successifs (aux circuits courts) et il y a eu le virage du bio qui m a poussé à commercialiser en direct». (Paul, 55 ans, oléiculteur et arboriculteur en Drôme Provençale). Cette interrelation se comprend par le fait que les filières biologiques sont peu structurées au regard de l industrie l agro-alimentaire conventionnelle. La vente en filière courte est donc une alternative pour vendre à un meilleur prix une production certifiée AB. On retrouve cette logique chez des éleveurs d agneaux commercialisant une petite partie de leur viande certifiée AB en direct par «réseau de connaissances». Ils arrivent à répercuter sur le prix de vente la qualité AB. «Ca nous fait plaisir de 15 GAEC : Groupement Agricole d'exploitation en Commun 24

les vendre un peu plus cher parce que nous en bio on n a aucune revalorisation sur le produit qu on donne à la SICA 16 des agneaux des Alpes». (Aline et Jean-Luc, 43 et 44 ans, éleveurs et arboriculteurs dans la vallée de la Drôme). Outre une meilleure valorisation de la qualité biologique d un produit par un prix plus élevé, la corrélation entre bio et filière directe se vérifie par la circulation de plus de volume de produits biologiques que dans la filière conventionnelle. D après l exemple de la filière fruits et légumes étudiée par l observatoire CROC 17, au niveau national, 39 % des légumes biologiques en volume sont achetés sur les marchés de détail contre seulement 17% pour les légumes non biologiques. 18 Les circuits courts de commercialisation s avèrent plus adaptés à la valorisation de productions agricoles en agriculture biologique que les circuits conventionnels. 1.1.1.3 Les producteurs non certifiés AB Les 13 autres producteurs interrogés ne sont pas certifiés AB. Voici les divers arguments mis en avant dans le choix de ne pas se convertir. 2 agricultrices refusent le label car certains agriculteurs biologiques qui le défendent vont exclure les autres formes d agricultures (et d agriculteurs). «Le logo AB est aussi pour une catégorie de gens qui sont malheureusement intégristes, c'est-à-dire qu ils ne vont même pas écouter quelqu un qui travaille de la même façon et qui n a pas le label. Ces gens là sont bornés, ils ont des œillères.» (Christèle, 40 ans, hélicicultrice dans la vallée de la Drôme) Il faut ajouter que les agriculteurs certifiés critiquent aussi cet effet pervers de l exclusion engendré par le label et par certains agriculteurs qui l adoptent «C est bien le bio mais il y aussi beaucoup de produits naturels qui ne sont pas bio mais presque et qui se retrouvent à l écart, c est embêtant». (Aline et Jean-Luc, 43 et 44 ans, éleveurs et arboriculteurs dans la vallée de la Drôme) 3 autres évoquent l aspect contraignant et voient le label comme une injonction à devoir se justifier. Voici le point de vu d une apicultrice, «le miel est le produit le plus «naturel» qui soit. Le label est une contrainte (financière et administrative) et je ne cautionne pas le fait de justifier d un produit qui est en soit naturel.» (Cécile, 42 ans, apicultrice dans le Vercors) 16 SICA : société d'intérêt collectif agricole, dans ce cas là c est une coopérative d éleveurs. 17 L Observatoire CROC-COXINEL étudie le développement des circuits courts par des enquêtes de terrain en Languedoc-Roussillon et des recherche en sociologie et agronomie. Voir p 99 18 Source : Interfelbio 25