Les travaux de Jean Julo : apports de la psychologie cognitive
QPG 1: qu est ce que des psychologues ont à apporter aux didacticiens des mathématiques?
Remarque : jean Julo n est pas le seul psychologue cognitiviste dont les travaux ont alimentés la recherche en didactique des mathématiques. Raymond Duval : registres de représentations sémiotiques (cadres) Gérard Vergnaud : champs conceptuels
Remarque 2 : les psychologues dont il est fait mention ci-dessus ont tous réalisé de nombreux travaux empiriques et recherches de terrain, en collaboration avec des enseignants de mathématiques ou des chercheurs en didactique, en particulier dans le cadre des Irem.
«Quel que soit l ordre des nécessités théoriques, l apport des psychologies cognitives est indiscutable,(..) en ce qu elles nous éclairent sur les rapports personnels aux savoirs ou sur les conceptions ( ) dont la connaissance est essentielle, en particulier lors de la construction des ingénieries didactiques ou de l élaboration des situations didactiques.» (Sylvette Maury, rfp n 137)
Revenons à Julo Son postulat : c est au niveau de la résolution de problèmes qu il faut chercher l une des principales causes d échec. Remarque : ce n est pas une problématique nouvelle (cf. Polya, dès 1945)
L originalité de Julo, ce n est pas la problématique formulée, c est son traitement! Selon lui, l aide à la résolution de problème consiste à «chercher à prendre en compte le mieux possible les relations entre une tâche donnée... et le fonctionnement cognitif induit par cette tâche.. Le but est que ces relations soient les plus fructueuses possibles du point de vue d un objectif donné».
Il ne s agit donc pas, selon lui, de guider l élève vers une procédure particulière le conduisant à la solution, ni de l entraîner à utiliser des stratégies cognitives, mais de l aider à se représenter le problème.
Pour pouvoir aider les élèves à se représenter le problème, il faut analyser le processus de représentation du problème. Jean Julo (1) décrit trois (sous) processus en jeu quand on résout un problème. (1) - Jean Julo, Représentation des problèmes et réussite en mathématiques, Presses Universitaires de Rennes-1995
1) Interprétation et sélection L élève est face à un contexte sémantique, qu il doit interpréter, ce qu il fait, guidé par les connaissances qu il a à un moment donné. Il serait faux de penser, d après lui, que les informations dont l élève à besoin pour résoudre le problème sont là, bien visibles
Un exemple (fourni par Catherine Houdement) Considérons les quatre énoncés suivants : Calculer le nombre de tulipes dans : - Un massif de fleurs, formés de 60 tulipes rouges et 15 tulipes jaunes; - Un massif de 60 rangées de 15 tulipes; - Un massif de 60 fleurs, formé de tulipes et de 15 jonquilles; - Un massif, sachant que 60 tulipes sont disposées en 15 massifs identiques.
Ces problèmes se ressemblent : même contexte, mêmes valeurs numériques, même question. Comment arrivons-nous à les discerner quant au traitement à mener pour arriver à la solution?
J.Julo nous dit que nous interprétons le contexte sémantique et nous lui associons spontanément une opération car nous avons les connaissances qui ont créé cette association, nous avons construit des associations entre contexte et opération numériques, associations que Julo nomme «schémas de problèmes».
2) Structuration La représentation d un problème ne se construit pas de façon juxtaposée, mais elle forme un tout cohérent qui se structure. Ainsi, les élèves restent parfois bloqués dans la résolution d un problème parce qu ils n envisagent pas de sortir du cadre qu ils se sont fixé et qui pourtant n est pas efficace.
Exemple Reliez les neufs points par une ligne brisée de quatre segments qui passe une fois et une seule par chacun des points.
Remarque : le lecteur est souvent bloqué parce qu il a structuré (de sa propre initiative) la figure en un carré. Et qu il (se) refuse à en sortir
3) Opérationnalisation C est le processus qui permet le passage à l action effective (calculs, tracés ) ou mentale (raisonnement, ). Ce processus résulte de la mise en œuvre de connaissances opératoires, issues de nos expériences passées.
D où la question : comment aider l élèves à construire ces connaissances?
D où la question : comment aider l élèves à construire ces connaissances? Remarque : pas seulement les connaissances opératoires, que nous venons de citer, mais aussi les connaissances permettant d interpréter le contexte (voir 1)
Réponse : en résolvant des problèmes!
Quelques pistes.pour aider ni trop, ni trop peu (dixit Julo) Théoriquement, l aide devrait: - ne pas contenir d indices sur la solution, - ne pas orienter vers une procédure de résolution, - ne pas suggérer de modélisation du problème.
En pratique, on est conduit, assez souvent, à transgresser ces critères, principalement pour deux raisons : 1) de véritables aides à la représentation (correspondant aux trois critères) sont difficiles à concevoir 2) Les élèves ne sont pas prêts à les recevoir comme telles, le contrat propre à une intervention du type «aide» contenant pour eux l idée d une immédiateté de l efficacité opératoire
Les contraintes énoncées servent plutôt de cadre de référence (garde-fou)
Un exemple de problème et d aides possibles : les crêpes source : article Grand n 69 de j.julo
Constat Beaucoup d élèves de 6 ème et de 5 ème ne parviennent pas à le résoudre
1 ère aide possible : la multiprésentation Remarque : elle remplit les trois critères Qu est ce que c est? On propose l énoncé conjointement avec deux autres énoncés strictement isomorphes (même structure, mêmes valeurs numériques et mêmes solutions). Sans relever cette particularité des énoncés, on demande aux élèves de résoudre le problème de leur choix ou les trois problèmes (dans l ordre de leur choix ou successivement, l ordre étant imposé par l enseignant).
Dans le cas des crêpes, ça peut donner ça :
Autre piste d aide : demander aux élèves de noter les différences et les ressemblances entre les trois énoncés Remarque : c est ce que l on appelle une tâche surajoutée. Beaucoup d aides relèvent de cette catégorie, mais c est souvent au prix du renoncement à l un ou l autre des critères évoqués précédemment.
Troisième aide possible : suggérer de «faire un tableau» -> c est (aussi) une tâche surajoutée -> on a renoncé au troisième critère, puisque l on propose un outil de modélisation -> ça pourrait être pire (du côté du renoncement aux critères), si l on proposait la modélisation par un «tableau de proportionnalité».
conclusion -> il faut autant que faire se peut, permettre aux élèves de vivre «ce phénomène extraordinairement riche sur le plan cognitif qu est la réussite par invention d une procédure de résolution» -> pourtant il faut aussi éviter l échec et faire évoluer la représentation et donc : proposer des aides en essayant de rentrer dans les critères et, au moins, en cas de suggestion de procédure ou de modélisation, faire en sorte d en proposer plusieurs pour que l élève ait (au moins) le choix de la procédure.
Pour finir de conclure Les recherches menées montrent que le cumul, pour un problème donné, de nombreuses aides, différentes dans leur nature et dans leur logique, ne nuit pas à l activité de représentation bien au contraire!
QPG n 2 : est-il pertinent de proposer aux élèves des tâches les amenant à s interroger sur l idée de problèmes sans en résoudre?
Exemples : -> chercher si le texte proposé est un problème Ce n est pas à l élève de faire le travail du maître; l élève doit certes comprendre ce que l on attend de lui, mais par rapport au problème posé. -> chercher les informations utiles (ou inutiles) sans résoudre. Cette action est intimement mêlée au traitement du problème : chacun prélève les informations nécessaires en fonction des connaissances qu il a. Proposer cette consigne fait croire aux «élèves à une antériorité de la prise d information sur le traitement du problème. -> chercher les informations manquantes. A priori, dans un problème de mathématiques scolaire classique,, il ne manque pas d informations; faire croire le contraire contribue souvent à accroître l inquiétude des élèves en difficulté sur ce thème. référence : Catherine Houdement, «la résolution de problèmes en questions» (article)