Les poursuites correctionnelles (cours)
Table des matières Table des matières... 2 Introduction... 3 I Les différents délits en matière fiscale... 4 II Le déroulement des poursuites correctionnelles... 7 Les poursuites correctionnelles (cours) 2
Introduction Le contrôle fiscal a, en plus de ses dimensions dissuasive et budgétaire, une finalité répressive. Celle-ci trouve à s illustrer au travers des procédures classiques de contrôle, mais connait une application remarquable quand l Administration décide de mettre en œuvre des poursuites correctionnelles relevant du juge pénal. Concrètement, certaines infractions fiscales sont, en raison de leur particulière gravité, érigées en délits passibles de sanctions pénales (amendes, peines de prison) prononcées par les tribunaux correctionnels, ces dernières venant, alors, s ajouter aux sanctions purement fiscales. Trois délits fiscaux sont, ainsi, distingués : le délit général de fraude fiscale, le délit comptable et le délit d escroquerie en matière de TVA (I). La mise en œuvre de telles poursuites est, cependant, fortement encadrée : en effet, il est nécessaire qu une commission, la Commission des infractions fiscales, autorise le dépôt d une plainte, condition indispensable pour enclencher l action publique devant les juridictions pénales ; mais, même à ce stade, la Procureur conserve la faculté de classer la plainte sans suite (II). Avant de commencer, il importe, cependant, de faire certaines précisions sur les personnes pouvant être poursuivies pénalement. Ainsi, peut, en premier lieu, être poursuivi l auteur principal du délit. Si le contribuable est une personne physique, il s agit du signataire de la déclaration ou de la personne légalement tenue de signer la déclaration manquante. Dans l hypothèse d un contribuable personne morale, il faut noter que le Code pénal prévoit que celles-ci peuvent être considérées comme pénalement responsables des infractions commises par leurs organes ou représentants pour leur compte. Il est donc possible de cumuler responsabilité des personnes physiques et responsabilité des personnes morales. Mais, les complices, c est-à-dire toute personne ayant facilité l infraction par son aide ou ayant, par instigation, provoqué l infraction ou donné des ordres pour la commettre, peuvent être poursuivis de la même façon. Pour qu il y ait complicité, il importe, cependant, qu existent un fait principal punissable, un accord de volonté entre l auteur principal du délit et le complice ainsi qu une action positive de ce dernier. Notons que le complice encourt les mêmes peines que l auteur principal de l infraction. Les poursuites correctionnelles (cours) 3
I Les différents délits en matière fiscale Trois délits fiscaux peuvent être distingués : le délit général de fraude fiscale, le délit comptable et le délit d escroquerie en matière de TVA. Le tableau qui suit présente, alors, pour chacun de ces délits les éléments qui les constituent, le délai de prescription et les peines possibles. Les poursuites correctionnelles (cours) 4
Délit Eléments constitutifs Délai de prescription ² Elément matériel Elément intentionnel Peines Délit général de fraude fiscale (art. 1741 du CGI) Soustraction ou tentative de soustraction à l établissement ou au paiement d un impôt par : une omission de déclaration dans les délais prescrits. la dissimulation de sommes sujettes à l impôt et excédant 1/10 de la base imposable ou 153. Le caractère volontaire de la fraude doit être établi par le ministère public et l Administration fiscale. Les plaintes peuvent être déposées jusqu à la fin de la 3 année suivant celle au cours de laquelle l infraction a été commise. Peines principales : jusqu à 5 ans d emprisonnement et 37 500 d amende. Peines accessoires : interdiction de participer aux travaux des commissions administratives des impôts, de créer ou d administrer un CGA. Délit comptable (art. 1743-1 du CGI) l organisation d insolvabilité. tous autres agissements frauduleux. Omission délibérée de passation d écriture. Passation délibérée d écritures inexactes ou fictives. Le caractère volontaire de la fraude doit être établi par le ministère public et l Administration fiscale. Peines complémentaires : interdiction d exercer une profession industrielle, commerciale ou libérale, exclusion des marchés publics, privation des droits civiques notamment. Prorogation de 2 ans du délai de prescription en cas de dépôt de plainte. Délit d escroquerie en matière de TVA (art. 313-1 du CGI) Obtention d un remboursement de crédit fictif ou imputation d un crédit fictif par l emploi de manœuvres frauduleuses, telles que des factures d achats fictifs. Les manœuvres frauduleuses doivent avoir déterminé le remboursement ou l imputation du crédit. Prescription de 3 ans révolus. Peines principales : jusqu à 5 ans d emprisonnement et 375 000 d amende. Dommages - intérêts : sur demande de l Administration et à l appréciation souveraine du juge. Les poursuites correctionnelles (cours) 5
² Deux remarques doivent être faites concernant le délai de prescription : Pour le calcul de ce délai, il est nécessaire de déterminer le jour ou l infraction a été commise. Celui-ci est déterminé de la manière suivante : pour le délit général de fraude fiscale, il s agit : du jour du dépôt de la déclaration en cas de déclaration minorée déposée dans les délais ; de la date d expiration du délai légal en cas de non dépôt d une déclaration dans les délais ; et de la date du dernier acte créant l insolvabilité en cas d organisation d insolvabilité. pour le délit comptable, il s agit de la date à laquelle l écriture incriminée a été passée ou aurait du être passée. pour le délit d escroquerie, il s agit de la date du remboursement de crédit de TVA ou du dépôt de la déclaration sur laquelle le crédit a été imputé. Il faut aussi noter que la prescription de l action publique peut être suspendue ou interrompue : il y a, ainsi, suspension pendant la période comprise entre la date de saisine de la Commission des infractions fiscales et la date à laquelle celle-ci émet son avis, cette suspension ne pouvant être supérieure à 6 mois. la prescription est, par ailleurs, interrompue lorsque le procureur met en œuvre l action publique par un réquisitoire d informer ou un réquisitoire introductif. En revanche, le dépôt de plainte par l Administration fiscale n interrompt pas la prescription. Les poursuites correctionnelles (cours) 6
II Le déroulement des poursuites correctionnelles Il existe une phase interne à la DGFIP et une phase propre aux tribunaux correctionnels. Dans le cadre de la phase interne à l Administration fiscale, le service vérificateur qui désire proposer des poursuites correctionnelles doit en informer la direction locale. Celle-ci va, ensuite, transmettre le dossier à la direction générale qui saisira la Commission des infractions fiscales (CIF). L avis de cette dernière est déterminant car il conditionne la possibilité de déposer une plainte pour fraude fiscale, étape indispensable pour enclencher l action publique, le Parquet ne pouvant se saisir d office de faits constitutifs de fraude fiscale ; il faut, cependant, préciser que la mise en œuvre des poursuites pour escroquerie n est pas subordonnée au dépôt d une plainte et donc que la CIF n a pas ici à être saisie. Ainsi, en cas d avis défavorable, il ne pourra y avoir dépôt de plainte ; dans l hypothèse d un avis favorable, une plainte sera déposée devant le Procureur de la République. Il est possible avant d en venir à la seconde étape, de relever quelques éléments concernant la CIF. Celle-ci a été instituée dans le but d accorder d avantage de garanties aux contribuables : c est ainsi que les plaintes pour fraude fiscale ne peuvent être déposées par l Administration qu après avis conforme de la commission (hors le cas de délit d escroquerie). La CIF est composée de 24 membres choisis parmi les conseillers d Etat et les conseillers maitres à la Cour des comptes qui sont tenus au secret professionnel. Leur nomination, ainsi que la désignation du président de la CIF, sont effectuées par décret pour une durée de 3 ans. Au plan procédural, la CIF ne peut pas s autosaisir ; en effet, elle doit être saisie par le ministre des finances ou, sur délégation de ce dernier, par un chef de service des services centraux de la DGFIP. Cette saisine, qui doit être accompagnée des diverses pièces de procédure ainsi que d une fiche d information, détermine le point de départ du délai de suspension de la prescription pénale et fixe le cadre strict dans lequel les procédures correctionnelles pourront être engagées. Puis, la CIF doit informer le contribuable concerné des griefs qui lui sont reprochés, ce dernier ayant, alors, 30 jours pour formuler des observations. La procédure est écrite et suppose, pour être valable, qu un quorum soit respecté lors de la délibération. Cette dernière n est pas publique, ce qui signifie qu elle a lieu sans la présence de l autorité de saisine et du contribuable. Au cours de cette délibération, un rapporteur formule des observations et le vote a lieu à la majorité des voix, la voix du président étant prépondérante en cas d égalité des votes. Dès lors que l avis est rendu, le ministre des finances est lié par celui-ci et le contribuable doit en être informé. Une fois la plainte déposée, le Procureur pourra, en fonction de l opportunité des poursuites, soit classer la plainte sans suite, soit poursuivre la procédure en saisissant le Tribunal correctionnel. Les poursuites correctionnelles (cours) 7