B. L ATTRACTIVITÉ DU BASSIN HAVRAIS EN QUESTION Un niveau de fécondité élevé Le recul démographique du bassin havrais ne s explique pas par un manque de vitalité de sa démographie «naturelle». En effet, même s il a diminué comme dans la grande majorité des territoires, le solde naturel (excédent des naissances sur les décès) reste à un niveau relativement élevé dans le territoire. Le Havre et son bassin se caractérisent en effet par un indice de fécondité assez élevé et par un nombre plus important de naissances qui en découle. Avec environ 2,1 enfants par femme, soit 0,1 enfant de plus qu aux plans régional ou national, c est un «surplus» de plus d une centaine de naissances annuelles qui est enregistré pour la ville du Havre (environ 2 à l échelle de la CODAH). Indicateur conjoncturel de fécondité en 2007 Ville du Havre 2,08 CODAH 2,08 Aire urbaine du Havre 2,11 Haute-Normandie 2,01 France métropolitaine 1,98 Source : Insee, État civil Des tendances migratoires très défavorables La tendance est en revanche très défavorable en matière de migrations. La baisse de population est provoquée par un déficit migratoire très marqué, qui compense très largement l excédent naturel. Le bilan migratoire est nettement déficitaire depuis les années 70. Durant la dernière décennie, la ville du Havre a perdu plus de 1 % de sa population chaque année par le seul jeu des migrations, l aire urbaine 0,8 %. 2,0% Évolution de la population : solde naturel / solde migratoire Ville du Havre Évolution totale due au solde migratoire 1,0% due au solde naturel 0,0% -1,0% -2,0% 1962-1968 1968-1975 1975-1982 1982-1990 1990-1999 1999-2010 Sources : Insee, Recensements de la population 1962 à 2010 - dénombrement - 10 -
Évolution de la population : solde naturel / solde migratoire CODAH 2,0% Évolution totale due au solde migratoire 1,0% due au solde naturel 0,0% -1,0% -2,0% 1962-1968 1968-1975 1975-1982 1982-1990 1990-1999 1999-2010 Sources : Insee, Recensements de la population 1962 à 2010 - dénombrement Évolution de la population : solde naturel / solde migratoire Aire urbaine du Havre 2,0% Évolution totale due au solde migratoire 1,0% due au solde naturel 0,0% -1,0% -2,0% 1962-1968 1968-1975 1975-1982 1982-1990 1990-1999 1999-2010 Sources : Insee, Recensements de la population 1962 à 2010 - dénombrement - 11 -
Seulement un tiers du déficit migratoire de l agglomération havraise est lié à de l étalement urbain De nombreuses grandes villes connaissent depuis plusieurs décennies un déficit dans leurs flux migratoires. Une grande partie de ce déficit, parfois la totalité, est souvent due aux échanges de la ville-centre avec les territoires périphériques. Selon ce mouvement bien connu d étalement urbain (ou de périurbanisation), les départs du cœur urbain vers les couronnes résidentielles sont essentiellement le fait de couples assez jeunes (âgés de 25 ans à 40 ans). Ils quittent souvent les centres urbains à l arrivée du premier ou du deuxième enfant, pour des logements spacieux plus abordables. Parallèlement, le cœur urbain accueille un nombre très important de jeunes originaires des zones périurbaines (notamment), pour leurs études ou pour leurs premiers emplois ou logements indépendants. Ces échanges permanents d habitants selon leur position dans le cycle de vie constituent une forme de «respiration» interne du territoire. Ce fonctionnement a profité, d un point de vue purement quantitatif, aux secteurs périurbains depuis trois ou quatre décennies. Ce mouvement d étalement urbain est bien sûr constaté entre la ville du Havre et le reste de la CODAH ou avec les autres territoires proches. Mais ce phénomène n explique que très partiellement le déficit migratoire, dans une proportion d un tiers environ. Sur cinq ans (observations de 2003 à 2008), la ville du Havre a vu partir environ 13 000 ménages (soit 2 600 par an) et s en installer 10 000 (2 000 par an). Sur ce déficit migratoire d environ 600 ménages par an, 200 migrent vers des territoires proches et 400 vers le reste du territoire national. L observation des lieux de destination des «partants» confirme ces tendances : 30 % d entre eux s installent dans un rayon de 25 km, qui correspond à peu près à l étendue du bassin havrais. Ménages quittant ou rejoignant la ville du Havre selon la distance arrivées départs 0-25 km 25 - km - 100 km 100-1 km 1-200 km plus de 200 km (mobilités sur 5 ans) 10 % des départs proches vers la rive sud L étalement urbain de la ville du Havre peut être apprécié plus précisément en considérant les ménages qui ont déménagé vers des territoires proches mais qui ont toujours leur emploi dans le pôle d emploi havrais 2. Ils représentent 3 300 ménages (2003-2008) sur les 9 0 ménages actifs ayant quitté la ville-centre. Sur ces départs «proches», % se sont dirigés vers le reste de la CODAH, 40 % vers les autres territoires proches de la rive nord et 10 % vers ceux de la rive sud (voir carte). En moyenne annuelle, ce sont ainsi une soixantaine de ménages «havrais» qui déménagent vers l autre rive en continuant à travailler dans le pôle havrais. 2 dans le cas présent, on a retenu le pays du Havre Pointe de Caux - Estuaire (HPCE), incluant la CODAH et la communauté de communes Caux-Estuaire, comme territoire correspondant au pôle d emploi havrais - 12 -
Départs de ménages de la ville du Havre entre 2003 et 2008 dont la personne de référence occupe un emploi dans le pays HPCE du Canton de Criquetot l'esneval 400 de Fécamp 100 200 de Campagne de Caux CA Havraise 16 Le Havre 3 de Saint Romain de Colbosc 3 Caux Vallée de Seine Coeur Côte Fleurie 10 de Quillebeuf sur Seine du Pays 100 100 de Honfleur du Canton de Beuzeville de Pont-Audemer Un déficit migratoire élevé avec les régions du Sud et de l Ouest, mais aussi avec le reste de la Haute-Normandie L aire havraise entretient des échanges d abord et surtout avec le reste de la Haute- Normandie (40 % des arrivées et 40 % des départs), puis des régions du Sud et de l Ouest. Dans l ensemble, l aire urbaine enregistre 18 000 entrées par an contre 28 000 sorties, soit un déficit migratoire de 10 000 personnes par an. La moitié du déficit migratoire de l aire havraise est réalisée avec les régions du Sud et de la façade Ouest de la France : 1 entrée pour 2 sorties du territoire sur ces zones. Cette perte pour l aire havraise, de 5 000 personnes par an, est constituée pour moitié de familles avec enfants, pour 20 % de retraités et pour 30 % d actifs sans enfant. Le reste de la Haute-Normandie représente un tiers du déficit migratoire de l aire havraise, soit 3 700 personnes. Ce sont, pour plus des trois quarts, des familles relativement jeunes (moins de 40 ans). Le reste du déficit est enregistré avec l Île de France : -1 200 personnes. Il s agit pour la quasi-totalité d une perte de jeunes actifs âgés entre 20 et 29 ans. Les régions du Nord-Est ne représentent que 10 % à 15 % des échanges sur des populations comparables et pour un solde quasiment équilibré. - 13 -
Échanges migratoires entre l aire urbaine du Havre et les régions de métropole * valeurs moyennes annuelles sur 5 ans (2003-2008) Profil des échanges migratoires de l aire havraise avec le reste de la métropole Avec le reste de la Haute-Normandie : fort déficit sur les jeunes familles (- de 40 ans) Avec l Île-de-France : nombreux départs de jeunes actifs (20-29 ans) Avec les régions du sud et de l ouest : déficit sur toutes les tranches d âge, surtout sur les actifs et les familles (davantage que sur les retraités) Avec les régions du quart nord-est et du centre : échanges assez équilibrés - 14 -
Le manque d attractivité à l égard des jeunes, principal point faible de l attractivité havraise Pour donner une valeur de diagnostic à l analyse du profil migratoire de l aire urbaine havraise, il faut le comparer avec ceux d aires urbaines françaises de même taille, voire de même statut. La situation géographique des aires urbaines auxquelles on peut comparer celle du Havre peut être assez déterminante : les villes du Sud de la France ou du littoral ouest sont en effet plus attractives que celles du Nord ou de l Est du territoire national. Mais force est de constater que l aire havraise présente un profil d attractivité démographique presque systématiquement plus défavorable que dans tous les territoires de référence, quelle que soit leur situation géographique. Le solde migratoire havrais est en effet déficitaire (ou à peine équilibré) à tous les âges sans exception. Mais c est le manque d attractivité à l égard des jeunes qui distingue le plus le territoire. Toutes les aires urbaines comparables (sauf Mulhouse) présentent un excédent migratoire très net pour les jeunes autour de 20 ans. Dans la quasi-totalité des cas, cet excédent représente 20 % à 40 % de la tranche d âge. Dans l aire havraise, c est un déficit (certes léger) qui est constaté. Les facteurs d attractivité d une ville à l égard des jeunes sont de natures diverses. L attractivité de l université havraise, et plus largement de l offre locale d enseignement supérieur, peut être mise en question. La situation géographique «excentrée» du pôle havrais peut également être déterminante. 60 Profils migratoires des aires urbaines de taille comparable - Ouest de la France - % 40 30 20 10 Tours Caen Le Mans Brest Rennes Angers LE HAVRE 0-10 -20-30 05 10 15 20 25 30 35 40 45 55 60 65 70 75 80 85 âge Lecture du graphique : en 2008, les migrations des 5 années précédentes ont entraîné, dans l'aire urbaine du Havre, un déficit de population des 25-30 ans d'environ 10% (par rapport à une situation théorique sans migration) - 15 -
60 Profils migratoires des aires urbaines de taille comparable - Nord et Est de la France - % 40 30 20 10 Nancy Metz Amiens Reims Mulhouse LE HAVRE 0-10 -20-30 05 10 15 20 25 30 35 40 45 55 60 65 70 75 80 85 Lecture du graphique : en 2008, les migrations des 5 années précédentes ont entraîné, dans l'aire urbaine du Havre, un déficit de population des 25-30 ans d'environ 10% (par rapport à une situation théorique sans migration) âge 60 Profils migratoires des aires urbaines de taille comparable - autres régions - % 40 30 20 10 Clermont-Ferrand Orléans Dijon Perpignan Limoges Nîmes LE HAVRE 0-10 -20-30 05 10 15 20 25 30 35 40 45 55 60 65 70 75 80 85 Lecture du graphique : en 2008, les migrations des 5 années précédentes ont entraîné, dans l'aire urbaine du Havre, un déficit de population des 25-30 ans d'environ 10% (par rapport à une situation théorique sans migration) âge - 16 -
L attractivité démographique du bassin havrais découle essentiellement de celle de sa villecentre. Là aussi, l analyse doit être menée par comparaison avec des villes comparables à celle du Havre. Le choix a été fait de comparer le profil migratoire du Havre avec celui de sept grandes villes françaises, de taille proche, et qui ne sont pas capitales de région (ces villes ne bénéficient donc pas d un pôle universitaire dominant dans leur région 3 ). Le manque d attractivité à l égard des jeunes est confirmé par cette comparaison plus ciblée. Seule la ville de Mulhouse présente un profil plus défavorable. Un manque à gagner de 1 000 à 2 000 jeunes chaque année Il est possible d évaluer l effet démographique du profil particulier de l attractivité de la ville du Havre, en gain ou en manque à gagner exprimé en nombre d habitants. En prenant les villes d Angers, de Brest et de Saint-Étienne pour référence, ce sont environ 1 000 à 2 000 jeunes qui seraient «gagnés», chaque année, si Le Havre avait le même profil d attractivité par âge que ces trois villes. Le Havre «perdrait» par ailleurs quelques centaines d adultes de 25 à 40 ans (les départs dans cette tranche d âge étant souvent le fait de personnes arrivées plus jeunes sur le territoire cinq, dix, voire quinze ans plus tôt). Profils migratoires des villes françaises comparables au Havre 140 % 120 100 80 60 40 Angers Brest Le Mans Mulhouse Nîmes Saint-Étienne LE HAVRE 20 0-20 -40 05 10 15 20 25 30 35 40 45 55 60 65 70 75 80 85 âge Lecture du graphique : en 2008, les migrations des 5 années précédentes ont entraîné, dans la ville du Havre, un déficit de population des 25-30 ans d'environ 30% (par rapport à une situation théorique sans migration) 3 mais elles disposent chacune d une université autonome, et d implantation plus ancienne que celle du Havre dans tous les cas - 17 -
Profil migratoire de la ville du Havre comparé à ceux des villes de Brest, Angers et Saint-Étienne : gains et «manques à gagner» par tranche d âge Manque à gagner pour les 18-24 ans : 7 700 habitants sur 5 ans, soit environ 1 0 par an Manque à gagner pour les 18-24 ans : 12 300 habitants sur 5 ans, soit environ 2 0 par an Manque à gagner pour les 18-24 ans : 3 0 habitants sur 5 ans, soit environ 700 par an Lecture des graphiques : si Le Havre avait le même profil migratoire (attractivité) que Brest, la ville «gagnerait» 8 200 habitants âgés de 17 à 25 ans par le jeu des migrations (sur 5 ans) et «perdrait» 2 100 habitants âgés de 26 à 40 ans. - 18 -