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Transcription:

Enseignement de Promotion et de Formation Continue de l Université Libre de Bruxelles et de la Chambre de Commerce de Bruxelles QU EST-CE QUE LA PLANIFICATION SUCCESSORALE ET PISTES POUR UNE CHARGE FISCALE MOINS LOURDE? Mémoire réalisé par Frédéric BOIRON en vue de l obtention du diplôme de Bachelier en Comptabilité option Fiscalité. Promoteur : Monsieur HEMERYCK Année académique 2011-2012

Remerciements Je tiens à remercier tous les professeurs pour l enseignement prodigué au sein de l EPFC. Tout particulièrement, je tiens à remercier : Mon promoteur de stage, Monsieur Hemeryck qui a su m aiguiller dans l élaboration de mon mémoire, Madame Leveugle, mon professeur de droits et successions, qui m a contenu de mon mémoire, conseillé sur le Madame Rey, mon professeur de droits et enregistrement ainsi que Monsieur Dobbelaere du SPF Finances qui m ont consacré de du temps dans pour la correction de mon cas pratique. 1

TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION... 4 CHAPITRE I : INTRODUCTION A LA PLANNIFICATION SUCCESSORALE... 6 A. Définition :... 6 B. Les avantages :... 7 C. Le rôle du comptable :... 7 CHAPITRE II : LA PLANIFICATION SUCCESSORALE VIA LES REGIMES MATRIMONIAUX... 9 Choix du régime matrimonial ou cohabitation:... 9 1. Régime de communauté légal (communauté d acquêts) :... 9 2. Régime séparation de biens :... 12 3. Régime communauté universelle de biens :... 13 CHAPITRE III : LA PLANIFICATION SUCCESSORALE VIA LES TESTAMENTS... 21 A. Testament authentique ou testament notarié :... 21 B. Testament olographe :... 22 C. Testament international :... 22 CHAPITRE IV : LA PLANIFICATION SUCCESSORALE VIA LES DONATIONS... 23 A. Région Bruxelles-Capitale :... 27 B. Région Wallonie :... 29 C. Région flamande :... 31 CHAPITRE V : LA PLANIFICATION SUCCESSORALE VIA LA CREATION D UNE SOCIETE OU D UNE FONDATION... 34 1. Société civile de droit commun :... 34 2. Fondation privée :... 35 CHAPITRE VI : EXPLICATIONS VIA UN CAS PRATIQUE... 37 CHAPITRE VI : VERS UNE DISPOSITION ANTI-ABUS?... 59 CONCLUSION... 60 BIBLIOGRAPHIE... 61 2

ANNEXES... 61 Testament ( à écrire manuellement)... 62 Don manuel: Lettre du donateur au bénéficiaire... 63 Don manuel: Lettre du donateur au bénéficiaire... 64 Circulaire anti-abus... 66 3

INTRODUCTION Le sujet que j ai choisi de développer est très vaste mais tellement intéressant par sa dimension humaine, les diverses possibilités qu il offre et son actualité en matière fiscale. En premier lieu, ce thème touche chacun d entre nous, même s il est difficile de l aborder et de le mettre en action car il nous confronte à la conscience de notre propre mortalité. En second lieu, il faut souligner le caractère responsable de la démarche qui consiste à léguer son patrimoine de son vivant. Il évite, aux héritiers, d être pénalisés par une taxation trop lourde (Droits de succession). Il procure la satisfaction de pourvoir aux besoins de la famille ou des proches et l assurance de voir ses biens répartis conformément à sa propre volonté. Enfin, le thème est séduisant par son actualité. En effet, j entends régulièrement des informations à propos de l évolution de la réglementation ou des prévisions de changements législatifs concernant les droits de successions. Dans un climat de crise qui perdure depuis 2008, avec une Europe fragile, le gouvernement en place cherche de nouveaux financements pour alimenter ses caisses et réduire le déficit public. Il se tourne vers le contribuable et, lui demande de participer à l effort par le biais de nombreuses taxes comme celles relatives aux droits de successions ou autres prélèvements concernant la succession. A propos d une matière aussi étendue et totalement liée aux particularités individuelles, nous tenterons d expliquer ses principaux mécanismes et baliserons quelques pistes pour alléger les charges fiscales. Par souci de clarté, nous présenterons des cas fictifs en tenant compte des variations régionales (Bruxelles, Flandres et Wallonie). Une bonne compréhension des différentes méthodes applicables à la planification successorale, devrait permettre un choix adapté à chaque cas pour en tirer le meilleur avantage, tel est mon objectif. La première partie du travail sera consacrée à la définition et à l explication de la planification successorale avec les motivations qui en découlent. La seconde partie présentera les différentes formes de planification successorale, à savoir : 4

Le choix du régime matrimonial ou cohabitation Les différents testaments Les donations La création d une société ou d une fondation privée Ensuite, je ferai le point sur les nouvelles mesures gouvernementales et les changements en cours en matière de dispositions de lois anti-abus. 5

CHAPITRE I : INTRODUCTION A LA PLANIFICATION SUCCESSORALE A. Définition : Tout au long de notre existence, nous accumulons des biens et nous nous constituons ainsi un véritable patrimoine. Afin de pouvoir transmettre celui-ci à nos futurs héritiers (famille ou proches), il est important de procéder à une bonne planification successorale qui nous permettra de nous assurer que nos actifs seront distribués comme nous le désirons. Il est ainsi possible d agir activement de son vivant par le biais d un transfert de patrimoine et de décider en partie soi-même de sa succession. La planification successorale réunit 2 aspects : l un administratif, l autre financier. L aspect financier traite de tout le patrimoine qui sera légué aux bénéficiaires que ce soit des biens meubles (comptes en banques, titres, mobilier etc ) ou immeubles (immobilier). L aspect administratif traite de la façon dont le patrimoine sera réparti entre les successeurs. Nous parlerons alors des différentes configurations possibles afin de planifier sa succession. Il en existe 4 principales que je présenterai plus tard. Concernant la taxation, l Etat effectue un prélèvement d impôt dénommé droits de successions sur une partie du patrimoine hérité avec un taux applicable dépendant de la Région dans laquelle était établi le domicile fiscal de la personne au moment de son décès. Ces droits de successions étant couramment considérés comme excessifs, de nombreuses personnes préfèrent entreprendre en temps utile les démarches nécessaires en vue de les réduire le plus possible. 6

B. Les avantages : Il y a de nombreux avantages à partager son patrimoine de son vivant : Pour les particuliers : Ce partage permet d effectuer la distribution de notre actif comme nous le souhaitons et de maintenir le niveau de vie de notre famille à court et long terme. De plus, il nous aide à conserver notre argent pour nos futurs héritiers qu ils soient des membres de notre famille ou des proches. Nous pouvons également décider de la répartition de nos biens entre nos héritiers pour éviter des discussions par la suite et aussi imposer une situation permettant d empêcher les conflits d après décès. Chaque bénéficiaire peut entrer en possession d un ou plusieurs biens qui lui convient(nent). Enfin, nous avons la faculté de choisir les personnes qui exécuteront nos dernières volontés et qui prendront en charge nos enfants. Pour les entreprises : Avec la planification, les héritiers intéressés par l entreprise familiale peuvent obtenir des actions de la société de manière anticipative alors que les autres, moins intégrés reçoivent leur part dans le patrimoine privé. Si le chef d entreprise décède subitement et n a rien planifié, ses successeurs héritent ensemble en indivision de l entièreté du patrimoine ce qui peut donner lieu à des conflits avec au pire comme répercussion la fin de l entreprise. Sans planification successorale, les droits de successions peuvent être très importants, ce qui peut avoir pour conséquence la faillite de l entreprise alors qu il est possible de faire une donation de société à un taux réduit comme expliqué en point C. Le rôle du comptable : Nous le savons tous et nous y serons tous confrontés un jour ou l autre, lorsqu un décès survient dans une famille, le patrimoine de la personne disparue est transféré à ses héritiers. C est alors que le fisc vient frapper à la porte de ceux-ci pour réclamer sa part. Plus la valeur du patrimoine est importante et plus les frais imposé par le fisc le sont aussi. De plus, la 7

taxation sur la succession augmentera avec le degré d éloignement de parenté entre l héritier et la personne disparue. Les sommes demandées par les pouvoirs publiques pouvant atteindre des sommets dans certains cas, il n est pas étonnant d apprendre dans une enquête réalisée par le journal l Echo en collaboration avec la Deutsche Bank que «77.4% des personnes interrogées admettent difficilement de devoir payer des droits de succession pour hériter de leurs parents» 1 La tentation est alors grande de ne pas déclarer la totalité des actifs de la succession. Cette démarche est illégale et la personne qui en use est passible de sanctions financières et pénales. C est en connaissance de cause que le notaire et/ou le comptable vont être appelés à aider les personnes pour planifier leur succession. Comme le Notaire, le comptable va s appuyer sur les chiffres pour faire l inventaire complet des actifs (avoirs) et passifs (dettes) de la personne qui planifie sa succession Certains cabinets comptables sont ainsi spécialisés dans la rédaction de la déclaration de succession. Le but est généralement d éviter qu une grande partie de l héritage d un client ne vienne grossir les caisses de l état et ce à l aide de solutions parfois assez simples ou d autres plus complexes. Toujours selon la même enquête réalisée par l Echo et la Deutsche Bank «le Belge n a qu une connaissance limitée de ces solutions. Plus grave encore, certaines catégories de personnes, comme les cohabitants ou les familles recomposées, peuvent avoir recours à des solutions spécialement adaptées à leur situation personnelle en matière de planning successoral mais n en sont nullement conscientes!» 2 Nous nous proposons donc de présenter quelques techniques de planification successorales qui seront utiles de connaître en tant que comptable pour optimiser l objectif d un contribuable se souciant d alléger de manière conséquente la facture successorale de ses héritiers. 1 Supplément Mon Argent de L Echo du 27 septembre 2008 2 Dossier - 12 techniques légales pour payer moins de droits de succession ; Deutsche Bank- page 2 Septembre 2008 8

CHAPITRE II : LA PLANIFICATION SUCCESSORALE VIA LES REGIMES MATRIMONIAUX Choix du régime matrimonial ou cohabitation: Pour toute personne mariée, le régime matrimonial joue un rôle crucial dans sa succession ou dans sa planification successorale. Il est donc important de connaître avant toute chose les dispositions établies par les époux avant leur mariage. En effet, ces dernières peuvent rendre inefficaces les solutions proposées pour une planification successorale. Un bon contrat de mariage peut nous permettre de payer moins de droits de succession. Le droit successoral et le droit matrimonial sont inséparables. Avec le décès, le mariage cesse et le régime matrimonial est dissous automatiquement. La liquidation du régime matrimonial devance celle de la succession. Et ainsi, le régime matrimonial conduit au contenu précis de la succession du défunt. Cette connaissance de régime matrimonial servira identifier le propriétaire des biens à transmettre, et donc, à définir les droits du conjoint restant sur les biens acquis pendant ou en dehors du mariage, dans le respect du choix du contrat choisi ensemble par les époux. De cette manière, on peut envisager des moyens pour protéger l époux survivant d une planification successorale qui ne lui conviendrait pas,. Un contrat de mariage judicieusement choisi permet d avantager le conjoint en réduisant la charge fiscale des droits de succession. Il est également possible durant le mariage de modifier le contrat initial ou l absence de contrat dans le même but. Le contrat de mariage est donc déterminant dans le partage du patrimoine entre époux. Il existe 3 régimes spécifiques : 1. Régime de communauté légal (communauté d acquêts) : Le régime légal s applique systématiquement à défaut de contrat de mariage. Il est fondé sur l existence de trois patrimoines : le patrimoine propre de chacun des deux conjoints et le patrimoine commun. 9

Si les conjoints sont mariés en communauté, il y a supposition de communauté : sauf clause contraire dans le contrat de mariage, tout bien dont il n est pas prouvé qu il lui est propre, est un bien commun. Ceci indique que la personne qui assure qu un bien lui est propre doit démontrer deux choses : que ses biens rentrent dans la catégorie légale de biens propres et de prouver que ces biens rentre véritablement dans cette catégorie. Par exemple, si un époux affirme qu un titre lui est propre (suite à une donation ou à une succession) il devra en apporter la preuve d où importance d un écrit. Il est important de noter que dans le régime légal, tous les revenus sont communs, y compris ceux des biens propres comme les revenus d immeubles propres, les titres propres et les revenus professionnels. Il est donc inexact de dire, comme on a souvent l occasion de l entendre que tel bien est propre car il a été obtenu avec les revenus professionnels, placés sur un compte bancaire ouvert au seul nom de l époux qui les a reçus. Il est donc essentiel de bien comprendre que les revenus des biens propres sont communs. Par exemple, si j hérite de 100 titres que je place sur un compte-titre, les revenus qui sont les dividendes seront communs. Si je décide de réinvestir ces dividendes en les plaçant sur le compte-titres, il y aura un mélange entre des biens propres (titres ordinaires) et des biens communs (les nouveaux titres obtenus grâce aux dividendes). S il n y a plus de possibilité de distinguer les biens propres des biens communs, il y aura supposition que tout est commun ce qui va entraîner des conséquences civiles (par exemple, l assiette des biens saisissables par les créanciers de dettes communes sera plus importante) et fiscales. Quels sont les biens propres? Les biens et créances qui appartiennent à chacun des époux au jour du mariage ainsi que ceux que chacun des époux acquiert seul, au cours de régime, par donation, testament ou succession. Pour résumer : 10

La communauté légale : Le patrimoine du couple marié sous la communauté de bien se ventile de la manière suivante : Patrimoine propre Actif Passif Biens acquis avant le mariage Dettes contractées avant le mariage Biens recueillis par donation, succession Dettes attachées à des biens reçus ou testament pendant le mariage donation, succession ou testament pendant le mariage Biens accessoires d un bien propre Bien acquis par remploi de fond Dettes propres contractées dans l intérêt provenant de son patrimoine propre (ex : exclusif sur son patrimoine propre (ex : achat d un immeuble grâce à de l argent droits de succession payés sur un reçu) héritage) Biens propres par nature C est ainsi que si Monsieur Dupont fait construire sa maison sur un terrain hérité avant mariage de Madame Dupont, cette maison appartiendra au patrimoine de Mme Dupont. Pour éviter les mauvaises surprises en cas de séparation, mieux vaut prévoir une «clause de récompense». 11

Patrimoine commun Actif Biens acquis pendant le mariage Salaires des époux pendant le mariage Passif Dettes contractées conjointement par les 2 époux et celles contractées par un des époux pendant le mariage pour les besoins du ménage Epargne constituée pendant le mariage Revenus des biens communs Revenus des biens propres (ex: loyer d un immeuble propre à un des époux) Biens dont la preuve de leurs caractères propres ne peut être établie Dettes dont la preuve de leurs caractères propres ne peut être établie En cas de dissolution par divorce, Monsieur et Madame récupèrent chacun leurs biens propres et la moitié des biens communs. En cas de dissolution par décès, les biens propres et les biens communs du conjoint décédé viennent constituer son actif successoral qui sera ensuite réparti entre les différents héritiers. 2. Régime séparation de biens : Si les époux sont mariés sous un régime de séparations de biens, chaque époux garde la propriété de ses revenus, des biens qu il avait acquis avant le mariage et de ceux qu il a reçu seul pendant le mariage. «Lorsque les époux ont stipulé par contrat de mariage qu ils seront séparés de biens, chacun d eux a seul tous pouvoirs d administration, de jouissance et de disposition, il garde propres ses revenus et économies.» 3 On pourra noter que si un époux n est pas en mesure de prouver que certains biens lui sont propres ou qu une disposition de son contrat de mariage le formule comme tels, ces biens seront présumés communs. Si les biens sont considérés être en commun, leur gestion est naturellement soumise aux règles de l indivision : «chacun des copropriétaires en use et en jouit selon la destination des biens et dans la mesure compatible avec le droit de l autre. Il ne peut donc accomplir 3 Article 1466 du Code Civil 12

seul des actes d administration non conservatoires et des actes de disposition (vente, donation, ). Chacun des époux peut en principe demander la sortie d indivision de ces biens indivis et provoquer le partage (sauf de l immeuble conjugal et des meubles le meublant). Ce peut être le cas pour un fonds de commerce appartenant aux deux époux ou d actions émises en indivision (bien entendu, si chacun des époux possède une partie des actions d une société, chacun peut, dans les limites des statuts, disposer seul de ses parts.» 4 Pour résumer : La séparation de biens Chaque époux est propriétaire de son patrimoine. Les avoirs de chacun se ventilent de la manière suivante : Actif Passif Biens acquis avant et pendant le Dettes contractées à titre personnel mariage Revenus et salaires avant et pendant le mariage Biens recueillis par donation, Dettes recueillies par donation, succession ou testament pendant le succession ou testament pendant le mariage mariage Ce régime est probablement le plus approprié pour rester maître de la constitution et la gestion de son patrimoine. En cas de dissolution par divorce, chacun récupère ses biens propres ainsi que la proportion qu il a acquis dans les biens communs (ex : achat d un appartement financé à raison de 70% / 30%). En cas de dissolution par décès, l actif successoral du conjoint décédé est constitué de ses biens propres et de la moitié des biens communs acquis sous le régime de la communauté réduite aux acquêts ce qui signifie que les partenaires gèrent chacun leur propre patrimoine et gèrent ensemble le patrimoine commun. 3. Régime communauté universelle de biens : Le régime de la communauté universelle dépasse celui de la communauté légale. Ce sont à la fois les biens acquis lors du mariage ainsi que tous les revenus reçus dans la communauté mais aussi tous les biens propres qui peuvent être acquis par exemple par succession ou donation. 4 Transférer son patrimoine dans le cadre d une planification successorale Introduction à la programmation successorale,page 43, Emmanuel De Wilde d Estmael 13

«Dans le régime de la communauté universelle, tous les biens font partie du patrimoine commun. Tous les biens appartiennent aux deux partenaires, indépendamment de la manière dont ils ont été acquis. Cela n'a donc aucune importance qui a acheté ou payé quelque chose, à quel nom est établi le compte en banque, à quel nom est établi la facture, si l'on possédait déjà les biens avant le mariage ou si on les a achetés ou hérités pendant le mariage.» 5 Pour résumer : La communauté universelle : Ici, tout le patrimoine est commun et se ventile de la manière suivante : Actif Passif Biens acquis à titre gratuit ou onéreux Dettes contractées avant ou pendant le avant ou pendant le mariage mariage par les époux Salaires et revenus du couple En cas de décès de Monsieur ou Madame, l actif successoral du conjoint décédé sera constitué de la moitié des biens communs. Dans ce cas, les enfants du couple sont impliqués dans la succession. Si le conjoint survivant habite la maison du couple au moment du décès de son époux, le survivant pourrait être obligé de se reloger si les héritiers ne s entendent pas sur les modalités de la succession. Afin d anticiper ce genre de désagrément la planification successorale devient une aide précieuse pour permettre au survivant de jouir exclusivement du bien. Autre exemple, «si l un des partenaires a hérité après le décès de son père, par exemple, cet héritage est en toute logique recueilli dans la communauté. Si cette personne perd son conjoint peu de temps après, l héritage du père sera taxé une seconde fois. Si les époux avaient opté pour le régime légal, cet héritage aurait été recueilli dans le patrimoine propre et n aurait été taxé qu une seule fois» 6. DANS LE CADRE DU MARIAGE, QUE VA-T-IL SE PASSER LE JOUR DU DECES D UN DES EPOUX? Régime de communauté Régime de séparations de biens 5 Site internet : http://www.belgium.be/fr/famille/couple/mariage/regime_matrimonial/communaute_universelle/ 6 Dossier «Succession et planification successorale» ; Deusche Bank Avril 2008 14

Chaque époux reste propriétaire de son patrimoine propre. Le patrimoine commun appartient aux deux époux. Chaque époux reste propriétaire de ses biens propres, il n'y a pas de patrimoine commun. Sans enfant (s) Avec enfant (s) Le survivant reçoit: - toute la communauté en pleine propriété - l'usufruit sur les biens propres du conjoint décédé si il existe d'autres héritiers que des descendants (parents, frère, sœur, etc...) - la pleine propriété des biens propres, à défaut d'héritier dans la famille du défunt Le survivant garde la pleine propriété de la moitié des biens communs. Le survivant reçoit un droit d'usufruit sur : - les biens propres - l'autre moitié des biens communs les enfants reçoivent : - la nue-propriété de la moitié des biens communs S'il existe des descendants : le survivant reçoit l'usufruit sur les biens propres du défunt. S'il n'y a pas de descendant : le survivant reçoit la pleine propriété des biens propres. Le survivant reçoit l'usufruit sur les biens propres du défunt. COMMENT OPTIMALISER UNE SUCCESSION LORSQUE L ON EST MARIE? «Le choix d un régime matrimonial spécifique n est pas définitif. Il est possible d apporter des modifications ou même de changer de régime pendant le mariage. Par le biais de petites adaptations, on peut par exemple intervenir dans la manière dont le patrimoine sera partagé en cas de décès. Une adaptation du contrat de mariage permet ainsi de mieux protéger le conjoint survivant.» 7 Pour modifier le contrat de mariage les deux époux doivent marquer leur accord. On appelle les clauses servant à avantager un des époux les clauses de «partage inégal de la communauté». Les avantages matrimoniaux ne sont pas considérés comme des donations et les héritiers réservataires (les enfants) n ont pas les moyens de s y opposer. A. Changement de contrat de mariage : Dans quel cas une modification du contrat de mariage devient une bonne solution? Famille recomposée 7 Dossier «Succession et planification successorale», page 6,Deusche Bank Avril 2008 15

Lorsqu il est trop tard pour effectuer une donation en vue d une optimisation fiscale Lorsque les époux recherchent une solution à long terme pour leur patrimoine respectif Avantages d un changement de contrat de mariage? Changer de contrat de mariage est une solution rapide pour effectuer une optimisation fiscale. Au contraire de la donation (que je développerai plus loin) il est possible d effectuer ce changement peu de temps avant le décès, alors qu une donation exige du donataire de rester en vie pendant les 3 années qui suivent sa donation pour éviter aux héritiers de devoir payer des droits de succession. Un contrat de mariage est difficilement annulable et ne peut être modifié sans l accord des deux époux. Il a donc un caractère durable que le testament n a pas forcément. Mais ce caractère durable peut également devenir un inconvénient, par exemple en cas de querelle entre les conjoints. Inconvénients d un changement de contrat de mariage? Comme on vient de le dire plus haut, le caractère durable du contrat peut devenir un inconvénient. Le changement de contrat de mariage demande du temps et de l argent et peut se transformer en une procédure complexe avec un lourd travail d inventaire. De plus cela nécessite un passage chez le notaire et donc les frais qui en résultent (entre 400 et 1300 en fonction de la procédure nécessaire.) Conseil du comptable? Je privilégierais ce système dans le cas où le couple ou la personne s adressant à moi m annonce que son espérance de vie est limitée à moins de trois ans. Dans ce cas, il sera possible de prémunir l époux restant de frais de succession très élevés. B. Ajout de clause au contrat de mariage : L ajout de clause n est possible que dans le cas où il existe une communauté matrimoniale. Cette technique n est donc pas possible dans le régime de séparation de biens. 16

Les dispositifs les plus connus : L attribution de communauté : De nombreux (anciens) contrats de mariage contiennent une clause d attribution de communauté «au dernier vivant les biens». «Cette clause prévoit l attribution de la communauté matrimoniale en pleine propriété au survivant. Cette clause est souvent privilégiée lorsque la relation avec les enfants et/ou beaux-enfants n est pas optimale ou en présence d héritiers mineurs ou handicapés.» 8 Cette technique déshérite donc temporairement les enfants et donne une meilleure protection aux conjoints. L inconvénient principal est la sanction fiscale que cette technique impose. Supposons: Pierre et Jeanne-Marie sont marié sous le régime légal. Le patrimoine commun s élève à 500.000 EUR. Nous parlons ici d'une situation simplifiée où la succession contient uniquement des biens mobiliers. Régime légal sans clause 250.000 EUR de cette somme tombent dans la succession. Ils ont deux enfants. Les droits de succession s élèvent à 13.500 EUR. Si le second partenaire décède par la suite, 15.285 EUR sont imputés en droits de succession. Régime légal avec clause d attribution de communauté les droits de succession au décès de l un d eux s élèvent à 19.500 EUR. Après le décès du second partenaire, 37.245 EUR sont dus. Régime légal avec clause d attribution de communauté à titre onéreux Les droits de succession s élèvent, tant au premier qu au second décès, à un montant égal aux droits de succession lors de l héritage sous le régime légal. Le dernier vivant reçoit toutefois l entièreté de la communauté du premier décédé en pleine propriété. 8 Dossier «Votre planification successorale» page 14, Dexia 17

Au total, 28.785 EUR sont donc payés en droits de succession. Au total, 56.745 EUR ont donc été payés en droits de succession. La raison de cette augmentation, surtout suite au second décès, est que l entièreté du patrimoine revient, au décès du premier partenaire, au dernier vivant. A son décès, des droits de succession doivent à nouveau être payés. Au total, 28.785 EUR sont donc payés en droits de succession. Remarque du comptable: Si l on désire une protection optimale ET une pression fiscale diminuée: la clause d attribution de communauté à titre onéreux est une solution. Elle donne au dernier vivant le droit à la pleine propriété des biens communs, mais également l obligation de donner aux enfants la moitié de cette communauté. Généralement, le dernier vivant peut cependant remplir sa dette lorsqu il/ elle le désire, et ce au plus tard à son décès. La créance au profit des enfants peut, au second décès, être déduite de l actif de la succession. Clause de préciput «La clause de préciput permet au conjoint survivant, avant tout partage, de reprendre en nature un ou certains bien déterminés du patrimoine commun, voire une somme d argent sans devoir les imputer sur sa part.» 9 Sont visés ici des biens spécifiques comme le logement familial, la voiture Clause reprise surprisée «Permet au conjoint survivant de reprendre en nature, au décès de son conjoint, un bien du patrimoine commun, mais en versant une somme correspondant à la valeur du bien ainsi repris. Un des avantages de cette clause permet à l époux survivant de reprendre p.ex. l exploitation commerciale et de poursuivre son activité professionnelle sans pour autant déposséder les héritiers de son conjoint.» 10 9 Donations et successions ; Alexandre Lecomte, Matthieu Van Molle, Hélène Diricq, Edouard-Jean Navez, Sophie Laret, sous la coordination de Lorette Rousseau et de Catalina Lamarche, page 7, Editions Indicator 10 Donations et successions ; Alexandre Lecomte, Matthieu Van Molle, Hélène Diricq, Edouard-Jean Navez, Sophie Laret, sous la coordination de Lorette Rousseau et de Catalina Lamarche, page 7, Editions Indicator 18

Avantages de ces clauses : L avantage principal pour le conjoint survivant est de garder un certain contrôle sur les biens acquis pendant le mariage. Dans le cas où les enfants sont encore mineurs ou dans le cas où une mésentente avec les enfants s est installée, ces dispositifs augmentent la protection de l époux survivant. Inconvénients de ces clauses : En premier lieu, cette totale liberté du conjoint survivant de gérer le patrimoine commun enlève tout pouvoir de contrôle aux enfants. Si le conjoint se retrouve sous une mauvaise influence, il peut dépenser toutes les économies du patrimoine commun et laisser les enfants complètement dépourvus. De plus : «bien qu elle offre une bonne protection sur le plan du droit civil, le régime est désavantageux du point de vue fiscal. Le code des droits de successions prévoit en effet que tout ce que le conjoint survivant reçoit, est considéré comme un leg. L insertion de cette clause conduit non seulement à des droits de successions plus élevés, mais pire encore, lorsque le survivant décède, les enfants doivent de nouveau payer des droits de successions sur cette part» 11. 4. Cohabitation : Il existe deux sortes de cohabitation : la cohabitation de fait qui ne nécessite aucune déclaration et la cohabitation légale qui consiste à déposer une déclaration de cohabitation écrite à l officier de l état civil de la commune du lieu de vie des deux cohabitants. C est ce côté juridique qui rend la cohabitation légale la plus intéressante car elle peut s apparenter à celui des époux mariés sous le régime de la séparation de biens, mais à la différence du mariage, il est possible de mettre fin à la cohabitation par simple remise, sans délai, d une déclaration à l officier de l état civil. 11 Dossier «Succession et planification successorale», page 7, Deusche Bank Avril 2008 19

Cette formule s adresse à toute personne quel que soit leur sexe et leur lien de parenté. La cohabitation est tout à fait possible entre membres d une même famille. Deux frères par exemples peuvent être des cohabitant légaux, de même qu un grand parent et son petit enfant. QUE PEUT-ON HERITER EN TANT QUE COHABITANT LEGAL? Le cohabitant légal survivant aura droit à l usufruit de la résidence de la famille et sur les meubles qui la garnissent quel que soit les autres héritiers du défunt. Cependant, les droits successoraux accordés par la loi au cohabitant légal connaissent deux inconvénients : - l usufruit est limité à la résidence familiale, et ce en présence ou non d autres héritiers. Dès lors, l état recueillera le reste de la succession dans le cas de décès d un cohabitant qui n a pas de famille proche. - par ailleurs, le cohabitant légal survivant ne bénéficie pas d une «réserve». Les partenaires cohabitant légaux peuvent donc se déshériter l un et l autre par testament ou donation à des tiers. (indicator astuces et conseils) LE TESTAMENT EST-IL EGALEMENT RECOMMANDE ENTRE COHABITANTS LEGAUX? Comme le cohabitant légal n hérite que de l usufruit sur l immeuble de famille, il est indispensable de rédiger un testament pour lui léguer des biens en pleine propriété ou modaliser le transfert de la succession. De plus, les descendants du défunt par exemple les enfants et les petits enfants qui sont en plus des cohabitant légaux ne peuvent profiter des droits successoraux du cohabitant légal et ne peuvent donc pas en hériter en leur double qualité alors que les autres héritiers légaux que sont les frères et sœur, neveux et nièces et ascendants le peuvent. 20

CHAPITRE III : LA PLANIFICATION SUCCESSORALE VIA LES TESTAMENTS Aujourd hui, même si le droit successoral a subit une évolution, il ne répond pas toujours à toutes nos attentes. Le fait d établir un testament reste utile et demeure le document juridique fondamental si nous souhaitons déterminer qui recevra avec quelle part et sous quelle condition notre patrimoine. On peut ainsi prévoir de quelle manière le patrimoine doit être distribué, si une personne doit être avantagée, ce que certains héritiers feront en échange de leur héritage etc Par exemple, on peut choisir de léguer un bien immobilier à une personne tout en lui imposant qu une autre personne y vive jusqu à la fin de sa vie. Autre exemple, on peut décider qu une personne héritera d une plus grande partie de l héritage en lui imposant d assumer l entretien d une personne déterminée. Donc grâce à la rédaction d un testament nous pouvons décider la part de chacun en devant être respectueux des règles relatives à la réserve et la quotité disponible. D un point de vue fiscal, le testament peut être utilisé afin d éviter les droits de succession en lui permettant par exemple d optimiser sa succession à travers un planning fiscal. Le testament sert à : o nommer la personne ou l institution qui aura la responsabilité d administrer nos affaires à notre décès o gérer et transmettre les biens qui n ont pas été répartis avant le décès o préciser toutes les limitations touchant à l utilisation de nos biens Il existe trois possibilités de testament qui ont par ailleurs la même valeur : le testament authentique, le testament olographe et le testament international. A. Testament authentique ou testament notarié : Il est dicté à un notaire qui doit en dresser un acte et doit être signé par le testateur (celui qui fait rédiger les testaments) en présence de deux notaires ou de deux témoins qui ne doivent pas être les bénéficiaires ni les conjoints du testateur. Dans le cas contraire, ces témoins pourraient voir leur droit à l héritage compromis. Cette forme de testament est celle qui présente de plus de sécurité, aussi bien sur la forme que sur le contenu et a pour avantage également le conseil du notaire tout en étant 21

absolument certain qu il sera exécuté. En effet, le notaire a l obligation de conserver le testament qui a été rédigé auprès du Registre central des testaments. B. Testament olographe : Il est soumis à peu de formalités pour être valable mais il est nécessaire qu il réponde aux 3 formalités suivantes : - il doit être écrit à la main - il doit être daté - il doit être signé Il peut être rédigé sur n importe quel support papier mais doit être impérativement écrit manuellement avec la mention de date et la signature. La rédaction à l aide de l outil informatique n est donc pas valable. Enfin il est à noter que le dernier testament en date c'est-à-dire le plus récent prend la priorité sur le testament plus ancien. C. Testament international : Le testament international doit être délivré au notaire et signé en présence de deux témoins et d un second notaire. Une attestation est ensuite rédigée en trois exemplaires par le notaire dans laquelle il ajoute les mentions minimales prévues par la loi et qui est jointe au testament dans une enveloppe qu il conserve. Cette forme de testament a la particularité de ne pas être spécialement rédigé à la main. Il peut également être dactylographié ou traité sous la forme informatique et peut-être également écrit par un tiers. Avantage du testament : Son avantage principal par rapport à une donation par exemple est son caractère révocable. Un testament est un dispositif pour le planning fiscal et peut être adapté ensuite par rapport à l évolution de la situation familiale. En effet, un testament plus récent remplace et annule le précédent. Cette révocation peut s effectuer de façon tacite. De plus, le testament a aussi l avantage d être discret puisqu il est possible de léguer son patrimoine ou une partie de celui-ci à des bénéficiaires sans que ceux-ci le sachent jusqu au décès du donneur. 22

Inconvénients du testament : L inconvénient principal d un testament est le fait qu il soit opérationnel seulement après le décès du donneur. De ce fait, les bénéficiaires ne peuvent économiser de droits de succession via la réalisation de donations. Ils devront en effet tous payer des droits de successions sur ce qu ils recevront en exécution du testament. Par ailleurs, le testament olographe qui est réalisé sans l aide d un notaire peut être perdu ou détruit. Le donneur n a donc aucune garantie que ses vœux écrits dans son testament soient respectés. Conseils pour une bonne stratégie : - Pour éviter de perdre un testament olographe, il est conseillé d en rédiger plusieurs et de les garder dans différents endroits. - Par ailleurs, il peut être judicieux de planifier sa succession lorsque l on est jeune et que l on estime qu il est prématuré de régler sa succession de manière définitive. La rédaction d un testament est aussi intéressante car on ne sait pas toujours combien il y aura d héritiers. Ces deux points tiennent compte des possibilités d évolution de la situation familiale. Ils soulignent la souplesse de cette formule qui permet, à notre convenance, de rédiger un testament qui annule et remplace définitivement le précédent. Le testament représente donc un système très flexible pour la planification successorale. CHAPITRE IV : LA PLANIFICATION SUCCESSORALE VIA LES DONATIONS «Une donation est un contrat par lequel un donateur se dépouille, à titre gratuit, immédiatement et irrévocablement, d un bien meuble ou immeuble en faveur d un donataire qui l accepte.» 12 Pour pouvoir effectuer une donation, le donateur doit être sain d esprit et majeur sans que le donataire (celui qui le reçoit) le soit obligatoirement. Par contre il existe des clauses ou la donation n est pas acceptée par la loi. 12 Guide des donations et successions, page 7, Service Public Fédéral FINANCES - 2011 23

Par exemple une donation n est pas possible lorsqu elle est faite par une personne malade qui a succombé à sa maladie si le donataire est le médecin qui a tenté de la soigner. Contrairement au testament, la donation est un contrat qui doit être accepté par le donataire lorsque le donateur est toujours en vie. En réalisant une donation de biens à ses héritiers de son vivant, le donateur baisse la valeur du patrimoine qu il leur lègue lors de son décès et donc les droits de succession qu'ils devront payer sur son héritage. La donation peut permettre à son bénéficiaire d avoir un avantage fiscal non négligeable, surtout si les montants données sont importants et le lien de parenté éloigné. Avant toute chose, il est important de bien faire la distinction entre un bien meuble et immeuble. Par un bien meuble, on entend tout ce qui peut se déplacer ou être déplacé: mobilier, voiture, table, livre, argent, etc Par un bien immeuble, on entend tout ce qui ne peut pas être bougé: bâtiments, maisons, terrains, Une donation d un bien immeuble situé en Belgique doit être constaté dans un acte notarié belge et celui-ci doit être enregistré (au bureau de l enregistrement) et devient ainsi assujetti à l impôt. Cet impôt est appelé communément «droit de donation». «On notera que lorsqu une donation n a pas fait l objet du paiement des droits de donation et que le donateur décède dans les trois ans suivant cette donation, la valeur de celle-ci sera considérée fiscalement comme se trouvant dans le patrimoine du défunt au jour de son décès. Ainsi l administration fiscale taxera la valeur de la donation non enregistrée non pas en droit de donation mais en droits de succession 13».voir Article 7 Code des droits de succession En effet, l article 7 du Code des droits de succession précise que «les biens dont l'administration établit que le défunt a disposé à titre gratuit dans les trois années précédant son décès, sont considérés comme faisant partie de sa succession si la libéralité n'a pas été assujettie aux droits d'enregistrement établis pour les donations». Il en résulte que les biens donnés retournent dans patrimoine du donateur en cas de décès de ce dernier dans les trois ans de la donation. Ces biens sont alors soumis à la taxation des droits de succession qui sont élevés. La règle ne vaut que pour les donations qui n ont pas été enregistrées, à savoir les dons manuels, les donations indirectes. Il existe plusieurs formes de donation : 13 Transférer son patrimoine dans le cadre d une planification successorale Introduction à la programmation successorale, page 147, Emmanuel De Wilde d Estmael 24

La donation notariée. Le don manuel. La donation indirecte par virement bancaire. La donation en tranche. 1. La donation notariée : En principe, toute donation de biens meubles ou immeubles doit faire l objet d un acte notarié. C est ce que prévoit le Code Civil. Les droits sur les biens immeubles sont calculés par tranche progressive et leur tarif dépend du degré de parenté entre le donateur et le donataire. Avantages : Elle a une date certaine. Elle possède une preuve manifeste de la donation. Le donateur peut léguer une habitation mais en conserver l usufruit et de continuer d y vivre. Le donateur peut léguer des biens meubles tout en conservant les revenus de son capital. 2. Le don manuel : Le don manuel connaît un vif succès et il n est pas rare qu il soit préféré à une donation notariée. Comme son nom l indique, le don manuel s effectue de main à la main. C est pour cette raison que les biens donnés ne sont que les biens mobiliers corporels (par exemple meubles, tableaux, ou bijoux, voiture etc ) ou incorporels (argent, titres au porteur, actions etc ). Tous ces biens sont matériels donc peuvent être remis de main à la main en présence du donateur et du bénéficiaire. Avantage fiscal : 25

Tout d abord, il n y a aucune obligation pour que le don manuel soit consigné dans un acte juridique authentique. Enfin, aucun droit de donation et plus tard aucun droit de succession n est dû, si le donateur vit encore au moins trois après la date de donation. Conseils : Même si l acte juridique n est pas obligatoire, il est conseillé d établir une preuve du don manuel par lettre recommandée ou document probatoire qui permet non seulement de protéger le bénéficiaire des prétentions de tiers vis-à-vis des biens donnés et de donner la preuve de date de la donation qui sert à établir au niveau du fisc que la donation a incontestablement eu lieu trois ans avant le décès du donateur. Pour les dons d argent ou de titres, il est préférable d avoir recours à la donation indirecte par virement bancaire qui accélèrera la procédure (retirer de l argent du compte du donateur, puis le donner pour que le bénéficiaire le place sur son compte). C est ce que nous développerons dans le point suivant. 3. La donation indirecte par virement bancaire : La donation indirecte par virement bancaire permet d accélérer la procédure c est-àdire, sortir de l argent de son compte du donateur, puis de le donner à un tiers qui le placera sur son compte. En effet, pour effectuer une donation indirecte, le donateur ne doit pas prendre rendez-vous avec le bénéficiaire afin de lui remettre une somme d argent mais simplement donner l ordre à sa banque de virer de l argent de son compte à celui du bénéficiaire. Il est Important de noter que cette opération est considérée comme neutre c est-à-dire qu elle ne fait pas apparaitre qu il s agit d une donation. Le donateur ne doit donc pas écrire le mot donation dans la partie «communication». Avantages : Les avantages sont les mêmes que ceux du don manuel avec en plus le fait que la donation indirecte est plus simple que le don manuel. Par exemple, il est plus facile de léguer un portefeuille de placements via un virement bancaire plutôt que de remettre chaque pièce séparément au bénéficiaire via le don manuel. 4. La donation en tranche 26

Lorsqu un donateur décide de céder un bien immobilier et qu il cherche à éviter des tarifs successoraux trop importants, il a la possibilité de le scinder en plusieurs parties et d étaler la donation en plusieurs tranches. Avantage fiscal : Cette méthode permet d appliquer le taux de 3%, avec un intervalle de trois ans. «En attendant trois ans entre chaque donation, vous évitez que la valeur des biens cédés par donation ne soit additionnée lors de la donation suivante pour déterminer le tarif applicable (et que cela ne conduise à application des tranches supérieures) 14» CALCUL DU DROIT DE DONATION : «Le droit de donation est calculé sur la valeur brute des biens que reçoit le bénéficiaire de la donation, suivant un tarif qui augmente selon la valeur des biens et suivant un tarif qui diffère selon le lien de parenté entre le donateur et le donataire (plus le lien de parenté est éloigné, plus le tarif est élevé) 15». Les tarifs sont différents selon la Région dans laquelle le donateur a élu son domicile fiscal au moment de la donation. Si au cours de la période de 5 ans qui précède son décès, le donateur a changé de lieu d habitation, le domicile qui sera pris en compte sera celui où il a vécu le plus longtemps durant cette période. Tarifs pour la donation des immeubles selon les 3 régions : (Source : cours droits et enregistrement en 3 ème année) Tarif 1 A. Région Bruxelles-Capitale : Tarif en ligne directe, entre époux et entre cohabitants Tranche d'imposition Pourcentage d'imposition par Montant total de l'impôt sur les tranche tranches précédentes de à 0,01-50.000 3% 50.000-100.000 8% 1.500 100.000-175.000 9% 5.500 175.000-250.000 18% 12.250 250.000-500.000 24% 25.750 au-delà de 500.000 30% 85.750 14 Dossier - 12 techniques légales pour payer moins de droits de succession, page 7, Deutsche Bank Septembre 2008 15 Site internet : http://www.belgium.be/fr/impots/donation/calcul 27

Ces taux s appliquent à tous les descendants et ascendants au conjoint et aux cohabitants légaux, sans aucune condition spécifique. Tarif relatif au tarif préférentiel pour les habitations familiales Tranche de la donation Pourcentage d'imposition par Montant total de l'impôt sur les tranche tranches précédentes de à 0,01-50.000 2% 50.000-100.000 5,3% 1.000 100.000-175.000 6% 3.650 175.000-250.000 12% 8.150 250.000-500.000 24% 174.150 au-delà de 500.000 30% 77.150 Tarif 2 Tranche d'imposition Tarif entre frère et sœurs Pourcentage d'imposition par tranche Montant total de l'impôt sur les tranches précédentes de à 0,01-12.500 20% 12.500-25.000 25% 2.500 25.000-50.000 30% 5.625 50.000-100.000 40% 13.125 100.000-175.000 55% 33.125 175.000-250.000 60% 74.375 au-delà de 250.000 65% 119.375 Tarif 3 Tarif entre oncles ou tantes et neveux et nièces Tranche d'imposition Pourcentage d'imposition par Montant total de l'impôt sur les tranche tranches précédentes de à 0,01-50.000 35% 50.000-100.000 50% 17.500 100.000-175.000 60% 42.500 au-delà de 175.000 70% 87.500 Tarif 4 Tranche d'imposition Tarif entre toute autre personnes Pourcentage d'imposition par tranche Montant total de l'impôt sur les tranches précédentes de à 0,01-12.500 40% 12.500-25.000 55% 20.000 25.000-75.000 65% 33.750 au-delà de 75.000 80% 98.750 28

Illustrons par un exemple le calcul des droits de donation pour un immeuble à Bruxelles-Capitale : Exercice 1 : Un père domicilié à Bruxelles depuis 3 ans donne à ses 3 fils un immeuble d habitation de 270 000 qui se trouve à Liège. Réponse : C est le lieu de vie du donateur qui est pris en considération (où il a vécu le plus longtemps pendant les 5 dernières années). On divise le montant du don par le nombre donataire soit 270 000 / 3 = 90 000 pour chaque enfant Puis on vérifie le tableau des donataires : dans ce cas tableau 2 50 000 x 2 % = 1000 50 000 90 000 = 40 000 x 5.3 % = 2120 Total de 3120 de droit de donation à verser par chaque enfant Tarif 1 B. Région Wallonie : Tarif en ligne directe, entre époux et entre cohabitants Tranche d'imposition Pourcentage d'imposition par Montant total de l'impôt sur les tranche tranches précédentes de à 0,01-12.500 3% 12.500-25.000 4% 375 25.000-50.000 5% 875 50.000-100.000 7% 2.125 100.000-150.000 10% 5.625 150.000-200.000 14% 10.625 200.000-250.000 18% 17.625 250.000-500.000 24% 26.625 au-delà de 500.000 30% 86.625 Ces taux s appliquent à tous les descendants et ascendants au conjoint et aux cohabitants légaux, sans aucune condition spécifique. 29

Tarif relatif au tarif préférentiel pour les habitations familiales Tranche de la donation Pourcentage d'imposition par Montant total de l'impôt sur les tranche tranches précédentes de à 0,01-25.000 1% 25.000-50.000 2% 250 50.000-175.000 5% 750 175.000-250.000 12% 7.000 250.000-500.000 24% 16.000 au-delà de 500.000 30% 76.000 Tarif 2 Tranche d'imposition Tarif entre frère et sœurs Pourcentage d'imposition par tranche Montant total de l'impôt sur les tranches précédentes de à 0,01-12.500 20% 12.500-25.000 25% 2.500 25.000-75.000 35% 5.625 75.000-175.000 50% 23.125 au-delà de 175.000 65% 73.125 Tarif 3 Tarif entre oncles ou tantes et neveux et nièces Tranche d'imposition Pourcentage d'imposition par Montant total de l'impôt sur les tranche tranches précédentes de à 0,01-12.500 25% 12.500-25.000 30% 3.125 25.000-75.000 40% 6.875 75.000-175.000 55% 26.875 au-delà de 175.000 70% 81.875 Tarif 4 Tranche d'imposition Tarif entre toute autre personnes Pourcentage d'imposition par tranche Montant total de l'impôt sur les tranches précédentes de à 0,01-12.500 30% 12.500-25.000 35% 3.750 25.000-75.000 60% 5.625 au-delà de 75.000 80% 23.125 Illustrons par un exemple le calcul de droit de donation pour un immeuble en Région Wallonne : Exercice 2 : Une dame domiciliée depuis 4 ans à Charleroi donne un immeuble à sa sœur domiciliée à Gent. Cet immeuble est un ensemble de garages d une valeur de 100 000. Réponse : C est lieu de vie du donateur qui est pris en considération (où il a vécu le plus longtemps pendant les 5 dernières années). 30