L information juridique des syndics de copropriété Edito La loi change La loi du 20 décembre 2014 : les premiers pas vers un détricotage de la loi ALUR La loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises contient certaines mesures intéressant le droit de la copropriété et s inscrivant dans le détricotage de la loi «ALUR». Tout d abord, la loi invite le «Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi pour simplifier les modalités d information des acquéreurs prévues aux articles L 721-2 et L721-3 du code de la construction et de l habitation tels qu issus de la loi ALUR.» Ces deux textes issus de la loi ALUR avaient été vivement critiqués en ce qu ils exigeaient de nombreux documents à annexer ou à transmettre lors d une cession de lots de copropriété. La loi de simplification pourrait permettre ainsi : - d autoriser la dématérialisation des documents ; - une entrée en vigueur progressive de l obligation de transmettre les règlements de copropriété ; - un allégement de l obligation d information pour les lots secondaires d immeuble à usage partiel ou total d habitation. Ces nouvelles dispositions devraient être prises par ordonnances du Gouvernement, dans les 4 à 18 mois à venir. Ensuite, la loi ALUR avait introduit la référence de «surface habitable» qui devait être communiquée à l acquéreur à côté de celle de la surface de la loi Carrez dans les contrats de baux d habitation et mixte. Cette nouvelle mention a été perçue par la pratique comme une source de contentieux et est supprimée par la loi de simplification. Enfin, la loi ALUR avait créé une procédure de vérification par le notaire du casier judiciaire de l acquéreur. L entrée en vigueur de cette procédure a été reportée par la loi de simplification au 1 er janvier 2016, permettant ainsi la mise en place de l automatisation de la consultation des casiers judiciaires par les notaires. Sources : Loi du 20/12/14, n 2014-1545 ; Loi du 24/03/14, n 2014-366 L équipe documentation AXA Protection Juridique. Page 1
Point de droit La responsabilité civile du syndic à l égard du syndicat des copropriétaires Une responsabilité contractuelle Le syndic gère et administre la copropriété en vertu d un mandat qui le lie au syndicat des copropriétaires. Sa responsabilité contractuelle est donc susceptible d être engagée en cas d inexécution du mandat ou en cas de faute dans le cadre de l accomplissement de sa mission. Le comportement du syndic doit aussi être constitutif d un préjudice pour le syndicat des copropriétaires (art 1991 al 1 du code civil et 1992 code civil). A SAVOIR : Les syndics professionnels ont l obligation de justifier de la souscription d une assurance couvrant les conséquences pécuniaires de leur responsabilité civile professionnelle (Décret 72-678 du 20 juillet 1972 article 49). LES CONDITIONS DE MISE EN ŒUVRE DE LA RESPONSABILITÉ DU SYNDIC Le syndicat des copropriétaires qui souhaite engager la responsabilité du syndic devra démontrer : - une faute du syndic, - un préjudice, - un lien entre cette faute et le préjudice (lien de causalité). La charge de la preuve pèse sur le syndicat des copropriétaires La Cour de cassation a rappelé que le syndic ne pouvait s exonérer de sa responsabilité au motif qu il agissait dans le cadre de son mandat (Cass, 3 ème civ. 23 mai 2012 n 11-14.599) UNE OBLIGATION DE MOYENS En tant que mandataire, pèse sur le syndic une obligation de moyens. Ainsi le syndicat des copropriétaires ne pourra pas obtenir la condamnation du syndic à titre personnel, s il a accompli les diligences nécessaires ou s il n a manqué à aucune de ses obligations. A savoir : Si la loi ne fait état d aucune obligation de conseil à la charge des syndics, on note une tendance jurisprudentielle à reconnaître une telle obligation. Cette dernière ne découlant pas de la fonction de syndic mais de la qualité de professionnel (CA Versailles, 30 mai 1988). Etendue de la responsabilité du syndic Le syndic n est tenu que des conséquences d un préjudice en lien direct avec sa propre faute. Le quitus vaut ratification de l ensemble des actes portés à la connaissance de l assemblée générale et effectués par le syndic au cours de son mandat. Une fois le quitus obtenu, il devient alors impossible de poursuivre le syndic (sauf dissimulation). Exemple : Pas de responsabilité du syndic pour un acte dépassant ses pouvoirs dès lors qu ils ont été portés à la connaissance de l assemblée générale et que cette dernière a donné le quitus. Page 2
Point de droit (Suite) La responsabilité civile du syndic à l égard du syndicat des copropriétaires (suite) Prescription Sauf aménagement conventionnel, la responsabilité du syndic à l égard du syndicat des copropriétaires est soumise à une prescription de 5 ans (prescription de droit commun). La prescription décennale invoquée par l article 42 al 1 er de la loi 65-557 du 10 juillet 1965 s applique seulement aux actions personnelles nées des rapports entre les copropriétaires ou entre ces derniers et le syndicat. Bon à savoir Le syndic est également susceptible d engager sa responsabilité pénale que ce soit pour des infractions de droit commun (ex : vol, escroquerie, détournements de fonds ) ou des infractions relevant d une législation spéciale (ex : travaux non conformes à un permis de construire, infractions aux règles de sécurité ) Sachez toutefois que dans certains cas, le syndic pourra échapper à sa responsabilité pénale dès lors qu il démontrera que la constitution de l infraction est le résultat d un manque de moyens juridiques ou matériels mis à sa disposition pour l accomplissement de sa mission. Pour finir, il faut aussi savoir que le syndic peut voir sa responsabilité civile délictuelle ou quasidélictuelle engagée par un copropriétaire qui a subi un préjudice personnel suite à une faute du syndic. Travaux en copropriété Pratiquer une ouverture dans un mur partie commune, c est se l approprier Lorsque des travaux réalisés irrégulièrement par un copropriétaire comportent l appropriation d une partie commune, la prescription applicable est celle de 30 ans. Dans une copropriété, deux bâtiments sont séparés par un gros mur partie commune. Un restaurant a ouvert ce mur pour réunir les lots des deux bâtiments et installer une cuisine. Un copropriétaire demande en justice la remise en état des lieux et la reconstruction du mur de séparation. La cour d appel le déboute car l action serait éteinte au titre de la prescription décennale de l article 42 de la loi du 65-557 du 10 juillet 1965 La Cour de cassation casse l arrêt. La demande, qui consiste aussi à mettre fin à un acte d appropriation du mur commun, est une action réelle relevant de la prescription trentenaire. Sources : Civ 3 ème, 16/12/2014, n 13-25024 Page 3
Travaux en copropriété (suite) Travaux dans les parties privatives : il faut parfois prévenir le syndic! Un copropriétaire fait d importants travaux dans ses parties privatives et encombre abusivement les parties communes, empiétant sur les droits des autres copropriétaires. Le conseil syndical, qui n a pas été informé par le copropriétaire, demande en justice la suspension des travaux, reprochant aux travaux ainsi entrepris de créer un péril imminent pour l immeuble. La Cour de cassation considère que les travaux effectués avaient nécessairement un impact sur la vie des autres copropriétaires et que la mesure de suspension est justifiée en raison du non-respect du règlement de copropriété. Sources : Civ 3 ème, 27/01/15, n 13-23.853 Seuls les copropriétaires concernés par les travaux sur une partie commune doivent effectuer les demandes de permis Lors d une assemblée générale, a été adoptée une délibération par laquelle certains copropriétaires, nommément désignés, étaient autorisés à installer un ascenseur dans les cages d escalier et à réaliser les travaux correspondants qui affectaient les parties communes. Le permis de démolir, nécessaire pour la réalisation des travaux, a été délivré au syndic de copropriété de l immeuble, mais par la suite, la cour administrative d appel de Paris annule l arrêté délivrant ce permis au motif que le syndic n était pas habilité à effectuer les démarches nécessaires. Le Conseil d état confirme la position de la cour administrative : lorsque des copropriétaires sont individuellement autorisés à réaliser à leurs frais des travaux sur les parties communes, alors ils sont seuls habilités à effectuer les démarches. Ils peuvent, toutefois, donner mandat au syndic de déposer les demandes pour eux. Précisons que lorsque des travaux concernent la collectivité des copropriétaires dans son ensemble, le syndic est automatiquement mandataire du syndicat des copropriétaires et c est alors à lui de présenter les demandes de permis. Sources : CE, 11/02/15, n 366296 Page 4
Contestation de décisions d assemblée générale Une notification de PV d AG irrégulière : 10 ans pour contester au lieu de 2 mois La contestation des décisions d assemblée générale est enfermée dans un délai de deux mois par l article 42 de la loi du 10 juillet 1965 à compter de la notification de ladite décision. Même si la décision de l assemblée est irrégulière, elle n est plus contestable une fois ce délai de recours écoulé. Mais si la notification du procès-verbal d assemblée est irrégulière et ne reproduit pas le texte de l article 42 de la loi du 10 juillet 1965, le délai de 2 mois n a jamais commencé à courir et la prescription applicable au recours du copropriétaire est alors de 10 ans. La Cour de cassation vient de rappeler cette règle dans un arrêt du 28 janvier 2015. Un copropriétaire contestait la désignation d un syndic et la validité des assemblées générales qui l avaient convoqué. Le courrier notifiant cette désignation ne reproduisait pas les dispositions de l article 42. En effet, la Cour de cassation casse l arrêt de la cour d appel qui avait rejeté le recours de ce copropriétaire jugé comme «tardif» car au-delà des 2 mois. Sources : Civ 3 ème, 28/01/15, n 13-23552 Modification de la destination d un lot refusée par l assemblée générale : pas d abus de majorité caractérisé Un couple acquiert un local professionnel dans une copropriété. Ce local est dit «principalement à usage commercial et de bureaux» dans le règlement de copropriété. Les acquéreurs demandent en assemblée à changer la destination du lot en usage d habitation, ce qui est refusé. La Cour d appel annule la décision d assemblée pour refus abusif au motif que ce changement ne porte pas atteinte à la destination de l immeuble et ne porte pas atteinte aux droits des autres Nécessité de la majorité des 2 tiers des voix pour les horaires de fermeture d une barrière automatique Une copropriété décide de fermer la barrière automatique donnant accès aux véhicules à la copropriété tout en laissant l accès piéton libre. Un copropriétaire dentiste conteste cette décision qui a été adoptée en assemblée générale à la majorité simple. Selon lui, même si l accès piéton restait ouvert en permanence, le vote de la mesure de fermeture permanente de la barrière relevait de l article 26 de la loi du 10 juillet 1965 qui exige la double majorité (majorité des Les actualités contenues dans ces pages sont délivrées à titre informatif et correspondent à des situations précises. Chaque cas étant unique, la responsabilité d AXA Protection Juridique ne saurait être engagée en cas d utilisation des informations contenues dans ces pages. copropriétaires. La Cour de cassation casse l arrêt d appel. La Cour d appel n avait pas relevé en quoi la décision d assemblée générale était contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires, ou prise dans le but de favoriser des intérêts personnels de certains copropriétaires. Sources : Civ 3 ème, 17/12/2014, n 13-25134 copropriétaires présents et majorité des 2/3 des voix). La Cour de cassation confirme cette interprétation. Les horaires de fermeture d une barrière donnant accès à la copropriété relèvent de la majorité qualifiée de l article 26 et non à la majorité simple. Sources : Civ 3 ème, 18/02/15, n 13-25974 AXA PJ COPROS NEWSLETTER N 21-04 2015 - Crédits Photos : Photononstop Fotolia Kadmy istock Squaredpixels - Pao. www.padincom.com