RAPPORT COMPLÉMENTAIRE

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Transcription:

RAPPORT COMPLÉMENTAIRE PRATIQUES D ENTRAÎNEMENT POUR LA LOCALISATION DES SONS ET LA PERCEPTION DE LA PAROLE DANS LE BRUIT CHEZ DES PERSONNES AYANT BÉNÉFICIÉ D UNE IMPLANTATION COCHLÉAIRE BILATÉRALE SÉQUENTIELLE Préparé par : Désirée Nsanzabera, M.A.P., M.A., conseillère en évaluation Normand Boucher, Ph. D, chercheur d établissement Juin 2014

Le contenu de cette publication a été rédigé par l Unité d évaluation des technologies et des modes d intervention en santé et en services sociaux (UETMISSS) de l Institut de réadaptation en déficience physique de Québec (IRDPQ). Pour se renseigner sur cette publication ou toute autre activité de l UETMISSS, s adresser à : Unité d évaluation des technologies et des modes d intervention en santé et en services sociaux Institut de réadaptation en déficience physique de Québec 525, boulevard Wilfred Hamel Québec, Québec G1M 2S8 Canada Téléphone : 418-529-9141 poste 6638 Afin de faciliter la lecture du document, un seul genre a été retenu pour identifier le féminin et le masculin. Il est recommandé de citer le document de cette façon : Unité d évaluation des technologies et des modes d intervention en santé et en services sociaux (UETMISSS). Pratiques d entraînement pour la localisation des sons et la perception de la parole dans le bruit chez des personnes ayant bénéficié d une implantation cochléaire bilatérale séquentielle. Rapport complémentaire. Rapport préparé par Désirée Nsanzabera M.A.P., M.A., et Normand Boucher, Ph. D. et, Québec : Institut de réadaptation en déficience physique de Québec, 21 pages. La reproduction partielle ou complète de ce document à des fins personnelles et non commerciales est permise, à condition d en citer la source. Copyright 2014 Institut de réadaptation en déficience physique de Québec Ce document présente les informations disponibles au 31 décembre 2013 selon la méthodologie de recherche retenue. Ce document n engage d aucune façon la responsabilité de l IRDPQ et de son personnel à l égard des informations transmises. Il est important de préciser que le document a été réalisé suite à des circonstances particulières liées au contexte de la demande. Sa réalisation n a pas suivi la méthodologie habituelle d une ÉTMISSS et le résultat n a pas le même impact sur la prise de décision. Les auteurs de la présente note n ont aucun conflit d intérêts à signaler. i

Remerciements Les auteurs remercient Mme Ann Murchison, bibliothécaire à la Direction du soutien aux mandats universitaires (DSMU), ainsi que toute son équipe, pour la recherche documentaire effectuée. Ils remercient également Stéfany Garneau, Paola Albornoz, François Bergeron, Geneviève Tremblay, Catherine Champagne et Annie Vaillancourt du programme Déficience auditive enfants-adolescents et implant cochléaire tous âges pour leur soutien à la réalisation de cette évaluation. Finalement, les auteurs remercient le Comité scientifique en ETMISSS pour leur soutien méthodologique. ii

TABLE DES MATIERES TABLE DES MATIERES... iii Contexte... 1 1. Interventions portant sur la perception de la parole dans le bruit... 1 1.1. L entraînement dans un contexte de bruit intermittent ou discontinu (Sullivan, Thibodeau, & Assmann, 2013)... 1 1.2. Prise en charge orthophonique... 2 1.2.1. Entraînement au bruit, à l utilisation du téléphone et à la perception de la musique (Demotes- Mainard, 2013)... 2 1.2.2. Manuel d entraînement à l éducation auditivo-verbale de l adulte sourd implanté cochléaire (Cardon & Collet, 2010)... 4 2. Interventions visant la localisation des sons... 5 2.1. Publication de MedEl (Kühn & Bogar-Sendelbach, 2011)... 5 2.2. Généralisation des acquis de l entraînement à la localisation des sons à la reconnaissance de la parole dans le bruit (Ibrahim, 2013)... 6 3. Approches globales... 7 3.1. Maximiser les bénéfices de l écoute binaurale (MacIver-Lux, 2009)... 7 3.2. Le modèle cubique («The listening cube» : (Leo De Raeve, Archbold, & Diller, 2013))... 8 3.3. L entraînement perceptuel : une des quatre composantes de la réadaptation (Boothroyd, 2007)... 11 3.4. Leçons tirées de la réadaptation des enfants présentant un TTA (Alles et al., 2011)... 11 4. Autres considérations... 12 4.1. Implantation bilatérale séquentielle chez les enfants et les attentes des parents (Sparreboom, Leeuw, Snik, & Mylanus, 2012)... 12 4.2. La généralisation des acquis est importante (Wright & Zhang, 2009)... 13 4.3. Perception des usagers sur le plaisir et les bénéfices à retirer d un programme d entraînement auditif (Tye-Murray et al., 2012)... 13 4.4. Implication des proches dans l entraînement auditif : un avantage au niveau de la qualité de vie (Jill E Preminger & Meeks, 2010)... 13 4.5. Interventions de groupe dans un processus de réadaptation (J. E. Preminger & Ziegler, 2008)... 14 4.6. Avantage des hommes au niveau de la localisation des sons (Zündorf, Karnath, & Lewald, 2011)... 15 4.7. Gains limités au-delà d un certain nombre d exercices (Majdak, Goupell, & Laback, 2010)... 15 Conclusion... 16 Références... 17 Annexes... 19 Annexe 1 : Sites proposant des outils et des exercices en ligne... 19 Annexe 2 : Types de publications incluses dans le rapport complémentaire... 20 iii

Contexte Au printemps 2013, une demande a été adressée par le programme Implant cochléaire à l UÉTMISSS pour réaliser une évaluation sur les pratiques d entraînement pour la localisation des sons et la perception de la parole dans le bruit chez des personnes ayant bénéficié d une implantation cochléaire bilatérale séquentielle. Une note brève a été réalisée sur le sujet. Toutefois, le processus de sélection a mené à l exclusion de certaines publications, principalement en raison des critères d inclusion (PICOTS) et de l absence d outils pour évaluer la qualité des publications notamment des revues narratives. Étant donné l intérêt que ses données présentaient et l évolution des besoins du demandeur, il a été convenu avec lui qu un rapport complémentaire serait réalisé afin d exploiter les éléments contenus dans ces publications intéressants par rapport à la question décisionnelle, sans égard à la qualité de l information. Ce rapport présente donc des éléments de la littérature, sans toutefois s appuyer sur une démarche méthodologique d ÉTMISSS. Il vise à apporter à l équipe un supplément d information afin de contribuer au même objectif que la note brève, soit soutenir la prise de décision sur l offre de service en réadaptation pour les personnes ayant bénéficié d une implantation cochléaire bilatérale séquentielle. 1. Interventions portant sur la perception de la parole dans le bruit 1.1. L entraînement dans un contexte de bruit intermittent ou discontinu (Sullivan, Thibodeau, & Assmann, 2013) Des études réalisées auprès des personnes présentant des habiletés auditives normales indiquent que ces personnes présentent un avantage dans la reconnaissance de la parole sur bruit de fond intermittent, dus à l activation de certaines aptitudes perceptuelles. L étude de (Sullivan et al., 2013), réalisée initialement dans le cadre d une thèse de doctorat et publiée en article par la suite, visait à déterminer si un entraînement de courte durée à l écoute sur un bruit de fond intermittent donnait lieu chez des enfants présentant une perte d audition, d une part, à des améliorations comparables à celles de l entraînement sur un bruit de fond continu et d autre part, si ces améliorations étaient durables dans le temps. Pour ce faire, 24 enfants (6-17 ans) ayant une perte d audition modérée à sévère et portant une aide auditive ont suivi un entraînement de 7 heures sur ordinateur, à raison d une heure par jour. L entraînement consistait à identifier des mots dans des phrases préenregistrées. Les phrases étaient articulées autour de 6 thèmes (zoo, jouets, nourriture, grandmère, centre d achats et transport) et étaient prononcées par une voie mâle ou femelle. Trois niveaux de difficultés étaient introduits : l intensité du bruit de fond (0, 6 et 12 décibels), le débit (0, 2 ou 4 secondes) ainsi que le nombre d éléments critiques (mots) introduits dans la phrase et que l enfant doit se rappeler (1, 2 ou 3). Trois groupes de 8 enfants chacun ont participé à l expérimentation : un groupe entraîné sur bruit de fond discontinu, un groupe entraîné sur bruit de fond continu et un dernier groupe qui a reçu un entraînement visuel sans bruit (sous forme de jeux sans aucun contenu auditif), utilisé comme groupe-contrôle. Chaque enfant affecté à l un ou l autre des deux groupes expérimentaux devait écouter un bloc de 30 phrases réparties en trois séries de 10 phrases chacune. L enfant devait identifier le mot ou les mots entendus en cliquant dessus dans un espace prévu sur un écran. Les niveaux de difficultés d un bloc à l autre étaient augmentés ou diminués selon la performance de l enfant. Un résultat de 80% de réponses correctes permettait à l enfant de passer à un bloc de difficulté supérieure. Par contre, un résultat inférieur à 80% amenait l enfant vers des exercices de niveau plus facile. Dans une session d une heure, les enfants pouvaient faire des exercices de 4 à 12 blocs. Pendant l étude, les enfants ont passé des tests trois fois : avant, tout juste après et trois mois après l entraînement. Les résultats de l étude indiquent que le groupe entraîné sur un bruit de fond intermittent obtient de meilleurs résultats sur le plan de la reconnaissance de la parole dans le bruit que les deux autres 1

groupes. De plus, ces améliorations sont encore présentes trois mois après l entrainement. Les auteurs expliquent ces résultats par deux hypothèses complémentaires : d une part, le développement, chez les enfants, de stratégies de récupération du signal sonore perdu dans un contexte sonore complexe (glimpsing skills), et d autre part, l opportunité de mieux utiliser leurs fonctions cognitives (mémoire et attention) au service de l audition. 1.2. Prise en charge orthophonique Alors que la majorité des publications américaines font état de la prise en charge des problèmes d audition par un audiologiste ou une équipe multidisciplinaire, des publications européennes font état de la prise en charge par un orthophoniste, reflétant une différence d approche. En effet, deux principales approches qui se distinguent par leur finalité semblent guider les interventions, soit l approche auditivo-verbale, mettant l accent sur l acquisition du langage via le développement de l audition et l approche auditive, mettant l accent sur l acquisition des habiletés auditives en tant que finalité en soi. Les écrits européens semblent s inscrire dans la première approche, d où la prise en charge essentiellement orthophonique (ou logopédique en Suisse) 1, alors que les écrits nord-américains privilégient une combinaison des deux. Les différents intervenants qui prennent en charge les personnes implantées reflètent aussi le contexte légal des professions dans chaque pays. Deux publications sur la prise en charge orthophonique sont présentées : 1.2.1. Entraînement au bruit, à l utilisation du téléphone et à la perception de la musique (Demotes-Mainard, 2013) Selon les auteures, il est possible de recourir à un entraînement spécifique dans le bruit avec un implant cochléaire dans le cadre d une prise en charge orthophonique. L amélioration de la perception de la parole dans le bruit dans des conditions binaurales découle de trois effets dus à la plasticité cérébrale. Le premier est l effet de démasquage qui permet de supprimer les effets des bruits compétiteurs au signal sonore cible quand ces bruits sont spatialement séparés de ce signal. Le deuxième est l effet de sommation qui permet d accroître la sensation d intensité du signal sonore émis. Et le troisième est l effet de masque de la tête qui est, lui, réduit (le relief de la tête atténue les hautes fréquences). Toutefois, les auteurs ne proposent pas de méthode d entraînement. Entraînement à l utilisation du téléphone Les auteures indiquent que l entraînement est d autant plus nécessaire que de plus en plus de gens utilisent un téléphone cellulaire et par conséquent, sont confrontés à des interférences bruyantes 2 lorsqu ils sont dans la rue ou dans les transports en commun. La communication par téléphone est considérée comme un des plus hauts niveaux de compétences que l on peut atteindre avec un implant. L orthophoniste ne va donc pas travailler tout de suite la compréhension de la parole au téléphone. Celle-ci peut être débutée lorsque le patient obtient un score de 50% de reconnaissance de la parole en champ libre. L orthophoniste peut proposer différentes aides techniques qui permettent de favoriser la communication par téléphone. Il peut par exemple conseiller l utilisation d une boucle à induction magnétique (BIM), soit en tour de cou si le patient utilise un téléphone portable soit intégrée dans le téléphone filaire. Des téléphones avec amplificateurs d écoute peuvent être proposés, ainsi que des systèmes qui préviennent la présence d un appel (flash, coussinet vibrant, montres vibrantes). Avec les avancées 1 Elle peut aussi être multidisciplinaire : De Raeve et al. (2013) 2 Dans le cas des personnes implantées, les interférences bruyantes s ajoutent aux difficultés déjà connues liées à l utilisation du téléphone par des personnes sourdes. 2

technologiques, on peut également aujourd hui communiquer par vidéo, ce qui permet de conserver l utilisation de la lecture labiale. Un entraînement particulier peut être intégré dans une rééducation orthophonique, afin d améliorer la compréhension au téléphone. Tout d abord, il est intéressant de travailler la reconnaissance de phrases dans le bruit. Cela permet de préparer le travail au téléphone. Puis l orthophoniste proposera des situations téléphoniques afin que petit à petit l usager prenne confiance et se sente à l aise avec cet outil. En effet, son utilisation peut être accompagnée d inquiétudes et il est primordial d aborder ces exercices dans un climat serein, pour éviter tout blocage. L orthophoniste donne aux patients ce que Calliès et De Bergh (2009) appellent «des stratégies de réparation conversationnelle». Il s agit par exemple de faire répéter, de reformuler, de faire épeler une information mal perçue. Il est important de conseiller aux usagers de téléphoner dans un environnement calme, où ils ne se sentent pas mal à l aise. Le patient ne doit pas «subir» la conversation téléphonique, et pour cela, on peut l aider à utiliser «les techniques d encadrement de l interlocuteur». Il s agit de donner le maximum d informations pour avoir le moins de questions à poser par la suite, par exemple. La progression des exercices peut aller d un travail perceptif à la compréhension de conversations non convenues et complexes au téléphone. La prise en charge s adapte à chaque client, à son utilisation de l outil, aux situations qu il rencontre au quotidien et à sa vitesse de progression. Pour les usagers jeunes, cette prise en charge est primordiale pour qu ils s insèrent professionnellement le mieux et le plus rapidement possible. Entraînement à l écoute de la musique Longtemps après que les personnes implantées aient acquis la perception de la parole, il leur reste toujours difficile de percevoir la musique, à cause des difficultés à percevoir les timbres, les mélodies, les fréquences et la structure fine des sons. Or, l incapacité à écouter la musique est souvent vécue comme un handicap. En effet, la musique véhicule beaucoup de sentiments (apaisement, exaltation, etc.) et elle est souvent liée à des évènements de vie (fêtes, anniversaire, mariage, etc.). La musique est partout : dans les magasins, en salle d attente, au restaurant, etc. C est un élément culturel ayant une forte dimension affective. La compréhension de la musique diffère de la compréhension de la parole. En effet, comprendre la parole nécessite un ensemble d activités cognitives : il faut percevoir et comprendre chaque mot, les analyser dans un ordre donné pour comprendre le sens de la phrase, saisir l intonation, le contexte où la phrase a été énoncée, etc. Pour comprendre, il faut donc percevoir tous les sons constitutifs de la chaîne parlée. Mais de temps en temps, il arrive que des sons ne soient pas perçus sans pour autant que l auditeur ne comprenne pas le sens de la phrase. En effet, dans cette situation, il y a deux phénomènes qui pallient ce manque : l effet de restauration phonémique - si un seul phonème est supprimé, le cerveau le restaure sans que le sujet ne se rende compte de sa suppression - et l effet de contexte - les mots sont mieux compris lorsqu ils appartiennent à une phrase. L écoute de la musique nécessite de : pouvoir identifier une phrase musicale correcte, pouvoir différencier deux mélodies différentes, reconnaître des rythmes différents, mémoriser toutes ces informations. Entre la musique et la parole, la finalité est différente : la parole véhicule un message qu il faut comprendre, alors que la musique fait surgir des sensations, des émotions. L auditeur ne les reçoit donc pas de la même manière. Dans le cadre de la parole, l effort cognitif est plus important car il faut comprendre le sens du message. De plus, l attention se porte sur les variations de la fréquence fondamentale. Alors qu en ce qui concerne la musique, c est le ressenti qui est recherché, et l attention est portée sur le timbre vocalique et sa structure harmonique. 3

Dans la rééducation orthophonique, la compréhension du langage est prioritaire. La musique n a qu une toute petite, voire pas de place dans la rééducation. Elle fait souvent l objet d une demande particulière. Or la musique est très riche acoustiquement et des études ont démontré que la pratique de la musique entraîne des progrès dans d autres domaines, entre autres la reconnaissance de la parole dans le bruit ((Bourguet, 2006);, (Parbery-Clark, Skoe, Lam, & Kraus, 2009);, (Shahin, 2011)). Intégrer la perception de la musique dans une prise en charge orthophonique chez les patients sourds implantés cochléaires, permet de la rendre plus ludique et diversifiée. Elle apporte un meilleur confort de l écoute et des progrès dans différents domaines auditifs 1.2.2. Manuel d entraînement à l éducation auditivo-verbale de l adulte sourd implanté cochléaire 3 (Cardon & Collet, 2010) La rééducation orthophonique a une place prépondérante dans la prise en charge de l adulte implanté. Elle consiste à entrainer les personnes implantées cochléaires à découvrir et intégrer le nouveau monde sonore auquel ils sont exposes, afin de maintenir et améliorer leur communication verbale. L orthophoniste propose une éducation auditive adaptée afin qu ils puissent réinvestir les interactions sociales généralement diminuées. L objectif de ce mémoire, réalisé en vue de l obtention du Certificat de Capacité en Orthophonie en France, était de développer un manuel d entrainement à l éducation auditivo-verbale qui s adresse aux orthophonistes. Le manuel comporte des exercices analytiques et contextuels variés et progressifs visant à travailler tous les aspects de la communication verbale et pouvant s adapter aux différents profils de patients adultes sourds implantes cochléaires. Le matériel comporte un recueil de supports verbaux divers repartis en quatre axes : Le premier axe concerne les aspects para-verbaux. Il travaille essentiellement les notions de discrimination d intensité, de hauteur et de durée à aborder en début de rééducation. Ces données sont à reprendre avant un réglage pour préciser les difficultés auditive-verbales, ou encore suite à un réglage pour rendre compte des nouvelles perceptions. Sont inclus dans cet axe des exercices portant sur l intensité (grave vs aigu, faible vs normale vs forte), les mots de différentes fréquences, la discrimination des phonèmes, la longueur des mots et des phrases. Le second axe porte sur un travail analytique phonémique. Il vise à travailler les confusions de phonèmes (en discrimination et en identification) et à optimiser la sensibilité du patient aux différences interphonémiques. Sont inclus dans cet axe des exercices portant sur la discrimination des phonèmes (Ex. : Aime Âme Homme Hume), les listes d opposition (exemple : opposition «i» et «ou» comme dans «biche» et «bouche»), les mots mixtes, les mots monosyllabiques (art, chat, etc.) et les mots de deux ou trois syllabes. Le troisième axe porte quant à lui sur un travail contextuel. Dans cette partie, le langage étant abordé dans un contexte phrastique ou textuel, il s agit plutôt de développer les capacités de suppléance mentale et de déduction du patient. Il ne s agira pas de choisir entre un travail analytique et un travail contextuel : les deux modalités se complètent et sont à travailler parallèlement. Sont inclus dans cet axe des exercices portant sur des mots sur thème (exemple de thème : l alimentation), les définitions, la complétion de fin de phrases et d expression, des exercices pour trouver le contexte et/ou l intrus, des textes à complexité croissante, des saynètes, etc. Le quatrième et dernier axe concerne le perfectionnement. Adressé à quelques usagers qui auront atteint un certain niveau d éducation auditive, ce volet a pour objectif de maximiser leur potentiel en développant plusieurs aspects susceptibles de répondre à leurs attentes (conversation téléphonique, 3 Les auteures ne précisent pas s il s agit d adultes bilatéralement implantés. Elles précisent seulement que ce sont des personnes présentant une surdité. 4

intonations, ) Sont inclus dans cet axe des exercices pour s entraîner à parler au téléphone, des exercices de reconnaissance de la voix d un interlocuteur spécifique (une femme, un homme) ou des intonations (interrogative, affirmative ou exclamative), etc. Ce niveau est personnalisé pour répondre aux attentes d un usager particulier. Par exemple : un utilisateur assidu du téléphone a des besoins différents de ceux d une secrétaire qui prend des notes sur dictaphone. Malgré la diversité des exercices conçus et l intérêt qu ils peuvent présenter pour des orthophonistes, ce manuel ne propose aucun exercice portant spécifiquement sur la localisation des sons ou la perception de la parole dans le bruit. 2. Interventions visant la localisation des sons 2.1. Publication de MedEl 4 (Kühn & Bogar-Sendelbach, 2011) La localisation est une habileté importante pour éviter les situations dangereuses, améliorer la compréhension de la parole (feedback visuel) et détecter/prédire les mouvements par le son. La publication propose des exercices pour améliorer la localisation des sons. Une personne pourrait les réaliser elle-même sans le soutien d un clinicien. Toutefois les cliniciens peuvent s en inspirer. Préparation : régler les deux processeurs à volume égal. Ne pas commencer avant que les deux soient à volume égal (ça peut prendre deux mois de programmation). Faites attention non seulement à CE QUE ou QUI vous entendez mais aussi D OÙ provient ce que vous entendez. Exercices par niveaux de progression (1 à 8) 1. Reconnaitre des sons connus, dans un environnement familier, venant d un endroit connu. Ex. : sonnerie du téléphone de la maison. 2. Reconnaitre des sons connus dans un environnement familier venant d un endroit inconnu Ex. : un membre de la famille déplace le téléphone vers un autre endroit de la maison. 3. Reconnaitre des sons inconnus dans un environnement familier venant d un endroit inconnu Ex. : un membre de la famille pourrait cacher à divers endroits de la maison des sources sonores inconnues ou inhabituelles (i.e. son d une cloche) 4. Demander à des personnes de vous appeler. Ex. : une personne ou différentes personnes vous appellent de différents coins de la maison. 5. Reconnaitre des sons connus dans un environnement inconnu venant de différents endroits avec du bruit de fond. Ex. : au parc avec des amis, vous devez suivre une conversation avec en bruit de fond le trafic automobile. 6. Reconnaitre des sons inconnus dans un environnement qui ne vous est pas familier avec du bruit de fond. Ex. : au parc avec des amis ayant des cellulaires, ils utilisent diverses sonneries pour attirer votre attention. Vous devez identifier la personne qui a le téléphone ainsi que le bruit. 7. Suivre les mouvements avec vos oreilles. Ex. : reconnaître le bruit d une voiture, de quelle direction elle vient et dans quelle direction elle se dirige. 8. Exercices en groupe. Ex. : dans un groupe d entraide ou en famille, faire un jeu de société amusant. 4 MedEl est une compagnie qui fabrique et commercialise des implants cochléaires. 5

2.2. Généralisation des acquis de l entraînement à la localisation des sons à la reconnaissance de la parole dans le bruit (Ibrahim, 2013) Cette étude a été réalisée en deux phases, dans le cadre d une thèse de doctorat. La première phase avait pour objectif d évaluer la perception de la parole dans le bruit et les habiletés à localiser les sons dans un plan horizontal chez des personnes portant des aides auditives fonctionnant sur un mode bimodal coordonné. Grâce à la coordination bilatérale, une amélioration significative a été notée dans la localisation du son (par rapport à l absence de coordination). Aucune amélioration n a été notée au niveau de la perception de la parole dans le bruit. La deuxième étude était une extension de la première. Les participants étaient des personnes atteintes d une perte d audition symétrique modérée à sévère d origine sensorineurale, portant des aides auditives depuis au moins trois mois. Tous ont bénéficié d une période d acclimatation d un mois, consistant à s adapter à une paire d aides auditives fonctionnant en mode bimodal coordonné, qu ils portaient au moins 8 heures par jour. Après la période d acclimatation, les participants ont été divisés en deux groupes : un groupe expérimental (cinq personnes) et un groupe contrôle (quatre personnes). Le groupe expérimental a bénéficié d un entraînement à la localisation des sons dans un plan horizontal, une adaptation du programme SELA (Dufour, Ratelle, Leroux, & Gendron, 2005) pour une clientèle présentant une vision normale. 5 L entraînement, étalé sur un mois, consistait en neuf leçons de 30 minutes, séparées de 2 à 5 jours à la convenance des participants. Le groupe contrôle n a reçu aucun entraînement. Tous les participants ont passé des tests pour mesurer l aptitude à localiser des sons et à percevoir la parole dans le bruit avant et après la période d entraînement. Pour être entraînés, les participants du groupe expérimental étaient placés au centre d une salle comportant 16 hauts parleurs (connectés eux-mêmes à un ordinateur), disposés dans un rayon de 360, distants de 22,5 chacun. Trois stimuli ont été utilisés : un bruit de bande large 6, un bruit passe-haut et un bruit passe-bas dont la fréquence de coupure est à 2kHz 7, d une durée de 250 ms chacun. Chaque stimulus était écouté 2 fois à partir d un des 16 haut-parleurs, une fois comme test et une deuxième fois en tant que rétroaction. Le participant pouvant bouger sa tête ou son corps pour indiquer la provenance du son. Une rétroaction audiovisuelle était fournie au participant au moyen d une lumière fixée sur le haut-parleur ayant produit le son qui s allumait. Le son et la lumière continuaient de jouer dans le haut-parleur concerné jusqu à ce que le participant presse le bouton de commande dans sa main. Le stimulus suivant était joué 600 ms après que le participant soit retourné au centre. Après l entraînement, la performance du groupe expérimental était meilleure dans certaines conditions, autant dans la perception de la parole dans le bruit que dans la localisation des sons. La coordination bilatérale n a pas eu d effets sur les résultats de la deuxième phase. Les résultats de cette étude semblent indiquer que les acquis de l entraînement dans une tâche comme la localisation des sons peuvent être généralisés à certains aspects de la perception de la parole dans le bruit. En outre, ils corroborent la littérature existant sur les points suivants : L entraînement auditif peut donner lieu à des améliorations significatives dans une tâche spécifique pour laquelle un sujet a été entraîné (Sweetow & Palmers, 2005). Une période d entraînement aussi courte que 30 minutes, 2 à 3 par semaine pendant 4 semaines peut donner lieu à des améliorations significatives des habiletés auditives; toutefois, il ne faut pas s attendre à ce que toutes les personnes entraînées améliorent leurs habiletés, ni que toutes obtiennent des améliorations dans les mêmes proportions (Saunders, 2012). 5 SELA : Système d entraînement à la localisation des sons, initialement conçu pour une clientèle présentant une surdicécité 6 Traduction certainement imparfaite de «broadband noise» 7 Idem, pour «2 khz low-pass, and 2 khz high-pass noises» 6

Le simple fait de s habituer à une aide auditive (acclimatation) peut donner lieu à des améliorations chez certains sujets (Keidser et al., 2006) et ces améliorations peuvent s étendre à une période pouvant aller jusqu à 8 semaines L entraînement auditif dans un aspect de la performance auditive (localisation des sons) peut être généralisé pour générer une amélioration dans un autre aspect (perception de la parole dans le bruit, (Gil et Iorio, 2010)). Toutefois, dans cette étude, la généralisation se limitait à certaines conditions de la perception de la parole dans le bruit. Des microphones directionnels peuvent mener à une amélioration significative de la performance dans la localisation des sons parce qu ils pourraient apporter une solution à la confusion avantarrière 8 (Boymans & Dreschler, 2000, Quintino et al., 2010, Ricketts & Hornsby, 2003, Tawfik et al. 2010, and Valente & Mispagel, 2008). La présence de composantes de basse fréquence dans un signal auditif améliore la performance dans la localisation pour ce signal (Noble et al., 1994). Les signaux auditifs suffisamment longs (dans la durée) pour permettre au sujet d effectuer des mouvements de tête (un klaxon de voiture dans la première phase de cette étude, 450 ms) peuvent être localisés avec moins de confusion avant-arrière (Brimijoin et al., 2010; Zambarbieri et al., 1997). 3. Approches globales Ces approches traitent de la réadaptation dans une perspective d ensemble, sans s intéresser spécifiquement aux aspects «reconnaissance du discours dans le bruit» et localisation des sons». 3.1. Maximiser les bénéfices de l écoute binaurale (MacIver-Lux, 2009) Interventions pour maximiser les bénéfices de l implantation cochléaire chez les enfants (MacIver-Lux, 2009) Deux types de thérapies sont proposés : la thérapie auditivo-verbale, axée sur le développement des habiletés langagières et de la communication chez l enfant implanté jeune (avant 5 ans) la thérapie auditive, axée sur le développement des habiletés de perception auditive chez les enfants ayant déjà développé des compétences langagières (grâce à une autre aide auditive, un premier implant ou tout autre moyen). Les connaissances du clinicien relativement au développement et au fonctionnement de l audition lui permettront : d identifier les habiletés perceptuelles acquises récemment et qui sont attribuables à l écoute binaurale (et donc à l implantation bilatérale) d assurer le suivi du développement des habiletés auditives de l enfant acquises grâce à l écoute binaurale d élaborer un plan d intervention individualisé qui facilitera le développement de ces habiletés d effectuer un diagnostic différentiel lorsque les progrès de l enfant sont en-deçà de ce qu ils devraient être. Avantages de la neuromaturation sur le traitement auditif : Avantages Interactions binaurales Retombées savoir qui parle dans une conversation impliquant plusieurs personnes; localiser la provenance des sons (i.e. localiser un téléphone qui sonne); distinguer ce qui se dit dans un environnement sonore difficile (i.e. bruit et échos); comprendre le message lorsque la parole est coupée; 8 Phénomène acoustique qui fait en sorte qu'une personne peut difficilement déterminer si un son vient de l'avant ou de l'arrière. 7

Discrimination des sons d un discours Traitement temporel Écoute dichotique capter les signaux d alerte (appels de la mère, alarme d incendies, etc.). perception du discours; développement des habiletés en lecture et en écriture. perception du discours; reconnaissance et compréhension du sens du message; perception de la musique. compréhension des messages présentés par deux personnes qui parlent en même temps; ignorer les messages secondaires pour se concentrer sur le message principal (exemple : écouter le professeur dans le bavardage des autres élèves). Les composantes de la thérapie : Commencement avec les deux implants (observer attentivement comment l enfant intègre les signaux issus des deux implants); Entraînement auditif avec le deuxième implant seul dans l optique d atteindre le même niveau dans les deux oreilles; Entraînement avec les deux implants. À cette étape, on vise des processus plus avancés (localisation des sons, perception de la parole dans le bruit, perception de la musique, l écoute dichotique). Pour les activités, techniques et stratégies d entraînement, l auteure réfère à deux ouvrages : (Bellis, 2003) et (Chermak & Musiek, 2007). Conseils et entraînement des parents, lesquels participent aux thérapies. Le clinicien fait la démonstration de l activité aux parents. Par la suite, ces derniers entraînent l enfant, guidés par le clinicien. Les dernières minutes de chaque session sont consacrées à l évaluation de la séance et à l élaboration d activités de généralisation dans la vie de tous les jours. Conseils à l enfant : l enfant doit apprendre à développer l écoute active. Il est important de l encourager à réparer les bris de communications causés par la défaillance de sa perception (stratégies de réparation). Il est également important de l aider à développer des stratégies afin de contrôler son environnement acoustique. Bien des enfants ont des questions relatives au fonctionnement de leurs implants. Répondre à leurs questions les aide à se sentir supportés dans le développement de leur potentiel. 3.2. Le modèle cubique («The listening cube» : (Leo De Raeve, Archbold, & Diller, 2013)) Le modèle cubique est un programme intégré d entraînement auditif pour des enfants et des adultes implantés. Il n est pas issu de recherches; il a plutôt été développé grâce aux savoirs expérientiels tirés de la pratique clinique à KIDS Royal Institute for the Deaf, en Belgique. Le programme est conçu comme un modèle en trois dimensions (d où le lien avec un cube) : les niveaux de perception (par conséquent, la séquence dans laquelle les habiletés auditives doivent être entraînées), le matériel à utiliser dans l entraînement et les conditions de pratique (divers environnements) à considérer. Selon les auteurs, ce modèle aide les cliniciens à planifier et organiser des séances de thérapie adaptées aux besoins des clients et susceptibles de donner les meilleurs résultats dans un temps relativement court. 8

Figure 1 : Modèle cubique de l entraînement auditif Source : (Leo De Raeve et al., 2013) Les 4 niveaux de perception L audition est une activité sensorielle complexe qui comporte quatre niveaux hiérarchiques de perception : 1) La détection, qui est le niveau de base de la perception. Il implique la capacité de percevoir la présence ou l absence d un stimulus sonore. La localisation, quant à elle, est la capacité d identifier la provenance d un son. 2) La discrimination est la perception des différences et ressemblances entre les sons: sons familiers et de l environnement, phonèmes, mots, etc. 3) L identification est la capacité de répéter ou pointer le stimulus entendu. Elle implique la capacité d associer le son entendu à sa source et d y associer un message dans un contexte plus large de langage. Source : (Leo De Raeve et al., 2013) 4) L interprétation, appelée également traitement ou compréhension, est la capacité de comprendre le sens de ce qui est entendu. C est ce qui fait la différence entre écouter et comprendre. 9

Le matériel d entraînement Le matériel peut consister en matériel non-verbal (sons environnementaux et phonèmes isolés) et verbal (c est-à-dire, ayant un sens et faisant partie du langage). Il s agit d onomatopées, phonèmes, mots, phrases, conversations, chansons, textes, etc. Tout ce matériel est imprégné de prosodie. Celle-ci réfère au rythme, ton, intonation, accent, mélodie qui caractérise les conversations et inclut des éléments suprasegmentaux (rythme, durée, pause et ton) et segmentaux (voyelles et consonnes). Source : (Leo De Raeve et al., 2013) Les conditions de pratique L entraînement auditif ne doit pas seulement avoir lieu dans les conditions idéales (environnement calme, un mètre de distance, bonne intensité du son, etc.), mais plutôt dans les conditions ressemblant le plus possible aux situations quotidiennes, incluant un fond bruyant, de larges distances et des gens qui chuchotent. Les personnes entraînées peuvent utiliser différentes aides auditives (auquel cas, leur présence est considérée dans l entraînement puisque ces aides peuvent présenter des pannes techniques et/ou nécessiter des ajustements). En outre, l entraînement peut faire appel aux Source : (Leo De Raeve et al., 2013) signaux auditifs, aux signaux visuels (pour la compréhension du langage non-verbal) ou à une combinaison des deux. Pour la personne implantée, l option de présenter un support visuel au début facilite l entraînement, jusqu à ce que la personne acquière suffisamment de confiance en ses nouvelles habiletés auditives. Dans une activité se déroulant dans des conditions fermées, les personnes pratiquent avec un nombre limité d items qu elles connaissent bien tels qu un groupe d objets, photos, dessins ou textes. Dans une activité se déroulant dans des conditions semi-fermées, la personne ne sait pas exactement quels items lui seront présentés mais une information minimale lui est donnée (par exemple, quel thème va être abordé, quelles consignes il faudra suivre, etc.) Dans une activité se déroulant dans des conditions ouvertes, qui représentent un niveau élevé de difficultés, la personne ne sait ni le nom des items ni quoique ce soit d autre sur eux, ce qui signifie qu il pourrait y avoir un nombre illimité de réponses possibles. La source du son peut être une personne, un objet ou un animal. Les possibilités de pratique sont également illimitées : une voix humaine (masculine, féminine, enfantine), bruit de fond, instruments musicaux, radio, télévision, téléphone fixe ou cellulaire, etc. Lors de la préparation d une session d entraînement, les niveaux de difficultés de plus en plus croissants doivent être intégrés : Des choix fermés aux choix ouverts (closed-set to open-set) Avec ou sans lecture de textes Sans et avec bruit de fond D une courte distance à une distance plus longue Du matériel facile au matériel plus difficile Une combinaison des trois dimensions 10

Un entraînement auditif débute toujours avec de larges contrastes et le niveau de contraste se réduit au fur et à mesure que l entraînement progresse. 3.3. L entraînement perceptuel : une des quatre composantes de la réadaptation (Boothroyd, 2007) Cet auteur indique que l entraînement des habiletés perceptuelles (la perception dans le bruit et la localisation des sons s inscrivent dans cet entraînement) n est qu une des quatre composantes de la réadaptation, dont la finalité est la participation sociale. Il propose une approche intégrée en quatre dimensions : Figure 2 : Quatre composantes de la réadaptation auditive Source : (Boothroyd, 2007) Cette approche suggère que l aide psychosociale serait à considérer pour améliorer la qualité de vie et la participation sociale des personnes. 3.4. Leçons tirées de la réadaptation des enfants présentant un TTA (Alles et al., 2011) Méthodes d entraînement formel qui ne sont pas basées sur l ordinateur Ce sont des programmes utilisant des écouteurs et un CD audio (ex : DIID Dichotic Interaural Intensity Difference Training) L écoute dichotique est l habileté à écouter lorsque deux stimuli différents s adressent à chacune des oreilles au même moment. (ex. : lorsqu une personne est assise entre deux personnes et que les deux lui parlent en même temps, ou lorsqu on écoute la radio tout en étant au téléphone). Deux processus différents sont en marche, soit l intégration binaurale (on a saisi tout ce qui provient des deux sources) et la séparation binaurale (on peut isoler ce qui a été entendu par chacune des oreilles). Lorsque la personne présente une dominance d une oreille par rapport à une autre (cas du TTA ou de l implantation bilatérale séquentielle), le programme DIID aide les deux oreilles à fonctionner de manière 11

égale. L entraînement décrit peut se faire soit en entraînant seulement l oreille «basse» pour qu elle atteigne le niveau de l oreille «haute» (quelques minutes d entraînement par jour sur plusieurs semaines), soit en entraînant les deux oreilles avec une intensité différente dans chacune (au moyen d écouteurs spécialisés). Méthodes d entraînement informel : Les exercices informels doivent présenter le même niveau de difficulté que les exercices formels. L entraînement peut se faire à l école ou à la maison, le but étant de généraliser les acquis de l entraînement formel (en clinique) dans le monde réel. L entraînement auditif peut comporter différents aspects, dont : L intégration binaurale et la séparation binaurale, i.e. écouter une histoire au moyen d écouteurs dont le volume est ajusté différemment d une oreille à l autre Écoute dans le bruit, i.e. écouter une histoire ou des instructions alors que le bruit de la radio couvre la voix. Localisation des sons, i.e. identifier d où le son provient, s il est proche ou lointain ou où dans quelle direction il se dirige (chez les enfants, habileté essentielle à l exercice des sports, savoir si un coéquipier l appelle et d où il l appelle, savoir si la balle a touché le sol, etc.) La reconnaissance des sons et des mots (auditory closure training, soit développer la capacité à reconstruire le message complet même si on n a pas saisi la totalité des sons ou des mots prononcés pour différentes raisons : accent inconnu, bruit ambiant, etc.) Mots/syllabes manquants dans une conversation (i.e. _ephone = téléphone, _able =table), sans le bruit et dans un fond bruyant Reconnaissance des différents accents Entraînement au téléphone (s habituer à la distorsion de la voix et à la non-disponibilité du feedback visuel, ajout d un bruit de fond comme la télévision) Entraînement musical : la musique est reconnue pour activer différents réseaux du cerveau. L entraînement avec divers types de musiques favoriserait la discrimination des sons, des intonations, des accents, des mélodies, des rythmes, etc. de plus, la musique a un effet positif sur la mémoire de travail et sur la motivation (plus facile d être motivé par sa musique préférée que par des phrases impersonnelles débitées par un inconnu). 4. Autres considérations 4.1. Implantation bilatérale séquentielle chez les enfants et les attentes des parents (Sparreboom, Leeuw, Snik, & Mylanus, 2012) Avant l opération, les attentes des parents par rapport à la localisation des sons sont trop élevées. Aussi : S assurer que les parents ont des attentes réalistes et les aviser que les résultats pourraient prendre du temps à se concrétiser; Le port du deuxième implant est moins assidu que celui du premier, surtout lorsque le délai entre les deux implantations est long (>2 ans). L enfant pourrait exprimer de la préférence pour le premier IC et même être amené à rejeter son deuxième implant s il est déçu de sa performance. Les parents doivent l encourager à porter les deux implants (et le deuxième seul quelques heures par jour). Par exemple, un système de récompenses pourrait être mis en place. Cette publication invite à la vigilance par rapport à l abandon du deuxième implant. Plus précisément, il est impératif d identifier les facteurs de risques d abandon et les usagers qui sont les plus à risque d abandonner leur deuxième implant. 12

4.2. La généralisation des acquis est importante (Wright & Zhang, 2009) Dans un contexte de réadaptation, il n est pas possible d entraîner l usager à l ensemble des situations de perception auditive qu il va rencontrer dans la vie courante. Il devient donc important de développer, chez les usagers, des habiletés à transférer les acquis de l entraînement réalisé en réadaptation aux tâches de la vie courante pour lesquelles ils n ont reçu aucun entraînement. Ce constat soulève plusieurs enjeux pour les équipes de réadaptation : 1) Comprendre par quels mécanismes les individus généralisent les acquis de l entraînement, ainsi que les facteurs favorables à l activation de ces mécanismes; 2) Sélectionner, pour la réadaptation intensive, les activités les plus susceptibles d entraîner la généralisation 3) Planifier l après-réadaptation intensive, afin que l usager et son entourage continuent l entraînement et donc, se donnent des chances de développer davantage les habiletés des personnes. 4.3. Perception des usagers sur le plaisir et les bénéfices à retirer d un programme d entraînement auditif (Tye-Murray et al., 2012) Les taux d adhésion aux programmes d entraînement auditif sont bas, même lorsque les inconvénients liés aux déplacements sont minimisés par des programmes sur l ordinateur personnel, d où la nécessité d améliorer l expérience de l usager. Cette expérience est mesurée à partir des perceptions, d une part, des bénéfices tirés du programme et, d autre part, du plaisir (ce qu ils aiment le plus et ce qu ils aiment le moins) Les usagers perçoivent l entraînement auditif comme étant bénéfique. Un des bénéfices perçus par les usagers est le sentiment de compétence (self-efficacy) et de reprise du contrôle sur la perte d audition. Il n existe pas de lien entre le plaisir et les bénéfices (un programme peut-être perçu comme étant bénéfique tout en étant très ennuyeux). L aspect plaisir est cependant très important pour favoriser l adhésion au programme Les résultats de cette étude sont à considérer dans le développement de programmes basés dur l ordinateur. Les participants ont indiqué que les programmes comportent trois avantages : (1) programmes accessibles aux personnes à mobilité réduite, (2) flexibilité d horaire car la personne choisit où et quand il fera ses exercices et (3), moins de déplacements et de dépenses. 19% des participants ont dit aussi que le contact avec un clinicien aura été l aspect du programme qu ils ont aimé le plus. Conclusion : indépendamment des mérites (dans le sens de progrès de l usager), l adhésion au programme sera toujours un élément à considérer. Les contacts réguliers avec les cliniciens (via les technologies comme skype par exemple) ainsi qu un programme basé sur ce qui a du sens pour l usager (meaning-based materials) pourraient améliorer l adhésion. 4.4. Implication des proches dans l entraînement auditif : un avantage au niveau de la qualité de vie (Jill E Preminger & Meeks, 2010) La déficience auditive affecte différemment les personnes concernées et leurs conjoint(e)s. Aussi, il peut sembler raisonnable que les programmes de réadaptation soient adaptées pour s adresser également aux conjoints. Cette étude s est intéressée à l efficacité d une formation sur les stratégies de communication et des exercices psychosociaux destinés aux conjoints des personnes affectées par la déficience auditive. Un essai clinique randomisé avec groupe expérimental et groupe contrôle a été mené et 36 couples ont participé comme suit : 13

Groupe expérimental Personnes ayant une Conjoint(e)s de ces déficience auditive personnes Formation traditionnelle Formation adaptée pour les conjoint(e)s 90 min par semaine 90 min par semaine pendant 4 semaines pendant 4 semaines Groupe contrôle Personnes ayant une Conjoint(e)s de ces déficience auditive personnes Formation traditionnelle Aucune formation 90 min par semaine pendant 4 semaines Tous les participants ont rempli des questionnaires mesurant le stress, l humeur, la communication dans le couple, la conscience des difficultés vécues par l autre et la qualité de vie et ce, à trois reprises: avant la formation, dans les deux semaines après la fin du programme et 6 mois plus tard. Les résultats obtenus par le groupe expérimental démontrent que la participation des conjoints à un programme de réadaptation améliore la compréhension de l expérience vécue par la personne touchée par la perte d audition et la qualité de vie du couple. 4.5. Interventions de groupe dans un processus de réadaptation (J. E. Preminger & Ziegler, 2008) Cet essai clinique contrôlé s est intéressé aux avantages potentiels d un entraînement auditif dans un format de groupe 9. Elle visait à déterminer : a) Si la perception auditive de la parole peut être entraînée dans un format de groupe b) Si la perception audio-visuelle de la parole pouvait être entraînée dans un format de groupe c) Si les personnes entraînées dans l un ou l autre des groupes allaient rapporter des améliorations dans ces habiletés d) Si l entraînement allait donner lieu à des améliorations en termes de qualité de vie perçues par les participants eux-mêmes. Trois groupes (16 participants de 55 à 75 ans, présentant une perte d audition) ont été formés aléatoirement : un groupe expérimental qui a reçu un entraînement à la perception auditive et audio-visuelle en groupe (5 heures à raison d une heure par semaine) un autre groupe qui a reçu le même entraînement enrichi d exercices psychosociaux (orientés vers la reconnaissance de sa déficience, les émotions et attitudes associées, les réactions des autres participants face à leur déficience, ainsi que l impact de la déficience sur la vie personnelle et professionnelle) un groupe contrôle, qui n a reçu aucun entraînement. Les participants ont passé les mêmes tests au début de l expérience, après 6 semaines et après 6 mois. Les résultats indiquent que les membres du premier groupe expérimental n ont pas obtenu des améliorations significatives au plan des habiletés de perception de la parole, même s ils indiquent avoir réalisé des progrès (bénéfices subjectifs). Ceux du deuxième groupe expérimental n ont pas eu plus de résultats concernant les habiletés perceptuelles. Les auteurs pensent que ces résultats (pour les deux groupes) seraient dus au fait que le temps passé dans une classe soit davantage consacré aux aspects émotifs plutôt qu à l entraînement à la perception. Enfin, l ajout d exercices psychosociaux n a apporté qu un bénéfice minimal pour le groupe qui en a bénéficié. Il appert que le simple fait d être en groupe donne lieu à des bénéfices psychosociaux même sans activités psychosociales explicites. 9 L étude se situe dans le contexte des États-Unis où, pour des raisons liées au remboursement des frais d audiologistes, ceux-ci sont plutôt peu portés à offrir leurs services sur une base individuelle, sinon via des programmes sur ordinateur. 14