1501262 IRP Délégué syndical : effets de l annulation de la désignation sur le statut protecteur Le salarié, dont la désignation en qualité de délégué syndical est judiciairement annulée, ne perd pas le bénéfice du statut protecteur qui y est attaché et peut prétendre, s il en fait la demande avant l expiration de sa période de protection, aux indemnités liées à la nullité de la rupture de son contrat de travail. Soc. 16 déc. 2014, FS-P+B, n 13-15.081 La nullité a pour caractéristique d entraîner l anéantissement rétroactif de l acte juridique qu elle frappe (sur la rétroactivité de la nullité, comp. Civ. 1re, 16 juill. 1998, n 96-18.404, D. 1999. 361, note P. Fronton ; RTD civ. 1999. 620, obs. J. Mestre ; RTD com. 1999. 488, obs. B. Bouloc ; Defrénois 1998. 1413, obs. J.-L. Aubert ; 15 mai 2001, n 99-20.597, D. 2001. 3086, obs. J. Penneau ; RDSS 2001. 780, obs. G. Mémeteau et M. Harichaux ; ibid. 781, obs. G. Mémeteau et M. Harichaux ; RTD civ. 2001. 699, obs. N. Molfessis ; dernièrement V. Civ. 3e, 17 sept. 2014, n 13-16.651, D. 2014. 1873 ; JCP 2014. 1174, note J.-J. Barbièri ; Soc. 9 déc. 2014, n 13-21.766, D. 2015. 18 ). Compte tenu de certains des impératifs qui l animent, le droit du travail a tendance à infléchir les effets de cette sanction (G. Couturier, La théorie des nullités dans la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation, in Études offertes à Jacques Ghestin, LGDJ, 2001, p. 273 s.). Il en va notamment ainsi s agissant de la protection accordée au salarié à l occasion des élections professionnelles ou dans ses rapports avec un syndicat. Le juge judiciaire s est, en effet, attaché, tout comme le juge administratif (à propos de l annulation des élections des membres du comité d entreprise, V. CE 21 déc. 1994, n 105313, Ministre du travail, de l emploi et de la formation professionnelle c. Huard de Jorna, au Lebon ; D. 1996. 226, obs. D. Chelle et X. Prétot ), a écarté l effet rétroactif de la nullité lorsqu une candidature aux élections (V. Soc. 28 nov. 2000, n 98-42.019, Bull. civ. V, n 396 ; Dr. soc. 2001. 634, note J.-M. Verdier ; 5 mai 2009, n 07-45.004, Dalloz jurisprudence), un mandat de salarié mandaté en vue d une négociation collective (Soc., 28 févr. 2007, n 05-42.553,Bull. civ. V, n 36 ; D. 2007. 802 ; RDT 2007. 465, obs. M. Grévy ), un jugement reconnaissant une unité économique et sociale (V. Soc. 2 déc. 2008, n 07-41.832, Bull. civ. V, n 238 ; Dalloz actualité, 15 déc. 2008, obs. L. Perrin ; D. 2009. 24 ; JCP S 2009. 1099, obs. F. Dumont) ou une élection de conseillers prud homaux (V. Soc. 16 mars 2010, n 08-44.094, Bull. civ. V, n 66 ; Dalloz actualité, 12 avr. 2010, obs. B. Ines ; D. 2010. 832 ; JCP S 2010. 1293, obs. T. Lahalle) est annulée. Dans chacune de ces hypothèses, le salarié conserve sa protection contre les mesures prises par l employeur à son encontre, comme un licenciement, jusqu à la date de la décision qui statue définitivement sur la validité de l acte lui octroyant cette protection. Il a été remarqué que la Cour fait prévaloir une logique de statut sur la logique contractuelle (J.-M. Verdier, préc.), prévalence justifiée par l exercice de libertés, qu elles soient issues du
principe de participation ou de la liberté syndicale constitutionnellement garantis, dont l effectivité, qui implique une prise de risque de la part des salariés cherchant à exercer certaines fonctions, nécessite une protection qui ne peut être remise en cause que de manière limitée. Cependant, la Cour n a jamais consacré la solution concernant le mandat de délégué syndical. Elle a plutôt emprunté le chemin inverse. Pendant de nombreuses années, l annulation de la désignation du délégué syndical produisait ses effets de manière rétroactive privant le salarié de toute protection contre, notamment, le licenciement prononcé à son encontre, sans autorisation ou malgré un refus d application, après sa désignation (V. Soc. 12 mai 1976, n 75-40.040, Bull. civ. V, n 273 ; 28 nov. 1991, n 90-44.606, Dalloz jurisprudence ; 30 nov. 2011, n 10-21.120, Dalloz jurisprudence). La chambre sociale a néanmoins changé de position dans deux décisions inédites (V. Soc. 13 févr. 2013, n 11-27.240, Dalloz jurisprudence ; 10 déc. 2014, n 13-22.142, Dalloz jurisprudence). Le présent arrêt a offert à la Cour l opportunité d étendre définitivement l application de la solution à tous les salariés protégés dont ceux qui sont investis d un mandat de délégué syndical. Est ainsi affirmé que «l annulation par le tribunal d instance de la désignation d un délégué syndical, quel qu en soit le motif, n a pas d effet rétroactif sur le statut protecteur». En l espèce, le salarié ayant été licencié entre sa désignation et le jugement qui a annulé son mandat et mit fin à ce dernier pour l avenir, la protection était encore opérationnelle. Le licenciement, prononcé en violation du statut protecteur, devait donc être nul. L arrêt se prononce également sur les suites de la nullité de ce licenciement. Le salarié est libre de demander ou non sa réintégration mais, en toute hypothèse, a droit à des indemnités. S il demande sa réintégration, le salarié a droit au versement d une indemnité égale au montant de la rémunération qu il aurait perçue entre son licenciement et sa réintégration effective (V. Soc. 17 oct. 1989, n 87-41.174, Bull. civ. V, n 596 ; 10 oct. 2006, n 04-47.623, Bull. civ. V, n 297 ; D. 2006. 2689 ; 16 oct. 2013, n 12-17.883, Dalloz jurisprudence). S il ne demande pas sa réintégration, le salarié a droit à une indemnité due au titre de la méconnaissance du statut protecteur, aux indemnités de rupture et à une indemnité réparant l intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement au moins égale à celle prévue par l article L. 1235-3 du code du travail (V. Soc. 16 mars 2005, n 02-45.077, Bull. civ. V, n 96 ; D. 2005. 1048 ; 29 mars 2005, n 03-40.768, Bull. civ. V, n 105). Dans tous les cas, la demande indemnitaire, pour aboutir, doit avoir été introduite avant le terme de la protection accordée au salarié (si une demande en réintégration est faite, V. Soc. 10 déc. 1997, n 94-45.254, Bull. civ. V, n 431 ; D. 1998. 31 10 oct. 2006, préc. ; 16 oct. 2013, préc. ; si aucune demande en
réintégration n est faite, V. Soc. 11 juin 2013, n 12-12.738, Bull. civ. V, n 150 ; D. 2013. 1555 ; RDT 2013. 573, obs. M. Grévy ; JCP S 2013. 1388, obs. A. Barège). En l espèce, la demande de réintégration du salarié avait bien été introduite avant le jugement annulant son mandat de délégué syndical. La Cour de cassation donne droit à la demande indemnitaire du salarié mais lui octroie la série d indemnités dues au salarié qui ne demande pas sa réintégration. De prime abord, la solution ne brille pas par sa cohérence, au contraire. L explication est peut-être à trouver dans l exposé des motifs de la décision de la cour d appel, critiquée par le demandeur au pourvoi, qui relatent certains éléments malheureusement ignorés de la motivation fournie par la Cour. Après avoir obtenu sa réintégration, le salarié s est vu proposer un poste qui n était pas le sien, ce qui pouvait justifier une demande de résiliation judiciaire aux torts de l employeur qu il a présentée et au titre de laquelle il a obtenu gain de cause. Or, selon la chambre sociale, lorsque le salarié a obtenu judiciairement sa réintégration et que l employeur y fait obstacle, ce dernier est tenu au paiement d une indemnité égale à la rémunération que le salarié aurait perçue jusqu à ce que, renonçant à sa réintégration, il prenne acte de la rupture de son contrat de travail (V. Soc. 25 janv. 2006, n 04-40.789, D. 2006. 467 ; ibid. 2002, obs. J. Pélissier, B. Lardy- Pélissier et B. Reynès ; RDT 2006. 41, obs. M. Grévy ). Le raisonnement devait valoir, par analogie, pour la résiliation judiciaire, comme le prouve le présent arrêt. Mais la demande d indemnisation liée à la renonciation à la réintégration, consécutive au refus de l employeur de réintégrer le salarié, aurait dû être antérieure au terme de la période de protection, en l occurrence antérieure au jugement annulant le mandat de délégué syndical, ce qui n était pas le cas en l espèce. La chambre sociale accueille malgré tout favorablement la demande du salarié parce qu initialement la demande de réintégration avait été formulée avant le terme de la période de protection. Le but est alors de tenir compte du fait que la demande nouvelle du salarié est la conséquence d une faute commise par l employeur. Seule importe donc la demande présentée ab initio par le salarié et par laquelle il manifeste la volonté de bénéficier de son statut protecteur, même si, par la suite, des évènements qui ne lui sont pas imputables le conduisent à choisir, au sein de ce même statut, le bénéfice d une autre règle indemnitaire. De ce fait et à ces conditions, l indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur ne correspond pas seulement aux salaires qui auraient été dus au salarié entre son éviction de l entreprise et le terme de sa période de protection, en l occurrence le jugement annulant son mandat, mais encore à ceux compris entre ce terme et la date de la décision prononçant la résiliation de son contrat de travail aux torts de l employeur. Bertrand Ines L'employeur qui n'organise pas la visite médicale cause un préjudice au salarié
Cour de cassation du 15 octobre 2014, pourvoi n 13-14969 Contexte de l'affaire La présente affaire concerne un salarié placé en arrêt de travail pour maladie du 5 au 25 juin 2008. A la suite d un accident du travail survenu le 28 août 2009, il est placé en arrêt de travail jusqu'au 2 novembre 2009, puis, à compter du 6 novembre suivant. Licencié pour faute grave par lettre du 26 novembre 2009, il saisit la juridiction prud'homale de nombreuses demandes, parmi lesquelles le versement de dommages et intérêts pour défaut de visite médicale de reprise. Dans un premier temps, la cour d appel déboute le salarié de sa demande, estimant que l'examen de reprise peut être sollicité par le salarié, lequel n'invoque pas, pour la période considérée, une modification de son aptitude au travail, ni le fait d'avoir avisé son employeur. Mais la Cour de cassation ne partage pas du tout l avis de la cour d appel. Les juges relèvent, en l espèce, que le salarié avait été en arrêt de travail du 28 août 2008, date de son accident du travail, au 2 novembre 2009, puis avait repris le travail sans que la visite de reprise envisagée par la médecine du travail n'ait été effectuée à la date de la rupture. L organisation de la visite médicale de reprise étant du ressort de l employeur, le défaut d organisation cause un préjudice conduisant au versement de dommages et intérêts. L arrêt de la cour d appel est cassé et annulé à ce propos, la Cour de cassation renvoyant les parties devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée. Cour de cassation du 15/10/2014, pourvoi n 13-14969 Cet arrêt rappelle, une fois de plus, que l organisation de la visite médicale de reprise est du ressort de l employeur, et qu un défaut d organisation cause un préjudice au salarié, entrainant le versement de dommages et intérêts. C est pour cette raison, que nous rappelons ci-après quelques informations importantes à ce sujet. Se soumettre à une visite médicale de reprise Arrêt de travail consécutif à maladie ou accident non professionnel Tout salarié bénéficie d une visite de reprise :
- Au terme d un congé de maternité ; - Après une absence pour cause de maladie professionnelle ; Après une absence d'au moins 30 jours pour cause d'accident du travail, de maladie ou d'accident non professionnel. Article R4624-22 Modifié par Décret n 2012-135 du 30 janvier 2012 - art. 1 Le salarié bénéficie d'un examen de reprise du travail par le médecin du travail : 1 Après un congé de maternité ; 2 Après une absence pour cause de maladie professionnelle ; 3 Après une absence d'au moins trente jours pour cause d'accident du travail, de maladie ou d'accident non professionnel. Cas du salarié qui ne reprend pas le travail après la visite de reprise Un salarié est engagé le 21/02/2000 en qualité d opérateur par une société industrielle. Il est en arrêt de maladie longue durée du 12/11/2006 au 31/10/2007. Le 5/11/2007, il passe une visite médicale de reprise et le médecin du travail le déclare apte à reprendre le travail. Sans nouvelles de son salarié, l employeur lui adresse deux mises en demeure par courriers des 7 et 9/11/2007. N ayant pas obtenu de réponse, l employeur procède alors au licenciement de son salarié pour faute grave. Le salarié saisit la juridiction prud homale, contestant son licenciement. Dans un premier temps, la Cour d appel déboute le salarié de ses demandes, mais ce dernier décide de se pourvoir alors en cassation. Les juges de la Cour de cassation confirment l arrêt de la Cour d appel et rejettent le pourvoi. Extrait de l'arrêt: Mais attendu qu'ayant relevé que le salarié, qui n'était plus en arrêt de travail depuis le 31 octobre 2007 et avait été déclaré apte à son emploi par le médecin du travail, n'avait pas repris le travail en dépit de deux mises en demeure de son employeur sans donner de justification de son absence, a pu décider que son comportement rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Cour de cassation 20/10/2011 Arrêt n 2069 F-D Pourvoi n G 10-24059
Requalification d un CDD en CDI à la demande d un syndicat Un salarié peut demander la requalification de son CDD en CDI devant le conseil de prud hommes. Un syndicat peut se substituer à un salarié en CDD pour la requalification de son contrat. Il a également la possibilité de saisir le tribunal d instance pour cette requalification, cette dernière ayant des intérêts dans la détermination de l effectif de l entreprise. Requalification du CDD devant le conseil de prud hommes Le recours au contrat à durée déterminée est strictement encadré par le Code du travail. Si les règles ne sont pas respectées, vous risquez que le salarié demande la requalification de son CDD en contrat à durée indéterminée. Par exemple, un CDD sera requalifié en CDI si ce dernier ne fait pas l objet d un contrat écrit, si les mentions obligatoires manquent dans le contrat ou s il n a pas été remis dans les 2 jours suivant l embauche du salarié. Dans ce cas, le salarié peut saisir le conseil de prud hommes pour demander la requalification de son contrat. Les syndicats représentatifs dans l entreprise peuvent également se substituer au salarié et demander au conseil de prud hommes de requalifier le contrat. Mais attention, pour pouvoir engager ce recours, ils doivent informer le salarié. Ce dernier peut s opposer à cette démarche. Il dispose d un délai de 15 jours pour le faire à compter de la date à laquelle le syndicat l a informé de sa volonté d agir en justice. Requalification du CDD devant le tribunal d instance Les syndicats peuvent également demander la requalification du contrat à durée déterminée devant le tribunal d instance. Ce droit vient d être reconnu par la Cour de cassation. Cour de cassation, chambre sociale, 17 décembre 2014, n 1413712 En effet, cette requalification des CDD représente un intérêt en matière d institutions représentatives du personnel et des syndicats puisque cela concerne notamment la détermination des effectifs de l entreprise. Dans cette affaire, il existait un litige sur le décompte de l effectif de l entreprise. Cour de cassation, chambre sociale, 17 décembre 2014, n 14-13712 (les syndicats peuvent demander la requalification d un CDD devant le tribunal d instance)
Sanctionner un harcèlement, pas si évident... Pour commencer, attachons-nous à décrypter ce que peut sous-entendre un harcèlement moral tant les manifestations en sont variées aujourd hui. Globalement, il s agit d une souffrance infligée sur le lieu de travail de façon durable, répétitive et/ou systématique par une ou plusieurs personnes à une autre personne par tout moyen relatif aux relations, à l'organisation, aux contenus ou aux conditions de travail en les détournant de leur finalité, manifestant ainsi une intention consciente ou inconsciente de nuire, voire de détruire. On n'est donc plus ici dans un traumatisme violent et unique survenant brutalement mais face à des agressions répétées et durables, qui ont une finalité. Dès lors, on peut distinguer : - le harcèlement dit «institutionnel» relatif à une stratégie de gestion de l'ensemble du personnel : la violence ne relève pas d'un problème épisodique ou individuel mais d'un problème structurel qui relève d'une stratégie ; - le harcèlement dit «professionnel» qui vise un ou plusieurs salariés en particulier avec l objectif d éviter les procédures légales de licenciement ; - le harcèlement dit «individuel» qui a pour finalité la destruction d'autrui et/ou la valorisation de son propre pouvoir. Dans cette affaire, une salariée avait été engagée en qualité d animatrice de développement des ventes par une société de laboratoires. Neuf ans plus tard, elle a été licenciée pour faute grave après avoir été mise à pied à titre conservatoire. Elle avait saisi la juridiction prud homale pour contester le bien-fondé de son licenciement et demander le paiement de diverses sommes. La société faisait grief à l arrêt de la Cour d appel de Nancy de dire que l existence d une faute grave n était pas démontrée et de l avoir condamnée à payer à la salariée des sommes à titre d indemnités de rupture et de rappel de salaire pour mise à pied conservatoire injustifiée. Pour sa défense, l employeur avançait que commet une faute grave le salarié qui fait preuve d autoritarisme et d une agressivité non justifiée à l égard des salariés placés sous sa subordination. A fortiori si ce climat social débouche sur le placement d une salariée en arrêt de travail pour cause «d anxiété réactionnelle liée au travail» et la dégradation des conditions de travail des autres membres de l équipe. En outre, l employeur précisait que la faute grave peut être caractérisée indépendamment de tout dénigrement ou harcèlement moral dès lors que le comportement du salarié rendait impossible son maintien dans l entreprise.
L employeur, qui a l obligation de prévenir tout fait de harcèlement dans l entreprise, devaitil tirer sans délai les conséquences nécessaires du comportement de sa salariée par la rupture immédiate de son contrat de travail? Pouvait-on objectivement caractériser une situation de harcèlement moral de la salariée envers ses subordonnées? Par principe, les méthodes de gestion mises en œuvre par un supérieur hiérarchique ne peuvent caractériser un harcèlement moral que si elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d entraîner une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. En l espèce, les juges du fond avaient relevé que ce n était pas le cas et donc qu aucun harcèlement moral n était caractérisé. En l occurrence, il faut savoir que l obligation faite à l employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir ou de faire cesser les agissements de harcèlement moral n implique pas par elle-même la rupture immédiate du contrat de travail d un salarié à l origine d une situation susceptible de caractériser ou dégénérer en harcèlement moral. Nonobstant le manque de preuve s agissant des griefs de harcèlement moral, les juges nancéiens avaient tout de même estimé que le grief de gestion autoritaire et inappropriée (également reproché à la salariée) était établi. Toutefois, cela ne rendait pas impossible le maintien de la salariée dans l entreprise et de facto ne justifiait pas une rupture immédiate de son contrat de travail. En définitive, il faut bien comprendre que si des faits de harcèlement moral ont été commis par un salarié, celui-ci est passible d une sanction disciplinaire. Pour autant, il ne s agit pas de se lancer avec impétuosité dans une procédure de licenciement pour faute grave. En effet, l employeur est tenu envers ses salariés d une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l entreprise, notamment en matière de harcèlement moral. Par conséquent, il doit prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral. Cependant, il ne faut pas oublier qu il dispose pour cela d une totale liberté dans le choix des moyens à mettre en œuvre. Alors, pas besoin de «se ruer» sur une rupture immédiate du contrat de travail du salarié «présumé harceleur», il s avère préférable de prendre le temps de la réflexion pour analyser les faits et recueillir des preuves suffisantes. Ne dit-on pas «qu on ne fait jamais rien de bon dans la précipitation»?