1. Les mesures de redressement



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N/Réf. : PG/PG/11-17 Strassen, le 1 er décembre 2014 à Monsieur le Ministre des Finances Monsieur le Ministre, Vous avez bien voulu saisir la Chambre d'agriculture pour avis sur le projet de loi concernant le budget des recettes et des dépenses de l Etat pour l exercice 2015. La Chambre d'agriculture a analysé le projet de loi dont question en assemblée plénière et a décidé de formuler l avis qui suit. 1. Les mesures de redressement Le budget pour l exercice 2015 est caractérisé notamment par une série de 258 mesures de redressement des comptes publics, dont 21 mesures qui relèvent du Ministère de l Agriculture, de la Viticulture et de la Protection des consommateurs. (en milliers d'euros) N Mesures 2015 2016 2017 2018 208 Eonomies à travers le regroupement d'articles budgétaires 6 13 21 29 209 Economies à travers le regroupement de subventions 100 262 235 207 210 Révision des conventions de conseils -28 40 40 39 211 Suppression de jetons de présence dans des groupes de travail n.d. n.d. n.d. n.d. 212 Révision du régime des aides d'etat 124 1.505 1.505 1.520 213 Office national de remembrement 458 505 515 625 214 Révision des taxes pour analyses viticoles 0 100 100 100 215 Fonds de Solidarité Viticole - Révision du concept de promotion 278 315 315 315 216 Révision de différentes mesures et dépenses en faveur de l'agriculture 28 72 81 71 217 Réorganisation des bureaux régionaux de l'asta 116 215 265 193 218 Réorganisation des équipes d'ouvriers de l'asta 68 107 133 251 219 Réorganisation de la promotion pour les produits agricoles 78 190 235 248 220 Réduction des frais de fonctionnement de l'asta 18 28 67 90 221 Suppression du service des constructions agricoles à l'asta 9 10 12 14 222 Réorganisation du garage et des ateliers de l'asta 4 4 4 4 223 Réforme des services de comptabilité agricole 0 109 275 275 224 Comptabilité agricole payante 0 120 120 120 225 Réorganisation du Service d'economie Rurale et de l'administration des Services Techniques de l'agriculture n.d. n.d. n.d. n.d. 226 Réforme de l'indemnisation dans le cadre de la police sanitaire 0 0 80 80 227 Prestations vétérinaires payantes 128 133 138 143 228 Réforme de la facturation des prestations vétérinaires 130 152 176 199 Total Ministère de l'agriculture 1.516 3.879 4.316 4.524 Source : Projet de budget de l Etat 2015 Il ressort du tableau ci-devant que les efforts en matière de redressement du département de l agriculture se font majoritairement au détriment des exploitations agricoles, viticoles et horticoles, et ceci par l abolition de certaines subventions et aides d Etat, par le biais de la [1]

réduction substantielle de la participation étatique au niveau de nombreux programmes et par le biais de l introduction resp. de l augmentation de certaines taxes. Certaines mesures proposées vont même générer au-delà des montants repris dans le tableau des coûts supplémentaires substantiels au niveau des exploitations (suppression du service des constructions agricoles). Il importe de relever dans ce contexte que les mesures envisagées au niveau du Plan de Développement Rural (PDR) pour la période 2014-2020 vont réduire par rapport à la période 2007-2013 considérablement le niveau des aides à l investissement (limitation des investissements éligibles, réduction du taux de subvention, introduction de plafonds). Les moyens financiers (part européenne & part nationale) réellement mis à disposition du secteur agricole seront donc fortement en régression par rapport au dernier PDR même si l alimentation constante du fonds agraire (Fonds d orientation économique et sociale pour l agriculture) à raison de 56 millions d euros par an laisse croire à une stabilisation. Le secteur agricole se voit dès lors confronté à deux démarches de consolidation budgétaire distinctes, menant chacune à une réduction des dépenses étatiques au profit des exploitations agricoles, viticoles et horticoles luxembourgeoises et ceci dans un contexte économique de plus en plus difficile (prix en forte baisse et abolition des quotas laitiers)! 2. La situation de revenu dans le secteur agricole La situation économique des exploitations agricoles reste extrêmement fragile du fait qu elles se trouvent pleinement exposées aux fluctuations des marchés agricoles mondiaux et ceci dans un cadre législatif européen et national qui, loin de les protéger, leur ôte tout moyen de réaction. La situation économique délicate dans laquelle l agriculture luxembourgeoise se retrouve, nécessite entre autres des mesures visant la réduction globale des coûts et favorisant l écoulement des produits agricoles, viticoles et horticoles sur le marché national à des prix suffisamment élevés. Evolution du revenu agricole par rapport au revenu de référence Source: Ministère de l'agriculture, de la Viticulture et du Développement Rural, Service d économie rurale (2014) L écart entre le revenu agricole et le revenu de référence des autres catégories de notre société continue de croître en défaveur du secteur agricole. Dans le contexte de la suppression des quotas laitiers en 2015 et de la mise en œuvre de la réforme de la politique agricole commune (PAC) pour la période 2014 à 2020, l insécurité au niveau de la profession agricole ne cesse de [2]

s accentuer. La baisse actuelle des prix du lait ne fait qu aggraver la situation, d autant plus qu on doit s attendre à ce que ce niveau de prix risque de perdurer tout au long de l année 2015. Le renforcement de la règlementation environnementale et notamment la désignation de zones de protection à caractère divers ont tendance à limiter de plus en plus la marge de manœuvre des exploitations agricoles en multipliant les servitudes, restrictions et interdictions sur la majorité des surfaces agricoles. La lourdeur administrative ainsi induite engendre en plus des délais énormes en matière d autorisations et une augmentation constante des coûts des constructions agricoles. 3. Les défis du secteur agricole dans le contexte de la réforme de la PAC Conformément à la stratégie «Europe 2020», les objectifs nationaux en matière de développement rural devront intégrer pour la période 2014 à 2020 les priorités suivantes : 1) Favoriser le transfert de connaissances et l innovation 2) Améliorer la compétitivité et renforcer la viabilité des exploitations agricoles 3) Promouvoir l organisation de la chaîne alimentaire et la gestion des risques 4) Restaurer, préserver et renforcer les écosystèmes tributaires de l agriculture 5) Promouvoir l utilisation efficace des ressources 6) Promouvoir l inclusion sociale, la réduction de la pauvreté et le développement économique Toutes ces priorités devraient donc être assorties de mesures concrètes. Or, après analyse du budget pluriannuel (2015-2018), nous nous devons de relever que celui-ci ne reflète que très sommairement les priorités de la PAC 2014-2020. Le secteur agricole s attendait pourtant à ce que le budget (pluriannuel) soit établi dans le sens d un développement dynamique du secteur agricole. Or, des éléments tangibles permettant d identifier au niveau du projet de budget des mesures concrètes et donc une quelconque stratégie de développement font défaut, tant au niveau de l amélioration de la compétitivité (p.ex. aides à l investissement, simplification administrative, réduction des coûts, amélioration du statut sanitaire des troupeaux, promotion des produits agricoles) qu au niveau de l encadrement général des exploitations (vulgarisation, recherche agricole, formation continue,...). D ailleurs, le commentaire du budget du ministère de l agriculture insiste lourdement sur les restrictions budgétaires et ne souligne aucune perspective politique positive pour le secteur. Renforcer la compétitivité et la viabilité économique...... par de vraies mesures de simplification administrative Il est de plus en plus évident que la lourdeur administrative croissante imposée à l économie luxembourgeoise entière a des répercussions néfastes sur le développement de notre économie et, de surcroît, engendre de lourdes dépenses au niveau de l Etat, sans pour autant générer une plus-value perceptible au niveau de la société. Les démarches de simplification administrative, qui, dans le passé, se sont largement limitées à décharger (ponctuellement) l administration elle-même et non l administré, devraient impérativement être renforcées par des mesures allant nettement au-delà de la simplification sommaire de procédures administratives isolées et de la mise en ligne de formulaires numériques. Notre chambre professionnelle est d avis qu une analyse approfondie et continue des répercussions de l ensemble des procédures administratives actuelles (et des politiques sectorielles sous-jacentes) sur notre économie s impose. In fine, une telle analyse devrait aboutir à un véritable projet [3]

d assainissement en matière d autorisations et de procédures, assurant des délais ainsi que des obligations décents tout en minimisant les coûts. Une meilleure organisation des administrations nous semble également d une grande importance. Ainsi nous sommes d avis qu une réorganisation, voire même une fusion du Service d Economie Rurale (SER) et de l Administration des Services Techniques de l Agriculture (ASTA) permettrait de réaliser d importantes économies, sans pour autant compromettre la qualité des services offerts aux exploitations agricoles. Il ne peut être considéré comme normal qu en parallèle de la diminution constante du nombre des exploitations agricoles, le nombre de fonctionnaires chargés de la gestion étatique ne cesse d augmenter. Hélas, le projet de budget pluriannuel ne comporte que des mesures de réorganisation assez timides, dont certaines augmenteront néanmoins considérablement la charge financière des exploitations agricoles. Ainsi la suppression du service des constructions agricoles à l ASTA ne permet que des économies au niveau de l administration de l ordre de 9.000 à 14.000 euros par an, alors que la modification du système de subventionnement des frais d établissement des plans nécessaires dans le cadre de projets d investissement risque pourtant de générer (au niveau des exploitations) des coûts supplémentaires de l ordre de 20.000 à 40.000 euros (par projet!) selon l envergure des projets.... par de vraies mesures de réduction des coûts de production Par le biais des différentes mesures du «Spuerpak», le gouvernement génère des coûts supplémentaires pour les exploitations et supprime des mesures de réduction des coûts existantes. Ainsi, le gouvernement abolit la subvention sur la consommation électrique («tarif agricole»), accordée dans les années 1960 en guise de compensation forfaitaire pour la mise à disposition de terrains agricoles pour la construction de lignes à haute tension. Si ces infrastructures continuent à générer des profits (et à gêner l exploitation agricole des terrains concernés), l indemnisation des agriculteurs (de l ordre de 1,3 millions d euros) sera tout simplement supprimée (à partir de 2016), sans que la moindre mesure de compensation ne soit envisagée! Si la Chambre d Agriculture peut comprendre l objectif du gouvernement de répercuter de façon générale certains coûts des services étatiques tels qu analyses, autorisations, certificats, etc. sur le bénéficiaire de ces services, elle constate que cette façon de faire aura comme effet une augmentation globale des coûts pour les administrés. En plus, la facturation de ces coûts (grand nombre de factures peu élevées) engendrera elle-même un coût administratif considérable, qui, dans certains cas risque de dépasser le produit de la recette (simplification administrative?). En tout cas, ces coûts supplémentaires à charge des exploitations risquent de ne pas comporter une économie significative pour l état, et n augmentent certainement pas l efficacité globale du secteur agricole!... par des investissements dans des infrastructures de production modernes Le secteur agricole se caractérise par un volume d investissement annuel de l ordre de 100 à 150 millions d euros. Dans un souci d assurer la compétitivité du secteur agricole entier, la Chambre d Agriculture tient à souligner la nécessité de doter le fonds agraire des moyens budgétaires suffisants afin d assurer que les exploitations agricoles puissent continuer à investir dans des infrastructures compétitives modernes à la hauteur des exigences croissantes en matière de sécurité alimentaire, de bien-être animal et d intégration de normes environnementales. Or, le montant global mis à disposition pour les aides à l investissement sera réduit considérablement par rapport à la période 2007-2013, de sorte que nombre de projets risquent de ne plus être subventionnés. [4]

... par un renforcement de la promotion des produits agricoles L agriculture se retrouve de plus en plus dans une situation de dépendance par rapport aux grands groupes agro-alimentaires qui dictent aussi bien les prix que les standards de production. Les coûts de production et les prix payés à la consommation ont évolué différemment et l écart ne cesse de se creuser. Depuis des années, l agriculture luxembourgeoise s'est engagée résolument dans une démarche de qualité et ceci dans le but de maintenir et de développer la part de marché de la production indigène sur le marché national. L agriculture luxembourgeoise a aussi fait preuve d un grand dynamisme dans le domaine de la sécurité alimentaire. Parallèlement, de nombreuses démarches ont été entamées pour orienter l agriculture luxembourgeoise davantage vers des méthodes de production durables et respectueuses de l environnement. Dès lors, la Chambre d'agriculture n a jamais manqué de soulever l importance d une conception globale de marketing pour ces produits agricoles de qualité. De nombreux efforts ont été investis, non seulement au niveau de la production, mais également au niveau de la transformation et de la commercialisation de nos produits de qualité par une collaboration étroite entre les différents intervenants dans les filières. Les produits de notre agriculture, avec le savoir-faire des filières en amont et en aval, peuvent garantir un niveau de qualité, de sécurité et d hygiène très élevé. Il faudra par conséquent mieux informer le consommateur sur les caractéristiques, la valeur et la qualité des produits alimentaires indigènes. Au niveau du commentaire du budget des dépenses, les responsables du Ministère de l Agriculture, de la Viticulture et de la Protection des consommateurs affirment qu «... il ne suffit pas de produire des produits de qualité, mais il faut également sensibiliser et informer le consommateur pour l inciter à consommer ces produits.». Or, les responsables du projet de budget pluriannuel font exactement le contraire en réduisant considérablement les subventions dans ce domaine d environ 500.000 euros par an au niveau des actions de promotion au profit de l agriculture resp. de la viticulture luxembourgeoise. Ceci à un moment où le nombre de consommateurs, notamment non indigènes (résidents étrangers, transfrontaliers), ne cesse d augmenter! Cette évolution démographique de notre société nécessiterait plutôt une intensification des efforts de promotion pour informer ces consommateurs des atouts des produits agricoles luxembourgeois. Si les responsables politiques n hésitent pas à soumettre les exploitations agricoles, viticoles et horticoles à toutes sortes d obligations et de contraintes coûteuses en matière d infrastructures et de méthodes de production, ne devraient-ils pas veiller à ce que les consommateurs soient dûment informés au sujet du niveau de qualité élevé des produits agricoles luxembourgeois et des avantages comparatifs d une production agricole locale? Malheureusement, l Etat lui-même est encore loin d honorer ces efforts dans sa politique d achats publics!... par un meilleur soutien via les établissements de la restauration collective gérés par l Etat L évolution du mode de vie et de travail continue d avoir des répercussions considérables sur l alimentation de notre population. A côté des hôpitaux et des établissements pour personnes âgées, il y a eu une multiplication des lieux de restauration collective et notamment du nombre de cantines scolaires où des repas sont distribués sous la responsabilité de l Etat ou des communes. Mis à part les aspects liés à la sécurité alimentaire, l Etat ne prend guère de responsabilité directe en ce qui concerne les méthodes de production et de transformation des produits alimentaires. L Etat, par son système d adjudications publiques, met avant tout l accent sur le facteur prix, ce qui mène à l utilisation de produits alimentaires qui ne répondent pas nécessairement aux attentes de la société en matière de qualité. Or, l Etat luxembourgeois, en s exprimant très clairement par d autres actes législatifs et réglementaires en faveur des méthodes de production respectant les exigences de l environnement naturel et en faveur d un étiquetage et d une traçabilité permettant de fournir les assurances nécessaires au consommateur, devrait montrer l exemple, en tant [5]

qu acheteur de produits alimentaires, d un choix judicieux de produits dans le respect des attentes du consommateur. Dès lors, nous demandons que l Etat, qui par ses décisions en matière d autorisation et de modes de production contribue substantiellement à renchérir la production agricole luxembourgeoise par rapport à la concurrence étrangère, fasse en sorte que le choix des produits alimentaires en restauration collective soit davantage influencé par des critères de durabilité que par le prix d achat. Améliorer l encadrement des exploitations...... par la création d un centre de compétence agricole Les besoins en infrastructures modernes ne se limitent pas aux exploitations agricoles, viticoles et horticoles. Ainsi la Chambre d Agriculture invite le Gouvernement à veiller à ce que la construction du nouveau Lycée technique agricole puisse être réalisée dans les meilleurs délais (les moyens budgétaires prévus à cet effet, tels qu ils ressortent de la programmation financière pluriannuelle, laissent appréhender le contraire). Rappelons que la construction d un deuxième complexe (probablement à Diekirch), regroupant les laboratoires de l Administration des Services Techniques de l Agriculture (ASTA) ainsi que les bureaux de la Chambre d Agriculture, devrait également être considérée comme priorité, du fait que ceci permettra de mettre en place un véritable centre de compétences agricole. Pourquoi d ailleurs ne pas prendre en considération la relocalisation de l ensemble des administrations agricoles sur un site unique dans le nord du pays? Outre l avantage de la création d un grand centre de compétences, ceci constituerait un acte de décentralisation en matière d aménagement du territoire au profit des zones rurales.... par l intensification de la recherche agricole appliquée et l extension des structures de vulgarisation L apprentissage tout au long de la vie revêt aujourd hui une importance particulière. Depuis des années le secteur agricole se voit confronté à une amplification soutenue d obligations diverses en matière de protection des ressources naturelles nécessitant une adaptation continuelle des pratiques agricoles. Un des objectifs de la nouvelle PAC qu on ne retrouve aucunement dans le projet de budget consiste précisément à mettre en réseau la recherche et les différents acteurs du secteur agricole pour promouvoir le transfert de connaissances et favoriser ainsi une mise en œuvre rapide de l innovation. Les services de vulgarisation agricole constituent un élément clé dans ce contexte. Leurs effectifs devraient être augmentés en conséquence notamment pour répondre aux nouvelles exigences règlementaires (p.ex. projet de loi «produits phytopharmaceutiques» : mise en œuvre des mesures du plan d action national) et faire face aux divers objectifs agri-environnementaux (protection des eaux, érosion, biodiversité,...). Rappelons dans ce contexte qu environ la moitié de la surface agricole utile sera concernée à moyen terme par des zones de protection (réserves naturelles, Natura 2000, protection des eaux). Considérant que l accélération de la désignation de telles zones de protection a été à maintes reprises déclarée être une priorité politique absolue, il nous étonne que cette détermination ne se traduise pas par un renforcement substantiel des structures de vulgarisation pour pallier au manque d effectifs actuel. Or, le projet de budget ne comporte aucun élément tangible, ni pour l année 2015, ni pour la période de 2016 à 2018, permettant d élargir les offres actuelles en matière de vulgarisation, de sensibilisation et de formation continue, alors que la date butoir pour la désignation des quelques 90 zones de protection des eaux se situe fin décembre 2015! [6]

Le soutien de l agriculture luxembourgeoise par la mise à disposition d un encadrement adéquat (vulgarisation, formation continue, recherche appliquée, ) constitue une condition sine qua non pour renforcer le secteur agricole dans un environnement réglementaire et économique de plus en plus complexe. Notons d ailleurs qu une offre adéquate en formation continue est également nécessaire pour promouvoir davantage le développement de la diversification de l agriculture luxembourgeoise. 4. Adaptations en matière de TVA L agriculture est concernée à plusieurs titres par les modifications de taux de TVA prévues à partir de 2015. Ainsi, dans un premier temps, il conviendra d apporter un ajustement au taux de TVA forfaitaire du secteur agricole. En effet l augmentation de 15 à 17 % sur la majorité des achats des exploitations demande l adaptation vers le haut également du taux forfaitaire appliqué aux matières agricoles à la sortie des exploitations pour maintenir l équilibre global entre TVA en amont et en aval dans le cadre forfaitaire. Etant donné que ce taux est fixé à l article 58 paragraphe 2, point a) de la loi modifiée du 12 février 1979 concernant la taxe sur la valeur ajoutée, il conviendrait de rajouter un point (10) à l article 6 du présent projet de loi budgétaire pour procéder à l ajustement nécessaire. D après nos estimations, le taux d équilibre devrait se situer aux environs de 11,5%. Un élément des ajustements budgétaires qui touchera sévèrement le secteur viticole est celui de l augmentation au niveau de la restauration du taux de TVA sur les boissons alcoolisées et plus spécialement sur le vin. L augmentation de 3 à 17 % de la TVA sur le vin risque de pénaliser fortement la consommation de vins dans les restaurants, et surtout celle des vins indigènes. En effet, une augmentation de 14% des prix de nos vins risque d entraîner à nouveau un déplacement de la consommation vers les vins étrangers. Même si ces vins subissent en principe la même augmentation de prix, il sera toujours possible pour le restaurateur de choisir parmi l offre de vins étrangers un vin moins cher à offrir à ses clients. L augmentation du taux de la TVA aura donc tendance à détériorer la situation concurrentielle déjà défavorable des vins luxembourgeois. Parallèlement, le gouvernement, par l intermédiaire des mesures d économie (n 225), retire une partie du soutien à la promotion des vins luxembourgeois. La viticulture se trouve donc deux fois défavorisée. C est pourquoi la Chambre d Agriculture insiste pour que la mesure n 225 qui prévoit une réduction de l aide au fonds viticole, soit levée au plus tôt suite à l audit annoncé et qu une partie de l augmentation des montants de TVA soit investie pour renforcer la situation concurrentielle des vins et crémants luxembourgeois sur le marché indigène. 5. Conclusions Compte tenu des multiples défis énoncés ci-dessus et de la mise en œuvre de la réforme de la PAC à partir de la fin de l année 2015, la Chambre d Agriculture s attendait à ce que le budget de l année 2015 soit établi dans le sens d un développement dynamique du secteur agricole et non seulement dans une logique de consolidation budgétaire. Or, les chiffres budgétaires du département de l agriculture présentent un des taux de progression les moins importants parmi l ensemble des départements. En plus, le projet de budget sous avis ne comporte aucun élément évoquant une quelconque stratégie de développement. Les mesures de redressement envisagées se font majoritairement au détriment des exploitations agricoles, viticoles et horticoles. Le Ministère de l Agriculture et ses administrations ne contribuent guère aux efforts de redressement des comptes publics. Le projet de budget sous [7]

avis laisse appréhender un démantèlement subtil, mais continu du soutien de l agriculture luxembourgeoise, notamment si on inclut dans l analyse du projet de budget les mesures proposées au niveau du PDR 2014-2020. Compte tenu de la disparité accrue entre l évolution du revenu agricole et du revenu de référence (voir graphique sous le point 2), il nous semble inconcevable d hypothéquer encore davantage les exploitations agricoles, viticoles et horticoles luxembourgeoises par l abolition de subventions, par la réduction substantielle de certaines participations étatiques et par l introduction resp. l augmentation de certaines taxes. La Chambre d Agriculture estime qu il importe de revoir les moyens budgétaires mis à disposition du secteur agricole et de veiller à ce qu au moins une partie des économies engendrées par les différentes mesures de redressement soit réinvestie à court terme dans des mesures de promotion et d encadrement au profit des exploitations agricoles. Ce soutien financier devrait impérativement être épaulé par des mesures à moyen et à long terme visant à réduire les démarches et insécurités administratives, à améliorer les infrastructures de formation et de vulgarisation, à améliorer la rentabilité et à réduire les coûts de production pour permettre au secteur agricole de se positionner dans la perspective de la reprise économique et de faire face aux défis dans le cadre de la nouvelle PAC et de la suppression des quotas laitiers. Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l expression de notre plus haute considération. Pol Gantenbein Secrétaire général Marco Gaasch Président [8]