Introduction Frédéric PETITBON Un contexte difficile Nicolas PERNOT
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1 Introduction Frédéric PETITBON Directeur général délégué, IDRH Les collectivités doivent à la fois respecter des engagements vis-à-vis des citoyens, poursuivre des démarches managériales et tenir compte de contraintes budgétaires considérables. Pourtant, elles continuent d innover. Un contexte difficile Directeur général des services, Ville du Havre Au début d un troisième mandat, la mairie du Havre débute un programme important de modernisation de la ville, fondé sur une capacité élevée d autofinancement. Dans le même temps, elle est soumise à une fiscalité locale élevée et les analyses de l évolution des dotations de l État 1 sont très pessimistes. Comment assumer une charge annuelle de 3,5 millions d euros, quand nos recettes qui s élèvent à 2,5 millions d euros évoluent moins vite? 1 Les dotations de l État représentent un quart des recettes de la Ville du Havre et elles ont probablement baissé de 5 % en
2 Responsable de la mission déconcentration, chargée de mission projets transverses, Ville de Lyon La Ville de Lyon rencontre les mêmes difficultés financières que Le Havre. Elle se doit pourtant de relever le challenge d amélioration continue de ses services, le tout dans un souci de développement durable, de qualité et de maîtrise de ses coûts. Directeur de l audit interne, Conseil général Seine-Saint-Denis Le projet d Agenda 21 du conseil général de Seine-Saint-Denis a mis en évidence les enjeux du territoire : la nécessaire résorption des inégalités sociales, une réinvention du modèle urbain en Seine Saint Denis, un renforcement du rôle moteur du département au sein de la métropole etc. Le relèvement de ces défis se heurte à une augmentation des dépenses obligatoires sur le champ social (RSA, APA, ACH), à la réforme la taxe professionnelle Pour autant, l administration départementale se donne pour objectif de trouver des marges de manœuvre et de mobiliser l ensemble des acteurs autour de ce projet. Quatre démarches engagées Mieux maîtriser la masse salariale La Ville du Havre a commencé par traiter le problème de la masse salariale de la collectivité avec, d une part, l adoption d un raisonnement pluriannuel (taux de croissance de la masse salariale fixé à 1,8 % sur 4 ans) et, d autre part, la mise en œuvre d un principe de contractualisation avec chacun des directeurs. Ceux-ci s engagent sur des mesures et sont libres d utiliser les moyens qui leur semblent pertinents (liberté de recrutement, variation du niveau de qualification des postes, etc.). Ces changements modifient le mode de fonctionnement de la Ville ; un rôle nouveau est confié à la Direction des Ressources Humaines (DRH) et à celle des finances, celui de veiller à la bonne application du contrat. Le même travail a été entamé pour maîtriser les dépenses de fonctionnement, avec un objectif de réduction de 3 % pendant trois ans. Les élus de la Ville de Lyon ont revu leur plan d investissement à la baisse et les citoyens ont à nouveau été sollicités via les impôts locaux, ce qui constitue des arguments forts en faveur du lancement du projet Emeraude. Le maire a fixé l objectif d une augmentation de la masse salariale ne dépassant pas 3 % et des effectifs stables pendant la durée du mandat. Une réflexion collective a été lancée pour revoir les périmètres d activité des directions et pour rechercher des marges de manœuvre afin de respecter les deux orientations données. Ces marges de manœuvre, nous les avons aussi recherchées dans les dépenses et les recettes via une politique d achat plus efficace et la politique tarifaire. Les directions ont créé des groupes de travail pour réfléchir à nos trois objectifs, qui sont indissociables : maîtrise des coûts, qualité et développement durable. Cette réflexion a débouché sur des plans d action auxquels les agents de la ville participent. Chercher les opportunités et les conditions de changement Le conseil général de Seine-Saint-Denis a, quant à lui, cherché des opportunités de changements en organisant une consultation de l ensemble de ses agents. Les 40 % de réponses obtenues ont permis 2
3 d identifier des axes de progrès concernant, par exemple, les circuits de décision, la gestion des ressources humaines, la transversalité et la capacité à travailler en mode projet, l utilisation des Nouvelles Technologies de l Information et de la Communication (TIC), etc. Les cadres se sont ensuite réunis autour de ces thématiques pour élaborer les lignes directrices du projet d administration et dégager des marges de manœuvre. Celui-ci est structuré autour de chantiers transverses et de projets de direction. Par ailleurs, la direction du personnel a prévu des formations pour aider les cadres à porter ces différents chantiers auprès de leurs équipes. Réviser l organisation Secrétaire général, Ville de Marseille A Marseille, l effet de ciseaux dû à un taux d augmentation des dépenses (3 %) supérieur à celui des recettes (1 %) a tendance à devenir structurel. Pour rééquilibrer cette inéquation, deux méthodes apparaissent : les ajustements conjoncturels et les ajustements structurels. S agissant des premiers, la Ville de Marseille a dû réduire ses effectifs, entre 2005 et 2008, de cent agents par an. Ces décisions sont difficiles à prendre. En parallèle, nous devons repenser le système pour l alléger et trouver des marges de manœuvre. Nous avons ainsi entamé une démarche qui permettra de définir de nouvelles bases d organisation, de travail, de moyens, et de mieux maîtriser nos dépenses et nos recettes. Ce processus de révision générale des moyens municipaux a été opéré par les cadres supérieurs, missionnés pour émettre des propositions d amélioration. Après cette première étape, la seconde a consisté en la préparation des décisions. Quatre groupes de travail ont été constitués. Ils ont concerné les principes, l organisation, le système et le déploiement de la réforme. La révision de l organigramme repose sur une mutualisation des moyens, notamment des ressources humaines en favorisant la mobilité des agents d un service à l autre, et sur la responsabilisation des personnels à travers des contrats d objectifs et de services. Echanges avec la salle Que se passe-t-il lorsque des directeurs ou des élus refusent de «jouer le jeu»? Si les résultats obtenus sont meilleurs que les objectifs de départ, le personnel est-il gratifié? Faites-vous appel à des audits privés? Sur quelles priorités se fondent vos projets de réorganisation? Pour quelles raisons cherchez-vous à réduire vos moyens? Comment traitez-vous des questions d intérêt collectif comme les reclassements? 3
4 Une prise de conscience collective est nécessaire. Il faut savoir qu il ne s agit pas de renoncer à ce qui fait le cœur de l activité de la collectivité. Le travail de contractualisation que nous avons entrepris permet de vérifier la viabilité des projets avec chacune des directions. C est seulement à ce moment que les propositions peuvent être discutées. S agissant des gratifications, une prime permet de récompenser les directeurs qui appliquent le contrat et de valoriser leur engagement. Pour autant, cela relève davantage d une logique de reconnaissance que de récompense. L un des effets pervers de la contractualisation réside dans le risque de cloisonnement entre les directions. Nous avons donc mis en place un dispositif afin de réguler les reclassements d un service à l autre. La Ville de Marseille gardait le souvenir d une réforme de son organisation dans les années 1990, imaginée par un grand cabinet d audit américain et qui avait échoué. Elle préfère ne pas trop s appuyer sur ce type de dispositifs, mais elle a toutefois fait appel aux conseils d une structure extérieure. Les priorités sur lesquelles se fondent nos démarches relèvent du projet politique, défini dans le programme de mandat. C est la base du contrat entre les élus et les citoyens : l administration doit faire mieux, avec moins de moyens et dans la durée. L idée n est pas de «faire des économies pour faire des économies» mais de continuer à apporter des services de qualité aux usagers, et ce dans un contexte économique difficile. Le fait de procéder à ces réorganisations sous forme de projets collectifs limite les résistances des uns et des autres face aux changements. La Ville de Lyon n a pas prévu de gratifications particulières. En revanche, nous avons mis en avant l idée du pacte social, idée selon laquelle l effort collectif bénéficiera à l ensemble du personnel. Enfin, nous avons choisi de faire le pari de l intelligence collective et le recours à une aide extérieure ne nous a servi qu à fixer des échéances. L exécutif et l assemblée du conseil général de Seine-Saint-Denis déterminent les priorités et les nécessaires ajustements de l organisation (création de la direction de l éducation ). L objectif n est pas de réduire les moyens mais de redimensionner éventuellement l intensité de telle ou telle prestation de services, de manière à trouver des marges manœuvre qui permettront de poursuivre nos projets et à être en phase avec le projet départemental. Au-delà de quelques réorganisations ponctuelles, des priorités ont été pointées par les agents eux-mêmes : par exemple, mieux travailler en mode projet, améliorer les relations entre les directions fonctionnelles et les autres services Nos priorités concernent avant tout nos modes de fonctionnement en interne. Nous avons sollicité l appui d un cabinet externe pour construire l ingénierie d ensemble et pour animer nos réunions de concertation ; cela nous a permis de gagner un temps précieux. En revanche, l encadrement de la collectivité s est impliqué dans le portage interne, c est ainsi que l on ancre des changements dans la durée. 4
5 La gouvernance des démarches Les élus doivent évidemment être associés à la démarche : ils doivent comprendre les nécessités financières et les liens entre l organisation administrative et les marges de manœuvre potentielles. Il est très important de les rencontrer et de leur présenter la démarche engagée. A Marseille, les élus l ont bien comprise et ils m ont laissé libre de la mettre en œuvre. Avec le personnel en général, il convient de bien fixer les règles de fonctionnement de la démarche. Il faut l en informer mais attendre que les réflexions soient suffisamment avancées pour le faire de façon opérationnelle. En parallèle de cette démarche, nous avons lancé il y a plus d un an, avec le CNFPT et l INET, une formation spéciale pour les cadres dits «A+». Celle-ci permet d offrir aux cadres un certain nombre d éclairages et de témoignages sur des formations complémentaires qui sont aujourd hui utiles pour faire face au contexte extérieur. S agissant de la gouvernance de la démarche, nous avons créé un comité stratégique spécifique, présidé par un élu informé de chacune des phases du projet et chargé de prendre les décisions. Lorsque les sujets étaient suffisamment préparés, ils étaient présentés au maire et aux adjoints. De nombreuses discussions ont eu lieu, avec des échanges permanents entre les directeurs et les élus, à tel point que ces derniers se sont vraiment intéressés à l administration. Notre démarche a nécessité deux étapes : sensibiliser les élus sur la mise en œuvre des objectifs compte tenu de la contrainte financière ; les impliquer au moment de la contractualisation des dépenses de fonctionnement. Durant cette seconde étape, les directeurs et les élus en charge des différents secteurs ont arbitré les propositions qui permettraient d atteindre les objectifs (évolution des tarifs de cantine, modalités d accueil périscolaire, etc.). Nous entamons par ailleurs une période de deux années de formation approfondie de nos chefs de services, de nos cadres de management, etc. Toute période de changement nécessite que l on soit accompagné. Le rôle des élus est de fixer les priorités d investissement et l intensité des services à rendre aux citoyens. L administration est responsable de la mise en œuvre de la démarche de modernisation de l administration. En revanche, le président est impliqué dans le suivi et l animation de la démarche. Au quotidien, le portage est pris en charge le directeur général, qui préside les comités de pilotage qui rassemblent l ensemble des responsables de projets. Ceux-ci y présentent l avancement de leurs travaux. Le directeur général participe également à un comité technique, qui regroupe les directions notamment la direction du personnel et les accompagne au quotidien. Nous organisons également des temps d échange formels entre les cadres. Pour éviter les incompréhensions et les attitudes de défiance, notre maître mot reste la transparence sur les efforts et les démarches en cours. 5
6 Conclusion La démarche participative engagée par la Ville de Lyon a été un pari. La responsabilité des fonctionnaires et leur intérêt pour le service public prime. Ainsi, la démarche est très intéressante, elle permet de mettre l administration en mouvement. Les efforts à fournir sont importants. Pour apaiser le climat social, nous avons expliqué aux organisations syndicales que la collectivité ferait un effort important. Nous consacrerons la totalité de la croissance des recettes à l évolution de la masse salariale. Nous prévoyons de suivre l impact des changements que nous aurons opérés sur les situations de travail de l ensemble des agents. Nous souhaitons que l encadrement se mobilise et que les agents aient l impression que l administration est plus efficace au quotidien. Nous renouvellerons la consultation du personnel et de l encadrement. Il est fondamental de retrouver le sens de notre action, à savoir le service public, notre projet politique et l insertion de la collectivité dans le monde actuel. Ce document est une synthèse de conférence, les propos des intervenants ne sont pas repris dans leur intégralité mais condensés. Réalisation de la synthèse 6
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