Un quotidien insolite et si plaisant

Transcription

1 Chers parrains, chère famille et chers amis, Un quotidien insolite et si plaisant Après sept mois passés à Madagascar, je souhaiterais vous parler de mon quotidien au sein de la communauté, à l extérieur aussi, par de petites choses qui font pour moi le charme de ce que je vis à Madagascar. À la communauté, nous chantons au moins trois fois par jour à chaque office, à chaque repas, et quand certains ont un peu de temps, ils partagent leur don, même aux plus petits qui sont initiés très tôt à la musique! C est un quotidien chantant et c est bien connu le service et la fraternité sont toujours plus marrants en chantant! Comme vous le savez, le plat de base à Mada, c est le riz. Mais comme celui que nous mangions avait des cailloux et cassait les dents et les pieds de certains communautaires, frère Rolland est allé cherché le riz de son village, six tonnes de riz «sans cailloux» que nous avons entreposé dans le contener à mains d hommes et de femme (je me suis prêtée à l exercice, Dieu que c est lourd!) pendant que les enfants jouaient sur les sacs de riz. Après quelques mois à Mada, je me suis mis à manger du riz deux fois par semaine le matin, quelle conversion culinaire! Une autre habitude que j ai prise lorsque c était encore l été, je me suis mise à porter des robes, chose que je ne faisais pas en France. Bref, lorsqu une «vazaha», avec une peau très blanche de surcroît, ça donne ça : «Oh ouhaaaa, mais tu es blanche!» accompagné d un regard sidéré sur mes jambes. Et moi de répondre : «Bah oui tu n avais pas remarqué que j étais blanche depuis le début?!» Et lui de répondre : «Mais tu es Blanche Neige!». Évidemment je ne l ai pas pris pour un compliment, c est tellement dur de bronzer!!! Et ma peau paraissait tellement blanche sous le soleil que les enfants du quartier étaient

2 apparemment très intrigués de savoir quelle en était la texture. Et je n ai pas échappé à leurs petites mains baladeuses sur mes mollets! trop mignons! Autre chose qui fait partie de notre quotidien communautaire et qui met à l épreuve notre patience : les voitures. Il faut dire que ce sont des dames du troisième âge, qu il faut ménager. Or nous en avons besoin assez souvent! Du coup c est inévitable, nos voitures s échangent chez le garagiste, si bien qu il ne peut se plaindre de ne pas avoir de travail! Il ferait presque partie de la communauté. D ailleurs petite annonce : si un plombier ou un garagiste se sent appelé à la vie communautaire, ou cherche à faire une bonne action, qu il n hésite pas à se présenter à la communauté du Chemin neuf, il sera accueilli à bras ouvert à Madagascar! Brave Toussaint! À Mada, nous consacrons aussi beaucoup de temps et d attention à la cuisine, comme il se doit bien sûr! Aussi, j ai découvert la cuisine malgache et après 6 mois à Mada, je commence enfin à bien maîtriser la cuisson du riz. Peu d eau et cuit à feu fort! Moi qui pensais qu il fallait beaucoup d eau pour cuire du riz, en fait tout est dans la chaleur! Hélas, je n arrive toujours pas apprécier l eau de riz que l on boit en accompagnant le repas. Cependant je me suis déjà fait mon petit cahier de recettes malgaches et certains plats traditionnels comme le «raftout» sont parmi ceux que je préfère et pourtant je ne l aurais pas cru : c est de l herbe broyé avec de la viande et du riz! C est super bon!

3 Évidemment, quand on cuisine, on a quelques petites surprises surtout lorsque l on met quelque chose à cuire au four : on aperçoit des cafards sauver leur peau en échappant à la chaleur mortelle du four, qui est d ailleurs leur petit nid hélas ainsi que les placards. Mais ils sont plutôt gentils car ils ne montrent le bout de leur nez normalement que la nuit. On a de belles surprises quand on se lève pour prendre un verre d eau! Je ne suis pas spécialement rebuté par ces petites créatures inoffensives et j éprouve un certain plaisir à les exterminer lors de nos mensuelles «opérations anti-cafards». Le seul problème, c est qu après la jouissive partie d extermination avec un produit hyper toxique que l on répand partout dans la cuisine, c est le travail qui nous attend le lendemain. En effet, après le constat délectable que la cuisine est devenu un cimetière de cafards, nous devons passer par le pénible ménage de la cuisine sinon nous risquons l empoisonnement. Mais les joies du service et de la fraternité font vite passer les réticences du début! En parlant de petites bêtes, j ai aussi appris à Antsirabe à ne plus être horrifié par les araignées grosses (selon moi petite Française) et velues et assez belles c est vrai : certaines ont des tâches bleues, ça ne les rend tout de même pas plus sympathiques. Dieu merci elles sont inoffensives! Mais elles ont pris la mauvaise habitude de se multiplier et de tisser leur toile sur la corde sur laquelle nous attachons le linge. Et devinez quoi? La lingerie est mon service! Du coup je ne pouvais y échapper : raide comme un couteau, crispée et effrayée j étendais le linge aussi vite que possible en prenant bien garde de baisser la tête et de ne pas détruire leur toile de peur qu elles me tombent dessus! Bon ce petit manège à durer un temps puis l énervement m a rendu moins peureuse et on a fini par les enlever. Mais voilà, elles logeaient aussi au foyer d étudiants et il a fallu les déloger! Très fière de moi, j ai accompli ce service sans trop crier! Une des choses qui m enchantent toujours ce sont les petites scènes de rues que j aperçois à pieds ou dans le bus lorsque je pars en mission dans la ville. À chaque fois je suis impressionnée par la circulation à Antsirabe. Inutile de préciser que la signalisation n a rien à voir avec celle qu il y a en France : il n y en a pas. Mais les Malgaches utilisent beaucoup plus le klaxon que nous autres Français qui ne l utilisons qu en cas de grave danger. Ici c est pour dire : «Pousse-toi!» un peu comme à Paris, mais en plus fréquent. Voici comment la circulation se fludifie entre les pousse-pousse, les cyclo-pousse, les taxi-brousse (se sont des cars), les bus, les charrettes tirées par des zébus, parfois par des hommes, les voitures et scooters. Les voitures sont rares à Antsirabe, les transports les plus communs sont les poussepousse et les bus. Je ne sais pas lequel est le moins dangereux quoique : Voir un tireur de pousse voler littéralement dans les airs parce qu il est dans une pente et qu il est entraîné par le poids de la personne qu il est sensé tirer, n est pas très rassurant!!!

4 C est aussi dans la rue que je croise souvent des sourires d enfants. Parfois on se demande comment c est possible dans leur situation de garder cette innocence et cette gaîté. C est aussi grâce à eux que j apprends à relativiser lorsqu il m arrive des pépins. Combien de fois, j ai été sidéré par leur façon de recycler un déchet en un objet d amusement!de les voir réutiliser des boîtes de conserves et un bout de cordes pour en faire un petit compagnon qu il traîne, comme un chien en laisse. Ou encore un sac en plastique déchiré, un bout de bois et de la corde pour en faire un cerf-volant, un bidon d huile pour en faire une luge sur les pentes du terrain de zébus, de vielles boîtes de conserves transformé en une dînette raffinée, un pneu qui devient un cerceau. Des sourires et encore des sourires! Après un petit shampoing pour les filles du quartier

5 Au marché, dans la rue, au soutien scolaire Des scènes de vie qui sont devenues mon quotidien. Parfois devenu habituelle, parfois attendrissante, parfois difficile à regarder. Des sons aussi: Le bruit des charrettes le matin, les chants malgaches même ceux que la voisine entonne en se brossant les dents dans le jardin chaque matin, la cloche qui rythme mes journée à la communauté et qui nous rassemble tous, les clochettes des pousse-pousse qui s agitent quand ils me voient passés (vazaha que je suis) pour m attirer, les beuglements des zébus, les rires des enfants du quartier, les aboiements des chiens lorsque la nuit tombe, les ouvriers de la rizière qui discutent tout en fabriquant des briques avec l argile rouge des Hautes Terres. Bref, des images, des sons qui font partie de cet univers auquel je me suis beaucoup attaché et qui sera bien dure à quitter! Je profite donc à fond du moment qui me reste à passer à Mada et de toutes les personnes qui font partie de ce quotidien insolite et si plaisant! Malou