Diagnostic agraire du district de Tien. Du, province de Bac Ninh, Vietnam



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École Nationale Supérieure d Agronomie de Rennes Centre National d Études Agronomiques en Régions Chaudes Développement Institutionnel et Associations Locales pour l Organisation et la Gestion de Services Collectifs Diagnostic agraire du district de Tien Du, province de Bac Ninh, Vietnam Mémoire présenté par : PERRIER Catherine (ESAT 1) EN VUE DE L OBTENTION DE : DIPLOME D INGENIEUR AGRONOME DE L ENSAR DIPLOME D AGRONOMIE TROPICALE DU CNEARC Maître de stage : M. Ripoche Directeur de mémoire : M. Moulin Soutenu en octobre 2004

École Nationale Supérieure d Agronomie de Rennes Centre National d Études Agronomiques en Régions Chaudes Développement Institutionnel et Associations Locales pour l Organisation et la Gestion de Services Collectifs Diagnostic agraire du district de Tien Du, province de Bac Ninh, Vietnam Mémoire présenté par : PERRIER Catherine (ESAT 1) EN VUE DE L OBTENTION DE : DIPLOME D INGENIEUR AGRONOME DE L ENSAR DIPLOME D AGRONOMIE TROPICALE DU CNEARC Membres du jury : M. Bergeret M. Faye M. Moulin M. Pillot Soutenu en octobre 2004

Sommaire Sommaire... I Résumé... III Summary...IV Introduction... 1 I. Contexte et problématique du stage... 2 A. La zone d étude... 2 1. Le Vietnam, au cœur de l Asie du Sud Est... 2 a) Géographie... 2 b) Population... 2 c) Économie et politique... 2 B. Contexte institutionnel et production laitiere... 5 C. Problématique du stage... 6 II. Méthodologie... 8 A. Cadre théorique... 8 1. Les concepts mobilisés... 8 2. Méthode d évaluation technico-économique... 9 B. Mise en œuvre du diagnostic... 11 1. L histoire agricole et le paysage... 11 2. L étude technico-économique des systèmes de production... 12 3. La restitution auprès des agriculteurs... 13 C. Contraintes et limites... 13 1. Le rythme de vie et les contraintes agricoles... 13 2. Les déplacements... 13 3. Le facteur humain... 14 4. Les limites de l étude... 14 III. Paysage et histoire agraire... 16 A. Paysage... 16 1. Le district de Tien Du, présentation générale... 16 2. Pédologie du district... 18 3. Occupation de l espace... 19 a) Habitat et aménagement hydraulique... 19 b) Utilisation des terres agricoles... 21 4. Zonage agro écologique du district... 23 B. L histoire agricole... 26 1. Avant 1960... 26 2. L ère collective, de 1960 à 1981... 26 a) La première vague, de 1960 à 1975... 26 b) La phase d expansion, de 1975 à 1981... 27 3. Le processus de libéralisation, de 1981 à nos jours... 28 a) L ébauche de la décollectivisation : la résolution 100... 28 b) Le glas des coopératives : le Doi Moi... 29 4. Le lait, une nouvelle production au Vietnam... 31 a) Les débuts de la production laitière nationale... 31 b) Les vaches laitières de Tien Du : introduction et organisation de la production... 33 C. Les exploitations agricoles du district : le résultat de l histoire agraire... 36 IV. Mise en valeur de l espace agricole... 40 A. Les systèmes de culture... 40 1. La double saison de riz : la base des systèmes de culture... 40 a) Technique culturale... 40 - I -

b) Efficacité économique... 44 2. Les cultures sèches annuelles... 45 a) Diversité des espèces cultivées... 45 b) Itinéraires techniques... 45 c) Comparaison des cultures sèches annuelles... 47 3. Les cultures pérennes... 49 4. Comparaison des systèmes de culture... 51 a) Les systèmes à base de riz... 51 b) Les systèmes de culture sans riz... 51 B. Les systèmes d élevage... 53 1. Les bovins et bubalins... 53 a) Ressources fourragères... 53 b) L élevage bubalin, un élevage en perte de vitesse... 53 c) L élevage bovin pour le travail... 54 d) L élevage bovin laitier... 54 2. Les porcins... 57 a) Les porcs charcutiers... 57 b) Les truies... 57 3. Les petits élevages... 58 a) L aviculture... 58 b) La pisciculture... 59 4. Analyse comparative des systèmes d élevage... 59 C. Les systèmes de production... 61 1. Présentation... 61 a) Deux exemples de systèmes de production diversifiés... 61 b) Deux systèmes de production laitière... 63 c) Quelques compléments... 68 2. Modélisation... 68 V. Discussion... 71 A. Des systèmes de production intégrés au sein de leur environnement et de systèmes d activité... 71 1. Situation du district... 71 2. Productivité de la terre et du travail... 73 3. Les activités extra agricoles : des systèmes de production aux systèmes d activité... 75 1. De nouveaux éleveurs laitiers?... 77 2. La question du foncier : une inégalité géographique... 78 3. La question de l environnement : le biogaz?... 80 C. Le système VAC : une option pour l avenir?... 81 1. Présentation d un système VAC... 81 2. Efficacité économique... 81 Conclusion... 83 Bibliographie... 84 Annexes... 88 - II -

Résumé Cette étude a été menée dans le district de Tien Du, en périphérie de Hanoi, dans le cadre du projet Dialogs. Ce projet, mené par un consortium d ONG avec le Gret comme chef de file, a pour objectif de favoriser les organisations paysannes. Dans le district de Tien Du, l ONG Afdi Haute Normandie est en charge de l élevage laitier, en pleine expansion depuis 1995. Un diagnostic agraire dans cette zone doit permettre de mettre en évidence les dynamiques agricoles en jeu ainsi que d analyser la situation actuelle. En effet, l augmentation de l élevage laitier dans le district va dans le sens du Plan National Laitier mais soulève de nombreuses questions, en particulier quant à l environnement. L agriculture de Tien Du reste basée sur la riziculture, mais une différenciation importante des exploitations familiales s est produite depuis la fin de la période des coopératives (1960-1981). Alors que certaines exploitations se sont surtout centrées sur les cultures, d autres se sont orientées sur les activités d élevage, parfois avec la mise en place d un atelier d élevage laitier. De plus, de part la localisation périurbaine du district, la place des activités extra agricoles au sein des exploitations ne cesse d augmenter. Ainsi dans certaines exploitations, l activité extérieure occupe une place primordiale dans l économie familiale, au détriment de l agriculture. La contrainte majeure pour l agriculture dans le district est l accès au foncier. En effet, avec une densité de population de 1 200 habitants/km 2, les surfaces par personne sont limitées. Or si l élevage laitier permet de dégager un revenu régulier par la vente du lait, il demande en revanche une surface plus importante du fait des cultures fourragères nécessaires. Dans l optique du développement de la production laitière souhaité par les autorités du district, cette étude met en avant les avantages et contraintes du district. Le potentiel laitier du district, l organisation de la production laitière si le cheptel laitier augmente, l intégration de cette production dans une dynamique de diversification, la garantie d un revenu stable pour les éleveurs laitiers, ceci sont autant de questions et de pistes de réflexion permettant de mener de nouvelles actions dans le district de Tien Du. Mots clefs : Élevage; bovin lait; structure d exploitation agricole; structure de production; système de culture; méthode d élevage; exploitation agricole familiale; enquête sur exploitations agricoles; Viet Nam Fleuve Rouge; Bac Ninh. - III -

Summary This study was realized in the Tien Du district, close to Hanoi, within the Dialogs project. This project has been undertaken by various NGOs, the Gret in charge. Its goals are to promote farmers organizations. In the Tien Du district, the NGO Afdi Haute Normandie is in charge of dairy production, a fast-growing sector since 1995. An agrarian diagnostic assessment in this area will present the agricultural dynamics as well as analyze the current situation. Indeed, the increase in dairy livestock in the district is in the strict accordance with the national dairy plan, but raises some important questions particularly with regard to the environment. Tien Du s agriculture is still based on rice cropping but some major differences appeared between the farming systems after the collective period (1960-1981). Whereas some systems turned towards crops, others developed breeding activities, such as dairy cows. Furthermore, due to the proximity of Hanoi, extra agricultural activities play an increasing role. Therefore, in some systems, these activities are essential to the family s economy, to the detriment of agriculture. The major agricultural constraint in the district is land access. With 1 200 inhabitants/km 2, little land is available per capita. However, even though a good income can be obtained with dairy production, this activity requires more land than other breeding activities, due to fodder growing. It is the local authorities intention to develop dairy production and this study highlights the district s advantages and constraints relating to it. The dairy capacity of the district, the organization of dairy production linked with the potential increase in dairy livestock, the integration of this production within a process of diversification, the promise of a stable income for milk producers, all of these are issues which remain to be considered in order to develop further actions in the district of Tien Du. Keywords: animal husbandry ; dairy cattle ; farming system ; production system ; cropping system ; animal husbandry methods ; family farms ; farm surveys ; Vietnam Red River ; Bac Ninh. - IV -

INTRODUCTION Après 30 années de guerre, le Vietnam a obtenu son indépendance en 1975 et s est progressivement fait une place au niveau mondial. Après avoir atteint l autosuffisance alimentaire, au prix de nombreuses réformes, le pays est même devenu exportateur de riz dès 1989. Le commerce s est développé, le secteur industriel a pris de l importance, mais l agriculture reste un des piliers de l économie nationale. Néanmoins, celle-ci s est modifiée au fil des années. Bien que la riziculture reste primordiale, de nouvelles productions se sont mises en place ces dernières années, et parmi elles la production laitière. Le lait n est pas un aliment traditionnel au Vietnam et l expansion de cette production ne date que du début des années 80. Bien qu elle soit plus présente au sud du pays, la production laitière existe aussi au nord. Ainsi dans le district de Tien Du, au nord est de Hanoi, l élevage laitier est présent depuis 1995. Il a connu depuis un développement important. Dans cette zone, l ONG Afdi Haute Normandie travaille depuis 1998 avec les éleveurs, leur fournissant des conseils techniques et aidant à l organisation de la production. En 2003, l Afdi HN se joint au Gret au sein du projet Dialogs pour continuer le travail dans le district. Mais le contexte du district en 2004 n est plus le même, avec 5 fois plus d éleveurs laitiers qu en 1995, et une présence de plus en plus importante des industries. Afin de pouvoir cibler leurs actions, mais aussi de mieux comprendre les réalités du terrain, ces deux ONG ont fait la demande d un diagnostic agraire. Après une introduction au contexte dans lequel ce diagnostic s est déroulé et à la définition de la problématique, la méthode mise en œuvre est explicitée. La deuxième partie décrit tant le paysage du district que son histoire agricole. Dans une troisième partie, ce document présente à la fois les systèmes de culture et les systèmes d élevage du district, et ce afin de pouvoir analyser les systèmes de production identifiés. L extrapolation des résultats consiste en une modélisation de ceux-ci afin de pouvoir, dans une quatrième partie, les comparer, tant sur le plan de leur fonctionnement agricole que de leurs résultats économiques. Enfin, dans une dernière partie, ce document lance quelques pistes de réflexion et ouvre la discussion quant au devenir de l agriculture, et plus spécifiquement de l élevage laitier dans le district de Tien Du. 1

I. CONTEXTE ET PROBLEMATIQUE DU STAGE A. LA ZONE D ETUDE 1. Le Vietnam, au cœur de l Asie du Sud Est a) Géographie Le Vietnam occupe une position centrale en Asie du Sud Est. Pays frontalier de la Chine, du Laos, et du Cambodge (figure 1) d une superficie totale de 331 000 km 2, il est divisé en trois régions administratives : le Nord, le Centre et le Sud. La province de Bac Ninh, à laquelle appartient le district de Tien Du, lieu du stage, est située dans la région Nord. Les collines et montagnes représentent les trois quarts du Vietnam. Le territoire Vietnamien est quadrillé par des milliers de cours d'eau de petites et grandes dimensions. Les deux systèmes de cours d'eau importants sont le Fleuve Rouge au Nord et le Mékong au Sud, débouchant sur la mer de Chine en deux grands deltas : Le delta du Fleuve Rouge (plaine du Bac Bo), d'une superficie d'environ 15 000 km 2 est formé d'alluvions charriées par le Fleuve Rouge et le Fleuve Thai Binh. Le district de Tien Du appartient à cet ensemble. Le delta du Mékong (plaine du Nam Bo), d'une superficie de quelque 36 000km 2 est le plus grand grenier à riz du pays. De part sa localisation géographique, le Vietnam se trouve régit par un climat de mousson, mais certains endroits proches du tropique du Cancer et les régions d'altitude ont un climat tempéré. Les températures moyennes annuelles sont de 22 à 27ºC et on distingue deux saisons : la saison sèche et froide (de novembre à avril) et la saison chaude et pluvieuse (de mai à octobre), ainsi que le montre la figure 2. b) Population Le Vietnam compte plus de 82 millions d habitants, ce qui le place au 13 e rang mondial et au 2 e pour l Asie du Sud Est. Bien que la densité moyenne de population soit de 240 habitants au km 2, cela recouvre une grande diversité de situations : de moins de 80 habitants/km 2 pour les montagnes du Nord Ouest à 1 100 habitants/km 2 dans le delta du Fleuve Rouge. 86% de la population est de l ethnie Viêt, les 14% restants appartenant à 53 ethnies «minoritaires». Les deux deltas sont majoritairement peuplés de Viêt, les ethnies se trouvant surtout dans les zones de montagne. La population est principalement rurale avec un taux d urbanisation de 24,5% en 2004. c) Économie et politique Le produit intérieur brut du Vietnam se compose à 23 % des produits de l agriculture, 38,5 % des industries et 38,5 % des services (selon les statistiques de la Banque Mondiale de 2002). Le niveau de vie de la population diffère grandement entre le milieu urbain et le milieu rural : il existe un rapport de un à huit entre les revenus urbains et ruraux (Delalande, 2000). Au sein du monde rural, les deltas sont plus riches et développés que les zones de montagne. Le PIB par tête est aussi plus élevé au Sud qu au Nord. 2

Province de Bac Ninh Figure 1 Carte administrative du Vietnam (source : http://www.populationdata.net/cartes) 3

400 35 350 30 300 25 mm d'eau 250 200 150 20 15 degré Celsius 100 10 50 5 0 Jan Fev Mar Avr Mai Juin Juil Août Sep Oct Nov Dec 0 Pluviométrie moyenne (mm) Température moyenne (degré celsius) Figure 2 Diagramme climatique pour Hanoi (source : http://www.asiaticatravel.com) Figure 3 Vue du district de Tien Du 4

Le Vietnam a rejoint l ASEAN (Association of South-East Asian Nations) en juillet 1995 et participe avec le Cambodge, le Laos, la Birmanie, la Thaïlande et la province chinoise du Yunnan au programme Great Mekong Subregion. En juillet 2003, le pays a du réduire ses tarifs douaniers et lever ses barrières non tarifaires dans le cadre de son intégration à la zone de libre échange du Sud Est asiatique (Asean Free Trade Agrement), prévue en 2006. Le pays est donc intégré dans l économie de la région, près de 70% de ses échanges commerciaux se faisant avec les pays d Asie Orientale et du Sud Est (Papin, 2003). B. CONTEXTE INSTITUTIONNEL ET PRODUCTION LAITIERE Le Gret est présent au Vietnam depuis 1988 et travaille en étroite collaboration avec divers partenaires, tant des Organisations Non Gouvernementales européennes que des institutions nationales. Le projet Dialogs (Développement Institutionnel et Associations Locales pour l Organisation et la Gestion de Services Collectifs) s inscrit dans cette dynamique. Il œuvre au renforcement institutionnel d organisations professionnelles et locales du nord Vietnam dans les domaines de la santé humaine, de l agriculture et de l élevage et intervient dans 6 provinces et 11 districts. Dans le domaine de l élevage, Dialogs a pour objectifs de renforcer les capacités techniques et organisationnelles des producteurs, d appuyer la structuration de filières agricoles adaptées aux conditions du marché et le développement de réseaux professionnels articulés aux services de l État, et enfin de favoriser la participation des organisations agricoles de base dans les instances décisionnelles locales de planification du développement agricole. Au sein du projet Dialogs, l ONG Agriculteurs Français et Développement International Haute Normandie (Afdi HN) est le partenaire du Gret en ce qui concerne l élevage laitier dans le district de Tien Du, province de Bac Ninh, dans le delta du Fleuve Rouge. L Afdi HN est une organisation qui s appuie sur les agriculteurs individuels, les techniciens agricoles et les organisations professionnelles agricoles. Elle favorise les échanges de paysan à paysan entre le Nord et le Sud. En collaboration avec l École Nationale Supérieure Agronomique (ENSA n o 1) et le Vietnam Agriculture Sciences Institute (VASI), l Afdi privilégie une approche filière : les actions concernent tant la formation et les conseils techniques que l appui à la commercialisation. Dans la dernière décennie, la consommation de produits laitiers par habitant au Vietnam a été multipliée par 16 et les producteurs laitiers sont actuellement capable de couvrir 10% des besoins en lait (tableau 1) de la population. Le gouvernement vietnamien souhaite développer une filière de production laitière nationale, et le Plan National Laitier de 2002-2010 (Décret Gouvernemental n o. 167/2001/TTg du 26 octobre 2001) fixe comme objectif un cheptel laitier national de 200 000 vaches, soit une production de 350 000 tonnes de lait sous 8 ans, ce qui représenterai 40% de la demande nationale. Année 1990 1995 2000 2001 Consommation en kg/habitant/an 0,47 2,05 6,50 7,50 Production totale en tonnes/an 12 000 17 000 54 000 64 000 Production laitière par habitant en 0,170 0,230 0,690 0,810 kg/habitant/an % de la demande nationale 36 11,2 11,6 10,4 Tableau 1 Données nationales sur la production laitière (source: Agroviet) 5

En 2002, le cheptel bovin national se composait de 3,8 millions de bovins locaux de race Jaune Vietnamienne ou Lai Sind, sans potentiel laitier ou à potentiel laitier faible (1 200 litres par lactation pour une vache Lai Sind), de 6 000 bovins laitiers exotiques à fort potentiel (4 000 litres par lactation) mais sensibles au climat et de 50 000 bovins croisés (de 3 000 à 3 500 litres par lactation). La race laitière utilisée est Holstein-Friesian en pur ou croisement avec des vaches Lai Sind. La principale région de production laitière du pays est le Sud, avec 76% du cheptel laitier national. Le Nord dispose de 20% du cheptel, principalement dans les exploitations de petite taille et familiales, à l inverse du Sud, où l on trouve de grandes unités de production modernes comprenant de 50 à 100 vaches laitières proche de Ho Chi Minh Ville. La production laitière reste peu importante dans les régions de collines et montagnes. En accord avec les objectifs nationaux, le district de Tien Du promeut et soutient l élevage laitier depuis 1995. L Afdi HN, en coopération avec l ENSA n o 1, le VASI et les autorités locales, a démarré un programme d aide à la production laitière en 1998, et le projet Dialogs s est mis en place dans le district en 2003. Durant la période de 1995 à 2004, le nombre d éleveur laitier du district est passé de 20 à 180 et on dénombre maintenant 682 bovins laitiers, vaches et génisses confondues (données de la Province de Bac Ninh). C. PROBLEMATIQUE DU STAGE Le projet Dialogs touche à sa fin, laquelle est prévue pour 2005. Dans cette optique, un diagnostic agraire de la situation du district de Tien Du doit permettre à l Afdi et au Gret de cibler les dernières actions à mener au sein du projet, mais aussi de proposer des actions pour l avenir. Il permet de rendre compte de la réalité paysanne et des dynamiques en œuvre au sein de la zone étudiée. Il doit aussi mettre en exergue les atouts et contraintes de cette région en fonction du thème étudié, l élevage laitier. Dans un contexte de forte pression démographique et urbaine, il est intéressant de déterminer quels seront les éleveurs laitiers de demain et d évaluer leurs besoins, afin réaliser des actions ciblées et efficaces. De plus, caractériser les éleveurs laitiers actuels permet de comprendre leur dynamique, leur trajectoire et d avancer des hypothèses quant à leur évolution. C est un aspect important pour le projet Dialogs car les actions engagées ont pour but, non seulement d aider et de conseiller les agriculteurs, mais aussi de maintenir un tissu social agricole et de lutter contre l exode rural, ce qui ne peut être mené à bien que par une connaissance fine de la situation. En outre, face à l augmentation du cheptel laitier du district de Tien Du, différentes questions se posent : La question des fourrages. La culture du riz reste vitale pour les paysans. Or il faut planter des herbes, des cultures sèches comme le maïs pour assurer l alimentation des vaches laitières. Quel est le potentiel fourrager du district face aux productions vivrières? Existe-t-il assez de surface disponible pour faire face à une future augmentation du cheptel? La saturation de l espace disponible n est-elle pas déjà atteinte? La question de l environnement. Le district de Tien Du est fortement urbanisé et proche de Hanoi. C est d ailleurs ce qui constitue un de ses points forts pour la production laitière, car la commercialisation en est facilitée. Mais se pose le problème du fumier. Où le répandre? Où le stocker? 6

La question de la capitalisation. L achat d une vache laitière suppose un gros effort d investissement. Comment les éleveurs laitiers actuels ont-ils pu réaliser cet investissement? Quelles sont les activités permettant la capitalisation? La question de la commercialisation. Pour l instant, la majeure partie du lait est livrée à l usine de Vinamilk. Mais cela ne représente qu une faible partie du lait utilisé par cette usine. Est-ce que les industriels seront toujours prêts à acheter du lait produit localement si le lait importé est moins cher? Sont-ils prêts à payer le lait à la qualité ce qui pousserait les éleveurs à produire «mieux»? De plus, la filière de commercialisation locale, avec des petits collecteurs, saura-t-elle faire face à un afflux plus important de lait? La question des politiques. Le district a toujours soutenu l élevage laitier, en fournissant des subventions, en organisant des formations et en assurant des services. Quelles seront les orientations futures du gouvernement? Quelles seront les actions menées en faveur de l élevage laitier? Les politiques vont-elles se concentrer sur une autre production jugée prioritaire ou stratégique? Quelles actions retrouve-t-on aux différents échelons de l administration (Province, District, communes)? 7

II. METHODOLOGIE A. CADRE THEORIQUE 1. Les concepts mobilisés Un diagnostic agraire permet d obtenir une vision globale d une région, mais aussi de comprendre les dynamiques agricoles en jeu. Il s agit d un outil de compréhension de l agriculture d une région. Le niveau d organisation le plus général de l agriculture dans une région est le système agraire. Il est défini par Mazoyer (1987) comme «un mode d exploitation du milieu historiquement constitué et durable, un système de force de production adapté aux conditions bioclimatiques d un espace donné et répondant aux conditions et besoins sociaux du moment». Au sein des systèmes agraires, nous trouvons des entités plus spécifiques, et tout d abord les systèmes de production. Ceux-ci correspondent à la combinaison des productions et facteurs de production dans l exploitation agricole. Néanmoins, afin de réaliser un diagnostic agraire, il importe de s intéresser aux éléments de base : les systèmes de culture et d élevage, composants importants des systèmes de production. Tout d abord le système de culture, qui se définit «pour une surface de terrain traitée de façon homogène, par les cultures pratiquées, leur ordre de succession et les itinéraires techniques (combinaison logique et ordonnée des techniques culturales) mis en œuvre» (Gras, 1990). Quant aux systèmes d élevage, Landais (1992) les définit comme «un ensemble d éléments en interaction dynamique organisé par l homme en vue de valoriser des ressources par l intermédiaire d animaux domestiques pour en obtenir des productions variées ou pour répondre à d autres objectifs». Mais ces deux sous ensembles ne suffisent pas à définir la complexité des systèmes de production. En effet, celui-ci n est pas la simple association de systèmes de culture et d élevage, mais il correspond à l interaction des sous systèmes avec des facteurs extérieurs. Il s agit bien d un système ouvert, intégré dans son environnement, tant agricole qu économique. Le diagnostic agricole se base sur des entretiens et enquêtes auprès des paysans mais le traitement des données permet de sortir du cas particulier de l exploitant enquêté, d extrapoler les résultats et de construire une typologie. Cet effort d abstraction permet de présenter la situation de façon synthétique, de tester les hypothèses élaborées au préalable ainsi qu au cours du diagnostic. Cela permet aussi de proposer des pistes de réflexion au vu de la problématique abordée. 8

2. Méthode d évaluation technico-économique Afin de pouvoir comprendre et comparer les sous systèmes des différents types mis en évidence, nous avons calculé les valeurs ajoutées brutes par sao (unité de surface vietnamienne correspondant à 360 m 2 ) et par jour de travail : La productivité de la terre (richesse dégagée par sao) soit VAB/sao=PB/sao - CI/sao avec PB/sao le produit brut par sao, c est-à-dire la quantité produite (vendue ou autoconsommée) par sao x prix unitaire et CI/sao les consommations intermédiaires, les intrants consommés par sao La productivité du travail, VAB/jW, richesse dégagée par jour de travail nécessaire à cette production. Dans le cas du Delta du Fleuve Rouge, et plus particulièrement du district de Tien Du avec une densité de population de 1 200 hab/km 2, le facteur limitant étant la terre, la productivité de la terre est un premier élément de comparaison et d analyse des systèmes rencontrés. La comparaison des systèmes de production fait appel à un autre indicateur, le revenu agricole familial (figure 4). Celui-ci se base sur les VAB des diverses composantes du système de production étudié. Leur somme donne la VAB du système à laquelle il faut alors soustraire les amortissements du capital fixe Am, obtenus en divisant la valeur des équipements nécessaire à la production par leur durée de vie utile. Cet amortissement est à distinguer de l amortissement comptable car il ne représente pas une provision pour le renouvellement du matériel. La valeur obtenue est la valeur ajoutée nette (VAN). Il faut alors retirer d autres frais : les taxes et impôts Im prélevés par l État (ce qui correspond aux taxes agricoles pour les paysans de notre zone d étude, principalement les frais hydrauliques), la rente foncière versée aux propriétaires fonciers Rf (cas pour un type de notre typologie), les salaires Sal pour la main d œuvre extérieure (rare dans notre zone d étude) et les intérêts bancaires Int lorsqu il y a eut crédit (cas rencontré surtout pour les éleveurs laitiers). Raf = VAB Am Im Rf Sal Int Le revenu agricole est comparé au seuil de survie afin de déterminer si l activité agricole permet à l exploitant de vivre. Le seuil de survie est le revenu minimum qu un actif doit dégager de son exploitation pour assurer sa survie et celle de ses dépendants. Pour le district de Tien Du, nous avons calculé un seuil de survie de 5 millions de dôngs par an par actif avec un dépendant à charge (détail du calcul en annexe). Le seuil de pauvreté officiel est de 200 000 dôngs/mois/personne, soit 2,4 millions de dôngs par an. De plus, du fait de la présence d usines, mais aussi de la proximité d Hanoi, il existe un coût d opportunité de la main d œuvre : un actif a la possibilité de travailler hors agriculture. Comparer un revenu moyen ouvrier au revenu agricole peut permettre de mettre en avant les systèmes les plus à même de maintenir un tissu rural et une agriculture dans le district. Un revenu ouvrier moyen s élève à 1 million de dong par mois. À ce stade, il ne faut pas négliger le rôle souvent important des activités extra agricoles. Celles-ci sont très variées dans notre District, et présentes dans un grand nombre de systèmes de production. Il est aussi intéressant de comparer les productivités de la terre et du travail pour les modèles étudiés. 9

Produits vendus Produits autoconsommés Produit brut = Productions x Prix PB consommations intermédiaires = Valeur ajoutée brute VAB Amortissements = Valeur ajoutée nette Semences Engrais Insecticides, herbicides, fongicides Frais vétérinaires Outillage manuel et mécanique Bâtiments d exploitation Animaux de trait Plantation VAN - Rentes foncières Payés au propriétaire - Taxes et impôts Payés à l État - Intérêts sur les prêts Payés aux banques et prêteurs usuriers - Salaires ouvriers temporaires ou permanents (charges sociales comprises) + Subventions directes = Revenu agricole familial (Raf) Figure 4 Les différentes étapes de calcul du revenu agricole familial (Benkahla, Ferraton et Bainville, 2003) 10

La phase finale de l étape économique est la construction de modèles. Les types mis en évidence et caractérisés lors des phases précédentes sont représentés sous forme graphique. Il convient de ramener toutes les données chiffrées par actif afin de pouvoir réaliser des comparaisons pertinentes. Cette phase d extrapolation permet d avoir une vue d ensemble de la situation agricole de la zone d étude et de lancer des pistes de réflexion quant aux actions pertinentes à mener. B. MISE EN ŒUVRE DU DIAGNOSTIC Le stage se déroule du 9 avril au 25 août, avec une phase de terrain du 26 avril au 23 juillet, soit 3 mois. Nous avons discuté de l avancée du travail à plusieurs reprises avec Denis Ripoche et Damien Thibault (coordinateur du projet et représentant du Gret au Vietnam). Avec une autre stagiaire du CNEARC travaillant sur le même sujet dans la province de Thai Binh, nous avons échangé des informations et mené une partie de la réflexion en commun. De plus, tout au long du travail, nous avons sollicité les membres vietnamiens de l équipe du projet, basés à Lim. Une présentation du travail sur le terrain a été organisée en fin de stage. 1. L histoire agricole et le paysage Les premiers contacts avec le terrain ont consisté en des présentations aux autorités : district (sous-chef du bureau administratif du district), présidents ou viceprésidents de Comité Populaire et chefs de la police. Chaque commune était libre d autoriser ou non notre présence. Une fois les autorisations nécessaires obtenues, une journée entière est consacrée à la lecture du paysage, puis cela se poursuit lors des trajets dans les différentes communes. Cette phase de lecture du paysage n est pas à négliger car elle soulève souvent beaucoup d interrogations quant à l utilisation du sol et permet d éviter des questions injustifiées, inadaptées lors des entretiens. De plus, connaître l environnement des paysans, leur cadre de vie facilite les échanges et permettre de situer facilement les localités et endroits auxquels ils peuvent faire référence. Les premiers entretiens ont servi de rodage au guide d entretien élaboré lors de la première phase. De plus, il faut adapter et orienter les questions sur certains sujets en fonction de la personne interrogée. Ces entretiens menés au hasard des rencontres dans toutes les communes du District ont permis d appréhender la diversité de l agriculture de la région et son histoire agricole. Il est important de connaître l histoire agricole de la zone d étude car elle est en relation directe avec la situation actuelle : le système agraire de Tien Du est issu de l histoire agricole nationale et locale. On ne peut comprendre la logique des systèmes de production actuels si on ne connaît pas leur passé et leur évolution. Lors de cette phase, 81 agriculteurs ont été interrogés, parmi lesquels 17 éleveurs laitiers. Un panorama large et varié a été obtenu, les cas rencontrés variant d une quasi spécialisation dans la culture du riz (pas de production sèche, peu d élevage) à une grande diversité de production, associée à de la transformation et des activités extra agricoles. 44 foyers ont un revenu extra agricole, soit par une activité extra agricole (maçon, menuisier ), soit grâce à de la transformation de produits agricoles ou à un service agricole (location de matériel, vente d intrant, service de décorticage). 5 systèmes VAC ont été enquêtés, dont 3 élevaient des vaches laitières. On trouve aussi un élevage spécialisé dans les poules pondeuses, une exploitation spécialisée dans les volailles (caille, canard de Barbarie et poulet) et 2 collecteurs laitiers. 11

Les entretiens sont traités le soir et leur analyse fait apparaître de nouvelles questions qui viennent enrichir le guide d entretien. À l issue de cette phase, la région étudiée a été divisée en zones délimitées en tenant compte à la fois de la lecture du paysage, c est-à-dire des éléments directement observables (route, géographie ), et du panorama de l agriculture obtenu par entretien. L évolution des systèmes de production a permis de construire une première typologie rendant compte de la situation actuelle. 2. L étude technico-économique des systèmes de production La construction de la typologie n est que le premier pas vers la compréhension de l agriculture du District. Lors de cette deuxième phase, après la découverte de l agriculture, il s agit de comprendre le fonctionnement technique des divers ateliers mis en évidence précédemment. Pour cela, 39 personnes sont interrogées, dont 19 éleveurs laitiers, un vétérinaire spécialisé dans les vaches laitières et un inséminateur. Les entretiens sont semi directifs, des exemples sont en annexe. En général, deux à trois ateliers sont étudiés par exploitation. Pour les éleveurs laitiers, l atelier lait a toujours été traité, puis les cultures destinées aux vaches laitières (maïs, herbe à éléphant). Pour les cultures, nous avons réalisé : 12 entretiens sur le riz, 6 sur le maïs, 3 sur le soja, 5 sur l arachide, 5 sur l herbe à éléphant et 7 sur les autres cultures comme les légumes. Pour l élevage, en plus des 20 entretiens sur l élevage laitier, il a été réalisé : 7 questionnaires sur les porcs à l engrais, 10 sur les truies, 5 sur les vaches locales, 3 sur les buffles, 6 sur la pisciculture et 6 pour la volaille. Les données économiques sont issues à la fois des entretiens avec les paysans et des entretiens avec les autorités locales (district et Comités Populaires). Lors des visites aux Comités Populaires, nous avons rencontré soit le vulgarisateur agricole, soit un cadre du cadastre, soit le Président, parfois aussi plusieurs de ces personnes à la fois. Les questions ont alors porté aussi sur : Le foncier : surface agricole totale, surface de chaque type de terre (haute, moyenne, basse, alluvion), qualité de la terre (argileuse, sablonneuse) Les cultures : les cultures menées sur chaque type de terre et les raisons (hydrauliques, pédologiques, autres), les productions sèches principales. L élevage : taille du cheptel bovin, bubalin et porcin, type d élevage principal dans la commune (porcs à l engrais ou truie) et taille (combien de foyers élèvent plus de 30 porcs ou de 5 truies). Les activités : importance des activités extra agricoles, des activités de transformation. Orientations politiques : les objectifs de la commune au niveau agricole, les projets en cours. Des données générales concernant le district sont obtenues auprès du Bureau du Recensement de Tien Du. À l issue de cette phase, la typologie est finalisée. Les systèmes de culture et d élevage sont décrits et les modèles élaborés. Ceux-ci sont une représentation synthétique de la réalité. C est à partir de l étude de ces modèles qu il est possible de 12

répondre aux questions initiales de la problématique et peut-être d en soulever d autres. 3. La restitution auprès des agriculteurs Le travail effectué pendant 4 mois doit être restitué aux agriculteurs afin de recueillir leurs réactions. Cette présentation suivie d un débat offre la possibilité aux agriculteurs de s exprimer sur le travail accompli et de présenter leur point de vue, leur vision de l agriculture du district. De plus, la présence des autorités lors de cette réunion est une occasion de faire remonter dans la hiérarchie les questions des agriculteurs ainsi que les conclusions du diagnostic. C. CONTRAINTES ET LIMITES 1. Le rythme de vie et les contraintes agricoles Mener des entretiens avec des paysans implique qu il faut suivre leur rythme de vie et de travail. La journée est rythmée par les repas et la sieste, qui sont à heures fixes. La majorité des entretiens étant conduits auprès des femmes (ce sont elles qui sont le plus souvent en charge des activités agricoles), il faut tenir compte du fait qu elles doivent préparer les repas en plus de leurs autres activités et donc ne pas poursuivre les entretiens au-delà de 11 heures du matin et après 17 heures. La sieste est plus longue lorsqu il fait chaud, soit dès le mois de juin, les paysans commençant leur journée plus tôt, et il est extrêmement mal vu de se présenter pendant cette période de repos. De plus, juin et juillet sont des mois très occupés du fait tout d abord de la récolte du soja, puis de la récolte du riz et de l arachide et enfin de la récolte du maïs. La préparation du sol des pépinières, le semis et le repiquage du riz suivent de peu. Or c est aussi à cette période que nous commençons les entretiens technicoéconomiques, qui se révèlent longs : il faut compter au moins une heure et demi à deux heures pour la culture du riz, la même durée pour l élevage laitier et entre une heure et une heure et demi pour les autres ateliers d élevage ou de culture. S il était donc possible de réaliser un grand nombre d enquêtes (jusqu à 7 par jour) lors des mois d avril et mai, cela s est avéré difficile en juin et juillet, où les journées comptent en général 2 à 3 entretiens, chacun abordant deux à trois ateliers différents. 2. Les déplacements Les déplacements se font à moto. La commune la plus lointaine du lieu de résidence (à 12 kilomètres) est accessible en 15 minutes par une route goudronnée. Mais certaines communes ne disposent pas de telles routes, ce qui les rend plus difficile d accès. Il faut alors compter 15 minutes pour parcourir 4 kilomètres par la digue en terre. Les trajets les plus longs ne sont donc pas pour se rendre dans les communes les plus lointaines. De plus, par temps de pluie, les chemins en terre se révèlent dangereux et glissants. Il nous a ainsi été impossible de nous rendre dans deux communes de bord de fleuve suite à des pluies incessantes pendant une semaine en juillet. 13

3. Le facteur humain Notre arrivée dans un village cause toujours une grande agitation qui n est pas toujours propice à des entretiens. Les paysans vietnamiens sont en général timides, surtout les femmes qui représentent la majorité des personnes rencontrées. De plus, nous restons des étrangers et les paysans ne se livrent pas aisément. L autorisation du District nous a simplifié les choses et ouverts des portes dans certaines communes. Cela rassure les gens. Aborder les questions historiques est difficile. Les gens ne parlent pas facilement de la collectivisation et à la question «alors l agriculture, quels changements?», les réponses portent sur l amélioration des rendements rizicoles et l introduction des nouvelles variétés de riz. Certains paysans sont plus habitués aux étrangers : ce sont les éleveurs laitiers qui travaillent avec l Afdi HN depuis près de 8 ans. Certains étant par ailleurs d anciens membres de la coopérative, d anciens membres de la commune et parfois des chefs de village, les aspects délicats sont donc traités avec eux. Enfin, les questions trop générales et ouvertes déstabilisent les interlocuteurs, plus habitués à des sondages et à des enquêtes très directifs. 4. Les limites de l étude Un biais important est apparu au cours de notre travail de terrain. Bien que nous tentions de ne pas nous présenter comme membres du projet Dialogs, les paysans nous considéraient comme tel. Cela nous a permis de rencontrer plus de personnes car cette étiquette nous donnait une légitimité. Mais les agriculteurs nous donnaient parfois des données théoriques (par exemple les rendements, les soins aux vaches ou l utilisation des engrais) correspondant à ce que préconise le projet. Le deuxième biais, inévitable, est lié à la traduction et au vocabulaire paysan. Par exemple, pour connaître les élevages au sein d une exploitation, il faut préciser les animaux, faire une liste car le paysan ne considère pas les volailles et les poissons comme un atelier d élevage. De plus, l obtention de certaines données a posé problème. Ainsi, les taxes sont calculées en fonction de la surface et les paysans ne voulaient pas toujours nous livrer cette information, ou alors cela changeait entre deux visites. La compréhension de l utilisation des sols et des successions culturales s est aussi avérée parfois délicate. Nombre de paysans suivent les directives de la coopérative agricole, suivent des conventions et des accords au sein du hameau mais ne le disent pas ouvertement. Enfin, un nombre limité d agriculteurs a été interrogé au cours du travail de diagnostic agraire. Il ne s agit donc pas d une étude exhaustive de l agriculture du district de Tien Du. Des études complémentaires précises dans certaines communes (par exemple les communes où l élevage laitier est présent) pourraient affiner la connaissance des logiques paysannes et de l évolution des systèmes de production. Avant de nous intéresser à l agriculture et l utilisation des ressources présentes, il convient de comprendre l organisation du milieu ainsi que les contraintes inhérentes tant au milieu naturel qu à l organisation humaine. Pour cela, nous allons procéder à une lecture du paysage puis à une analyse de l histoire agraire de la zone étudiée. 14

District de Tien Du Figure 5 Carte de la Province de Bac Ninh et localisation du district de Tien Du (source : Viet Nam administrative atlas) 15

III. PAYSAGE ET HISTOIRE AGRAIRE A. PAYSAGE 1. Le district de Tien Du, présentation générale Frontalière d Hanoi, la province de Bac Ninh est traversée par le fleuve Duong et comporte 8 districts, dont le district de Tien Du à l ouest (figure 5). Situé à 25 kilomètres au nord de Hanoi, le district est divisé en 16 unités administratives (15 communes et un chef lieu, Lim). Il est traversé par deux routes nationales, une autoroute et une voie de chemin de fer. L habitat est regroupé et dense : 131 118 habitants (recensement de 2003) pour une superficie totale de 10 847,4 hectares soit 1 200 habitants/ km 2. La surface agricole totale est de 6 898,21 hectares, soit 526 m 2 par habitant en moyenne. La majorité de la population est rurale, le centre administratif du district ne comptant que 12% des habitants (source : bureau du recensement du district de Tien Du, 2004). D une topographie majoritairement plane, Tien Du dispose de 290 hectares de collines (hauteur maximale de quelques mètres). Les sols du district dont divisés en deux grandes catégories : les terres dedans (protégées par la digue) et les terres d alluvion qui sont inondées par le fleuve Duong toutes les années. Ces dernières représentent 330 hectares. Le système d irrigation et de drainage permet de mettre en valeur les terres dedans. L organisation du système d irrigation est schématisée dans la figure 6. À partir d un canal principal longeant la digue, des stations de pompage alimentent les canaux secondaires. Un système de vanne permet le cloisonnement entre les canaux secondaires et le canal primaire, alimenté directement du fleuve. Les canaux tertiaires permettent d apporter l eau aux parcelles. La gestion des canaux primaires et des stations de pompage principales est du ressort des provinces alors que les canaux secondaires et tertiaires ainsi que les stations de pompage secondaires sont gérés au niveau des communes. Les stations assurent à la fois le pompage dans le canal primaire pour assurer l approvisionnement en eau que le pompage dans les canaux secondaires pour permettre le drainage des parcelles lors de la saison de pluies. Traditionnellement agricole, le district de Tien Du développe depuis quelques années son secteur secondaire et tertiaire ainsi que le présente le tableau 2. 1995 2000 Agriculture 65,8% 59,7% Industrie et construction 11,9 % 17,2% Commerce et services 2,3% 23,1% Tableau 2 Part des différents secteurs dans l'économie de Tien Du (source : bureau du recensement du district de Tien Du) 16

Canaux secondaires Station de pompage secondaire Station de pompage principale Canaux tertiaires Digue Fleuve Canal primaire Figure 6 Organisation du système d'irrigation Figure 7 Un exemple de canal d'irrigation, commune de Canh Hung Présidence de l Etat Assemblée Nationale Comité permanent Etat Gouvernement Cour populaire suprême Parquet populaire suprême Provinces Comité populaire Conseil populaire Tribunal populaire Parquet populaire Districts Comité populaire Conseil populaire Tribunal populaire Parquet populaire Communes Hameaux Blocs Comité populaire Chef de hameau Conseil populaire contrôle dirige Figure 8 L'organisation de l'appareil d'état depuis la Constitution d'avril 1992 (source: Papin 2003) 17

La structure de la production agricole est aussi en changement avec un net développement de l élevage (tableau 3). 2000 2001 2002 2003 Culture 66,1% 64,3% 63% 64% Élevage 27,5% 29,1% 33,7% 33% Services agricoles 6,5% 6,5% 3,3% 3% Tableau 3 Structure de la production agricole (source : bureau du recensement du district de Tien Du) Chaque commune est composée d un nombre variable de hameaux, comprenant eux-mêmes des blocs. À chaque échelon administratif correspond une structure de l appareil de l État, comme présenté dans la figure 8. À ceci se rajoutent les instances du Parti Communiste, présentes à tous les niveaux. 2. Pédologie du district Les terres dedans sont divisées en trois types : Les terres hautes ou «van cao» Les terres moyenne ou «van thap» Les terres basses ou «van trung» La structure géologique du district de Tien Du est essentiellement constituée d alluvions, les collines étant sur base schisteuse. Les alluvions sont de type sablo argileux ou argilo sableux, la granulométrie dépendant des conditions de dépôt, ainsi que de l époque. La pédologie du district est directement liée aux caractéristiques géologiques. Nous retrouvons une grande diversité de sols, de granulométrie variable. De plus, l altitude relative des divers sols influe sur l hydrologie et donc, sur l évolution de ceuxci. Du fait de l endiguement des fleuves, l évolution des terres à l intérieur de la digue est bloquée. Nous pouvons toutefois distinguer deux grandes catégories pour les sols à l intérieur de la digue : 1. les sols peu évolués à hydromorphie permanente ou temporaire (gley ou pseudo-gley). Il s agit des sols inondés en saison des pluies, des terres basses. 2. les sols alluviaux non évolués sur alluvions récentes. Ces terres, en fonction de leurs conditions de drainage et d irrigation, servent à la riziculture ou aux productions sèches. La majorité des sols du district sont sablo argileux, avec une teneur plus ou moins importante en sable selon l éloignement du fleuve et la hauteur. Il faut néanmoins retenir que, lors des réformes agraires, les terres ont été aménagées et aplanies avec parfois apport de matériaux extérieurs. Les terres sont acides, demandant un chaulage régulier. Les collines ont des sols ferrallitiques peu épais. Ils sont acides et comportent peu de matière organique. Les berges du fleuve Duong sont argilo limoneuses. La fertilité des sols est directement corrélée avec leur teneur en argile, déterminant leur capacité d échange, mais aussi avec leur éloignement des villages. En effet, les habitants fertilisent plus abondamment les terres proches des habitations, surtout par apport de fumier. Les sols les plus hauts sont plus sableux, plus légers, que les sols bas ce qui les rend avantageux pour la culture des tubercules. Une terre basse 18

est définie comme basse si «après une pluie de 300 mm, la hauteur d eau y reste à un niveau compris entre 80 et 100 mm pendant au moins 3 jours» (Agriculture familiale et gestion des ressources du milieu dans le bassin du fleuve rouge, 1996). Du fait de ce drainage peu efficace, les terres basses ne sont pas mises en valeur lors des périodes de pluie et mousson. Les communes n ont pas toutes les mêmes capacités culturales du fait des différences entre les sols. Ainsi, une commune disposant d une majorité de terres basses argileuses aura peu de possibilité de développer les cultures sèches, contrairement à une commune disposant de nombreuses terres hautes plus sableuses. Les communes de bord de fleuve disposent en plus d une ressource particulière : les terres d alluvions inondables. 3. Occupation de l espace Comme nous l avons présenté précédemment, le district de Tien Du a deux caractéristiques géographiques principales : des collines en son centre et le fleuve Duong au Sud. Cela détermine structurellement un paysage contrasté. Les collines sont boisées en acacia et eucalyptus. Au Nord, une ligne ferroviaire traverse le district et longe une voie rapide très fréquentée. Une autre route importante passe à l est du district. a) Habitat et aménagement hydraulique L habitat est regroupé et dense. Les villages sont à l abri des crues du fleuve, derrière la digue, et souvent au pied de celle-ci pour les communes de berge. Pour toutes les autres communes, ou lorsque la digue est loin, les hameaux sont situés sur des terres hautes, ou au pied des collines. Ils sont le plus souvent le long des axes de communication. Les maisons sont isolées les unes des autres par des murs entourant les cours privées, jardins et bâtiments, tant d habitation que d élevage. Dans la cour, les foyers les plus aisés ont un puits privé, mais chaque hameau dispose d un puits commun. Les bâtiments d élevage (porcherie ou étable) font le plus souvent face à la maison. Le jardin est planté de légumes et d arbres fruitiers (bananiers le plus souvent). Les figures 9 et 10 présentent l organisation générale du paysage pour deux communes, l une disposant de berges de fleuve, l autre de collines. La paille de riz est stockée dans la cour, en meule. La volaille est libre dans les cours privées, mais aussi les rues des villages. De même, nous rencontrons parfois des truies et des porcs en train de fouir le sol à la recherche de nourriture aux abords des hameaux. Les bovins sont maintenus dans l étable ou sortis pour pâturer. Ils sont alors à la corde, au piquet ou surveillés suivant la localisation des pâtures. En effet, il n existe pas de parc, les pâtures principales étant les digues et diguettes, ainsi que les bords de route Le système d irrigation est développé dans les terres dedans et de nombreux canaux sont bétonnés. Les zones cultivées représentent la majorité des terres du district. Il y a peu de friche de longue durée, et certaines parcelles proches de hameaux sont laissées en eau afin de pouvoir pêcher et cultiver des légumes aquatiques, comme les liserons d eau.. 19