Les enjeux de l indépendance des banques centrales



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Transcription:

Les enjeux de l indépendance des banques centrales La FED va-t-elle remonter ses taux d intérêt? Les débats sont ouverts et les enjeux considérables. Avec un dollar en baisse, une croissance dont la reprise est confirmée, des indicateurs qui laissent à penser que les Etats-Unis risquent des poussées inflationnistes, nombreux sont ceux qui estiment que la FED pourrait prochainement augmenter ses taux. Toutefois, rien ne permet de dire quand cela interviendra et quel sera l ampleur de la modification. L indépendance dont jouit la FED concerne à la fois le niveau des objectifs à atteindre et les moyens qu elle se donne. Dans le cadre de sa mission, elle doit veiller à un objectif multiple de croissance d emploi et d inflation. L indépendance dans ce cadre précis est définie par rapport au pouvoir politique qui détient l autre instrument macroéconomique entre ses mains : la politique budgétaire. Il s agirait alors pour une banque centrale de pouvoir déterminer le niveau des objectifs et les moyens à employer dans le cadre de sa mission, sans avoir à subir d influence dans ses orientations ou même dans ses actions de la part d autres institutions. L indépendance renvoie généralement à la question de la responsabilité vis-à-vis d une autre autorité ou bien des citoyens. En effet, une banque centrale, à la différence d une banque classique détient le privilège de pouvoir émettre de la monnaie. Pour les monétaristes, la banque centrale détermine le niveau de l offre de monnaie. Elle doit garantir la stabilité monétaire. Les variations de l offre de monnaie ne pouvant se traduire que par un niveau supérieur d inflation, il faut assurer la neutralité de la monnaie. Le débat sur l indépendance des banques centrales a vu le jour dans les années 70-80 avec le constat de l inefficacité des politiques de relance appliquées après les chocs pétroliers. L apparition de la stagflation a dérouté les modèles keynésiens classiques. Les thèses monétaristes ont alors retrouvé les faveurs des autorités gouvernantes. La lutte contre l inflation a alors dominé tous les débats. On a alors assisté dans les années 80 à une remontée des taux et à un resserrement des politiques monétaires. Par opposition aux politiques menées précédemment, notamment dans les années 60, dites de stop and go, les économistes à tendance keynésienne ou libérale s accordent alors sur la nécessité de parvenir à une indépendance des banques centrales. L objectif de lutte contre l inflation ne pouvait alors être mené à bien avec des autorités monétaires soumises à des pressions des gouvernements souhaitant des politiques laxistes plus favorables à des desseins électoraux. La réalisation de l Union Economique et la création de la BEC ont également très largement nourries ces questions. Le traité d Amsterdam en 1997 consacre la création d un système de banques centrales européen avec une autorité supranationale de la BEC, organe régissant la politique monétaire de l Union monétaire. La mission de la BEC est la stabilité des prix, cependant elle peut apporter un soutien aux politiques économiques des Etats sans toutefois que cela puisse porter préjudice à son objectif principal de stabilité des prix. L indépendance de la BEC comporte 3 points : ses membres ne sont pas révocables, elle ne reçoit pas d instructions des gouvernements et ne doit pas financer les déficits. Il apparaît ainsi une indépendance totale de la BEC qui maîtrise également sa communication. Une comparaison avec les autres banques centrales dans le monde que la notion d indépendance peut revêtir des nuances. La FED a des obligations envers le congrès. La banque d Angleterre est redevable devant le Parlement. La banque du Japon serait en définitive en terme de critère d indépendance la plus liée au pouvoir politique. La question se pose alors de l efficacité des banques centrales dans la réalisation de leur (s) mission (s). L indépendance a-t-il permis de diminuer l inflation? Il semblerait que oui. Mais aujourd hui, l inflation combattue, le combat ne s oriente-t-il pas 1

vers une notion plus élargie de la mission des banques centrales qui s exprimerait en termes de croissance et d emploi. Enfin, l indépendance des banques centrales est-t-elle le garant d une meilleure efficacité économique? Dans une première partie, nous verrons les arguments qui ont amené les autorités à mettre en place des institutions monétaires indépendantes afin de pouvoir atteindre des objectifs économiques dictés par la conjoncture des années 70. Puis, dans une deuxième partie, nous expliquerons pourquoi dans un souci d efficacité une coordination est un point complémentaire mais essentielle de l articulation des différentes politiques. I L indépendance des banques centrales : le débat règles - versus discrétion Il s agit là encore de conjuguer des impératifs de court terme : le niveau d activité, l emploi avec une vision de long terme d orientation économique, de croissance. La politique monétaire peut ainsi être considérée comme un outil de régulation ou bien, mais pas exclusivement, comme devant servir la stabilité monétaire. Nous verrons donc dans un premier temps la politique monétaire comme outil de régulation, puis dans une deuxième partie la nécessité de l abandon de la politique monétaire comme outil discrétionnaire. A) La politique monétaire au service de la régulation Les autorités monétaires ont divers outils à leur disposition pour agir sur l offre de monnaie. Les monétaristes représentés par Friedman s appuient sur la maîtrise des agrégats monétaires. En Europe, il s agit de M3 fixé à 4,5%, afin de permettre une croissance potentielle de 2,5%. Les monétaristes prônent la non intervention de l Etat et s érigent en défenseurs des lois du marché. Ainsi, il faut laisser les forces du marché agir. Dans les faits, les banques centrales règlent leur politique essentiellement à travers le taux d intérêt. Il agit à travers le canal du crédit, le canal large et le canal du change. Ainsi, une baisse du taux d intérêt permettra des financements moins onéreux et donc une augmentation des investissements. Il se traduira également par une relance de la demande et par répercussion de l activité (via les salaires) mais aussi de la consommation (via baisse épargne). Elle peut intervenir par la vente ou le rachat de titres contractant ainsi la masse monétaire ou l augmentant (open market). Les réserves obligatoires enfin peuvent également servir d outil pour augmenter ou diminuer la capacité d attribution de crédits par les banques de second rang. Pour autant, la banque centrale a très peu utilisé cet instrument, préférant agir directement par l intermédiaire des taux. Ainsi, jusque dans les années 70, les autorités gouvernementales européennes entre autres, mais également américaines, ont utilisé l outil monétaire dans le cadre de politiques de stop and go. Les politiques monétaires expansionnistes permettaient de relancer l activité en bas de cycle. Et inversement, on appliquait des politiques monétaires restrictives en période de 2

surchauffe avec une remontée des taux. Cependant, la dérive inflationniste des années 70 et l augmentation exponentielle de la dette ont conduit à un changement dans l emploi de ces politiques monétaires. La constitution de l Europe monétaire en perspective et outre Atlantique la nécessité de casser la spirale inflationniste ont conduit à mener des politiques monétaires restrictives, non discrétionnaires. Il s agit alors de ne plus employer les politiques monétaires comme outil de régulation d autant qu ils se sont avérés parfois utilisés de façon inadéquate. B) Les banques centrales doivent garantir la stabilité monétaire Utiliser un outil à des fins discrétionnaires pose la question de la définition de la politique optimale. En effet, une politique est choisie par des autorités à un instant t parce qu il semble adéquat à remplir les objectifs à cet instant. Il s avère alors que ultérieurement et compte tenu de la conjoncture ou de nécessité électorale, cette politique définie comme optimale à l origine ne puisse plus l être. Il conviendrait alors d en changer. Ainsi, les politiques deviennent alors incohérentes temporellement. C est ce que Barro et Gordon ont modélisé dans un schéma impliquant la banque centrale et les agents. Les effets souhaités sont des niveaux de chômage naturel et une inflation nulle. A l aide de ce modèle qui se déroule en 2 temps : la banque centrale est reconnue pour son attitude de lutte contre le chômage, puis dans un deuxième temps le fait qu elle dévie ou non, on s aperçoit que la situation qui permet d obtenir les meilleurs résultats externes de chômage et d inflation est réalisée lorsque la banque centrale a une politique cohérente temporellement. Elle assoit donc son efficacité sur sa crédibilité. Une banque centrale ne doit donc pas être amenée à dévier de ces objectifs. Il faut donc qu elle soit indépendante. C est un point essentiel de sa crédibilité crédibilitéindépendance. Pour certain, comme Rogoff, cela ne suffit pas. A une règle de droit, Rogoff pense qu il faut ajouter une règle de comportement. A savoir, le rôle du banquier central. En effet, il pourrait être tenté parce que par exemple ces schémas économiques sont plus souples à déroger de cette rigueur. On a donc besoin d un banquier central connu pour ces opinions de rigueur. C est le débat qui a tourné autour de la nomination du successeur de M. Duisenberg, M. Trichet. Ainsi ces règles devraient assurer l indépendance de la banque centrale et l efficacité de sa politique. Pour autant, d autres éléments nous amènent à émettre quelques réserves. En effet, des critiques ont été émises envers la banque centrale concernant sa capacité à pouvoir réaliser efficacement sa mission. Il s agissait entre autres du déficit de communication et de transparence qui entoure la BCE. La déclaration du 8 mai 2003 a, à cet égard, amené quelques éclairages sur la politique de la BCE, notamment au regard de la cible d inflation ou fourchette de [0-2%]. Il s agit bien de rester le plus près possible des 2% et en dessous. Un autre point concerne l absence de règle affichée par la BCE. La fonction de réaction serait supposée proche de la règle de Taylor. Toutefois, la BCE a défini clairement s appuyer sur les deux piliers économiques d abord, puis monétaires dans ses orientations. Ainsi, le débat, faut-il appliquer des règles dans le suivi des politiques monétaires, a été tranché. Les banques centrales doivent pouvoir agir et décider en toute indépendance. Ceci pose le problème de la coordination des politiques macroéconomiques et donc monétaires 3

avec budgétaires. Le problème est aussi plus délicat lorsque les centres de décision ne sont pas au même niveau pour l Europe, une politique monétaire supranationale et unitaire et des politiques budgétaires multiples, soumises à des contraintes diverses (politiques, culturelles, ). Il s agit bien ainsi de faire coïncider les équilibres réels et monétaires du modèle général. II L efficacité des politiques macroéconomiques : indépendance versus coordination. La coordination est nécessaire à deux niveaux. Elle doit être réalisée dans le cadre d une optimisation avec la politique budgétaire. Mais, il existerait aussi une limite d efficacité liée au concept d indépendance. A) La version optimale : une coordination des politiques macroéconomiques Il s agit de définir l optimalité des politiques économiques par rapport à des objectifs et des conceptions de modèles économiques qui peuvent diverger selon les intervenants comme l a montré M. Blinder. PM Y - Y I I tx tx PIB PIB ***** La coordination ne poserait pas de problèmes selon M. Blinder lorsque les 3 conditions sont réunis : mêmes objectifs même vision de fonctionnement de l économie mêmes prévisions. Le graphe ci-dessus représente en abscisse ligne libre de long terme (taux d investissement réalisé/souhaité-d équilibre) et en ordonnée l équilibre de court terme (activité). Une vision Keynésienne des politiques permettra avec une politique budgétaire restrictive et une politique monétaire légèrement inflationniste d atteindre l équilibre. A 4

Si les autorités gouvernementales souhaitent avoir une activité plus forte, la BC devra faire un effort plus important que souhaité. Ainsi, s il y a divergence d objectif entre les deux parties, la coordination posera un problème. De même, si les intervenants n ont pas la même vision du fonctionnement de l économie, le résultat ne sera pas optimal en terme d efficacité. A C est en effet ce qui a caractérisé le mandat de Busch qui a mené des diminutions d impôts (politique d offre) alors que dans le même temps M. Volker menant une politique monétaire très restrictive. A l inverse, une coordination harmonieuse et représentée par le tandem Clinton-Greenspan, appliquant tout deux une vision souple de l économie. La coordination est un point essentiel. En effet, on a reproché à la BCE d avoir relâché les taux un peu tardivement fin des années 90, retardant en cela la reprise de la croissance. Les conséquences se font également sentir en matière de chômage. Reprenant en cela l analyse de la courbe de Phillips, on a défini un ratio de sacrifice correspondant au chômage supplémentaire supporté pour une baisse du taux d inflation. Ce ratio serait d autant plus élevé qu il existerait des rigidités nominales, que le taux d inflation serait élevé. Ainsi, si la lutte, contre l inflation coûte des points de chômage, il semblerait que pour des niveaux d inflation faible, ce ratio soit moins élevé. La lutte contre l inflation serait donc un point essentiel toujours aujourd hui, malgré la polémique chômage-politique restrictive. Là encore, la coordination est un enjeu de l efficacité. Le conseil Ecofin jouerait un rôle à ce niveau dans l articulation des politiques. L indépendance des banques centrales, du moins en Europe, a pour objectifs d empêcher ou de prévenir un financement monétaire de la dette et par là d éviter une augmentation dont on ne peut maîtriser le devenir. B) L indépendance des banques centrales : comment réprimer la dette L augmentation exponentielle de la dette dans les années 80 résulte d un double phénomène. La croissance des années 60 avait permis d assurer une augmentation de la dette. Bien que dans les années 70, elle se soit ralentit, l inflation avait permis d avoir des taux réels au final inférieur à la croissance. Par contre, à partir des années 80 avec les politiques de rigueur, l inflation qui baisse et les taux réels et nominaux qui remontent, on assiste à un phénomène boule de neige et une augmentation élevée du déficit mais surtout de la dette. Face à cela, les économistes après avoir développé la théorie de l arithmétique de la dette dépense : déficit primaire + charge de la dette seigneuriage monétaire, on développe un autre modèle. Les agents disposent de fonds d Etat qui leur donne droit à des biens. L Etat finance la dette par une émission de titres. L objectif étant d avoir une émission à terme nulle, la dette est égale au seigneuriage monétaire + financier. Ainsi, en ayant une BC indépendante, les 5

autorités gouvernementales ne peuvent se permettre une gestion laxiste. La théorie budgétaire du niveau général des prix vient remettre en question ce modèle en définissant les fonds comme une valeur. Ainsi la dette serait égale à P (seigneuriage monétaire + seigneuriage financier). La banque fixant la monnaie, si les gouvernements baissent les impôts, on a automatiquement pour obtenir l équilibre, une augmentation des prix. L indépendance de la banque centrale ne serait donc pas un critère suffisant pour permettre la réalisation, le maintien des équilibres. Ainsi, il semblerait que si l indépendance est une clef de l efficacité des politiques monétaires, il faut adjoindre une dose de coordination pour permettre une efficacité des politiques économiques cette fois. Au final, l indépendance des banques centrales est une clef première permettant d obtenir la stabilité monétaire. La montée de l interdépendance des économies, le poids des échanges mondiaux, le rôle des échanges financiers enfin donne une importance prédominante dans l influence des politiques monétaires et de la crédibilité des institutions qui les mènent. Pour autant, des divergences importantes dans les solutions institutionnelles retenues entre les différentes banques centrales laissent entrevoir qu il n existe pas un modèle unique idéal de la banque centrale, qui permettrait de réaliser les meilleures performances. Enfin, l efficacité ne résiderait pas tant dans le choix d indépendance qui est fait que dans la manière dont les politiques économiques peuvent et sont articulées entre elles. La question est comment concilier indépendance d une part et convergence des vues et objectifs d autre part. Il s agit aussi de réfléchir à la mission des banques centrales par rapport à la stabilité monétaire et à la dominance des marchés financiers sur les marchés des biens et services. A maintes reprises et à une fréquence croissante, on a pu voir des bulles éclatées. Les répercussions sur le monde réel sont considérables. Les banquiers se défendent d avoir un rôle à jouer dans la stabilisation des marchés financiers. Mais dans la mesure où ils interfèrent sur la stabilité des marchés monétaires, dans quelle mesure ne devrait-il pas intégrer également ce paramètre. 6