8 ème Séminairedel'ObservationUrbaine



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Transcription:

8 ème Séminairedel'ObservationUrbaine Marne-la-Vallée,3novembre2010 Actes du séminaire

NOTICE ANALYTIQUE N Production 13010 N Produit 1 1b Organisme commanditaire : DGALN Titre : Actes du séminaire de l observation urbaine 2010 Sous-titre : Date d achèvement :06/07/2011 Langue :Français Organisme auteur : Certu Rédacteurs : Retranscription par Scribe-net Relecteur assurance qualité : Gilles Quéré Tarik Yaïche Texte d introduction du programme du séminaire : La modélisation en observation urbaine s étend dans des champs de plus en plus vastes : population, consommation d espace, environnement Comment se repérer dans la diversité des méthodes et des approches? Quelles sont les utilisations possibles? La recherche de méthodes d observation permettant les comparaisons spatiales, temporelles et une connaissance partagée entre acteurs, peut conduire à des processus s apparentant à de la normalisation. Comment les acteurs de l observation urbaine se les approprient-ils? Cette journée s adresse aux chargés d études des services de l Etat, des collectivités territoriales, des agences d urbanisme et des bureaux d études, ainsi qu aux chercheurs. Observations : A mettre sur le portail de l environnement : non Thème général et thème : Urbanisme et habitat Ouvrages sur le même thème : - Mots clés : Observation urbaine, Modélisation urbaine Diffusion : Internet Web : oui Nombre de pages : 61 Tirage : non Confidentialité : non Bibliographie : non Séminaire de l'observation Urbaine 2010 3

SOMMAIRE 1. Les actualités de l observation urbaine 6 1.1 La suite des travaux du Cnis 6 1.2 Le grand équipement bases de données (GEBD) 8 2. Séquence méthodologique : la modélisation 11 2.1 Un exemple de modélisation statistique 13 2.1.1 Statistiques carroyées, dernières avancées 13 2.2 La modélisation du territoire et de ses évolutions 16 2.2.1 L évolution de la tâche urbaine - Identification des terrains susceptibles de s urbaniser 16 2.2.2 La modélisation par automate cellulaire application à l agglomération rouennaise 21 2.3 La modélisation des flux et des émissions de gaz à effet de serre 23 2.3.1 Le modèle de déplacements en Ile-de-France de la DRIEA IF (modèle MODUS) 23 2.3.2 Estimations d émissions de gaz à effet de serre : les diagnostics élargis de la mobilité 27 3. Séquence Débat : l observation des territoires et la mise en place de normes 32 3.1 Des méthodes construites pour être appliquées localement 33 3.1.1 Indicateurs de consommation d espace 33 3.1.2 Enquêtes Ménages/Déplacements et grands territoires 42 3.2 La co-construction d observation 47 3.2.1 Un exemple d observation transfrontalier : L atlas transfrontalier «de Berck à Brugge» 47 3.2.2 Le Baro métropole Un outil partagé de connaissance locale sur le territoire de Rennes-Métropole 51 Séminaire de l'observation Urbaine 2010 4

Mot d accueil et introduction de la journée Marie-Noëlle MILLE, CERTU Je vais tout de suite donner la parole à Monsieur Robin, directeur-adjoint de l École des Ponts, qui nous reçoit pour la troisième fois. Gilles ROBIN, Directeur-adjoint de l École des Ponts L École des Ponts s implique très activement dans la construction du Pres (Pôle de recherche et d enseignement supérieur Université Paris Est) en construisant ici sur la cité Descartes, un pôle à visibilité mondiale sur la ville dans toutes ses problématiques et son ingénierie. Vous avez peut-être remarqué en arrivant, des chantiers, différents matériels de construction. Deux chantiers sont actuellement en cours. Un premier se construit dans cette direction, le bâtiment Descartes +, qui est un bâtiment à énergie positive, qui a vocation à accueillir l ensemble des laboratoires de l école qui sont aujourd hui implantés en location dans le coin. Un deuxième chantier important est sous la maîtrise d ouvrage du ministère de l Écologie. Il prend place sur l ancien terrain de rugby de l école et a vocation à accueillir à la fois le Laboratoire Central des Ponts et Chaussées, qui va quitter le boulevard Lefebvre, une partie des équipes de l Inrets, d ores et déjà ici, et également les instituts d urbanisme des deux universités (Paris Est Marne-la-Vallée et Paris Est Créteil). Dans ce cadre, le Certu est associé au Pôle scientifique et technique du ministère de l Écologie. Nous sommes donc encore une fois heureux de vous accueillir et nous vous souhaitons une bonne journée de travail. Jean-François GUET, responsable du département urbanisme, CERTU Bien évidemment, nous sommes fortement impactés, les uns et les autres, par la mise en œuvre opérationnelle du Grenelle de l environnement et de la loi Grenelle II valant engagement national pour l environnement, qui viennent déranger, percuter, enrichir, perturber notre façon de voir le territoire, en attribuant et introduisant de nouvelles thématiques, de nouveaux acteurs, avec l irruption des questions d environnement, bien évidemment, climatiques, mais aussi sociales, qui se révèlent toujours plus complexes. Le maître mot, le concept clé de ce que l on appelle aujourd hui «ville durable», c est l intégration des politiques publiques, et il y a là un formidable défi en matière d observation urbaine, puisqu il ne s agit plus d exploiter indéfiniment les bases de données que nous connaissons bien, notamment celles de l Insee, mais de les confronter à de nouvelles données pour voir comment tout cela peut constituer un corpus de connaissances enrichies sur les questions de durabilité des territoires. Il y a là un enjeu très fort et c est une question qui sera abordée, dans un contexte où la question des frontières et des limites devient d autant plus complexe qu elles tendent à s estomper. Nous ne savons plus où s arrête la ville et où commence la campagne et quand nous croyons être à la campagne, finalement, nous sommes quand même en ville. Il y a là beaucoup de sujets d interrogations. L idée qui prévalait dans les politiques publiques, notamment européennes, était celle d une coupure très nette entre la ville et la campagne. Mais, il suffit d observer les territoires pour voir que ces frontières sont devenues infiniment floues, ce qui rend nos travaux passionnants, mais compliqués. Ce séminaire annuel constitue le temps de rencontre d une communauté technique très particulière personnes qui travaillent sur l observation des territoires. Nous sommes environ 200 personnes et c est à comparer avec les abonnés de notre lettre d information qui alimente le milieu de l observation, soit un peu plus de 2 000 abonnés. Vous représentez donc aujourd hui 10 % de cette communauté technique, ce qui est quand même assez considérable et mérite d être souligné. Séminaire de l'observation Urbaine 2010 5

1. Les actualités de l observation urbaine 1.1 La suite des travaux du Cnis Bernard MOREL, INSEE Depuis deux ans, le Cnis a engagé une réflexion pour situer ses orientations de moyen terme sur une période 2009-2013 et nous sommes à mi-parcours de ce qui se passe dans le champ de la statistique publique, par rapport à ces orientations. À l époque, en septembre 2008, une rencontre importante avait permis de définir ces orientations. Dans l observation urbaine, les données locales ont tout de suite été beaucoup soulignées comme un des thèmes majeurs de cette période qui s ouvrait, 2009-2013. Ensuite, un deuxième temps fort a permis notamment à certains d entre nous de participer à travers un groupe de travail présidé par Francis Cuillier. Il portait spécifiquement sur les données locales et a émis un certain nombre de préconisations, qui servent de référence, de jalon, dans l examen réalisé chaque année de l avancée des programmes des services statistiques des ministères. Une commission Territoire, dont je suis un des corapporteurs est présidée par le sénateur-maire d Arras, monsieur Vanlerenberghe. Chaque année, le groupe a la responsabilité d examiner les programmes statistiques des services des différents ministères et d émettre des avis, après confrontation avec les besoins des utilisateurs. Tout cela est un peu théorique, mais cela marche et donc aujourd hui, je suis un peu en mesure de vous dire ce qui a été fait depuis deux ans, par rapport à ces orientations qui avaient été tracées. En 2008, de façon très schématique, il ressortait une multiplication des acteurs dans le champ de l observation urbaine, une multiplication des sources et donc un défi particulier à assurer, avec d abord, un minimum de cohérence dans ces informations, pour que des comparaisons soient possibles, qu un langage commun soit établi. Le deuxième défi était de rendre les données accessibles, pas seulement par le biais d une mise en ligne, mais en montrant comment les utiliser à bon escient. Le troisième était celui de l innovation technologique dans laquelle on s engage, à savoir celle du développement de la statistique géoréférencée, avec, à l horizon 2013-2015, une nouvelle façon de produire et de diffuser des statistiques. Tous ces points seront abordés aujourd hui, d où l intérêt de les resituer par rapport aux perspectives tracées par le Cnis et par le groupe de travail. Dans le champ des outils de cohérence, 2011 sera l année d actualisation des zonages. Je vous ai parlé des frontières ville/campagne, c est un chantier qu il a fallu ouvrir, parce que nous avions de nouvelles données avec l arrivée du nouveau recensement. C est en 2011 que ces nouveaux zonages d études que gère le Service statistique public seront mis à disposition de tous, à savoir les unités urbaines et les aires urbaines. La deuxième vague concernera les zones d emploi, sur la base d un travail réalisé sous l égide du ministère en charge du Travail et de l Emploi, donc par la Dares. Là aussi, les travaux sont en cours. Une concertation se déroule avec les préfets de région, sur une proposition technique qui a été faite par la Dares et l Insee. Il est prévu que ces zones d emploi soient effectives, quand les résultats du recensement millésimé 2008 seront mis à disposition, en juillet 2011. Le zonage des aires urbaines et l espace rural seront actualisés en octobre 2011, occasion d une nouvelle livraison des données du recensement. Ces travaux sont essentiellement menés à méthodologie constante. Il ne s agit pas de tout chambouler. Toutefois, des ajustements méthodologiques sont en cours sur ces questions, sur le fait de revisiter la façon dont on parle de l urbain et du rural, à l occasion de ces zonages. Un groupe de travail associe à la fois l Insee, le Meeddm, l Inra, le ministère de l Agriculture, la Datar, pour mettre au point ces ajustements de méthodes. C était d ailleurs une des recommandations du groupe Cuillier. Séminaire de l'observation Urbaine 2010 6

En termes d accessibilité aux données, un certain nombre d enrichissements se font chaque année, en particulier sur le site «données urbaines infracommunales» qui est un des volets du site Insee.fr, consacré aux données locales, qui livre de l information. Ce qui est nouveau, depuis 2009 et maintenant 2010, c est la livraison, chaque année, de tous les indicateurs qui ont été sélectionnés sur les Iris. Mi-2010, le recensement millésimé 2007 vient d être mis à disposition. Cette livraison s accompagne d indications sur la précision des données. Certains labels sont donnés sur les Iris, sur leur fiabilité, leur robustesse, ainsi que des éléments de précision sur les différentes variables, ce qui nous paraît une précaution indispensable, quand on livre des statistiques à ces échelles. Je voudrais signaler aussi que 2011 verra l ouverture d un nouveau service qui consiste à disposer de résultats du recensement sur des zonages à façon, estimations qui seront possibles sur des zones de plus de mille logements. Le service qui sera réservé aux organismes détenteurs de missions de service public, en particulier les agences d urbanisme et les Dreal, consistera à tracer sur un écran la zone d intérêt et d entrée en contact avec une sorte de back-office à l Insee, qui dira s il est possible, effectivement, de fournir l information. Dernier point, faire progresser la production et la diffusion de données géoréférencées : le carroyage. Je n en dis pas plus, parce que c est un des objets de l exposé de Jean-Luc Lipatz. Le CNIS en a discuté lors de sa réunion de septembre dernier. Ceci a été plutôt bien accueilli, y compris d ailleurs par le Président, le sénateur-maire d Arras, qui a vu un intérêt particulier que soit fournie une statistique hors zonage, parce que cela lui donne beaucoup de visibilité. Si l on passe d un système où l on avait des statistiques sur les zonages prédéfinis, les zones urbaines sensibles, par exemple, ou les statistiques par Iris, aucune de celles-ci ne lui permettait vraiment de voir si les périmètres de ses Zus ou de ses Zones de contrat urbain de cohésion sociale étaient pertinents. Une statistique carroyée avec une bonne maille donne tout de suite une vision des quartiers où il faudrait agir et où l on n agit pas ou au contraire, on agit à tort, etc. Je conclurai simplement s agissant des travaux réalisés en collaboration au niveau régional en particulier, entre l Insee, les services statistiques, les Dreal et aussi les agences d urbanisme et les collectivités ; il ne s agit pas de travailler pour se faire plaisir entre statisticiens, mais de répondre à des demandes très concrètes que se posent les collectivités, par rapport à leur politique. Telle est l orientation que nous nous donnons, c est-à-dire que nous visons toujours à mettre à l épreuve ce qui est fait, de l utilité dans l aide à la décision et nous avons chaque année, des bons exemples de travaux à fournir. Cela progresse dans ces partenariats. Dernier exemple en date, ce qui a été fait sur Brest Métropole, paru en juillet, avec l Agence de développement et d urbanisme du pays de Brest. Questions - Réponses Monique GADAIS, ARS Rhône-Alpes Je voulais poser une question supplémentaire sur les zonages, à Bernard Morel. Les bassins de vie seront-ils mis à jour? Leur zonage est très demandé, y compris entre autres à l ARS, puisque nos zonages de soins de proximité sont très proches des bassins de vie et nous nous demandons pourquoi l on crée encore ces zonages supplémentaires, quand une mise à jour des bassins de vie semble suffisante. Bernard MOREL La mise à jour des bassins de vie est prévue après celle des aires urbaines et des espaces ruraux pour fin 2011, début 2012. Les précédents avaient été construits sur les données disponibles à l inventaire communal, donc de 1998. Ce dernier n existe plus aujourd hui, Séminaire de l'observation Urbaine 2010 7

mais une autre source est disponible : la base permanente des équipements, elle-même mise en ligne. C est sur cette base que les bassins de vie seront actualisés, voire un peu refondus. 1.2 Le grand équipement bases de données (GEBD) Olivier BONIN, Laboratoire ville mobilité transport (LVMT) Pourquoi établir un grand équipement pour les sciences humaines et sociales, qui soit centré sur la ville, la mobilité, l environnement? Schématiquement, un travail considérable a été mené en France, dans le domaine de la diffusion des données, en particulier avec le dispositif Quetelet et différentes initiatives. Il est de plus en plus facile d accéder aux sources de données de la statistique publique, mais en parallèle, il faut constater une multiplication de tout ce qui va être observatoire et production de nouveaux types de données, sous l impulsion de directives telle la Directive européenne Inspire ou du fait du développement de nouvelles technologies (téléphones équipés de Gps). Dans le même temps, dans le monde académique, le travail d ingénierie des données reste difficile à valoriser, n est pas toujours extrêmement bien fait et souvent peu capitalisé. Aussi, pour passer à la vitesse supérieure et mieux exploiter ces données disponibles, il était nécessaire de se doter d un outil pour faciliter, ou du moins mieux capitaliser ce travail d ingénierie des données. L ingénierie des données Une pression existe pour faciliter la diffusion et la réutilisation des données. Pour ce faire, il existe beaucoup de travaux de type normalisation, interopérabilité (Géoportail, Géocatalogue), beaucoup d observatoires sont ouverts sur le Web avec souvent des interfaces cartographiques que l on peut interroger. C est également l apparition de nombreux portails qui fédèrent ces différents observatoires. Ainsi, un mouvement très favorable pousse vers l interopérabilité des données. En même temps, il émane une demande croissante des entreprises, des décideurs, des politiques, de la recherche, pour exploiter, confronter et croiser un plus grand nombre de données. Malgré tout, il apparaît que le fait de croiser ces données soulève des problèmes de fond, méthodologiques (références spatiales ou concepts utilisés). Dans le monde de la recherche en particulier, cela suppose un travail au coup par coup, au fur et à mesure des projets. Un certain nombre d opérations, d ingénierie des données seront réalisées de manière plus ou moins manuelle. S agissant des difficultés actuelles du travail sur les données, les compétences d ingénierie des données sont très diffuses et réparties. Certains savent faire tout ou partie de ces tâches dans la fonction publique d État, territoriale, hospitalière, dans le secteur privé, dans le monde académique, mais il n existe pas de réseau d échange extrêmement structuré. Beaucoup de réseaux spécialisés fonctionnent très bien, mais nous semblent un peu étanches. Il existe également peu d interfaces entre le monde de la statistique et celui de l information géographique. Ainsi, si nous allons vers des données de plus en plus territorialisées, à savoir avec des références spatiales qui deviennent des coordonnées au lieu d être des références à des zonages, c est un problème qui devient important. Et, plus particulièrement dans le domaine de la recherche, il faut noter une tendance à se limiter aux bases connues, car cela demande un investissement important, mais aussi du fait d une habitude culturelle de tout refaire soi-même à partir des fichiers bruts et ne jamais accepter le moindre travail intermédiaire. Cela peut se comprendre, dans la mesure où accepter un travail d ingénierie déjà fait suppose que celui-ci soit suffisamment documenté pour que le chercheur ou l analyste ait confiance dans les résultats. Séminaire de l'observation Urbaine 2010 8

Nous avons donc identifié le besoin d un outil dont la visibilité serait susceptible d éclairer à la fois sur les données disponibles et sur les méthodes, les outils et le travail d ingénierie qui a pu être réalisé ou est réalisable. Positionnement de Belgrand Cet équipement se veut en complémentarité parfaite avec les équipements de diffusion de données, les observatoires et les living labs territoires sur lesquels des expérimentations sont faites, en termes de recherche, développement, voire des solutions technologiques très avancées en se focalisant sur le champ de l ingénierie des données, pour l instant moins couvert. Il est proposé un modèle collaboratif où chacun trouve un intérêt à contribuer. Cela peut concerner les producteurs de données, les utilisateurs, les techniciens, les chercheurs, les ingénieurs responsables de systèmes d information. Il est également souhaité une grande diversité d approche, en s intéressant à la fois aux données, aux logiciels, aux systèmes d information géographiques, aux méthodes, dans la recherche de connaissances très pratiques (conditions matérielles de diffusion, à qui s adresser) ou plus théoriques. Enfin, il nous a semblé important d avoir une parfaite neutralité thématique. Il ne s agit en effet pas de rajouter une nouvelle couche de gouvernance sur le fonctionnement classique de la recherche, aucune ingérence, mais il faut un recensement et une proposition d un certain nombre de bonnes pratiques. En ce qui concerne son fonctionnement, il s articule et s harmonise avec le fonctionnement classique des projets de recherche : au cas par cas, quand on identifie un projet, ce dernier va mobiliser un certain nombre d équipes et nécessiter l utilisation d un certain nombre de données. Pour ce faire, un travail d ingénierie sera réalisé, en général à façon. Ce travail, dans la mesure du possible, doit ensuite être capitalisé, c est-à-dire documenté et centralisé, de manière à ce qu un nouveau projet qui démarre quelques années après n ait pas à refaire ce travail, dans la mesure où celui-ci est utilisable. Belgrand : Centre de ressources pour le montage de projets Jean-Paul HUBERT, INRETS Cet un projet qui n existe donc pas encore. L équipement veut favoriser la bonne utilisation des bases de données, en phase avec les attentes des chercheurs. Il sera donc très centré sur la technologie du Web. Concrètement, un portail Web permettra l exploration et la recherche dans les catalogues de fournisseurs de données et des métadonnées, de façon à pouvoir faire son choix dans l ensemble des données disponibles. Ce moteur de recherche doit être accompagné d une base de connaissances sur des modalités plus pratiques concernant les données, en particulier l accès, mais aussi les conditions juridiques de mise à disposition et des connaissances sur l utilisation de ces bases de données savoir si d autres projets les ont déjà utilisées et dans quelles conditions. Nous aimerions qu il existe de meilleures informations, de type bibliométrique sur l usage des bases de données, pour savoir combien de fois une base de données a été utilisée. C est quelque chose qui peut intéresser les producteurs. Nous nous intéresserons aussi aux outils logiciels et aux SIG, qui sont des outils de diffusion des méthodes et des référentiels spaciaux. Ainsi, il ne s agit pas seulement de collectionner les outils, mais il est intéressant d avoir une plateforme logicielle qui permette de les diffuser. Aussi, nous privilégierons un SIG Open source, grâce à la collaboration de l Irstv de Nantes. Enfin, les résultats des travaux d ingénierie sont souvent des données intégrées et des méthodes, qu il convient de conserver, de documenter, d archiver, afin de les rendre disponibles à d autres travaux. Séminaire de l'observation Urbaine 2010 9

Interface de l équipement Belgrand C est un équipement d abord conçu pour la recherche, donc le monde dit «académique». Dans ce cadre, il va fonctionner sous le régime d un accès libre aux ressources et aux données, dans la mesure où il est possible de les redistribuer. Nous voulons développer un service d assistance juridique et administrative au montage, parce qu il s agit d opérations très coûteuses et pénibles, qui n ont pas grand rapport avec la recherche proprement dite. Nous sommes en lien structurel avec le Meeddm, en partenariat avec l Ign et ces liens doivent être développés. Avec le monde non académique, une partie des ressources peut également être mise à disposition, sauf restriction éventuelle en matière de redistribution, de la part des producteurs : aide au montage de projets, partenariats énergie. Nous souhaiterions être ouverts aux contacts, au privé, favoriser la valorisation des études et mener des travaux méthodologiques, éventuellement dans le cadre de thèses avec les entreprises. Montage du projet Ce projet se décompose en deux étapes. Le projet «GEBD» (Grand équipement pour l utilisation des bases de données) est subventionné par la DRI du Meeddm pour l année prochaine, jusqu en 2013. Nous allons donc créer l amorce d un réseau scientifique puisque tout doit fonctionner sur la base d un modèle collaboratif, avec un réseau de chercheurs spécialisés dans l ingénierie des données, ainsi que l amorce du portail puisque des travaux méthodologiques seront réalisés dans le cadre de thèses et implémentés dans un SIG. La deuxième phase, qui doit vraiment permettre le changement d échelle et aboutir à la création d'un centre «Beau et grand», comme son nom l indique, s inscrit en réponse à l équipement d excellence lancé par l Anr dans le cadre de l emprunt national. Ici, il s agit de se lancer dans l industrialisation d outils et la production de données, en relation avec l Ign et le Bipe, mais à travers un partenariat étendu comprenant l Inrets-LCPC (qui sera fusionnée dans un institut), le Lab Urba, l Ensg, l École des Ponts, l Ird US Espace et l Irstv. Il est prévu un budget de 7,4 millions d euros, dont 2,4 demandés au programme Investissements d avenir de l ANR. Nous en attendons les résultats. Questions - Réponses Marie-Noëlle MILLE, CERTU Comment savoir où vous en êtes et être informés de l avancement de vos travaux? Nous aimerions le savoir pour que cela figure sur les actes. Ghislain GENIAUX, INRA La première brique n est-elle pas Inspire? Avez-vous évalué la réelle capacité de la recherche à s engager de façon durable dans ce type d équipements? Olivier BONIN Le projet de la DRI va permettre de constituer un premier noyau d outils, de méthodes et de connaissances. Si nous partions d un système complètement vide, nous ne pourrions pas imaginer avoir la collaboration des chercheurs qui, de manière spontanée, iraient l alimenter. En revanche, avec la possibilité de créer une amorce et de partir avec du contenu, nous pouvons imaginer avoir un système suffisamment fourni pour que le coût marginal de l enrichir soit relativement faible. Par ailleurs, nous nous rendons compte que les tâches sont très segmentées, en tout cas dans notre domaine de sciences humaines et sociales. D un côté, les ingénieurs d étude ou de recherche réalisent ce travail d ingénierie des données ; de l autre, les chercheurs, en collaboration, vont faire les analyses et le travail de publication. Les ingénieurs d études et Séminaire de l'observation Urbaine 2010 10

de recherche, eux, pourraient trouver intérêt à alimenter ce genre de site, parce que ne sera pas qu un simple «fourre-tout» anonyme, mais quelque chose qui permettra de mettre en avant les contributions des uns et des autres et donc, de créditer un certain nombre de réalisations. Jean-Paul HUBERT Je peux également ajouter que les ingénieurs d études et de recherche sont de moins en moins nombreux. Les chercheurs font donc de plus en plus leur travail et pas forcément aussi bien. Un service qui existe serait également une garantie de qualité. Olivier BONIN Nous n avons pas répondu à votre question sur le site. Le projet démarrant officiellement au 1 er janvier 2011, nous n avons pas encore ouvert de site Internet. En revanche, nous parlions de réseau scientifique : pendant les deux ans du projet, une série de séminaires réguliers se tiendra sur le site du Pôle de recherche et d enseignement supérieur de l Université Paris Est, qui permettra de s informer de son avancement et de voir les différentes briques se construire. Marie-Noëlle MILLE Ne manquez pas d informer le Certu, afin que nous puissions le diffuser dans une prochaine lettre de notre site d observation. 2. Séquence méthodologique : la modélisation De quoi parle-t-on? Jean-Michel FLOCH, INSEE L année dernière, nous avions également construit le séminaire avec une séquence méthodologique. Celle-ci avait été conçue autour des carroyages. Cela avait pas mal séduit les personnes qui avaient assisté au séminaire et nous avons donc eu l idée de continuer dans cette voie, de présenter une nouvelle séquence méthodologique axée autour de la modélisation ou sur un certain nombre d exemples de modélisation. Cela ne signifie pas que nous n avions pas de modélisation l année dernière. Je vais vous présenter un certain nombre d images que les plus passionnés d entre vous ont peut-être croisées plusieurs fois : le schéma qui nous permet d expliquer le repérage de la ségrégation résidentielle, en utilisant un certain nombre de techniques statistiques, qui permettent, à partir d un ensemble de données, de modèles statistiques, de simplifier la réalité d une souspopulation ou d une population totale, de passer à des ratios, de cartographier l ensemble et au final, de repérer un certain nombre de zones pour les confronter, par exemple, à des zones urbaines sensibles, où sont menées des politiques publiques. Afin de consolider nos travaux, nous souhaitons présenter une nouvelle utilisation de méthodes de modélisations statistiques, qui permettront d estimer des données de population, pour permettre des cartes carroyées. Cela permet aussi d illustrer les propos de Bernard Morel. Quand nous avons construit cette séquence, nous avons d abord pensé modélisation statistique, modélisation à base de simulations. C est quelque chose que nous avons un peu abandonné, la modélisation étant déjà un univers assez vaste. La plupart des modélisations ne seront pas forcément, pas exclusivement ou pas principalement des modélisations statistiques. La diapositive suivante donne une illustration de modélisation par automate cellulaire, de la dynamique de ségrégation dans laquelle, à partir d une répartition un peu aléatoire de deux Séminaire de l'observation Urbaine 2010 11

points avec trois communautés, des cases libres et des règles de comportement, au final, un certain nombre de populations se regroupent et des tâches bleues, rouges et vertes se stabilisent. Modèle, modélisation, dans le domaine des sciences sociales, des sciences assez appliquées et de modèles orientés vers de la décision politique ou économique, le modèle va être une représentation simplifiée destinée à faire comprendre, avec une idée de modèle cognitif ou euristique. Nous avons donc des représentations qui vont utiliser à la fois le langage de la science, le langage ordinaire, les possibilités de l informatique, mais qui répondent en général à des préoccupations opérationnelles qui visent à préparer des actions ou des décisions publiques. Les sciences sont utilisées, notamment les sciences de l ingénieur. Ainsi, il y a quelques années, Nicolas Bouleau avait fait une conclusion assez brillante et de haute volée, à notre séminaire, avec l emploi du terme de «sciencettes» pour les sciences un peu moins élaborées. Il peut également s agir de constructions formelles, élaborées, rigoureuses, qui reposent sur des bases éventuellement fragiles ou contestables (modèle de Schelling). Cela utilise également des exportations de concept. Par exemple, les modèles d étalement urbains sont des modèles gravitaires issus de modèles physiques. Ce sont des modèles qui fonctionnent, mais qui sont construits un peu par analogie. Tous ces modèles vont avoir un rapport plus flou que les modèles purs et durs de la physique ou des mathématiques, dans le sens où il est possible de les qualifier de sous-déterminés. Cela signifie que des modélisations concurrentes peuvent coexister, sans qu elles ne soient forcément complètement désavouées par de l expérience. Il ne s agit donc pas de schémas poppériens. À la limite, qu elles coexistent ne constitue pas forcément un obstacle. Cela peut dépendre des usages sociaux. Ainsi, les modèles de trafics peuvent être fondés sur des modèles d origine/destination ou sur des modèles qui font davantage référence à des modèles d hydrologie, pour des spécialistes des flux. Cette coexistence n est pas un problème fondamental et nous pourrons peut-être voir dans le séminaire, des modélisations différentes de phénomènes proches. Classifier ces modèles est une tâche impossible. Certains utilisent les aspects statiques, dynamiques, abstraits, concrets, qualitatifs, quantitatifs, sur une classification qui fait apparaître des objectifs cognitifs, prévisionnels, décisionnels et normatifs. Il s agirait donc plutôt de modèles à dominante cognitive ou prévisionnelle. L aspect cognitif de ces modèles réside dans la connaissance limitée d un système étudié, extrêmement complexe, pour lequel le mode de représentation choisi va permettre de le comprendre et de l appréhender. Ainsi, le modèle de l atome de Bohr était un modèle cognitif qui permettait de comprendre la plupart des réalités des expériences physiques de cette époque. Sur l aspect prévisionnel des modèles, nous avons un système de modèles qui visent à savoir comment va se comporter notre réalité dans des conditions nouvelles, à partir d une connaissance initiale. Cela nécessite une connaissance préalable des grands paramètres qui régissent le système (modèles météos, modèles physiques prédictifs, modèles issus des sciences sociales). Le séminaire n abordera pas les modèles normatifs. Nous cherchons précisément à décrire les propriétés du système à créer, à mettre en évidence les propriétés que nous souhaitons définir pour ce système. Ce peut être des dispositifs de régulation, de sécurité, etc. Quant à l aspect décisionnel des modèles, il s agit de prendre des décisions adéquates, en fonction d un certain nombre d objectifs visés (modèles à visées prospectives et modèles de trafics). Bien entendu, tout cela ne fait pas une partition. Tous les modèles vont avoir un peu d aspect cognitif, dans la mesure où ils reposent sur la description d une réalité. Les modèles cognitifs peuvent servir à faire des prévisions ; le modèle prévisionnel peut guider le décisionnel. Les modèles statistiques au sens strict ne vont pas rentrer dans cette classification, mais nous Séminaire de l'observation Urbaine 2010 12

voyons que les techniques statistiques ou différentes techniques mathématiques vont rentrer dans plusieurs places de modèles. Cette introduction visait à marquer l intérêt que nous portons et notre souhait de continuer à donner dans ce séminaire, une place à la méthodologie et à assurer un suivi. Je vais maintenant laisser la place aux modèles et donc à l exposé de Jean-Luc Lipatz, sur le carroyage à l échelle européenne. Les deux exposés suivants seront consacrés à des aspects de modélisation territoriale. Après la pause, deux exposés seront consacrés aux modélisations de flux et d'émission de gaz à effet de serre. 2.1 Un exemple de modélisation statistique 2.1.1 Statistiques carroyées, dernières avancées Jean-Luc LIPATZ, INSEE J ai un peu «triché» par rapport au titre du programme et choisi un titre plus général. Cela s insère assez mal dans la séquence modélisation. Je voulais surtout donner un écho à la séquence carroyage que nous avons eue l année dernière, pour vous montrer comment les choses ont avancé en 2010. Faute de temps pour vous montrer tout ce qui a évolué depuis un an, je vous en donne directement la conséquence : 2010 est un tournant assez majeur dans la statistique infracommunale. Son champ n a plus aucun rapport avec ce qu il était, l an dernier, lors de la présentation des carroyages. En conséquence, vous devriez commencer à voir apparaître des données carroyées mises à disposition sur le site de l Insee et sur une échelle considérablement plus étendue que ce que nous pouvions faire auparavant, uniquement sur les communes de plus de 10 000 habitants. Le rapport Cuillier, particulièrement intéressant au titre de mes activités, parlait l an dernier de réformer notre système de production des données infracommunales, de mise à disposition de données carroyées et sur les densités de population. Nous verrons dans un premier temps les changements intervenus sur les systèmes de production, puis ce que vous pourrez bientôt voir en termes de données carroyées. Simultanément avec le rapport Cuillier, l Insee s est inscrite dans un groupe de travail (USS Net) dont le but consiste à généraliser la production de données carroyées à partir des recensements dans un contexte européen. L objectif de ce groupe est d améliorer quelque chose qui existe depuis plusieurs années par le centre de ressources d Eurostat, qui contenait de nombreuses imperfections. Dans ce contexte, la France a glissé sa brique depuis juillet 2010. Pour remplacer l estimation un peu grossière faite par le Centre de ressources européen, nous avons produit une carte de données de population carroyée, basée sur des estimations plus fiables qu auparavant. Cela reste des estimations, mais une grande partie de la carte n est pas estimée. Là se trouve le grand tournant de 2010. Ainsi, toute la partie grise a été estimée, mais sur toutes les parties rouge-orangées, nous sommes capables d homogénéiser de l information sur des carreaux de 1 km² ou autres, par simple agrégation. Par comparaison, l année dernière, je vous aurais présenté une grande carte grise avec quelques points rouges sur Paris. S agissant des conséquences de ce genre de modélisation : désormais, nous pouvons imaginer nous passer de zonages ; ainsi, en région Poitou-Charentes, si l on regarde le contour de Poitiers, entre Poitiers et La Rochelle, entre Poitiers et Niort, entre Poitiers et Lusignan, à l intérieur du canton de Lusignan, le même canton en changeant les carreaux, etc., cela permet un certain nombre de données détaillées. Mais, cela n est pas réalisable sur Séminaire de l'observation Urbaine 2010 13

l ensemble du territoire, car il demeure des zones grises. Les zones non-grisées représentent tout de même 23 000 communes et 80 % de la population. La prochaine étape consistera à boucher les trous de cette carte. Une opération classique a déjà été présentée. Il s agit de prendre des données en termes d occupation du sol et d essayer de construire quelque chose qui permette d imaginer, pour chaque type d occupation du sol, la façon dont il est peuplé. Majoritairement, on utilise l outil «Corine Land Cover», parfois «Soil sealing» (Autriche), mais l idée est toujours de dire que l on connaît quelque chose à un niveau très agrégé, au niveau de maillages administratifs et que l on essaie d imaginer comment sont peuplées les différentes parties de la commune, suivant les différents modes d occupation du sol. Cela consiste à essayer d estimer des coefficients de densité, pour les différents types d occupation du sol, à condition de faire quelques hypothèses sur la forme de ces coefficients de densité. Ainsi, l Ifen avait supposé que les coefficients étaient stables dans le voisinage de chaque commune. Le Centre de ressources européen a utilisé quelque chose de plus compliqué. Mais, très vite, nous nous apercevons que «Corine Land Cover» n est pas un outil suffisant : il ne voit pas en dessous de 25 hectares. Cette maille minimum peut masquer un certain nombre de choses et généralement, cela conduit à des surestimations de populations en milieu rural et à des sous-estimations en milieu urbain. De même, à essayer de déduire du comportement des parties d un tout en regardant juste ce qu il se passe pour le tout, on peut arriver à des conclusions complètement erronées. À titre d exemple, sur une grande commune avec une population importante et une grosse zone industrielle, un processus automatique peut déduire qu une zone industrielle contient une grande quantité de population. C est un risque dans lequel il est assez facile de tomber. Dans le cas spécifique de la France, nous aurions pu faire nettement mieux. D abord, parce que nous disposons de «Corine Land Cover», de «Soil sealing» et du RGE, qui peut apporter d autres informations complémentaires. Par ailleurs, nous disposons d informations détaillées sur 23 000 communes, avec à la fois la population et l occupation du sol. Nous pouvons donc construire une vraie relation entre ces deux éléments, sans avoir à observer ce qu il se passe au niveau du tout. Ainsi, sur la commune de Vannes, l occupation du sol selon «Corine Land Cover» n a pas l air de bien fonctionner. En effet, les zones urbaines censées être peuplées sont celles en rouge et rose. Or, si nous superposons l implantation de la population, il en apparaît dans des zones censées non-peuplées (agricoles, industrielles et commerciales) et inversement. «Soil sealing» est un sous-produit du premier, contient beaucoup moins d informations, mais jusqu à des mailles de 100 mètres de côté. Ce dispositif fournit un coefficient d artificialisation, qui permet de voir, à l intérieur des grandes zones de «Corine Land Cover», pour découvrir des zones habitées là où cela ne devrait pas être, mais qui ne résout pas forcément tous les problèmes. Sur les zones urbaines, «Soil sealing» est assez bien corrélé avec la densité de population. Le RGE, quant à lui, peut permettre de compléter l image. Ainsi, il peut permettre de faire apparaître des zones pavillonnaires dans des zones qui ne sont pas censées être peuplées selon «Corine Land Cover» et de supprimer certains biais liés à «Soil sealing», qui auraient tendance à détecter comme artificialisées des autoroutes. À la sortie, cela donne une classification un peu plus riche que celle donnée par «Corine Land Cover», dans la mesure où nous croisons les trois sources. Le processus d estimation : nous avons construit une machine assez souple, qui part d une base de pixels de un hectare et qui fonctionne par extrapolation. Elle permet d estimer des tas de choses, des carreaux de 1 km² pour le projet européen, mais qui fonctionne aussi actuellement dans le cadre de la refonte des unités urbaines. Le principe consiste à, pour chaque commune non connue, aller regarder les pixels type par type et, dans les communes connues, quelle est la relation entre type de territoire et Séminaire de l'observation Urbaine 2010 14

population. Cette relation est calculée sur un grand nombre d échantillons, pour avoir une idée de la dispersion et de la stabilité du processus. Cela va donner des densités moyennes, des écarts-types. Avec une densité moyenne, nous pouvons reconstituer une population prédite pour la commune, qui a peu de chances de tomber exactement sur la population réelle. Ensuite, les coefficients sont modifiés en utilisant les écarts-types que nous avons détectés au moment des échantillons, pour calculer des densités corrigées, à une population qui tombe pile sur la population réelle. En conclusion, il ne faut pas aller chercher trop loin en termes de précisions. Dans certains cas, nous tombons sur une prédiction de la population communale qui s avère exacte, mais ce n est que pure chance. La plupart du temps, il faut tabler sur environ 20 % d imprécision par rapport aux chiffres prédits, ceci pour nombre de phénomènes inévitables : «Corine Land Cover» a ses propres défauts ; toutes les sources ne sont pas exactement à la même époque ; les territoires ayant tendance à être occupés sont décrits à l inverse par «Corine Land Cover» ; les hauts bâtiments posent problèmes car nos sources ne nous permettent pas de les localiser ; nous avons des problèmes de précision géométrique ; enfin, ce n est pas parce qu il existe un logement à un endroit qu il y a de la population (résidences secondaires). De ce fait, nous ne descendrons probablement pas en dessous de 1 km² et nous n essayerons probablement pas de chercher plus loin que des chiffres de population et éventuellement, nombres de ménage. La diapositive suivante vous donne un exemple de ces défaillances avec les environs de Strasbourg. Des tâches noires ne sont pas détectées dans la partie estimée, mais correspondent à des zones urbaines sensibles Le processus d estimation continue à trop étaler. Parmi les pistes d amélioration, nous pensons utiliser le volume des bâtiments. Car, sur les modèles purement spatiaux, nous nous retrouvons vite avec des zones de corrélation spatiale. Ainsi, dans le centre de Vannes, toute une zone est systématiquement surestimée. Le modèle devra donc être combiné à d autres sources. La suite de mes propos sera disponible sur Insee.fr, sous forme de cartes et d une base de données, qui ne contiendra qu un chiffre de population, avec des références à un carreau. La colonne type indiquera le type d estimation. Cette carte est disponible depuis trois semaines sur le site de l EFGS (Forum européen pour la géostatique) et le sera incessamment sous peu sur Insee.fr. Questions - Réponses Aline CLOZEL, Urbaniste, CA Grand Avignon La disponibilité de cette maille est importante, parce qu elle peut permettre de caler d autres travaux à des échelles plus fines, qui soient cohérents avec elle. Dans le cadre du programme local de l habitat, j utilise depuis deux, trois ans, un traitement sur les densité de logement, qui donne une lecture du territoire intéressante et utile pour sensibiliser aux questions de densité. Elle permet d utiliser les données SIG tout en ayant une certaine abstraction qui rappelle que ce ne sont toutefois que des traitements statistiques et pas un chiffre précis. Il existe un certain nombre de marges d erreur, ce qui rend le dispositif utile à la discussion. Dans le même ordre d idée, j imagine que cette maille sera stable dans le temps, en espérant que nous n ayons pas de nouvelle évolution de projection, de manière à ce que nous puissions nous caler sur cette maille stable. Jean-Luc LIPATZ Tous les travaux sont imbriqués. La maille géographique n est pas un produit francofrançais, mais issue de documents officiels de la Directive Inspire, annexe I. Il est préconisé Séminaire de l'observation Urbaine 2010 15

un système de projection «Lambert azimuthal equal-area» qui respecte les surfaces, bien documenté notamment sur le site de l Ign, et qui doit être la norme de diffusion des données carroyées, au moins sur l espace européen continental. Christophe TERRIER, INSEE J ai eu l impression de manquer quelque chose dans le début de ton exposé. S agit-il bien de 23 000 communes sur lesquelles nous connaissons l information? Dans ce cas, l estimation de modélisation que tu as décrite concernait le reste. Par ailleurs, tu as souligné deux défauts. Pour les zones industrielles, tu as dit qu il y avait du bâti, mais pas d habitant, sauf que dans la journée, il y a du monde. Il convient peut-être de l estimer. Même remarque pour les zones touristiques. Les logements ne sont pas tout le temps plein, mais cela peut être une approche de là où il peut y avoir de la population par moments. Jean-Luc LIPATZ Il s agit bien de 23 000 communes sur lesquelles nous disposons d informations à un niveau fin. Elles correspondent majoritairement à des communes à lien à cadastre vectorisé. Tout repose sur l exploitation du cadastre. Sur les zones industrielles et leur population, je suis bien d accord. Au moment où j ai rédigé le transparent avec la vue de la population carroyée de France, j ai failli marquer l heure de l estimation derrière. Certains le préconisent, parce que l image que nous en aurions à un autre moment de la journée serait probablement différente. 2.2 La modélisation du territoire et de ses évolutions 2.2.1 L évolution de la tâche urbaine - Identification des terrains susceptibles de s urbaniser Ghislain GENIAUX, INRA La maille, c est très bien, mais quand il s agit d essayer de simuler des évolutions ou des modèles de choix, la parcelle est mieux car elle est l élément décisionnel. Aussi, je vais vous présenter une tentative de modèle de simulation de l occupation du sol à l échelle parcellaire qui a été développée à l Inra d Avignon, en partenariat avec la Dreal, la Région Paca, un certain nombre de partenaires dont Aline Cluzel fait partie. Ce modèle de simulation vise à essayer de projeter les conséquences spatiales de différents modes d évolution de l urbanisation, en analysant le passé à partir d un ensemble de données renseignées à l échelle parcellaire. Objectifs Il s agit de simuler l urbanisation nouvelle à moyen terme, en fonction de plusieurs paramètres : démographiques, réglementaires, environnementaux ; en s appuyant sur l analyse spatiale des politiques d urbanisme et des dates de construction de chaque parcelle et ainsi tenter de répondre aux questions suivantes : quels sont les espaces disponibles et où apparaîtront les tensions foncières demains? Quelles sont les conséquences spatiales d efforts politiques consentis sur certains critères urbanistiques? Combien de logements supplémentaires dans une commune sans ouvrir de nouvelle zone et ainsi ne pas rogner sur les zones naturelles ou agricoles? Quelle est la mosaïque spatiale des usages de demain? Nous avons travaillé en trois étapes. D abord, une création de données de départ à l échelle parcellaire, pour essayer de construire une offre foncière et faire un certain nombre de statistiques à cette échelle, sur les densités et leur évolution. Puis, une modélisation spatiale de la probabilité d être construit en zone non constructible des POS. Le modèle fonctionne Séminaire de l'observation Urbaine 2010 16

différemment aux zones constructibles out non constructibles de POS. Il est spatial dans les zones non-constructibles et va dire où va arriver l étalement futur de demain, alors que sur les zones déjà constructibles, il se contente de calculer un nombre de logements dans la zone constructible. Deux raisons à cela : en zone dense et déjà constructible, l offre foncière est plus limitée et chaque nouvelle zone construite est une histoire particulière. Nous nous intéressons plus à la localisation de l étalement urbain futur, c est-à-dire celui qui va se passer dans les zones non encore constructibles, de pressions foncières. Une troisième étape va consister en la mise en place d un modèle de simulations avec des contrôles de certains paramètres, de certains efforts et des cartographies. Traitement des données Les données sont des informations parcellaires de type PCI croisées avec les données des fichiers fonciers de l État, qui donnent notamment les dates de construction. Cela permet ainsi de construire une vision dynamique de l étalement urbain. Nous avons également bien d autres données, comme sur l agriculture, etc. Dans cette expérience, nous avons surtout utilisé les zonages réglementaires, puisque nous disposions en Paca, des zonages numérisés des POS et PLU pour l ensemble de la zone, avec plusieurs versions. Pour cette première version test, nous avons travaillé uniquement sur trois SCOT ouest du Vaucluse (Avignon, Carpentras, Cavaillon) soit près de 300 000 observations, à l aide de la matrice littérale du cadastre, les plans cadastraux informatisés, les POS/PLU 2006, BD TOPO, Corine Land Cover, les zonages environnementaux et zonages de risques (Diren, MNHM), ainsi que les historiques de population pour les aspects démographiques et projection démographique. Pour la première étape, à savoir le calcul d une probabilité, chaque parcelle est renseignée dans cette version comme bâtie ou non en 2005, suivi d un certain nombre de variables pour chaque parcelle selon le type de zonage dans lequel elle se trouve, des informations de propriété foncière, etc. et d un ensemble de variables sur le voisinage (distance minimale au noyau villageois, aux routes principales, à un zonage POS). Ensuite, il s agit de renseigner des densités du bâti, dans un voisinage à 500 m, en termes de nombre de logements et d emprises au sol du bâti. De tels traitements sont toujours longs à mettre en place. Ensuite, pour essayer d alimenter le modèle de simulation mis en œuvre par la suite, nous avons mis en place une méthode d identification des espaces ouvrables à l urbanisation (l offre foncière), en essayant de doter chaque parcelle d un niveau d inconstructibilité théorique (impossibilité réglementaire ou physique), à partir des traitements de l ensemble des bases décrites, qui vont servir ensuite à ordonner la façon dont on va remplir les zones, en prenant les zones de plus faible contrainte, vers les zones de moins faible contrainte. Nous avons également calculé des référentiels sur les densités de logements par type de communes et de zones POS. Cela fait quatre, cinq types de zonages POS, une vingtaine de types de communes, des distributions de densité sur chacune de ces zones et communes, que nous allons utiliser pour caler la simulation. Je reviens sur le fonctionnement de l indice de constructibilité. Certaines parcelles sont considérées totalement bâties lorsque leur surface est de petite taille avec une grosse part d emprise du bâti. Pour les autres, on sélectionne un buffer avec un espace tampon autour, considéré comme non disponible. Ensuite, sur l ensemble des autres zones disponibles (photo de droite), nous allons essayer de voir quel est le niveau réglementaire en termes de statut, le plus limitant. Nous obtenons ainsi huit classes de contraintes : zones disponibles à l urbanisation (constructibles avec ou sans contraintes) et nous qualifions la contrainte. Cela a été construit en partenariat (Diren, agences d urbanisme, Dreal, etc.) pour essayer, pour chaque type d emprises d infrastructure ou de bâti et chaque type de zonage, de définir un niveau de contraintes associé en termes de constructibilité de la parcelle. Ainsi, nous classons différemment des zones centrales de parc national, des sites inscrits ou Ramsar, des réserves de biosphère, des ZNIEFF, etc. Nous utilisons aussi les PPRI disponibles pour Séminaire de l'observation Urbaine 2010 17

qualifier et à la fin, nous avons, pour chaque parcelle, un niveau d inconstructibilité théorique. Modélisation spatiale de la probabilité pour une parcelle d être bâtie Pour calculer la probabilité de bâti, dans ce modèle un peu réduit, nous avons utilisé le fait d être dans une classe «Corine Land Cover» de type 11 (tissu urbain continu), le type de contraintes (k) dans lequel on se situe, le type de zone POS, la distance à la route, la distance à la ville, le nombre de bâti à l hectare et le nombre de logements à l hectare (dans le 500 m retour). Les «s» signifient une relation non linéaire. Il s agit donc d un modèle nonparamétrique, spatial, qui corrige l hétérogénéité spatiale. Comment fonctionne le modèle? Concrètement, l utilisateur choisit un horizon temporel T (10-20 ans), une projection démographique à l échelle de la zone totale, un niveau de répartition de cette projection démographique basé sur la population actuelle des communes ou sur l offre foncière, ainsi que de la demande de logements dont nous disposons, pour chaque commune. Nous reportons là non pas une moyenne, mais un percentile 75, c est-àdire que nous essayons de densifier un peu plus ces zones. Alors, la confrontation de l offre et de la demande nous dira si nous avons suffisamment de zonages constructibles dans cette commune. Soit la réponse est positive et on s arrête là. À ce moment, nous plaçons les logements dans les zones POS en fonction des contraintes (de la plus faible à la plus forte). Soit nous n avons pas suffisamment de logements ou d offre foncière dans la commune : alors, soit nous refusons d ouvrir le POS et le solde est reporté sur les communes contiguës ; soit nous essayons de placer la demande non soldée dans des zonages non-constructibles. C est ici que le modèle probabiliste que j ai présenté tout à l heure intervient. Il va localiser l endroit où ces nouvelles constructions vont apparaître. Nous avons ainsi analysé l évolution de 280 POS en Paca et nous connaissons à peu près le taux maximum d ouverture de zones urbanisables, que nous avons calé en fonction. Si à l issue de ce deuxième round, nous ne trouvons toujours pas l offre foncière, elle est reportée sur les communes contiguës. Nous avons deux trois seuils de contrôle, relativement simples : lorsque nous mettons en œuvre ce type de modèle, il convient de poser une première question sur une simulation qui était un prolongement de tendance. Les zonages constructibles sont-ils suffisants, avec des projections tendantielles? Un tiers des communes avaient prévu une offre foncière suffisamment importante pour absorber cette demande à vingt ans. Ensuite, dans cette simulation, quand on ouvre la possibilité d aller implanter de nouvelles habitations dans des zones actuellement non constructibles, il s agit aussi de regarder où elles se placent (zones agricoles ou zonages naturels). Là aussi, l utilisateur dispose ensuite de possibilités de contrôler où il préfère placer son urbanisation de demain. Maintenant, le modèle probabiliste utilise une projection tendantielle. Un certain nombre de paramètres, que sont la distance aux routes, la distance à des bâtis proches, etc., ont été sélectionnés pour leur aspect didactique, en se disant que quand on modifie l un de ces paramètres, quelles seront les conséquences spatiales sur les endroits qui connaîtront une forte pression foncière. La première simulation type témoigne d un modèle un peu «tordu» pour favoriser la proximité au centre villageois par rapport à la tendance normale. Apparaissent en bleu foncé les parcelles ayant une probabilité d être construites supérieure à un seuil ; les autres zones en vert et en rose sont déjà constructibles et on n y spatialise pas l urbanisation de demain. Dans une autre simulation, la proximité au réseau routier est favorisée ; ailleurs encore, c est le regroupement autour des parcelles bâties. À partir de ce modèle tendantiel, on peut tordre les choses en augmentant un effort «urbanistique» sur certains critères. Séminaire de l'observation Urbaine 2010 18

Conclusion Pour conclure, nous avons une version quasi-opérationnelle sur les trois SCOT Est du Vaucluse. Nous travaillons à l ensemble de la région Paca. Les évolutions majeures du modèle en cours sachant qu une thèse a été financée par la Région, au sein de notre laboratoire, pour en améliorer les modèles concernent l aspect données explicatives (pente, valorisation agricole, etc.) et surtout, l amélioration de l offre foncière théorique, pour essayer de passer à une offre foncière un peu plus réaliste, à travers l analyse des effets de rétention foncière, à savoir regarder les effets des prix des mutations et surtout, la structure de la propriété. En effet, nous avons désormais la possibilité d analyser des évolutions de cadastre, notamment dans des zones rendues constructibles ou des zones déjà constructibles. C est pour nous la plus grosse amélioration de la qualité prédictive du modèle. Le deuxième aspect est beaucoup plus méthodologique et en cours d étude par mon thésard : c est le fait de passer à un modèle plus dynamique. Là, nous n avons pas utilisé les dates de construction. La version 2 s intéresse à l urbanisation 1990-2005, en considérant les dates de construction, encore sur un modèle probabiliste qui calcule une probabilité. Le stade ultime est un modèle qui s appuie sur un modèle de survie spatialisée, qui va calculer la durée pendant laquelle une parcelle reste inconstructible. Questions - Réponses Sylvain DAJOUX, INSEE, DR de Bretagne J ai trouvé cela très intéressant. Je n ai pas bien compris comment on estimait la demande de logement et la pression foncière. Ensuite, par rapport au SCOT et à la programmation PLH, j ai l impression que l on ne tient pas compte, dans le modèle, des choses qui ont déjà été décidées et qui vont donc influer sur le fait que sur telle commune, on ne va pas bouger le POS parce que dans le SCOT ou le PLH, on va plutôt densifier telle commune ou autres. Quant au parti pris de considérer les zones bâties comme non-disponibles, il nie dans le modèle, l impact de la rénovation urbaine et de la reconstruction, qui peuvent aussi avoir des conséquences sur le fait que l on ne va pas densifier certaines zones. Ghislain GENIAUX Nous ne nions pas le renouvellement urbain, mais nous ne spatialisons pas. Mécaniquement, 30 à 70 % des nouvelles habitations apparaissent dans des endroits où il existe déjà une habitation sur la parcelle dans la zone. Mais, nous ne disons pas où cela se trouve. Quand nous sommes dans une zone déjà constructible, nous projetons essentiellement un nombre total et donc, nous ne le précisons pas. Sur le côté SCOT, nous avons une projection démographique globale. Mais, l utilisateur peut choisir un niveau de projection démographique pour chaque commune, et alors d ouvrir ou non le POS. Maintenant, pour calculer la demande foncière, nous avons une projection démographique globale que nous répartissons par commune en fonction de certaines règles, ce qui nous donne une demande de logements. Pierre LAVERGNE, Agence d urbanisme de Montbéliard Ce modèle est-il facilement reproductible sur un autre territoire? En termes d outils, comment êtes-vous amenés à réaliser ces travaux et à mener à bien vos hypothèses? Ghislain GENIAUX Concernant la reproductibilité, elle est soumise à la disponibilité des données. Les données que nous avons utilisées le sont toutes, sauf les POS/PLU, pour lesquels la région Paca a une politique particulière pour favoriser la numérisation des POS. Les DDE ont procédé à une Séminaire de l'observation Urbaine 2010 19

harmonisation des POS et à des codages généralisés. Ce n est pas le cas pour toutes les régions. Pierre LAVERGNE S agit-il de développements spécifiques ou d outils type CFFME qui permettent d organiser des géotraitements? Ghislain GENIAUX Les outils, c est POS GRE, POS GIS, donc un open source pour le traitement de l aspect spatial, couplé à R, qui est un logiciel de statistique qui dispose de librairies de traitement statistiques. Nous avons implémenté un modèle spécifique pour R afin de développer tout cela. Tout est en open source et peut donc être dupliqué, conformément à l enjeu du modèle. Pierre LAVERGNE Cela peut-il être mis à disposition de certaines agences d urbanisme? Ghislain GENIAUX Pour l instant, la mise à disposition pose problème : le modèle en lui-même mouline des données sur la propriété foncière individuelle. Il ne peut être ouvert partout à tout le monde. Il se pose un problème de filtrage quant à la manière de rendre compte de certains indicateurs selon le type d utilisateurs. Cela demande un travail important et nous n avons pas les fonds pour le faire pour l instant. Pierre LAVERGNE Cela est-il lié aux données Majic II? Si nous avons un accord avec sa collectivité pour exploiter ces données, on peut utiliser votre outil. Ghislain GENIAUX Oui, mais ensuite, il se pose un autre problème sur les versions prochaines, qui réside dans la qualité de l information vis-à-vis de la date de construction, qui ne serait pas homogène, dans Majic, selon les régions. Ainsi, pour la région Paca, nous bénéficions de 96 % de correspondance et de renseignements sur la partie en termes de dates de construction ; cela n est pas du tout le cas dans certaines régions. Pierre LAVERGNE C est une information cruciale pour pouvoir faire tourner votre modèle pour les prochaines versions. Mais, il est vrai que les sources Majic varient d une région à l autre, je m en étais rendu compte. François SALGE, MEDDM-DGALN Toutes les directions départementales des territoires, maintenant, disposent des données Majic anonymisées, en évacuant tous les problèmes de secrets liés à la loi informatique et liberté, vis-à-vis de la Cnil. Toutes ces données peuvent être utilisées pour faire tourner ce genre de modèle, moyennant un accord avec les DDT. Ensuite, un mouvement de numérisation des POS et les PLU est lancé du fait de la RGPP sur l amélioration ou la dématérialisation des procédures liées aux permis de construire, ce qui peut permettre d espérer que, progressivement, les POS généralisés soient disponibles, d autant plus que la norme Cnig qui a été adoptée récemment, permet d avoir une harmonisation dans le sens de la généralisation des postes, du moins sur les différents labels du zonage PLU. Ledit cahier des charges est désormais disponible, téléchargeable et utilisable. Il sera vraisemblablement compatible avec ce qui va sortir de la directive Inspire concernant l usage des sols. Séminaire de l'observation Urbaine 2010 20

Frédéric FASQUEL, CETE Nord-Picardie J aurais aimé savoir comment ont fait les SCOT, d un point de vue opérationnel. Quand vous avez fait le test, vous avez modélisé sur le territoire, comment pouvons-nous nous en servir? S agit-il d évaluer l état d avancement de l urbanisation a posteriori, de redresser ce qu il se passe en termes d urbanisation par rapport aux objectifs déterminés en termes de densité, de modèle urbain? Comment cela a-t-il été éprouvé par rapport à la réalité d un territoire et de ses perspectives? Ghislain GENIAUX Cela n a pas été fait du tout. Nous sommes encore en phase de développement avec les partenaires initiaux (Dreal, Cete, Agence d urbanisme d Avignon), au stade de la mise à disposition. La réplication de simulation pourra donner la validité et l utilité du modèle sur ce plan. Ce qui a été validé est la capacité de la méthode à repérer l offre foncière disponible. La phase création de la donnée initiale sur laquelle le modèle s appuie a été validée par un certain nombre de séries sur le terrain, de repérage d offre foncière et de confrontation à la réalité. En revanche, nous ne connaissons pas encore la capacité des acteurs à réellement utiliser l outil, complexe. Ainsi, il n est pas encore possible d ouvrir son interface graphique, faute d avoir réglé tous les problèmes de mise à disposition des données. 2.2.2 La modélisation par automate cellulaire application à l agglomération rouennaise Patrice LANGLOIS, Université de Rouen Notion d automate cellulaire Un automate cellulaire est avant tout un modèle spatial et dynamique qui permet de faire évoluer le contenu des cellules qui sont en fait un carroyage auquel on ajoute un fonctionnement, par des règles de transition qui s appliquent à toutes les cellules et à chaque temps de la même manière. Chaque cellule est localisée selon une ligne et une colonne. Elle possède à chaque instant un état qui représente son contenu. Chaque cellule est environnée d autres qui forment sa structure de voisinage, qui reste homogène à la fois dans l espace et dans le temps. En ce qui concerne ce voisinage, nous pouvons imaginer les huit voisins immédiats (voisinage de Moore) autour d un carreau ou juste prendre les quatre voisins Nord, Sud, Est, Ouest (voisinage de von Neumann), mais plus généralement, un voisinage selon une métrique et un rayon donnés, ce qui peut donner des voisinages plus ou moins grands et de forme diverse. La dynamique du modèle est basée sur une règle ou un ensemble de règles qui s appliquent à toutes les cellules, qui calculent l état suivant en fonction de son état actuel et de l état des cellules du voisinage. C est un modèle relativement simple. Exemple de plateforme de modélisation La dynamique d une cellule Prenons un exemple : j ai un ensemble d états possibles sur mes carreaux. La cellule au centre est dans l état (d), les voisins forment une configuration sur la base des états de huit cellules alentours : la règle de transition prend en compte l ensemble de ces valeurs, pour en déduire l état de la cellule centrale (e) en fonction de la règle de transition définie. Dans le cas de l exemple du «jeu de la vie», médiatisé, ce modèle est basé sur une transition calculée par rapport au nombre de voisins vivants dans le voisinage de Moore des huit voisins. Chaque cellule a deux états, «mort» ou «en vie» et les règles de transition sont les Séminaire de l'observation Urbaine 2010 21