LEG9 NUMÉRO 9 JUIN 2012 BULLETIN D INFORMATION Ce 9 e bulletin G9 vous présente le projet de Modernisation du modèle de gestion du Centre de santé et de services sociaux Jardins-Roussillon. Il s agit de l un des neuf projets d amélioration des conditions d exercice des cadres retenus par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) dans le cadre de sa première phase. Modernisation du modèle de gestion 1 Objectifs du projet 2 Choix des secteurs pilotes 3 Révision des tâches des cadres et autonomie des professionnels 3 Approches de gestion 4 Calendrier de réalisation 4 Indicateurs objectifs et subjectifs 5 Comités et ressources liés au projet 5 Conditions gagnantes et défis 6 Transfert de connaissances 6 Santé et Services sociaux Modernisation du modèle de gestion Le CSSS Jardins-Roussillon, à l instar des autres CSSS du réseau, est une organisation à vocations multiples répartie sur plusieurs sites, ce qui implique une approche de gestion adaptée à cette réalité. Devant la quasi absence de littérature scientifique concernant les approches à privilégier pour gérer des organisations aussi complexes et en constatant que les autres CSSS en sont aussi aux balbutiements de la recherche à ce sujet, le CSSS Jardins-Roussillon a fait le pari d opter pour une recherche-action fondée sur ses cadres intermédiaires. Ce projet s inspire d un modèle d analyse de l architecture d une organisation dérivé des travaux de Lawrence et Lorsch (1989). À partir d une adaptation de ce modèle, le CSSS a décidé d entreprendre une démarche interne, intitulée Modernisation du modèle de gestion, pour se construire des outils et un référentiel correspondant à sa réalité. Ce CSSS est également préoccupé par le nombre de postes de cadres non comblés et par le départ de gestionnaires vers des organisations jugées moins complexes et où la charge de travail est perçue comme étant moins lourde. Ce projet s inspire largement des approches d amélioration continue. Il utilise une méthodologie impliquant étroitement les cadres concernés et leur équipe. Il est axé sur le développement d outils d analyse réutilisables et vise à établir un modèle de gestion pour chaque grand secteur d activités, en tenant compte des caractéristiques de sa clientèle. Cette approche aura pour effet de préciser le rôle et les responsabilités des cadres intermédiaires et du personnel qui l entoure en fonction de la réalité propre à chaque secteur.
Voici comment Richard Cloutier, directeur des ressources humaines du CSSS, résume son projet: «Avec ce projet, nous voulons dresser un portrait précis de trois secteurs de notre CSSS pour voir comment leur fonctionnement, leurs mécanismes de coordination et leur structure sont adaptés à leur réalité et à leurs clientèles, le tout dans un esprit d améliorer les conditions d exercice des cadres.» Parmi les finalités associées au projet, notons que le CSSS compte alléger les tâches administratives effectuées par le cadre et responsabiliser les intervenants de leur équipe. Il souhaite de plus explorer davantage la cogestion médicoadminitrative et revoir l ensemble des processus transversaux impliquant des cadres, afin de les rendre plus fluides et surtout moins laborieux. De plus, il veut aussi miser sur l utilisation d outils technologiques d aide à la gestion et à la communication. Le CSSS a choisi, dans un premier temps, trois secteurs pilotes. Dans chacun, les acteurs concernés, en s inspirant des meilleures pratiques, vont convenir d un nouveau mode de fonctionnement qu ils vont ensuite tester pendant six mois. À l issue de cette démarche exploratoire, et au fur et à mesure de l expérience, des ajustements permettront de faire les modifications nécessaires pour adapter la formule théorique à la réalité observée. Une formule définitive sera ensuite adoptée. Notons que ce CSSS compte sept sites principaux et une quinzaine de points de service. Au départ, 12 cadres intermédiaires sont visés, mais les solutions choisies pour répondre à leurs besoins seront ensuite rapidement appliquées aux autres gestionnaires non visés par cette première phase du projet. En effet, le CSSS compte ensuite adapter le référentiel, les outils et les résultats de ces trois chantiers pilotes pour les exporter dans d autres secteurs. Il veut réviser les plans d organisation de toutes ses directions à la lumière des résultats obtenus. Dans le même esprit, certains cadres de secteurs non visés par le projet participent aux travaux afin de pouvoir être en mesure de transposer plus facilement les expériences et solutions déterminées dans leur secteur. Objectifs du projet Concrètement, le projet du CSSS Jardins- Roussillon est articulé autour de six objectifs qui seront réalisés de façon consécutive : Dresser un portrait de l organisation et du fonctionnement des trois secteurs visés en mettant en relief les défis à relever et les processus transversaux les liant à d autres secteurs. Élaborer un modèle conceptuel de l architecture organisationnelle et les outils d analyse associés. Élaborer une formule provisoire d organisation et de fonctionnement pour les trois secteurs. Expérimenter et évaluer la formule provisoire. Mettre en place la formule organisationnelle retenue dans les trois secteurs. Dégager les apprentissages découlant de cette démarche ainsi que les outils qui pourraient être réutilisés dans d autres secteurs. 2
Choix des secteurs pilotes Ce CSSS a choisi d expérimenter de nouvelles formules de fonctionnement dans les secteurs suivants, notamment parce qu ils sont très différents et parce qu ils permettent d analyser plusieurs enjeux et de tester le modèle théorique sous différents angles. Le secteur famille-enfance-jeunesse est un service de première ligne, lui aussi réparti sur plusieurs sites, qui compte de nombreux liens avec des partenaires externes. Sa structure d encadrement comporte trois niveaux. Un grand nombre d intervenants professionnels y travaille et doit composer avec de nouvelles responsabilités, dont celles à caractère légal. La clientèle est complexe et diversifiée. La structure de ce service est davantage organique, entre autres, car elle demande une plus grande capacité d adaptation à un environnement souvent imprévisible. Finalement, le secteur des soins critiques subit de fortes pressions pour accroître sa performance. Il est situé sur un seul site avec des équipes réparties en trois quarts de travail. Le nombre d usagers y augmente constamment, le taux d encadrement y est faible et ses interfaces avec l environnement hospitalier et médical sont nombreuses. La prestation de services, plus prévisible dans sa forme et sa durée, a un haut potentiel de standardisation. Il s agit donc d un service de nature plus mécanique. Le secteur de la santé mentale a été retenu, entre autres, parce qu on y trouve un codirecteur médical et que le CSSS souhaite miser sur la cogestion médico-administrative pour explorer les principes et les modalités de partage des rôles et responsabilités des médecins et des chefs de départements médicaux. Il s agit en outre d un secteur réparti sur plusieurs sites et qui compte plusieurs liens avec des partenaires externes. De plus, l équipe de gestion en place, tout comme l équipe interdisciplinaire, manifestait un grand intérêt à participer. C est un secteur de l organisation qui se situe à mi-chemin entre une structure organique et mécanique, notamment parce que la nature des soins et services et la clientèle sont complexes, mais relativement prévisibles. Pour faciliter le déploiement, éviter de surcharger les ressources et adapter la méthodologie au fur et à mesure du déploiement, le démarrage des projets dans ces trois secteurs est espacé de quelques mois. Révision des tâches des cadres et autonomie des professionnels L exercice d évaluation des tâches réalisées par 12 des cadres intermédiaires des trois secteurs à l étude montre que le temps consacré aux tâches administratives peut parfois représenter jusqu à 40 % du temps de travail. Or, le temps consacré aux tâches administratives ne l est pas pour la supervision clinique. «On paie trop souvent des cadres pour faire des horaires, car il n y a pas suffisamment de personnel de soutien administratif pour le faire», explique Pierre Collerette, professeur en gestion à l Université du Québec en Outaouais et expert externe pour ce projet. 3
M. Collerette s est notamment intéressé à la question de l autonomie des professionnels qui travaillent dans les trois secteurs étudiés. Il précise : «Cet exercice nous a permis de constater que le temps consacré à la supervision est trop faible. Si, au départ, nous pensions qu il fallait développer l autonomie des professionnels pour alléger la tâche des cadres, nous avons plutôt constaté que les professionnels ont toute l autonomie requise pour exercer leur travail. En contrepartie, la plupart des cadres estiment manquer d encadrement et se sentent laissés à eux-mêmes. La supervision professionnelle fait défaut et c est un aspect qu il faut considérer notamment dans un contexte où il y a beaucoup d intervenants inexpérimentés qui travaillent avec des clientèles affectées par des problématiques à complexité croissante. La structure de prise en charge des professionnels à des fins de supervision est donc à bonifier dans le cadre de ce projet.» M. Cloutier constate aussi qu il faut évoluer : «Dans le réseau, historiquement, le profil de compétence des cadres était soit hiérarchique, soit de type conseil. Il faut revoir cette conception pour tenir compte de l environnement et du contexte dans lesquels ils travaillent. C est une approche moins documentée dans la littérature et que nous sommes en train d expérimenter.» Cet exercice a donc incité le CSSS à revoir et à clarifier aussi les rôles de tous les collaborateurs immédiats des cadres ainsi que la coordination et la supervision clinique des équipes. Ce CSSS est d ailleurs en train de définir une nouvelle fonction type pour répondre à ce besoin. Approches de gestion Gilles Lefebvre, directeur général adjoint administratif s est lui aussi intéressé aux différents profils de gestion des cadres. Il signale qu il faut revoir ces profils de compétence : «Les projets en cours nous permettent de confirmer que certaines compétences de gestion que les cadres sont appelés à développer varient selon la nature organique, hybride ou mécanique des services dans lesquels ils travaillent. Le profil des compétences attendues varie d un secteur à l autre. Nous sommes donc en train de définir différents profils variant selon le type de service. L exercice est presque complété. Ainsi, le profil d un gestionnaire de salle d opération n est pas identique à celui d un cadre du secteur famille-enfancejeunesse. Cela ne fait pas appel aux mêmes capacités de leadership, aux mêmes compétences. Il faut toujours adapter la gestion au type de clientèle desservie par les secteurs.» Calendrier de réalisation Quant au calendrier de réalisation du projet, notons d abord que le portrait de l organisation et du fonctionnement des trois secteurs visés, tout comme l élaboration d un modèle d architecture organisationnelle et des outils d analyse associés sont maintenant terminés. Dans le secteur de la santé mentale, des changements sur le plan du soutien administratif aux cadres ont été apportés ainsi que sur le plan du soutien technologique afin de s adapter à la mobilité des cadres sur plusieurs sites. Dans la direction du secteur famille-enfance-jeunesse, une nouvelle structure provisoire a été implantée. La 4
mise en place d un nouveau plan d organisation qui est en cours, va remplacer une structure plus cloisonnée et territoriale par une structure transversale plus optimale. Ces changements réalisés avec l implication des cadres concernés ont notamment entraîné la migration de personnel entre différentes équipes ainsi que des changements dans les responsabilités de chefs de programme. Dans la direction des soins critiques, l implantation de certaines améliorations qui nécessitent un ajout de ressources a été retardée pour des considérations financières, mais les autres modifications, qui touchent la révision de processus transversaux, sont en voie d implantation. Indicateurs objectifs et subjectifs Pour évaluer les résultats de ce projet, le CSSS compte comparer différentes mesures prises au début de la démarche à d autres effectuées à l issue du projet. Il s agit notamment du taux d encadrement, du taux de roulement, du taux d absentéisme et d assurance-salaire, du taux de postes vacants et du pourcentage de temps 0 comparera aussi des indicateurs plus subjectifs, tels que l écart perçu par les cadres entre l effort et la reconnaissance, l intention des cadres de demeurer à l emploi du CSSS, le climat psychologique de travail dans les équipes et la satisfaction du personnel envers les cadres. À la lumière d une comparaison des résultats des indicateurs désignés avant et après l expérience pilote, le CSSS va adapter les outils et les plans d organisation pour les implanter ensuite de façon définitive. Comités et ressources liés au projet À l instar des autres projets du G9, différents comités, comme un comité directeur et un comité pilotage, permettent d assurer la gouverne, la coordination et la planification du projet du CSSS Jardins-Roussillon. Le directeur des ressources humaines du CSSS agit à titre de chargé de ce projet. De plus, une agente de projet interne et un expert externe sont aussi étroitement impliqués dans les travaux. Le CSSS compte en outre deux comités consultatifs en relation avec ce projet. Le comité-conseil des cadres est un lieu privilégié pour discuter des solutions développées et expérimentées dans les trois secteurs et s assurer qu elles sont adaptées aux préoccupations et besoins d un échantillon plus large de cadres. Quant au comité-conseil des organismes professionnels et syndicaux, il permet de discuter de l impact potentiel du projet et des solutions développées et mises en œuvre sur l organisation du travail et le fonctionnement des secteurs visés. Environ tous les quatre mois, ces comités se réunissent pour faire état de l avancement du projet, dans une perspective de transparence. Ainsi, les cadres et les syndicats sont bien au fait de l évolution du projet et peuvent émettre des commentaires et suggestions. C est d ailleurs un élément essentiel aux yeux de M. Cloutier, comme il le précise : «Évidemment, en travaillant sur les conditions d exercice des cadres, on touche à différents groupes périphériques, aux professionnels et à l organisation du travail. Alors, il faut inclure tous les intervenants concernés dans le processus.» Cette approche de collaboration et de transparence a visiblement porté ses fruits. En effet, l accueil réservé au projet par les cadres et les salariés des secteurs visés a été très positif. Un sondage a été effectué avant la réalisation du projet, puis une fois 5
Stéphanie Thibert, conseillère-cadre en développement organisationnel, à la formation et aux projets spéciaux ; Gilles Lefebvre, directeur général adjoint administratif ; Richard Cloutier, directeur des ressources humaines et Pierre Collerette, expert externe. la nouvelle architecture d organisation définie, afin de valider la perception du personnel et de voir comment il se situe face à ce changement. Le CSSS a ainsi pu adapter sa stratégie et s assurer d une implantation harmonieuse du changement. Conditions gagnantes et défis Comme dans les autres projets du G9, parmi les conditions gagnantes pour en assurer le succès, notons l implication étroite de la direction à toutes ses étapes, le soutien d une ressource interne dédiée et d un expert en gestion et en rechercheaction, tout comme l engagement et l imputabilité des directions des secteurs visés. Le manque de temps et la difficulté de concilier les agendas et de coordonner l apport des différentes ressources impliquées dans le projet font cependant partie des difficultés souvent citées. L un des défis observés par M. Collerette, mais aussi par plusieurs établissements dans le cadre de l implantation d un changement organisationnel, est lié à la réticence du corps médical à modifier certaines de ses pratiques, malgré la démonstration des gains d efficacité qui en découlent. Le projet pilote dans le secteur de la santé mentale, qui implique une cogestion médico-administrative déjà bien implantée, sera certainement très riche d enseignement en cette matière. Par ailleurs, ce CSSS doit aussi relever le défi de concilier ce projet avec tous les autres en cours. En effet, l établissement a aussi été retenu par le MSSS pour implanter un vaste chantier de trois ans qui compte 10 projets menés selon l approche Lean Healthcare Six Sigma. Le CSSS voulait bien arrimer son projet d amélioration des conditions d exercice des cadres avec ceux liés à l approche Lean et éviter de les mener de façon parallèle. Il souhaitait ainsi s assurer d une cohérence dans leur réalisation afin que les apports des différents projets convergent. Transfert de connaissances Le CSSS peaufine actuellement son cadre conceptuel en adaptant le modèle théorique choisi à l environnement complexe de ses trois secteurs d activités. Les autres 6
secteurs de l établissement en suivent étroitement l évolution et comptent bien tirer profit de l expérience. «Je vois déjà plusieurs possibilités d appliquer les formules issues des secteurs pilotes dans d autres secteurs de l établissement», estime Stéphanie Thibert, conseillère-cadre en développement organisationnel. Par ailleurs, cette démarche de validation du modèle pourrait certainement intéresser d autres établissements du réseau qui souhaitent modifier leur plan d organisation. Bien qu il ne s agisse pas d une formule transposable telle quelle, le CSSS compte bien partager toute l information sur les balises et éléments à considérer pour en faciliter l analyse et l adaptation dans une autre structure. Avec l implantation de cette Modernisation du modèle de gestion à laquelle s ajoutent bien d autres expériences, le CSSS Jardins-Roussillon est une vraie fourmilière de projets. Il est encore trop tôt pour mesurer véritablement l effet qu auront tous ces changements sur l organisation, mais les premières observations relatées semblent prometteuses. Le bulletin G9 fera relâche pour la période estivale. Les prochains numéros vous permettront d en apprendre davantage sur l évolution des différents projets d amélioration des conditions d exercice des cadres dans le réseau de la santé et des services sociaux. Commentaires? Questions? Expériences à partager? Pour toute question ou commentaire au sujet du G9 ou des différents projets d amélioration des conditions d exercice des cadres, n hésitez pas à communiquer avec Jacinthe St-Amand, chargée de projets cadres et transfert de connaissances à l adresse courriel suivante : jacinthe.st-amand@msss.gouv.qc.ca LEG9 Dépôt légal Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2012 Bibliothèque et Archives Canada, 2012ISSN 1927-0070 (Version PDF) Gouvernement du Québec, 2012 Rédaction : Brigitte Massé Brigitte_masse@ssss.gouv.qc.ca 7 Le masculin est utilisé dans le seul but d alléger le texte.