Approche technicoéconomiques. des pratiques respectueuses. de l environnement



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Station Régionale ITV Midi-Pyrénées Approche technicoéconomiques des pratiques respectueuses de l environnement 40 - Viticulture durable et environnement - Décembre 2007 Station Régionale ITV Midi-Pyrénées

Approche technico-économique des pratiques respectueuses de l environnement Adeline Ugaglia - ENITAB - UPR EGERIE - Bordeaux Introduction Avec la montée en puissance du concept de durabilité, la dimension environnementale des activités humaines est devenue incontournable. Peut-être encore plus que les autres activités, car fortement liée au milieu naturel, l agriculture est concernée par cette nouvelle attente de la société. L impact des pesticides agricoles sur la santé humaine et l environnement devient notamment source d inquiétudes. Appliquée à la viticulture, la question de la prise en compte de la dimension environnementale n en est que plus prégnante si on considère la pression en intrants sur le vignoble par rapport à d autres cultures (46% du tonnage des matières actives appliquées sur 4,3% des surfaces cultivées en France en 2003 - Eurostat, 2007). L activité viticole est donc très concernée par la problématique environnementale. La recherche de nouvelles pratiques techniques fait intervenir des disciplines très variées telles que l agronomie et la protection végétale qui ont pour but de proposer de nouveaux itinéraires techniques. Mais la technique ne peut répondre seule à ce défi sociétal : le travail au niveau des pratiques culturales doit être relayé au niveau de l économie car les viticulteurs ne sont pas en mesure aujourd hui d évaluer la performance économique de pratiques environnementales. Cette question sociétale s avère cruciale autant pour la mise en œuvre des politiques publiques que pour les exploitants. Les premiers ont en effet besoin d indicateurs de coût (et de performance) au niveau des exploitations agricoles afin de déterminer les seuils à appliquer en cas d actions incitatives et/ ou cœrcitives en faveur du respect de l environnement. Les seconds ont besoin d évaluer les conséquences financières des différentes stratégies qu ils peuvent mettre en œuvre (y compris celles qui intègrent un meilleur respect de l environnement). Dans cet exposé, nous présentons tout d abord le cadre du travail de recherche mené : le projet ADD Vin. Depuis les années 90, une méthode de comptabilité analytique a été mise au point pour calculer les coûts de revient en viticulture. Nos travaux de calcul de coût des pratiques s appuient sur la méthode existante qui est présentée, les charges étant imputées à des opérations culturales. Nous illustrons nos travaux dans la partie suivante par quelques résultats de coût appliqués aux pratiques environnementales. Enfin, nous montrons les limites du travail qui offrent autant de nouvelles perspectives de recherche. Les travaux de recherche en matière de coût des pratiques respectueuses de l environnement à l ENITA L équipe de recherche EGERIE de l ENITA de Bordeaux est impliquée depuis octobre 2005 dans un programme de recherche financé par l Agence Nationale pour la Recherche : le projet ADD (pour Agriculture et Développement Durable) Vin. Le titre précis est le suivant : «Quelles interventions publiques et privées pour réduire l utilisation des pesticides en viticulture?». Le projet regroupe des équipes de recherche pluridisciplinaires, aussi bien des agronomes et des pathologistes que des économistes et des gestionnaires. Le projet est basé sur la réduction du nombre de traitements phytosanitaires en viticulture grâce à une règle de décision basée sur des observations à la parcelle combinées aux conditions météorologiques pour raisonner les traitements anti-mildiou et anti-oïdium de manière conjointe. Cette règle est actuellement expérimentée sur quelques exploitations bordelaises dans le cadre du projet. Le rôle de l équipe EGERIE est, dans un premier temps, d évaluer le coût des pratiques mises en œuvre suivant cette règle. Les calculs de coûts en viticulture : des coûts complets de revient pour la maîtrise des charges Depuis la création de la méthode de comptabilité ABC (Activity Based Costing) dans les années 90, une méthode de calcul des coûts de revient a été mise en place à l ENITA de Bordeaux, et ce spécifiquement pour la viticulture, puisque la gestion de la performance présente de fortes particularités dans cette filière, notamment dans les domaines viticoles d appellation d origine contrôlée, au moins pour deux raisons : - la production s y inscrit dans un cadre réglementaire très strict qui prive le Station Régionale ITV Midi-Pyrénées Viticulture durable et environnement - Décembre 2007-41

gestionnaire d un domaine viticole d un des leviers majeurs de l action sur la performance : les quantités produites. En effet, la limitation du nombre d unités productives se combine avec des limites à la productivité inscrites dans les décrets fixant les règles de production de l appellation. - les différents produits des exploitations viticoles sont écoulés sur des marchés ouverts à la concurrence, que le marché visé soit local, national ou mondial. Entre menaces et opportunités, le viticulteur doit avoir pour souci permanent de rechercher et de mettre en œuvre la stratégie qui lui permettra de se positionner de façon profitable et durable. La gestion de la performance prend deux directions essentielles : - l action sur les coûts. - l action sur les prix. Cette méthode a permis, à travers de nombreuses études de groupe, de produire des références en termes de coûts de production, de stratégies commerciales, de prix de vente et de résultat économique pour la profession. Nous nous intéressons dans ce travail aux coûts de production. La méthode de calcul des coûts de revient en viticulture permet de calculer des coûts complets départ propriété. Un coût complet permet d incorporer dans le coût des produits élaborés et vendus par les viticulteurs la totalité des charges, (après des corrections éventuelles) y compris les charges non directement liées à l activité de production comme les charges administratives par exemple, qu il a fallu engager pour effectuer les opérations de production, de transformation et de commercialisation. L entreprise est subdivisée en activités, qui permettent de regrouper les différentes charges de l exercice. Les activités définies pour les exploitations viticoles sont les suivantes : Vigne en production - Vinification élevage - Elevage en barriques - Mise en bouteilles - Habillage et emballage - Commercialisation des vins en vrac et tiré bouché - Commercialisation et conditionnement des vins en cubitainer et bag in box - Commercialisation des vins en bouteilles - Autres activités Le coût de revient complet des produits est calculé en additionnant le coût unitaire de chaque activité par laquelle passe le produit au cours du processus de production. Nous ne détaillerons pas plus la méthode, mais il est évident qu elle ne permet pas de travailler sur le coût des pratiques viticoles, et encore moins sur les pratiques respectueuses de l environnement. Toutes les charges liées à ces pratiques sont regroupées dans l activité Vigne sans aucune distinction. La méthode présente l avantage d être opérationnelle et proche du processus de production, c est-à-dire proche des choix stratégiques des exploitants pour la mise en œuvre de leurs pratiques. Nous avons donc décidé de conserver cette méthode tout en l améliorant et en la rendant plus détaillée afin de pouvoir calculer le coût des pratiques. Le coût des pratiques viticoles : une version plus détaillée de la méthode de calcul des coûts de revient, la méthode OBC La méthode se concentre sur le détail de l activité Vigne. Les pratiques viticoles sont définies à travers deux termes : - les opérations culturales : intervention sur la culture, séquence technique homogène centrée sur une finalité précise et qui est caractérisée par sa modalité (exemple : la taille), - l itinéraire technique : un itinéraire technique est une combinaison logique et ordonnée d opérations techniques appliquées à une espèce dans un milieu Imputation des charges : dans les opérations pour l activité Vigne ou dans les autres activités 42 - Viticulture durable et environnement - Décembre 2007 Station Régionale ITV Midi-Pyrénées

donné, qui permettent de contrôler ce milieu et d en tirer une production. Les opérations sont les séquences d intervention sur la culture pour en maîtriser la production. Elles sont à la base du calcul du coût des pratiques. L activité Vigne est donc découpée en une série d opérations culturales, ce qui permet d obtenir un coût plus détaillé. Au lieu d être envoyées dans les activités, les charges de l activité Vigne sont imputées aux différentes opérations. Le coût des opérations culturales est construit à partir de la comptabilité de l exploitation agricole. Il s agit de calculer le coût réel des facteurs de production mis en jeu pour réaliser les opérations. Les charges prises en compte sont celles qui par nature sont directement affectables aux opérations. Il s agit des approvisionnements (dans lesquels on isolera les produits phytosanitaires puisque le projet ADD s y intéresse plus particulièrement), les charges de main d œuvre, les charges liées au matériel et à la traction (amortissement, assurance, carburants et lubrifiants, entretien), les autres services (abonnements et conseil par exemples), et les autres facteurs de production consommés par les opérations (local phytosanitaire par exemple). Le coût est un coût dit incomplet puisqu on ne prend pas en compte les charges non directement liées aux opérations. Sont exclus les charges financières et les charges administratives, les consommations intermédiaires indirectes (électricité générale, frais de comptabilité par exemples), la main d œuvre indirecte consacrée à l administratif, et le capital indirect (hangars de stockage du matériel viticole par exemple). En se concentrant sur les facteurs de production, l impact sur les coûts d une modification de l itinéraire technique sera aisément identifiable. Sur le modèle de la méthode ABC, cette méthode de calcul de coûts a été baptisée la méthode OBC pour Operation Based Costing. Enfin, le coût d un itinéraire technique est obtenu simplement en sommant le coût des opérations qui le composent. Résultats La maîtrise des charges L expérimentation mise en œuvre dans le cadre du projet ADD Vin a porté sur un nombre restreint d exploitations viticoles de l Entredeux-Mers, mais permet de mettre en évidence un certain nombre de points intéressants. Cette méthode permet tout d abord de comparer les exploitations entre elles. Nous observons dans le tableau suivant que la comparaison entre exploitations permet d identifier la performance de certaines exploitations dans la maîtrise des coûts à un niveau plus fin que l activité. Par exemple, l exploitation n 2 est plus performante en terme de coût de sa protection phytosanitaire (différentiel de 173 /ha). Si on analyse plus en détail Exemple de calcul de coût d une opération de traitement phytosanitaire (anti-botrytis) sur une exploitation viticole de la région bordelaise Station Régionale ITV Midi-Pyrénées Viticulture durable et environnement - Décembre 2007-43

Traitement n Maladie visée Coûts ( /ha) EXPLOITATION 1 Coûts ( /ha) EXPLOITATION 2 1 Excoriose 38,57 17,33 2 M/O 53,61 25,54 3 M/O 48,80 36,49 4 M/O + insecticide 66,73 40,54 5 M/O + insecticide 66,87 40,54 6 Botrytis 152,14 68,15 7 M/O 69,56 - M/O + insecticide - 65,93 8 M/O 65,95 - M - 36,55 9 M + insecticide 73,27 - M - 21,81 10 M + insecticide - 23,59 11 Botrytis - 95,42 Observations/informations 9,62 - TOTAL 645 /ha 472 /ha Comparaison des itinéraires de protection du vignoble et des coûts associés entre deux exploitations de l Entre-deux-Mers (2006) la composition des coûts, on constate que cette dernière a des coûts de traitement phytosanitaire inférieurs car son équipement en matériel est très bien maîtrisé, au contraire de l exploitation n 1 qui est sur-équipée. L étude des coûts des différentes opérations des itinéraires techniques permet également d identifier les facteurs responsables des niveaux de coût. En étudiant la composition des coûts des traitements phytosanitaires pour chaque facteur de production, on s aperçoit que selon les exploitations, les facteurs de production prépondérants dans le coût diffèrent. Dans les exploitations ayant une bonne maîtrise du matériel, c est le prix des produits qui explique le niveau de coût (plus le produit utilisé est cher, plus le coût du traitement augmente). Par contre, dans les exploitations qui n ont pas cette maîtrise, c est le coût du matériel qui est limitant ; c est-à-dire que quel que soit le produit utilisé, le coût est élevé et varie peu. Les leviers d action sur les charges ne sont donc pas les mêmes selon les exploitations. Dans la majorité des cas, la part relative des produits phytosanitaires dans le coût d une opération est assez faible par rapport aux charges de main d œuvre et surtout de mécanisation (les intrants représentent moins de la moitié du coût des traitements phytosanitaires). Ce type d étude peut donc mener à du conseil personnalisé en terme de maîtrise des charges. Il est également envisageable de comparer le coût des différents itinéraires techniques qui peuvent être menés sur l exploitation. Dans l exemple suivant, toutes les parcelles de l exploitation ne sont pas conduites de la même façon. On peut aisément imaginer que les parcelles auxquelles est apporté le plus de soin sont les plus qualitatives et les mieux valorisées. Les pratiques peuvent ainsi être adaptées à l objectif de production assigné à chaque parcelle. Au lieu de considérer un coût global de l activité Vigne, on peut imaginer ensuite calculer des coûts de revient par type de produit. La réduction de l utilisation des produits phytosanitaires Le Grenelle de l environnement qui a récemment eu lieu préconise la réduction de 50% des produits phytosanitaires utilisés en agriculture. Cela peut se traduire de deux manières : - la diminution du nombre de traitements phytosanitaires (ce sur quoi nous nous sommes concentrés dans le projet), - la diminution du nombre de doses appliquées. En ce qui concerne le premier point, la règle de décision mise en œuvre sur les exploitations du réseau par les pathologistes de l INRA a permis de réduire assez considérablement les traitements en 2006 et en 2007 (2 traitements anti-oïdium et 7 anti-mildiou avec la règle de décision contre 5 et 11 dans la stratégie classique de l exploitation n 2 en 2007, par exemple). L étude de l efficacité des stratégies mises en œuvre n est pas discutée ici car laissée aux équipes de pathologistes, mais ils ont pu constater que 44 - Viticulture durable et environnement - Décembre 2007 Station Régionale ITV Midi-Pyrénées

Itinéraire A Itinéraire B Itinéraire C Itinéraire D Coût ( /ha) 2353 2123 2035 2198 Travaux en vert ( /ha) 951 721 633 796 % Itinéraire 40 34 31 37 Protection phytosanitaire ( /ha) 645 645 645 645 % Itinéraire 27 31 32 29 Récolte ( /ha) 351 351 351 351 % Itinéraire 15 17 17 16 Entretien du sol ( /ha) 175 175 175 175 % Itinéraire 7 8 9 8 Fertilisation ( /ha) 137 137 137 137 % Itinéraire 6 6 7 6 Autres ( /ha) 94 94 94 94 % Itinéraire 5 4 4 4 Comparaison du coût de différents itinéraires techniques sur une exploitation de l Entre-deux-Mers (2006 les résultats de la protection du vignoble étaient aussi bons avec la règle de décision que dans des itinéraires classiques. Par contre, en termes de coûts, on observe que la suppression de certains traitements n entraîne pas la suppression de toutes les charges liées aux facteurs de production qui sont engagés dans leur mise en œuvre. En effet, une part importante des charges de matériel (amortissement, entretien, assurances, ) est incompressible et doit de toute façon être supportée par l exploitation. Ces charges se reportent donc sur les autres opérations. Seule la charge en produits phytosanitaires associée à l opération disparaît. Sachant que l aversion au risque des viticulteurs est assez forte, le faible gain économique à l hectare qui résulte de la suppression d un traitement n est pas encourageant face au risque que le viticulteur estime prendre. En ce qui concerne les réductions de dose, le gain économique sur les charges en intrants est faible également. Les intrants représentent moins de 50% du coût d un traitement. Il serait possible de gagner, au mieux 25% du coût d un traitement. Chez les viticulteurs de notre réseau, le gain économique est même quasiment nul puisque les exploitants travaillent déjà à doses réduites, et qu il serait périlleux de les diminuer plus encore sans travailler sur l efficacité potentielle de doses si faibles. Les autres pratiques de production viticole respectueuses de l environnement Les travaux du projet ADD Vin ont été étendus aux autres opérations de l itinéraire technique viticole. Il est possible de comparer par exemple la différence de coût entre un épamprage chimique, dit classique et un épamprage mécanique, a priori plus respectueux de l environnement. Si on prend l exemple d une exploitation qui a pu tester les deux opérations sur des parcelles comparables, on observe une différence de coût entre les deux opérations. Le tableau semble indiquer au premier abord que le coût généralement ressenti comme plus élevé par les viticulteurs au sujet des pratiques respectueuses de l environnement se vérifie. L épamprage chimique semble moins cher, notamment car il est plus rapide (1h/ha contre 2h/ha). Pourtant, il convient de raisonner en terme d itinéraire technique, puisqu on s aperçoit ainsi que, pour une même efficacité technique sur la parcelle, deux épamprages chimiques (290 / ha) sont nécessaires là où un seul épamprage mécanique (163 /ha) est efficace. Le différentiel de coût n est alors pas négligeable (127 /ha). Il ne faut donc pas se contenter d étudier les coûts à la parcelle, mais de considérer également les itinéraires techniques. Ainsi, de la même manière que le qualificatif environnemental peut être appliqué aux opérations culturales (en fonction de leurs conditions de réalisation), il est possible de caractériser des itinéraires techniques environnementaux dans leur ensemble et de calculer leur coût. C est d ailleurs un projet de travail avec l ITV. Limites et perspectives Ces résultats sont à prendre très prudemment, puisqu ils ne concernent qu un petit nombre d exploitations viticoles et que les expérimentations ont été menées sur une région viticole particulière, l Entre-deux-Mers. Toutefois, la multiplication des années d expérimentation et l élargissement du réseau Station Régionale ITV Midi-Pyrénées Viticulture durable et environnement - Décembre 2007-45

Epamprage chimique ( /ha) Epamprage mécanique ( /ha) Main d oeuvre 23,50 34,80 Traction 31,93 47,28 Matériel 43,16 81,75 Produits 44,55 0 Autres 1,78 0 TOTAL 144,92 163,83 Comparaison du coût d un épamprage mécanique et d un épamprage chimique sur une exploitation de l Entre-deux-Mers (2006) pourront, nous l espérons, permettre d extrapoler les données au plus grand nombre d exploitations pour assurer du conseil en terme de changement de pratiques. La méthode OBC requiert un grand nombre d informations, notamment en ce qui concerne les temps de travaux et le détail de la comptabilité. Cela nécessite de travailler sur des exploitations ayant déjà mis en place ou souhaitant mettre en place une traçabilité sur leur exploitation. Cela n est évidemment pas généralisable à toutes les exploitations. Toutefois, il serait souhaitable d agrandir le réseau expérimental, à d autres régions par exemple, afin de disposer de plus de données et de pouvoir les extrapoler aux exploitations souhaitant évaluer le coût d un changement de pratique mais ne disposant pas des informations nécessaires pour calculer des coûts réels. Il s agirait alors de produire des références. On parle alors de coûts standards établis par type d exploitation. Contrairement aux coûts standards qui peuvent circuler aujourd hui et sont calculés à dires d expert, ces coûts standards seraient basés sur des observations réelles sur le terrain. Nous avons d ailleurs déjà pu constater dans les données recueillies que les coûts réels obtenus sont parfois très éloignés des standards à dires d experts en fonction des caractéristiques des exploitations. Toujours dans l esprit de faciliter l accessibilité de ce type d étude à un large nombre d exploitants et conseillers, l équipe travaille également à la mise en place d outils de gestion et de traçabilité afin de faciliter l enregistrement des informations nécessaires à la mise en place de la méthode. Enfin, le coût n est pas le seul élément d appréciation de la performance d une entreprise viticole. Il convient maintenant de s intéresser à la possible valorisation des pratiques respectueuses de l environnement. Cette dernière peut passer par plusieurs voies : - subventions de type Mesures Agro Environnementales, calcul à partir de références sur le coût des pratiques plutôt qu à dires d experts, - valorisation par les consommateurs (analyse de la disposition à payer des consommateurs), - valorisation par les circuits de distribution. Ces travaux seront menés dans le cadre de la suite du même projet ADD Vin. 46 - Viticulture durable et environnement - Décembre 2007 Station Régionale ITV Midi-Pyrénées