Fellow Ashoka Belgique
Ashoka: Et si vous commenciez par me parler un peu de votre famille et de l endroit où vous avez grandi? Arnoud: J'ai grandi à Bilzen, Limburg, dans une famille heureuse. Ma mère était une institutrice maternelle mais a décidé de rester à la maison pour prendre soin de mon frère et de moi après ma naissance. Mon père était un juge à la Cour de Hasselt. Malheureusement, mon père est décédé à l'âge de 43 ans. Quand il est mort, j'avais 12 ans et mon frère, 13 ans. Heureusement, nous avons une maman courageuse qui a lutté dur pour nous offrir toutes les opportunités dont nous avions besoin. À l'école secondaire, je n'étais pas parmi les meilleurs élèves parce que les professeurs préféraient les enfants qui se conformaient et ne dépassaient pas les limites. Se former une opinion et avoir l'esprit d'entreprise étaient punis d'une détention; je suis donc devenu un expert en la matière J. Ashoka: Quelles sont quelques-unes de vos expériences personnelles qui, depuis votre enfance, ont influencé votre vision du monde? Arnoud: Perdre mon père juste avant la puberté a accéléré le processus d'être confronté à des questions existentielles, le but de la vie et la justice (je me suis senti démuni). D'une certaine façon, elle accélère la nécessité de grandir, d'assumer une responsabilité. Je suis certain que cela a déterminé mes choix dans la vie. À 21 ans, comme étudiant, j'ai fait mon stage en Colombie. Après avoir été confronté à la réalité des enfants des rues et des personnes sans-abri, j'ai décidé de ne pas accepter la façon dont la société traite ces gens et à consacrer mon temps à me joindre à eux dans leur lutte pour la reconnaissance.
Ashoka: En quoi votre approche est-elle distincte et originale? Que faites-vous de différent des autres acteurs pour remédier à ce problème? Arnoud: Augmenter le nombre d'enfants placés dans des programmes de désintoxication, le plus souvent, ne fait qu augmenter le nombre d'enfants qui les abandonneront plus tard. Le nombre d'enfants qui s'intègrent avec succès dans la société reste minime. Mais il serait trop facile de conclure que tous les programmes de désintoxication échouent à cause de leur qualité. C'est une histoire plus complexe. Si nous voulons en accroître l'efficacité, il sera essentiel de trouver le chaînon manquant entre le gamin dans la sous-culture de la rue et la société. Et ce lien est l'estime de soi. Se lancer un processus de réadaptation ou de réinsertion est une tâche ardue pour un enfant des rues. Sans de l'engagement et de la persévérance, ils ne changeront pas. Et une décision consciente sur un objectif clair à l'avenir constitue une condition absolument nécessaire pour développer ces caractéristiques et réussir. Souvent, le processus d'intégration est entamé par des travailleurs sociaux et des éducateurs de rue. Dans ces cas, le manque absolu de motivation intrinsèque garantit presque toujours les futurs d'abandons. Alors que pouvons-nous faire pour aider les enfants à parvenir eux-mêmes à une décision consciente sur une stratégie de progrès et de prospérité? La réponse à cette question est de commencer à stimuler leur estime d eux-mêmes.
Arnoud: Le passé d'extrême pauvreté, de violence, de sévices et d'exclusion de la plupart des enfants se traduit par une estime de soi gravement endommagée. Une des conséquences est une prise de conscience rabaissée de l'identité qui se traduit par l'incapacité de voir les opportunités dès qu'ils quittent leur propre sous-culture habituelle. Nous devons accroître les initiatives qui s'adressent aux enfants des rues grâce à des approches éducatives non formelles qui sont toutes examinées par les critère sacré suivant: cela affecte-t-il l'estime de soi de l'enfant de manière positive? Nous avons ainsi conçu une école mobile. C'est un tableau noir sur roues qui peut être tiré dans les rues comme une petite remorque. Lors des rencontres avec les enfants, vous faîtes glisser la boîte de 1m50 jusqu'à ce qu'elle devienne un outil éducatif de 6m de long spécialement conçu pour la chaussée. Une sélection de plus de 300 jeux éducatifs que transporte la remorque peut être connectée aux tableaux noirs. L'approche pédagogique de l'école mobile ne se concentre pas sur les problèmes de l'enfant. Au contraire, tous les jeux sont conçus pour détecter et développer ses talents. L'incapacité des sociétés à voir les possibilités des enfants des rues est frappante. Pouvezvous nommer certains de leurs points forts?
Arnoud: Qu'arriverait-il si vous releviez le défi de rivaliser avec un enfant de rue âgé de 12 ans pour survivre le plus longtemps dans les rues de Bogota par exemple? Compte tenu du fait que vous auriez à lutter avec les mêmes armes, le gamin vous vaincrait très probablement. En travaillant sur l'école mobile, nous sommes devenus fascinés par les aptitudes, les attitudes et les mécanismes d'adaptation de l'enfant de la rue pour gérer le contexte des rues. Les 15 ans d'expérience combinée avec la recherche nous ont aidés à concevoir un modèle des compétences des rues: il s agit d un ensemble de compétences primordiales lorsque vous devez faire face à un contexte d'incertitude, de risque et de crise. Inspirés par les enfants de la rue et en collaboration avec eux, nous avons commencé l'entreprise «Streetwize». La crise financière vient de se manifester et nous sommes devenus conscients de la nécessité d'avoir plus d'employés dits «streetwise» dans la plupart des entreprises. Nous avions 15 ans d'expérience dans l'apprentissage des processus, de nombreux histoires de rues et exemples inspirants et un modèle de compétences de rue appuyé académiquement. Nous étions prêts pour la formation et le consulting. Jusqu'alors les activités de dépendaient complètement des œuvres de bienfaisance.
Arnoud: Nous avons toujours dit aux enfants qu'ils ne doivent pas s'attendre à ce que nous leur donnions du poisson. Apprendre à en attraper un soi-même est l'expression courante dans notre travail. Avec le lancement de l'entreprise Streetwize, nous sommes passés d'un modèle d'organisme à but non lucratif à une société de profit qui investit 100 % de ses profits dans les projets de. Ceci nous a aidés à boucler la boucle. Et croyez-moi, dire à un enfant des rues d'attraper lui-même un poisson est bien plus facile si vous le faites vous-même. Ashoka: Comment faites-vous pour communiquer vos idées aux autres et les inspirer à partager votre vision? Pourriez-vous donner des exemples où votre travail a inspiré ou habilité des individus à devenir des agents de? Arnoud: Par les médias sociaux, conférences, lettres d'informations... Nous faisons une campagne annuelle «la Stoepkrijtactie» dans les écoles primaires. Cette année nous avons déjà touché 9 000 enfants. De plus, il y a des milliers de personnes viennent se former via Streetwize afin de développer leurs compétences en leadership et leurs talents grâce à aux enseignements tirés de notre travail dans les rues. C est une approche de valeur partagée.
Arnoud: A côté de la communication en ligne, des ateliers et des formations, nous avons écrit le livre StreetwiZe. Il a été publié en Belgique par Lannoo Campus et Academic Services aux Pays- Bas. Et puisque que les ventes sont très bonnes, il va bientôt être traduit en anglais. Ashoka: Qu est-ce qu un agent de pour vous et comment le devient-on? Arnoud : Un acteur de est un entrepreneur qui met l'accent sur une possibilité de faire de la société un meilleur endroit. À mon avis, un vrai acteur de ne se concentre pas sur le problème mais sur la possibilité offerte. Un acteur de est pratique, agit et utilise le concept de tâtonnements pour apprendre et progresser. Ashoka: Pourquoi votre idée ou votre travail vous tient-il tant à cœur? Arnoud: Parce qu exclure les enfants est un acte cruel et criminel. Et si je m'en détournais, je serais coupable. Ashoka: Pouvez-vous partager quelques exemples de personnes qui ont été inspirées ou habilitées par le biais de votre travail pour devenir des faiseurs de? Arnoud: Je ne les connais pas, mais en toute modestie, je suis sûr qu'elles existent J.
Ashoka: Quel soutien le réseau Ashoka a-t-il apporté à votre parcours? Arnoud: Ashoka a offert la plate-forme pour nous positionner comme de vrais entrepreneurs. Ils nous rassemblent dans un mouvement que la société ne peut plus ignorer. Au sein du mouvement, vous rencontrez les entrepreneurs sociaux les plus influents et des innovateurs qui remettent en question votre modèle, votre produit et votre approche selon leurs propres expériences. Nous nous inspirons les uns des autres et nous lançons des défis les uns aux autres pour atteindre le niveau supérieur. Merci beaucoup Arnoud!