LES INSTRUMENTS PREVUS PAR LA LOI 10-95 SUR L EAU POUR LA PROTECTION DES RESSOURCES EN EAU CONTRE LA POLLUTION S.E.E.E(1)

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LES INSTRUMENTS PREVUS PAR LA LOI 10-95 SUR L EAU POUR LA PROTECTION DES RESSOURCES EN EAU CONTRE LA POLLUTION 1- INTRODUCTION L eau est plutôt rare au Maroc. Estimées à prés de 730 mètres cubes par habitant et par an, les ressources actuelles du pays en eau naturelle sont en deçà du seuil critique indiquant l apparition de pénuries et de crises latentes (soit 1.000 m3/habitant/an). A cette limitation des ressources en eau s ajoute la dégradation de la qualité de l eau suite à l augmentation de la pollution. Afin de rendre les déversements conformes aux exigences de protection de la santé publique et de l environnement, une réglementation complète (incluant les conditions de déversement ainsi que des programmes de surveillance et de sanctions) a été définie en étroite collaboration avec les départements et les différents ministères en charge du dossier. Le fruit de cette synergie a donné naissance à la loi n 10 95 sur l eau dont la quasi-totalité des textes d application ont été publiés. Cette loi met au centre de son dispositif une entité administrative, l Agence de Bassin hydraulique (ABH), dédiée à l accomplissement de ces mécanismes. Cependant, et ce, quelle que soit la perfection de la réglementation relative aux ressources en eau, cette protection ne peut être assurée sans une adhésion de l ensemble des entités génératrices de la pollution. Autrement dit, sans consciences collective de tous les acteurs économiques, il ne peut exister d actions efficaces renversant le processus de dégradation déjà en cours. Les grands axes de la loi n 10-95 sur l eau Et c est conscient de cet impératif que la loi n 10 95 a été pensée. Au-delà de l aspect répressif nécessaire pour faire respecter le système, elle a accordé une large place à la prévention et l accompagnement des usages, notamment grâce à la proximité et la disponibilité des ABH. En effet, aider financièrement les acteurs économiques à améliorer leurs équipements, comme les responsabiliser au respect des valeurs limites de rejets via l octroi d une autorisation et le paiement d une redevance symbolique sont autant d axes de collaboration que l Etat souhaite privilégier avec les usagers. 1- Secrétariat d Etat chargé de l Eau et de l Environnement. S.E.E.E(1) 40 Toujours dans cette optique de mise à niveau, la loi impose une demande d autorisation pour toutes personnes prévoyant un déversement d eaux usées. Cette autorisation délivrée par l ABH est obligatoire, permettant ainsi de contrôler la mise en conformité de l usager avant le lancement de ses activités. L autorisation de déversement Tout déversement dans les eaux superficielles ou souterraines doit être autorisé par l Agence du bassin hydraulique (ABH), qu il soit d origine publique ou privée. Cette même agence contrôle par la suite le respect des prescriptions contenues dans l autorisation. Autoriser pour mieux préserver Pour mieux contrôler le déversement des eaux usées et atténuer l impact de la pollution, l Etat a confié l octroi des autorisations de déversement à l Agence du Bassin Hydraulique (ABH). En impliquant l ensemble des acteurs, la loi sur l eau pose les éléments d une gestion concertée. Cette proximité a pour but d inciter à la responsabilité citoyenne, afin que les usages adoptent des comportements responsables quant à leurs déverses d eaux usées. En effet, les gestionnaires du réseau d assainissement peuvent aujourd hui se prévaloir d un interlocuteur qui connaît leur problème et se propose de les aider à les résoudre, dans le respect des lois. Cette initiative de rapprochement et de contrôle via l ABH est primordiale, puisqu il s agit de mieux protéger les ressources hydriques du pays mais aussi assurer une meilleure protection aux citoyens ainsi qu au milieu environnant. Ainsi l autorisation fournie par l ABH est obligatoire. Elle est nominative et à durée déterminée, mais aussi révocable à tout moment pour motif d intérêt public. Elle fixe essentiellement les valeurs limites de rejets. La formalisation de ces procédures permet ainsi mieux en contrôler l évolution, pour le bien du consommateur avant tout. Comment obtenir une autorisation? Le décret n 2-04-553 du 24 janvier 2005 assujettit les demandes d autorisation pour les rejets à une procédure administrative menée par l ABH. Le dossier de la demande doit renseigner sur l identité du demandeur, la nature et le volume du déversement, ainsi que son emplacement, en plus d une note technique sur les détails du dispositif d épuration prévu.

Le demandeur doit également disposer d un acte justifiant de la libre disposition du fond sur lequel les ouvrages ou installations doivent être réalisés. Une fois le dossier remis, une enquête publique est confiée à une commission spéciale composée de représentants des différents ministères concernés par les déversements (Intérieur, Environnement, Eau, Institut National de recherche Halieutique, Agriculture, Santé, ), ainsi que des représentants des différentes circonscriptions administratives touchées par ces déversements (communes, préfectures et provinces). Cette enquête ne peut excéder trente (30) jours et prend l avis de tous les acteurs de la commune où le déversement aura lieu. Au vu du dossier d enquête publique, le directeur de l ABH décide alors de suite à réserver à la demande d autorisation. Dès lors l autorisation acquise, l usager peut en toute légalité débuter ses activités de déversement mais dans les limites de plusieurs indicateurs prédéfinis de pollution. Ces indicateurs appelés VLR (valeurs limites de rejet) sont fixées par des arrêtés conjoints de département en charges et ont pour but principal de protéger les usagers de risques sanitaires et écologiques importants. Les Valeurs Limites de Rejet (VLR) Tout rejet est soumis à autorisation et par conséquent au respect des valeurs limites de rejets (VLR). Ces dernières se basent sur des indicateurs de pollution à ne pas dépasser tels que la température, le PH, la matière organique et les métaux lourds, Elles sont révisées tous les dix (10) ans ou à chaque fois que la protection du milieu l exige. Limiter pour mieux préserver Conséquence directe de l accroissement des activités économiques et sociales que connaît le pays, le rejet direct ou indirect des eaux usées est devenu un des facteurs majeurs de dégradation des ressources hydriques. Seulement 13% des eaux usées sont épurées dans la totalité du pays en 2008. Or, selon une étude de la Banque mondiale, une estimation des coûts de dégradation environnementale a démontré que le non traitement des eaux usées avait des conséquences graves non seulement sur l écologie mais également sur la santé des populations locales. 41

En effet, dans certaines régions du pays les eaux de surface sont utilisées sans traitement pour la lessive, la cuisine mais aussi pour la production de biens affectant directement la santé des citoyens. Ces risques se traduisent alors par l augmentation des maladies transmissibles telles que, les maladies hydriques comme le choléra, la fièvre, la typhoïde, l hépatite virale épidémique, les maladies dermiques, etc. en outre, cette dégradation du milieu hydrique engendre une hausse de la mortalité des poissons, ainsi que l arrêt de stations de traitement d eau potable. Autant de menaces graves qui imposent l intervention de l administration et de l ABH pour mieux contrôler ces effluents. Comment sont fixées ces VLR? Les VLR sont fixées par des arrêtés conjoints des départements dons la mission est de veiller à la protection des ressources hydriques et aussi de défendre les intérêts des industriels. Ces derniers ont tenu de nombreuses réunions au Ministère de l Industrie, en présence des représentants des associations professionnelles, pour concilier au mieux la protection des ressources hydriques aux intérêts des industriels. Ces valeurs peuvent être générales ou spécifiques selon les activités. Les valeurs limites spécifiques de rejets des ressources, papeteries et domestiques sont déjà entrées en vigueur, alors que celles des cimenteries, textile et des industries de traitement de surface sont en cours. L application de ces VLR n est pas immédiate pour les installations déjà opérationnelles, qui bénéficient d un délai de grâce jusqu en 2011 pour s y conformer. Par contre, les unités nouvelles qui s installent sont immédiatement soumises eu respect des VLR. Mais lorsque les conditions d autorisation ne sont pas respectées par l usager, la loi a mis en place un système de sanctions administratives allant de la simple amende à la peine de prison pour toute transgression aux dispositifs aux dispositifs réglementant la déverse d eau ci-dessous détaillées. Sanctions administratives Le déversement des eaux usées fût un acte longtemps ignoré mais aujourd hui soumis à une réglementation précise et adaptée. L enjeu environnemental étant prioritaire, des sanctions administratives voire pénales sont prévues en cas de non-respect des dispositifs de loi 10-95 sur l eau. Ce nouveau cadre réglementaire, qui jongle entre la prévention et la répression, a pour objectif d accompagner au mieux le pays à relever les défis actuels liés à l approvisionnement en eau. De l amende à la peine de prison Pour veiller à la qualité des ressources en eau et la santé des populations, la loi a prévu plusieurs dispositions qui réglementent la déverse de rejets polluants. Des sanctions administratives (retrait de l autorisation de déversement ) ou judiciaires (amendes, emprisonnement ou les deux à la fois) sont prévues en cas de non respect de ces dispositions. Le contrôle de la qualité de l eau est effectué par des agents assermentés, relevant des départements ministériels concernés (SEEE, Intérieur, Agriculture, et Santé), ainsi que des agences de bassins hydrauliques. Quiconque met ces agents dans l impossibilité d exercer leurs fonctions, est puni de sanctions allant de la simple amende à une peine d emprisonnement. Ainsi aucun déversement dans une eau superficielle ou une nappe souterraine susceptible d en modifier les caractéristiques physico-chimiques ne peut être fait sans autorisation préalable de l agence de bassin hydraulique. En cas d infraction révélée, les contrevenants s exposent à une peine d emprisonnement pouvant aller d un (1) mois à un (1) an et d une amende de 1.200 à 5.000 dirhams. Ces deux peines peuvent être cumulées, sachant que les transgresseurs, s ils sont nombreux, peuvent être déclarés solidairement responsables du paiement des amandes et frais de justice liés aux infractions. De même qu il est formellement interdit de laver le linge ou autres objets dans les eaux du domaine public, comme de s y laver ou se s y baigner (humains et animaux), sous peine de payer une amende allant de 240 à 500 dirhams. Quand aux rejets des aux usées ou déchets solides (matières insalubres, bêtes mortes ) dans les oueds ou autre canaux publics et nappes souterraines, l amende peut aller de 1.200 à 3.000 dirhams. L agence du bassin hydraulique peut également faire procéder aux frais du contrevenant et après mise en demeure restée sans effet, à l enlèvement ou à la destruction des dépôts et épaves gênant la circulation, la navigation ou le libre écoulement des eaux. Dans cette même optique de prévention et de répression, l agence du bassin hydraulique peut faire fermer d office les prises d eau qui seront reconnues sans droit ou auraient été faites sans autorisation. Comment se constate l infraction? Les agents de contrôle ont accès à tout ouvrage, installation de prélèvement ou de déversement. Ils peuvent requérir du propriétaire ou de l exploitant la mise en marche des installations aux fins d en vérifier la conformité. Les infractions peuvent être constatées par plusieurs procédées, notamment le prélèvement d échantillons. Ces prélèvements donnent lieu, séance tenante, à la rédaction de procès-verbaux. Ces derniers doivent comporter les détails sur les circonstances de l infraction, les explications de l auteur et les éléments faisant ressortir la matérialité des infractions. 42

L agent verbalisateur, s il est en présence du propriétaire ou de l exploitant, doit l informer de l objet du prélèvement et lui remettre un échantillon sous scellé. Les procès-verbaux sont alors transmis dans un délai de dix (10) jours aux juridictions compétentes. En cas de flagrant délit, les agents auront le droit d arrêter les travaux et de confisquer les objets et choses dans l usage constitue une infraction. Une fois cette autorisation accordée, l usager doit obligatoirement s acquitter d une redevance de déversement s appuyant sur le principe «pollueur payeur». Cette dernière a pour but de responsabiliser les acteurs économiques sur à la fois la qualité et la quantité de leurs rejets et pose ainsi les bases d une gestion solidaire et participative des ressources hydriques. La Redevance de déversement Le principe «pollueur payeur» s appuie sur l équation selon laquelle plus un utilisateur (public ou privé) pollue, et plus il paiera de redevance. Cet instrument financier instauré par la loi a pour but de responsabiliser les usagers sur leur débit et la qualité de leur rejet. Polluez Moins, Payez Moins! Ce principe plus connu sous le nom de «pollueurpayeur» a déjà fait ses preuves dans d autres pays, et a largement contribué à responsabiliser les usagers sur leur rejet. C est un principe essentiel fondant les politiques environnementales dans les pays développés. Le taux fixé de cette redevance est volontairement modeste, et n augmentera que très progressivement. En effet, l administration a voulu en faire plus un élément incitatif à une conduite citoyenne qu un élément de sanction. En soumettant tout déversement à autorisation et au paiement d une redevance, l administration cherche à réduire les coûts de pollution en influant sur le comportement de l usager, qui à long terme doit se responsabiliser s il ne veut pas payer plus. Les agences des bassins hydrauliques constituent désormais le cadre adéquat pour concrétiser le principe de gestion solidaire et participative des ressources hydriques par les usagers, l administration et les collectivités locales. C est pourquoi cette redevance ne peut être assimilée à un impôt ou une taxe, dans le sens où on ne la paie que si l on consomme le service associé. Le but de cette mesure est d instaurer un principe découlant de l éthique de responsabilité, en faisant prendre en compte par chaque acteur économique les externalités négatives de son activité. 43

Comment ça se calcule? (Article 52 da la loi n 10-95 sur l eau) Définit par le décret n 2-04-553 du 24 janvier 2005, les taux de redevance ont été fixés par arrêté conjoint des autorités gouvernementales en 2006. Comment alors se calcule la redevance de déversement? Pour le déversement domestique, il suffit de multiplier le volume d eau consommée par le taux de redevance applicable, après avoir pris en considération le rendement des dispositifs d épuration existants en matière de réduction de la pollution. 44

Par contre, pour les agglomérations rurales de plus de mille (1000) habitants, ne disposant pas d un dispositif d assainissement autonome adéquat et fonctionnel, la redevance forfaitaire de déversement domestique est fixée à cinq cent (500) dirhams par an et est recouvrée directement auprès des communes concernées. En ce qui concerne les déversements industriels, la redevance se calcule selon la quantité de pollution exprimée en nombre d unité de pollution, multiplié par le taux de redevance après avoir pris en considération le rendement des dispositifs d épuration existant en matière de réduction de la pollution. En l absence de mesure, le nombre d unités de pollution contenue dans les déversements d eaux usées industrielles est estimé en multipliant les grandeurs caractéristiques de l activité génératrice de l eau usée industrielle par les coefficients spécifiques de pollution de celle activité. Les aides Financières Les agences de bassins hydrauliques (ABH) peuvent fournir, en fonction des moyens financiers dont elles disposent, des aides financières aux personnes physiques ou morales qui entreprennent des investissements et qui en feraient la demande. Ces investissements sont destinés à prévenir la pollution des ressources en eau via le réaménagement ou la construction d infrastructures. Selon la disponibilité des fonds et en fonction des priorités de l agence, tous les usagers de l eau peuvent ainsi être soutenus autant d un point de vue financier que technique dans leurs opérations d aménagement, d entretien, ou de protection du domaine public hydraulique. Aides à la mise en conformité Conscient du manque de moyens face à ce défi majeur qui est la protection du domaine public hydraulique, l administration a institué le système de la redevance afin de constituer un fond d aide qui bénéficierait autant à la collectivité qu aux particuliers. C est à l ABH, dont la gouvernance est orientée vers l information, la sensibilisation et la formation, que revient la mission de délivrer ces aides et de s assurer de leurs exécutions selon les critères requis. En effet, les expériences dans les pays voisins ont démontré que pour une meilleure préservation des ressources en eau, il fallait investir dans les techniques économes, sécurisées et moins polluantes. C est dans cette optique que ces aides sont accordées, aussi bien pour le développement des ressources en eau que pour leur protection contre la pollution, et concernent aussi bien les projets d études, de travaux et d équipement. En effet, en invertissant dans l épuration des eaux usées où le pompage jusqu au lieu d utilisation, l ensemble des usagers pourront ainsi profiter d une économie d eau conséquence et aussi prévenir la pollution des ressources hydriques. Mais ces investissements sont conséquentes, alors que le produit da la redevance est modeste. D où la nécessité d inciter les consommateurs à se responsabiliser sur leur propre consommation, pour qu à long terme, l ensemble soit en conformité. Comment postuler aux aides de L ABH? (Articles 20 et 21 de la loi n 10-95 sur l eau) Les ABH s engagent à accorder des prêts, aides et subventions à toute personne prête à investir dans l aménagement ou la préservation des ressources en eau. Pour cela, les projets d études, de travaux d équipement doivent répondre à des critères d éligibilité fixés par le conseil d administration de chaque agence de bassin sur proposition du directeur de cette agence. Toute demande est déposée à l ABH concernée accompagnée d un dossier comportant un descriptif précis de l opération à réaliser, son coût prévisionnel ainsi qu une étude de faisabilité technique, économique et financière. Lorsque le directeur de l agence juge que l aide financière peut être accordée, il la soumet au conseil d administration de l agence qui doit donner son approbation. La convention d accord doit être signée par le bénéficiaire et le directeur de l agence. En cas d inexécution par le bénéficiaire de l aide, les avantages prévus par celle-ci sont retirés et les sommes perçues sont restituées à l agence. CONCLUSION L objectif principal de la loi n 10-95 l eau est non seulement de préserver les ressources hydriques existantes mais également de fournir des quantités supplémentaires en améliorant la qualité de déverses et donc leurs réutilisations. Cette politique ne pourra aboutir que dans le cadre d une prise de conscience collective d une ressource hydrique menacée pour les générations à venir. Une course contre la montre est en effet engagée, avec les facteurs aggravant que sont la croissance des centres urbains et industriels. C est pourquoi la responsabilité de chacun est ici engagée, dans le cadre d une réglementation étatique qui se veut privilégier la prévention et la collaboration. Au Maroc, la loi n 10-95 sur l eau pose les bases d une association pour un avenir meilleur, où l accès à une eau pure restera un droit humain fonda mental respecté. 45