Journées Mixtes de Toxicologie SMTCA-SFTA M A R R A K E C H



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Journées Mixtes de Toxicologie SMTCA-SFTA M A R R A K E C H Screening toxicologique # Principes et valeurs prédictives # Rédaction : Pascale VISINONI - LIPS Toulouse Photos : SMTCA et Véronique DUMESTRE TOULET Les 9, 10 et 11 novembre derniers se sont déroulées à Marrakech les «Journées mixtes de Toxicologie» organisées par la Société Marocaine de Toxicologie Clinique et Analytique (SMTCA) en partenariat avec la Société Française de Toxicologie Analytique (SFTA). Cette manifestation a réuni une centaine de scientifiques en provenance de diverses régions du Maghreb et d Europe dans le centre de vacances «COS/ONE» ou «Village de l Electricien» situé dans la banlieue résidentielle de Marrakech. Lors de la première journée divers aspects de la toxicologie ont été abordés. La conférence introductive de B. MEGARBANE, (Service de Réanimation Médicale et Toxicologique de l hôpital

Lariboisière à Paris), a rappelé les principes généraux de prise en charge des intoxications aigües. Ces intoxications, le plus souvent médicamenteuses et volontaires évoluent en fonction des modes de prescriptions et de la mise sur le marché de nouvelles molécules. L examen clinique initial avec l évaluation du «toxidrome» ou syndrôme d origine toxique est d une importance capitale pour préciser le tableau clinique et biologique et mettre en place une thérapie d urgence adaptée. A l admission, les effets biologiques du toxique sont le facteur le plus important à prendre en compte et à mesurer. L analyse toxicologique ne vient qu en complément de l approche clinique. En effet, malgré les indications nécessaires qu elle apporte, elle nécessite du personnel formé, notamment au niveau de l interprétation des résultats qui demeure problématique. De manière générale, l importance de la toxicocinétique a été rappelée, ainsi que les différents types de traitements à instaurer (symptômatiques, évacuateurs, antidotes) et le rôle des centres anti-poisons et de toxicovigilance souligné, notamment dans l identification des situations à risque, le recensement de nouveaux toxiques et la mise en place de moyens de prévention. A l hôpital Lariboisière, malgré une prise en charge optimisée, le pourcentage de décès est encore de 28 %. Les conférences qui ont suivi ont mis en évidence : - Le problème des intoxications (mortelles, accidentelles et suicidaires) chez l adolescent au Maroc (A. KHATTABI Centre Anti Poison du Maroc) qui sont en augmentation notable depuis 2000. La tranche d âge des 15-19 ans est la plus touchée avec une prédominance féminine et un caractère saisonnier marqué, 40 % des accidents ont lieu en été (relation avec l échec scolaire évoquée). Le lieu est souvent à domicile, le mode d administration majoritaire étant la voie orale. L intoxication fatale accidentelle est plus importante chez les 10-14 ans. Les substances mises en causes les plus fréquemment rencontrées dans les intoxications volontaires sont les pesticides, la paraphénylène diamine (teinture capillaire) et les médicaments ; dans les intoxications accidentelles ce sont essentiellement les envenimations (scorpions), les plantes, le monoxyde de carbone qui sont en cause. Ce dernier est la 1 ère cause de décès accidentel collectif. En parallèle, le problème des décès consécutifs aux tentatives d avortement chez les femmes a été évoqué. En ce qui concerne les tentatives suicidaires aux médicaments de manière générale, on retrouve une prédominance féminine et un maximum de cas l été. Les médicaments les plus fréquemment impliqués sont les psychotropes, notamment les benzodiazépines (F. ABOUALI- Centre Anti Poison du Maroc). Certains produits à usage agricole, tel le phosphure d aluminium, raticide fumigant, est souvent responsable d intoxications accidentelles graves au Maroc ou de tentatives d autolyse (S. ACHOUR - Centre Anti Poison du Maroc). - La gravité des intoxications au méprobamate, rappelée par une étude à propos de 124 observations confortant la possibilité d un risque toxique majeur pour des concentrations sanguines supérieures à 80 mg/l et l intoxication par certaines plantes méditerranéennes, en particulier le redoul, utilisé au Maroc pour le tannage des peaux, dont les fruits peuvent être confondus avec les mûres, et dont l ingestion peut avoir des conséquences graves : décès fréquents, intoxication du bétail (J. ARDITTI Centre Anti Poison de Marseille). - La prise en charge des patients intoxiqués, dont le traitement symptomatique doit être réalisé en priorité et l administration d antidotes disponibles la plus rapide possible. Un récapitulatif des principaux a été évoqué. Ce sont : les fragments d anticorps antidigitaliques pour les intoxications aux digitaliques (immunotoxicothérapie), l hydroxocobalamine pour les intoxications cyanhydriques, la N-acétylcystéïne pour les intoxications au paracétamol, le flumazénil pour les intoxications médicamenteuses, en particulier aux benzodiazépines, le fomépizole pour les intoxications à l éthylène glycol et le méthanol. Toutefois, la disponibilité, le coût et le stockage des antidotes reste problématique notamment dans les pays en voie de développement, plus particulièrement lors des attentats chimiques (I. ALAOUI MOUSTAIN Samu Gendarmerie Royale du Maroc).

La deuxième partie de la matinée a porté plus particulièrement sur la toxicologie médico légale avec une conférence introductive de J.C. ALVAREZ, (hôpital Poincaré de Garches), sur l intérêt et la nécessité d une collaboration étroite entre médecins légistes et toxicologues. Il a été rappelé, notamment en ce qui concerne les prélèvements biologiques destinés à l analyse toxicologique, l importance de certaines opérations lors des autopsies ou levée de corps. Dans le premier cas, il est nécessaire de prélever tous les milieux, dans la mesure du possible, certains obligatoires quel que soit le contexte (sang, urine, contenu gastrique ), d autres facultatifs ou alternatifs (humeur vitrée, bile, cheveux ) ; dans le second cas, le prélèvement dans la veine sous-clavière doit être privilégié, ceci afin de limiter la contamination du sang cardiaque par le contenu gastrique. Le conditionnement doit être adapté et le prélèvement comporter certains critères d identification (nom, site anatomique de prélèvement, lieu, nom du médecin etc) ; le mode de conservation doit être en adéquation avec la nature de l échantillon (cheveux par exemple conservés température ambiante). Le non respect de ces règles peut parfois être préjudiciable au diagnostic des causes du décès. En ce qui concerne les analyses toxicologiques à effectuer, il a été rappelé l existence en France, d une «analyse toxicologique de base» comprenant diverses opérations à réaliser en laboratoire et définies par une note de la Chancellerie (en date du 4/08/2006). L importance de la relation entre les conclusions de l autopsie et les résultats de l analyse toxicologique a été soulignée : dans 86 % des cas, il y a confirmation des conclusions de l autopsie, dans 14 % l analyse toxicologique ne le permet pas, avec 3 % de décès restant inexpliqués. Par la suite, la conférence de Monsieur H. WADIFI, (Service de médecine légale de Casablanca), à propos des prélèvements effectués dans différentes morgues municipales et hospitalières du Maroc a mis en évidence une grande disparité entre les différents établissements, plus particulièrement au niveau des équipements pour la conservation. Certaines morgues ne disposent d aucun appareil de réfrigération Deux exemples d intoxications mortelles, l un par la gammabutyrolactone ou GBL, précurseur de l acide gammahydroxybutyrique ou GHB (M. DEVEAUX Toxlab Paris), le second par le dichlorvos, insecticide organophosphoré (JC. ALVAREZ CHU R. Poincaré Garches) ont illustré cette session, suivis par un rappel des substances psychoactives à rechercher dans les milieux biologiques et plus particulièrement les cheveux en cas de soumission chimique. Les faibles concentrations circulantes des composés mis en cause, les prélèvements biologiques réalisés souvent tardivement impliquent obligatoirement la mise en œuvre de techniques analytiques performantes de type HPLC/MS/MS et/ou GC/MS/MS (M. VILLAIN Chemtox Illkirch). La session suivante, concernant plus particulièrement la toxicologie analytique, a débuté par une conférence de P. MURA, (Centre Hospitalier Universitaire de Poitiers), à propos de l exploration biologique des cannabinoïdes, devenue pratique courante pour les toxicologues analystes en raison de l implication récurrente du cannabis dans les accidents de la route, du travail mais aussi dans certains crimes et délits. La responsabilité de l usage de ce composé est souvent mise en cause, d où la nécessité de pouvoir disposer de techniques performantes pour caractériser une imprégnation cannabique. La mise en évidence du THC dans le sang est indispensable pour démontrer une influence quelconque, dans la mesure où les effets cliniques et la présence éventuelle de principes actifs sont mal corrélés. En post mortem, (d après une étude réalisée sur le porc), le cerveau peut être le milieu alternatif pour la mise en évidence des cannabinoïdes, en particulier en l absence de prélèvement sanguin. Les conférences qui ont suivi ont montré l utilité et la nécessité de disposer de la technique de chromatographie en phase liquide couplée à la spectrométrie de masse (LC/MS, LC/MS/MS) en toxicologie analytique notamment en ce qui concerne :

- le screening toxicologique, la confirmation de la présence de certains composés et leur dosage (K.AMOURA Waters St Quentin en Yvelines), - l intérêt de disposer d étalons deutérés pour l analyse quantitative de dérivés cocaïniques en LC/MS/MS, en particulier lors de la validation de méthode. L absence de certains étalons isotopiques ayant entraîné d importantes variations, notamment au niveau de la robustesse de la méthode (T.GOUGNARD C.H.R de la Citadelle Liège), - la mise en évidence dans les cheveux de l éthyl glucuronide, marqueur de l éthylisme chronique, petite molécule en concentration infinitésimale (0,5 % de l alcool transformé) dans ce milieu (V.CIRIMELE Chemtox Illkirch), - la caractérisation des hétérosides toxiques du chardon à glu, plante du pourtour méditerranéen, en vente chez les herboristes pour ses propriétés cicatrisantes, diurétiques. Elle est utilisée comme piège à oiseaux et comme gomme à mâcher, et responsable d intoxications accidentelles (souvent chez les enfants), rarement criminelles mais dans 52 % des cas mortelles (L.ROMEUF Laboratoire d Analyses Toxicologiques La Voulte s/rhône / A.STAMBOULI Laboratoire de Recherches et d analyses Techniques et Scientifiques de la Gendarmerie Royale Rabat). Une série d intoxications de chiens par le carbofuran, utilisé dans le traitement des sols pour ses propriétés nématicides et insecticides, a permis la mise au point et l optimisation par GC/MS et HPLC/UV/DAD d une méthode d analyse de ce type de composé dont l inconvénient majeur est la thermolabilité (A.EL BOURI - Laboratoire de Recherches et d analyses Techniques et Scientifiques de la Gendarmerie Royale Rabat). La session : «Résultats de toxicologie et prise de décision» a clôturé l après-midi. La conférence introductive P. KINTZ, (laboratoire Chemtox à Illkirch) a permis de rappeler les recommandations publiées par La Society of Hair Testing en matière d analyse de cheveux et de rendu de résultats. Après un rappel de la stratégie analytique à mettre en place, les principaux paramètres ayant une influence sur le résultat ont été décrits, ce sont : - la couleur des cheveux dont la concentration en mélanine, génère des variations de la concentration capillaire des molécules basiques, - les traitements colorants qui peuvent entraîner une baisse des concentrations, - la vitesse de pousse, - le mode de conservation ; la conservation au réfrigérateur est responsable de la perte de 30 à 60% des xénobiotiques éventuellement présents, - le milieu de conservation ; une contamination externe est possible dans les cas de cadavres putréfiés (jus de putréfaction) ; l eau de mer, contrairement à l eau douce, est responsable d une extraction préalable des xénobiotiques, - la toxicomanie aux dérivés amphétaminiques, provoquant une hypersudation, donc une contamination par la sueur. De manière générale, il a été rappelé que l analyse des cheveux demeure une alternative nécessaire dans la plupart des cas de soumission chimique, de dopage, mais aussi dans certains cas d empoisonnement et de recherches des causes du décès, en particulier lorsque les fluides biologiques ne sont plus disponibles ou non exploitables (prélèvements trop tardifs). Elle nécessite du matériel très performant (GC/MS/MS et/ou LC/MS/MS) et du personnel qualifié, tout particulièrement en matière d interprétation de résultats qui doit tenir compte de tous les paramètres précités.

Ce préambule, illustré par deux présentations, l une à propos de trois cas de soumission chimique, la seconde à propos d une intoxication mortelle par un analgésique utilisé en anesthésie, a permis de confirmer l importance de l analyse des cheveux pour la mise en évidence d une prise de xénobiotique et son habitude de consommation : prise unique ou administration répétée (V.DUMESTRE-TOULET Toxgen Bordeaux) Toutefois, même si la toxicologie analytique a considérablement évolué durant la dernière décennie, en matière d appareillages et de prélèvements alternatifs, certaines limites demeurent, en particulier dans les cas de décès impliquant des substances volatiles dont la caractérisation ne peut être réalisée par les techniques usuelles. Dans ce cas, en l absence de données complémentaires de type anamnèse, et/ou rapport d autopsie il est très difficile voire impossible pour le toxicologue de conclure (Y.PAPET C.H.U Poitiers). La deuxième journée consacrée aux thèmes libres devait débuter par une conférence introductive traitant de «l importance d une démarche qualité en toxicologie», malheureusement un empêchement n a pas permis à l orateur d être présent. Les présentations qui ont suivi ont donc fait l objet de problématiques particulières à l Etat du Maroc. Elles ont concerné : - deux cas d intoxication au méthanol par ingestion d alcool à brûler (M.A BELLIMAM - Laboratoire de Recherches et d Analyses Techniques et Scientifiques de la Gendarmerie Royale Rabat), - l intoxication à la paraphénylène diamine (PPD), amine aromatique utilisé comme adjuvant dans le hénné, et dont la toxicité systémique est responsable de décès (Y.BOULISMAN Laboratoire de Pharmacologie Rabat), - l utilisation des cheveux pour la caractérisation de la bioaccumulation de métaux, en particulier les métaux lourds, chez les enfants résidents dans des zones polluées entre autres par les eaux usées (A.SEDKI Laboratoire d Hydrobiologie, Ecotoxicologie et Assainissement Marrakech), - la potentialité antibactérienne de certaines épices, cardamome, laurier sauce et muscade utilisées dans la cuisine marocaine. Ces épices, inoculées dans la viande assurent une meilleure conservation par un degré moindre de colonies bactériennes et une réduction du nombre de polynucléaires et de lymphocytes. Leur usage et consommation doit cependant être limité car en surdose, elles peuvent entraîner des pathologies au niveau du cerveau, du cœur, du foie (J.EL.MALTI Laboratoire de Microbiologie et de Pharmacologie Faculté des Sciences Casablanca), - l étude, selon un modèle animal, la gerboise (animal vivant dans l Atlas marocain, très résistant aux effets secondaires hépatiques liés à l absorption de certains médicaments) d un usage à long therme de ciprofibrate, hypolipémiant responsable de pathologies au niveau du cerveau et du foie. Les travaux réalisés montrent une absence de génotoxicité, mais une activation des peroxysomes au niveau du foie et un métabolisme hépatique perturbé. En revanche il n y a rien de particulier au niveau des leucocytes ; cette recherche se poursuit sur ce type d animal afin de comprendre son mécanisme de resistance par rapport à la souris et surtout à l homme. (D. MOUNTASSIF Laboratoire de Biochimie et Biologie Moléculaire - Faculté des Sciences Casablanca), - l envenimation scorpionique, première cause des intoxications au Maroc, en particulier chez l enfant (marche nu pieds sur les amas d ordure, lieux très prisés par les scorpions) est un problème

de santé publique au Maroc. Le taux de létalité général est de 15 pour 1000 avec une prédominance chez les enfants de moins de 15 ans. Actuellement environ 100 décès par an sont recensés. Dans le cadre d une stratégie nationale de lutte contre les envenimations, un audit clinique a été mis en place par le Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc afin de standardiser la prise en charge et améliorer la qualité de soins des hôpitaux. Cet audit, réalisé au niveau de deux hôpitaux pilotes prenait en compte certains critères tels : le choix des sujets, les critères d hospitalisation, le choix des méthodes de soin, les mesures d urgence, le recueil des données, l analyse des résultats, les solutions et recommandations, le suivi. Le cycle d audit a permis de dégager des points importants, à savoir la formation du personnel, l établissement d un consensus sur la conduite à tenir, sur les critères d appréciation de la prise en charge du patient mais aussi une évaluation critique de la qualité de cette prise en charge et des traitements réalisés, avec notamment la mise en évidence de la non disponibilité de certains matériels et médicaments. Au vu des résultats obtenus, le Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc propose un programme de généralisation des audits pour tendre le plus rapidement possible vers un nombre de décès égal à zéro. (I.SEMLALI - Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc Rabat) - une enquête sur la prévalence de l usage de tabac, alcool et stupéfiants en milieu scolaire, par le biais d un questionnaire anonyme (6231 consultations en lycées et collèges répartis selon 54 % de filles et 46 % de garçons) a permis l obtention de données exhaustives, notamment en matière d identification des substances et leur provenence, et de mise en place de mesures préventives. Il ressort de cette étude les éléments suivants : 11 % des personnes ont déclaré avoir eu recours à la drogue, avec plus de 60 % des usagers entre 15 et 18 ans ; 50 % consomment du cannabis, 12 % de la cocaïne et 3 % de l héroïne. Pour le tabac, 16 % des jeunes consultés sont consommateurs. L initiation au tabac et au stupéfiants se fait vers l âge de 11 ans, ce qui correspond à l entrée au collège ; on note une plus forte corrélation entre tabac et drogue chez les garçons par rapport aux filles. La plupart des personnes n ont aucun mal à se procurer les produits en particulier au marché noir. Cette toxicomanie est responsable en milieu scolaire de problèmes de délinquance, de décrochage scolaire, d agressions diverses et par voie de conséquence contribue à un degré supérieur à l augmentation de la criminalisation des villes par le narcotrafic, au financement de réseaux terroristes, à l augmentation des maladies infectieuses et au transport de stupéfiants par les clandestins. D où le projet de la SMTCA de mettre en place une campagne de sensibilisation nationale afin que des mesures de prévention adaptées soient proposées en particulier dans les classes primaires (A.STAMBOULI Société Marocaine de Toxicologie Clinique et Analytique Rabat). La matinée s est poursuivie par la visite, sous le soleil, des stands réservés aux communications affichées et aux exposants de matériel analytique et terminée par une photo de groupe autour de (et non dans) la piscine.

La demi journée du samedi après-midi a été consacrée à une visite touristique de la ville de Marrakech ensoleillée, sur fond d Atlas enneigé. Nous avons pu visiter le Palais de la Bahia, luxueux édifice de 150 pièces, succession de luxueux appartements secrets ouvrant sur des patios, construit en 1880 à l initiative du Vizir Sidi Moussa, et destiné à loger ses 4 épouses et 24 concubines ce qui a laissé rêveur certains collègues masculins de la SFTA!!! Ce palais a par la suite abrité les bureaux du Maréchal Lyautey. La visite s est poursuivie à la Medersa Ben Youssef, école coranique la plus grande du Maghreb (900 étudiants pouvaient y loger), construite en 1570 par les Saadiens. Elle se situe au centre de la Médina, et son architecture arabo-andalouse est un mélange de sculptures en bois de cèdre de l Atlas, de zelliges, de marbre de Carrare et de stucs Après un passage obligé dans le souk, nous avons pu assister, à la nuit tombante à la métamorphose de la Place Jemaa el Fna, véritable cœur de Marrakech et restaurant de plein air où badauds, musiciens, charmeurs de serpents, boutiquiers, guérisseurs forment une foule hétéroclite et bigarée. La soirée s est achevée dans un restaurant typique marocain de la Médina sur fond de musique et danse folklorique. A l issue des journées scientifiques, Marc DEVEAUX, a annoncé la publication de toutes les communications orales et affichées dans le dernier ouvrage 2006 des «Annales de Toxicologie Analytique» à paraître courant du premier trimeste 2007.