Soins obstétricaux gratuits en. Haïti. Pour une grossesse à moindre risque chez les femmes et les nourrissons



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Soins obstétricaux gratuits en Haïti Pour une grossesse à moindre risque chez les femmes et les nourrissons

Les femmes qui ne disposent pas des fonds nécessaires pour se rendre à l hôpital doivent accoucher à la maison. Cette barrière financière est immanquablement l une des causes majeures du taux élevé d accouchements à domicile. Dr Serge Louissaint, Directeur du Département sanitaire du Sud, Les Cayes 2 Qu est-ce que le projet SOG? Visant une des populations féminines les plus pauvres et les plus vulnérables d Haïti, le projet Soins Obstétricaux Gratuits (SOG) propose gratuitement des consultations et un accouchement assisté pour les femmes sans ressources. Depuis son démarrage en 2008, le projet mené par le Ministère haïtien de la Santé publique et de la Population et soutenu par l Agence canadienne de développement international (ACDI), l Organisation panaméricaine de la Santé (OMS/OPS) et le Partenariat UE/ACP/OMS 1 a déjà permis d obtenir des résultats remarquables, avec une importante augmentation du nombre d accouchements assistés et du nombre de femmes se rendant à des consultations prénatales. Ce document fait le point sur l impact du projet depuis son démarrage en 2008. Le projet devra être reconstruit après les ravages causés par le tremblement de terre de janvier 2010 mais son histoire et les résultats qu il a obtenus, détaillés dans ces pages, exigent non seulement de le remettre sur pied mais de l élargir au pays tout entier. L expérience du projet SOG montre en effet comment des soins obstétricaux gratuits participent au développement futur de la santé des femmes et des nouveau-nés en Haïti. «Après la mise en œuvre du projet SOG, nous avons vu un changement radical dans la manière dont les femmes utilisent les services de santé maternelle. Le coût étant trop élevé, elles ne pouvaient pas se rendre à l hôpital. À présent, les femmes viennent de tout le district, même si elles vivent à trois ou quatre heures d ici.» Lamarre Anthonese, infirmière sage-femme, hôpital de référence de Port-Salut

3 Pourquoi des services gratuits sont-ils nécessaires aux femmes? Haïti est le pays le plus pauvre de l hémisphère occidental. Plus des deux tiers de sa population vit avec moins de US$ 2 par jour, si bien que la plupart des femmes n ont tout simplement pas les moyens de payer pour une prise en charge quand elles sont enceintes ou doivent accoucher. Une telle pauvreté s accompagne d un nombre alarmant de décès maternels et néonatals. Il était déjà le plus élevé des Amériques avant même le tremblement de terre: environ 2900 femmes meurent chaque année de causes liées à la grossesse et à l accouchement 2, et 62 enfants sur 1000 naissances vivantes ne survivent pas plus d un an 3. Dans la mesure où elles ne peuvent pas payer pour un accouchement sans risque dans un établissement de santé, la plupart des femmes pauvres sont obligées d accoucher à la maison avec l assistance de personnes non qualifiées. En 2007, une étude 4 a montré que 76% des femmes vivant à Haïti dans le Département du Sud choisissaient d accoucher à domicile plutôt que dans un établissement de santé. Pour expliquer ce choix malheureux, le manque d argent était la première raison évoquée. Or il conduit à un risque accru de décès pour la mère et l enfant. Selon leurs déclarations, environ 65% des femmes ont dit trouver l accouchement dans un établissement de santé trop cher. Supprimer les coûts pour ces femmes apparaît dès lors comme le moyen le plus évident d accroître l utilisation des services. Comment fonctionne le projet? Les institutions haïtiennes de santé sont payées pour offrir aux femmes une prise en charge gratuite avant et après la naissance ainsi qu un accouchement gratuit. Sur la base de la qualité des services qu ils fournissent, cinquante établissements répartis dans tout le pays ont été sélectionnés pour prendre part au projet. ACDI et OMS/OPS fournissent le soutien au niveau national, tandis que le Partenariat UE/ ACP/OMS apporte des fonds ciblés pour l action du projet à Port-Salut et à Aquin. Ce document fait le point sur les actions du projet dans ces deux zones. Le projet repose sur plusieurs éléments essentiels, notamment : payer aux établissements de santé la prise en charge de la grossesse, de l accouchement et du post-partum ; rembourser les frais de transport aux femmes enceintes ; payer les accoucheuses traditionnelles qui accompagnent les femmes enceintes pour accoucher dans les institutions de santé. Les établissements ne sont remboursés qu à condition d adresser pour approbation un rapport au format standardisé stipulant les soins donnés à chaque femme. Le Système d Information Périnatal (SIP) conçu par OMS/OPS/CLAP/SMR 5 sert à la fois à faire des vérifications pour voir si le projet atteint bien ses objectifs et à évaluer sa performance. Le projet s intègre aux efforts plus vastes visant à réduire la mortalité maternelle et néonatale en Haïti, à accroître l accès aux services de santé et à améliorer la capacité des institutions à fournir une prise en charge de qualité. À Port-Salut et à Aquin, le Partenariat UE/ACP/OMS soutient également la réhabilitation et l équipement des établissements de santé, la formation des prestataires de santé et la fourniture de matériel médical et de médicaments essentiels. «C est mon premier enfant. Je suis venue deux fois à l hôpital pour deux consultations prénatales. Je n ai eu aucun problème pendant ma grossesse, mais j ai eu des complications à l accouchement. Je suis heureuse d avoir accouché à l hôpital : à la maison, mon bébé aurait pu mourir.» Merise Merita, 19 ans, Port-Salut

4 Communes d Haïti : Taille moyenne de la population couverte par centre de santé primaire " Capitale du pays Ville Estimation de la taille de la population couverte en 2008 (totale) Moins de 15 000 15 000-30 000 30 000-45 000 45 000-60 000 Plus de 60 000 Aucune/Inconnu* Port de Paix Gonaïves Cap Haïtien Fort Liberté Hinche * Pour ces communes, l existence de données ou de centres de santé primaires n est pas connue.. la République dominicaine Jeremie Miragoane Port-au-Prince " 0 10 20 40 Kilomètres Les Cayes Port-Salut Aquin Jacmel Les appellations employées et la présentation des données figurant sur cette carte n impliquent de la part de l Organisation mondiale de la Santé aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. Les lignes en pointillé représentent des frontières approximatives dont le tracé peut ne pas avoir fait l objet d un accord définitif. Carte réalisée le 28 janvier 2010, 11h GMT Source des données : Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH SIG), UNFPA, OPS Carte élaborée par Information en santé publique et Système d Information Géographique (SIG) Organisation mondiale de la Santé OMS 2010 Tous droits. réservés Les UCS Situées dans le Département du Sud d Haïti, les Unités communales de Santé (UCS) de Port-Salut et d Aquin sont des institutions de santé publique rassemblant des prestataires de soins de santé, des autorités locales et des groupes communautaires. Une population de 85 000 personnes à Port-Salut et de 120 000 à Aquin, vivant éparpillée dans les montagnes environnantes, en bénéficie. Chaque UCS regroupe plusieurs établissements de santé répartis sur sa zone, notamment des dispensaires et des centres de santé, et chaque établissement de santé est lié à un hôpital communautaire de référence. Les femmes qui présentent des complications au moment de l accouchement peuvent obtenir des soins d urgence à l hôpital de référence de Port-Salut ou à celui d Aquin. Les blocs opératoires de ces deux hôpitaux ne fonctionnant cependant pas en permanence, les personnes sont orientées si nécessaire vers l hôpital départemental de Les Cayes, la capitale régionale.

5 Nous avons utilisé tous les moyens de communication imaginables pour diffuser le message le plus loin possible et toucher les personnes qui vivent dans les zones les plus isolées des départements. Le taux d accouchements dans un établissement de santé demeure aujourd hui encore très bas comparé au taux d accouchements à domicile. Mais nous avons fait néanmoins un pas de plus pour accroître le nombre d accouchements dans des établissements de santé. Dr Joseph Yves Domercant, Directeur d UCS, Port-Salut Quel engagement pour la communauté? À Port-Salut et à Aquin, on a recruté des personnes dans la communauté pour soutenir les femmes tout au long de leur grossesse, pendant l accouchement et après l accouchement. Ces personnes répondent à des questions telles que : comment dois-je me préparer à l accouchement? Pourquoi faut-il accoucher à l hôpital? Qui prendra soin de mes autres enfants quand je serai à l hôpital? Quand et comment dois-je me rendre à l hôpital? Ces agents de santé communautaires interviennent également dans des comités «comités de surveillance de la mortalité maternelle» qui font le lien entre les communautés et les institutions de santé. Les comités peuvent avertir les hôpitaux des accouchements susceptibles de présenter des complications, transmettre l opinion des femmes sur la qualité de la prise en charge, faire un suivi des ruptures de stock de matériel. Ils peuvent ainsi accélérer la réponse aux urgences et réduire les retards pour le transfert des femmes enceintes vers les dispensaires. La participation de la communauté largement perçue comme vitale pour l amélioration de la santé maternelle et néonatale a été encouragée par le projet à Port-Salut et à Aquin, via les UCS qui coordonnent les services de santé dans chaque zone. Une campagne de plaidoyer pour la promotion du projet a constitué une part importante du projet lui-même. L'OMS/OPS et leurs partenaires se sont employés activement à ce qu une politique de prise en charge gratuite de l accouchement soit soutenue au niveau politique dans le pays. Ils ont également cherché à accroître l utilisation des services par la promotion des avantages de l accouchement à l hôpital et par une sensibilisation renforcée du public sur la gratuité des services dans certains hôpitaux. «Je vis à trois heures de l hôpital de référence de Port-Salut en moto-taxi. Pour mes deux premiers enfants, j ai accouché à la maison sans avoir jamais eu recours à ce genre de services. Quand j ai entendu parler à la radio de services gratuits pour les femmes enceintes, je me suis rendue à l hôpital pour une consultation prénatale. L argent a toujours été un problème pour moi, et aller à l hôpital signifiait beaucoup de dépenses pour les services de santé, le transport, les médicaments, etc» Paula Ferdinand, 26 ans, enceinte de 8 mois

Quels sont les résultats du projet? À Port-Salut comme à Aquin, le succès des SOG apparaît nettement dans l élévation rapide du nombre de femmes utilisant des services de santé maternelle et néonatale. Une première évaluation du projet 6 au niveau national révèle que : Les progrès accomplis pour réduire la mortalité maternelle sont encourageants. Après une mise en œuvre des SOG, des résultats préliminaires permettent d avancer un ratio de 135 décès pour 100 000 naissances vivantes dans les zones du projet, contre un ratio de 630 décès pour 100 000 naissances vivantes au niveau national. Depuis la mise en place des SOG à Port-Salut, le nombre de consultations prénatales a été multiplié par six. À Aquin, on a observé trois fois plus de consultations prénatales. Les accouchements dans des établissements de santé ont augmenté de 62% par rapport à l année précédente dans plus d un tiers des institutions participantes. 30% des femmes qui ont accouché dans une institution SOG avaient accouché à domicile la fois précédente. Concernant les réactions face aux situations d urgence, les progrès semblent eux aussi encourageants on les mesure au taux d accouchements par césarienne qui a été de 9% contre 3% au niveau national. 83% des femmes utilisant ces services se sont dit satisfaites de l assistance reçue. Le projet SOG a encouragé les femmes d âges et de milieux socio-économiques différents à rechercher une prise en charge dans un établissement de santé indépendamment du nombre de grossesses antérieures. La plupart d entre elles disent avoir choisi cette fois-ci la prise en charge dans un établissement de santé au motif qu elle est aujourd hui gratuite. Elles reconnaissent aussi que la prise en charge reçue à l hôpital pour elles et leur nouveau-né était de bonne qualité. Le Système d Information Périnatal (SIP) offre une vue bien plus précise de la situation à Port-Salut et à Aquin que les enquêtes périodiques réalisées auparavant. Son succès a incité les autorités sanitaires nationales à approuver la mise en œuvre de ce système pour tous les services publics de santé d Haïti. 6 «Certaines femmes ont l habitude d accoucher en présence de matrones non formées. C est souvent un problème d éducation. Avec l aide du comité, nous devrons montrer aux femmes pourquoi il vaut mieux accoucher à l hôpital qu à la maison.» Alabre Odesse (à droite), agent communautaire de santé, Comité de surveillance de la mortalité maternelle, Port-Salut

7 Quelles sont les prochaines étapes? Le succès rencontré par le projet suggère que certains financements destinés au renforcement des services de santé d Haïti soient réorientés, et que des fonds supplémentaires soient mis à disposition pour des soins obstétricaux gratuits. L augmentation de l utilisation des services par les femmes dans les zones du projet montre à quel point la simple suppression des frais peut entraîner une amélioration. Un nombre beaucoup plus grand de femmes pourrait encore être touché si d autres obstacles importants à la santé pouvaient être levés, notamment le mauvais état des routes et des infrastructures ainsi que le manque de transports. Le projet souligne comment l engagement de la communauté appuyé par un investissement dans le domaine du développement des infrastructures de santé et de la formation du personnel peut garantir que des soins obstétricaux gratuits profiteront aux femmes les plus pauvres et les plus vulnérables d Haïti. Les membres de la communauté, tout en apportant leur soutien aux femmes, peuvent communiquer avec les institutions de santé et participer à l élaboration de services de meilleure qualité et mieux adaptés. Une politique nationale de soins obstétricaux gratuits est nécessaire pour faire en sorte que l ensemble du territoire d Haïti, jusqu aux zones les plus reculées, puisse bénéficier des avantages de ce projet. Les résultats obtenus par ce projet appuient l idée d un plan national de protection sociale dans le domaine de la santé, et suggèrent fortement de mettre en place dans le futur des programmes pour former un nombre suffisant de personnel qualifié et pour disposer de structures de santé adéquates. Aujourd hui, la priorité pour Haïti est bien sûr de rétablir les services de santé élémentaires, notamment les soins obstétricaux. L appel lancé en février 2010 par l OMS/l OPS vise à réunir US$ 21 millions pour cela et pour renforcer également les mesures prises vis-à-vis des urgences engageant le pronostic vital. Une partie importante de cette opération consistera à réactiver et à élargir le projet SOG avec davantage de médicaments, d équipements, de services, de structures et de cliniques mobiles pour atteindre les femmes déplacées. Suite au tremblement de terre, les femmes et les nouveau-nés haïtiens ont plus que jamais besoin de ce projet et les résultats présentés plus haut montrent précisément à quel point de tels services ciblés et gratuits sont utiles à ces populations. Tout aussi importantes que les statistiques, il y a les voix des femmes et des agents de santé sur le terrain qui figurent dans ce document des paroles qui racontent le succès du projet et comment les soins obstétricaux gratuits peuvent sauver et changer des vies. Alors que Haïti se remet du tremblement de terre, la fourniture de soins obstétricaux gratuits sera l un des éléments essentiels pour aider les femmes à retrouver la santé. «À mon avis, là où nous avons réussi, c est en ayant mis en avant l idée qu il n est pas possible de parler de santé, et plus particulièrement de santé maternelle, sans parler de services gratuits quand il s agit d un pays où 70% de la population vit audessous du seuil de pauvreté.» Dr Carlos Gril, OMS/OPS Conseiller en Santé génésique, Haïti

Organisation mondiale de la Santé 2010 WHO/MPS/10.07 Tous droits réservés. Il est possible de se procurer les publications de l Organisation mondiale de la Santé auprès des Editions de l OMS, Organisation mondiale de la Santé, 20 avenue Appia, 1211 Genève 27 (Suisse) (téléphone : +41 22 791 3264 ; télécopie : +41 22 791 4857 ; adresse électronique : bookorders@who.int. Les demandes relatives à la permission de reproduire ou de traduire des publications de l OMS que ce soit pour la vente ou une diffusion non commerciale doivent être envoyées aux Editions de l OMS, à l adresse ci dessus (télécopie : +41 22 791 4806 ; adresse électronique : permissions@who.int. Les appellations employées dans la présente publication et la présentation des données qui y figurent n impliquent de la part de l Organisation mondiale de la Santé aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. Les lignes en pointillé sur les cartes représentent des frontières approximatives dont le tracé peut ne pas avoir fait l objet d un accord définitif. L Organisation mondiale de la Santé a pris toutes les précautions raisonnables pour vérifier les informations contenues dans la présente publication. Toutefois, le matériel publié est diffusé sans aucune garantie, expresse ou implicite. La responsabilité de l interprétation et de l utilisation dudit matériel incombe au lecteur. En aucun cas, l Organisation mondiale de la Santé ne saurait être tenue responsable des préjudices subis du fait de son utilisation. 8 Imprimé par le Service de production des documents de l OMS, Genève (Suisse) «Cela fait plaisir de voir autant de femmes se rendre à l hôpital. L hôpital a ajouté une journée en plus pour les consultations prénatales pour que nous puissions les faire toutes. Depuis que le projet SOG a démarré, le nombre de consultations a presque quadruplé.» Dr Labady Ledon, hôpital de référence d Aquin Références 1. Partenariat Commission Européenne/Groupe des États d Afrique, des Caraïbes et du Pacifique/Organisation mondiale de la Santé un accord tripartite signé entre les trois partenaires et les ministères nationaux de huit pays, Haïti compris, afin de soutenir des actions accélérées en vue d atteindre l Objectif du Millénaire pour le développement (OMD) 5. 2. Plan Stratégique National pour la Réforme du Secteur de la Santé 2005-2010, Ministère de la Santé Publique et de la Population, République d Haïti, Port-au-Prince, 2005. 3. Enquête Mortalité, Morbidité et Utilisation des Services, EMMUS IV, Ministère de la Santé Publique et de la Population, République d Haïti, Port-au- Prince, 2006. 4. Divers J, Joseph JR, Napoleon W. Étude sur les déterminants du choix des femmes habitant le Département du Sud sur la motivation à accoucher chez elles ou dans les institutions de santé. OPS/OMS, Haïti, 2007. 5. Centre latino-américain de périnatalogie/santé de la femme et reproductive à l Organisation panaméricaine de la Santé. 6. Les données courent jusqu en novembre/décembre 2009, le suivi ayant été interrompu par le tremblement de terre de janvier 2010. Remerciements La création de ce document a été rendue possible grâce aux fonds du Partenariat UE/ACP/OMS et au soutien et à l assistance de l OMS/l OPS Haïti tout au long de la recherche sur le terrain. Monika Piskorek et Stéphane Grandvaux ont fourni les photographies et le texte initial. Ils ont voyagé à travers Haïti et interviewé des femmes qui ont utilisé les services gratuits et du personnel de santé qui est engagé dans le projet. Amit Srivastava a finalisé le texte de ce document et Duke Gyamerah a été responsable de la partie graphique. David Chomentowski a réalisé la traduction française. Nous tenons particulièrement à remercier, pour leur participation et le temps qu ils ont bien voulu accorder, le personnel des hôpitaux de référence de Port-Salut et d Aquin, les membres des comités de surveillance de la mortalité maternelle et les femmes interviewées.