Rabat, le 21 mai 2015



Documents pareils
CAMPAGNE NATIONALE DE SENSIBILISATION «Pour un meilleur partenariat Banques/Petites et moyennes entreprises au service du Développement Humain»

Allocution de Monsieur le Ministre à l occasion du 1 er meeting sur l information financière

Le FMI conclut les consultations de 2008 au titre de l article IV avec le Maroc

Veuillez trouver ci-joint la communication de Monsieur le Gouverneur à l occasion du forum international des finances et des affaires tenu à

Wali. Directeur général. commissaire Du gouvernement. conseil. M. Abdellatif JOUAHRI. M. Abdellatif FAOUZI. M. Le Wali. M. Le Directeur Général

Remarques d Ouverture par M. Mohammed Laksaci, Gouverneur de la Banque d Algérie, Président de l Association des Banques Centrales Africaines

BANQUE CENTRALE DU CONGO

Royaume du Maroc. Département de l Economie, des Finances et de la Privatisation. L'épargne intérieure au Maroc

Groupe de la Banque africaine de développement. ALLOCUTION D OUVERTURE DE M. OMAR KABBAJ Président du Groupe de la Banque africaine de développement

La PME Marocaine. Levier de développement économique et d innovation. Saad Hamoumi Président de la commission PME

Honorables invités, Mesdames et Messieurs,

La politique monétaire après la crise financière mondiale : Nouveaux enjeux

Conférence Internationale - Finance Islamique IFC Youssef BAGHDADI. Khalil LABNIOURI

Crises financières et de la dette

Allocution d ouverture de Jean DEBEAUPUIS, Directeur Général de l Offre de soins

Restrictions et Libéralisation des I.D.E Au Maroc. Mr. Marwane MANSOURI

Contrôle. Consultation CDEC

Réception de Montréal Secteur des valeurs mobilières. Discours d ouverture

Les perspectives mondiales, les déséquilibres internationaux et le Canada : un point de vue du FMI

devant le Conseil de surveillance de la normalisation comptable

Comité monétaire et financier international

Déclaration de M. Philipp Hildebrand, Président de la Direction générale de la Banque nationale suisse

SIGNATURE DE CONVENTION AVEC LA CHAMBRE DE COMMERCE. Madame le Directeur général de la Chambre de Commerce et d Industrie de Côte

la quête du Graal? Michel Aglietta Université Paris Ouest et Cepii

Allocution. de monsieur Louis Vachon. président et chef de la direction. de la Banque Nationale du Canada. Centre Mont-Royal

l'installation de la PME au Maroc et dans la région Provence Alpes Côte d'azur

Perspectives économiques régionales du Moyen-Orient et de l Afrique du Nord

La promotion de la pluralité linguistique dans l usage des nouvelles technologies de l information et de la communication

Banque nationale suisse

Paris Europlace, Forum financier international à Tokyo 27 novembre «Mondialisation des marchés financiers»

Les perspectives économiques

Le FMI et son rôle en Afrique

Royaume du Maroc. La masse salariale et ses impacts sur les équilibres économiques et financiers

Présenté par Michel Sapin, Ministre des finances et des comptes publics. Christian Eckert, Secrétaire d État chargé du budget

mai COMMENTAIRE DE MARCHÉ

Mot d ouverture de Mamadou Lamine N DONGO Lead Results Adviser Banque Africaine de Développement Coordonnateur de AfCoP

Discours d ouverture de Sem Alassane Ouattara

QUELLE DOIT ÊTRE L AMPLEUR DE LA CONSOLIDATION BUDGÉTAIRE POUR RAMENER LA DETTE À UN NIVEAU PRUDENT?

Présentation du projet de jumelage

Avis. Projet de loi n relative aux établissements de crédit et organismes assimilés. du Conseil Economique, Social et Environnemental

Croissance plus lente dans les pays émergents, accélération progressive dans les pays avancés

n 7 F é v r i e r Note d information sur le Credit Bureau

Régimes publics de retraite État de la situation. Perspectives des différents régimes publics de retraite. Plan

Le ministre de l'économie et des finances,

ORGANISATION ET SURVEILLANCE DES SYSTÈMES DE PAIEMENT

RAFFINEZ VOTRE STRATÉGIE DE PLACEMENT, SIMPLIFIEZ VOTRE VIE

Vu la loi n du 23 novembre 2005, portant statut de Bank Al-Maghrib ;

RAPPORT ANNUEL Exercice 2006

ALLOCUTION DE M. BENJAMIN HOUNTON CHARGE DU BUREAU DU HAUT COMMISSARIAT DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L HOMME POUR L AFRIQUE DE L OUEST

Réussir ses communications aux employés

Discours de Philippe MARTIN Ministre de l Écologie, du Développement durable et de l Énergie

Toronto (Ontario) Le vendredi 26 octobre 2007 L ÉNONCÉ FAIT FOI. Pour de plus amples renseignements, s adresser à :

Paris mardi 28 février 2012

Economie Générale Initiation Ecole des Ponts - ParisTech

MEMORANDUM POSITIONNEMENT DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE SENEGALAISE SUR LA COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE

Circulaire relative aux fonds propres des établissements de crédit

Notes d allocution de la présidente et première dirigeante de la SADC, Michèle Bourque

ALLOCUTION DE LA 2 ème PROMOTION MBA-IP / SENEGAL «SOUMAÏLA CISSE, PRESIDENT DE LA COMMISSION DE L UNION ECONOMIQUE MONETAIRE OUEST AFRICAINE» A L

Ligne directrice sur les simulations de crise à l intention des régimes de retraite assortis de dispositions à prestations déterminées

Notes de recherche de l

Récapitulatif: Du 17 au 28 Août Mesures de développement de la place de Paris. Retard dans l implémentation du format SWIFT au Maroc.

Les questions relatives aux finances publiques, longtemps réservées aux spécialistes, sont

Membre de la Commission européenne, chargé du Marché intérieur et des Services

FINANCEMENT DU DEFICIT BUDGETAIRE AU MAROC

(Cotonou, le 18 Juillet 2013)

WAFASALAF. L innovation, la clé du leadership

À Pékin (heure de Pékin) : 11h00, 20 janvier 2015 À Washington (heure de Washington) : 22h00, 19 janvier 2015 JUSQU À PUBLICATION. Courants contraires

Intervention de Marisol Touraine. Ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes

Ensemble mobilisons nos énergies

Croissance soutenue et résultats solides en 2012 *** Accor s engage dans un plan de transformation profond pour accélérer sa croissance

Introduction : pour une refonte générale de notre système de retraite

Monsieur le président, mesdames et messieurs les commissaires, bonjour.

Cérémonie de clôture de la réunion débat sur le thème de la 56 e session ministérielle

INTRODUCTION Événements importants survenus au cours de l année

Mise en place du Mécanisme de Supervision Unique (MSU)

Commission CI. Session d ouverture. Remarques d ouverture par le Président de la Commission CI

Recommandation de RECOMMANDATION DU CONSEIL. concernant le programme national de réforme du Luxembourg pour 2015

Rapport d Activité 2012

Fonds Igrane, un levier d investissement pour la Région Souss Massa Drâa

ALLOCUTION DE CLOTURE DE MONSIEUR LE PREMIER MINISTRE, MINISTRE DE L ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET

Secrétariat d Etat auprès du Premier Ministre chargé des Technologies Nouvelles

Paris Europlace Forum financier international 20 avril 2015 «FAVORISER LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE EN EUROPE»

Quelle stratégie d Intelligence économique pour le dessein africain du Maroc? ASMEX DAYS, Casablanca, 24 mars 2015

Consommation et investissement : une étude économétrique

Editorial. Chère lectrice, cher lecteur,

INTERVENTO PRESIDENTE NARDO FILIPPETTI CONFERENZA ANNUALE DEL CETO PANORAMICA SUL MERCATO E PROBLEMI DEI TOUR OPERATOR

Partenariat entre Saham Finances et Cegedim-Activ

MESURES INCITATIVES À L INVESTISSEMENT 1

DOSSIER D ENTREPRISE ENTREPRENEURIAT TRANSFORMATION CROISSANCE

FORMATION INTENSIVE ET CERTIFIANTE DE TROIS JOURNÉES SUR : «Le métier de banquier. islamique» en partenariat avec

C O M M U N I Q U É D E P R E S S E

Les défis du reporting macro-prudentiel

Intervention de M. Assane DIOP Directeur exécutif, Protection sociale Bureau international du Travail, Genève ***

BOURBON. Intervention de Jacques de Chateauvieux Président du conseil d administration Assemblée Générale mixte - 21 mai 2015 BOURBONOFFSHORE.

ETUDE DE PERCEPTION PRODUIT

Evelyne DUCROT. Spécialiste de l accompagnement du changement et des relations humaines

A-T-ON DES ATTENTES IRRÉALISTES POUR NOS RÉGIMES PRIVÉS ET PUBLICS DE PENSION?

PRÉSENTATION DES RÉSULTATS DE LA NÉGOCIATION DU RÉGIME AGRÉÉ DE PENSION ALCAN (RAPA)

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Contexte. Description de l offre

Transcription:

Allocution d ouverture de Monsieur le Wali, Abdellatif Jouahri, au séminaire de haut niveau sur le thème «Défis de la politique monétaire dans la région MENA et avantages de l adoption d un dispositif structurel de prévision et d analyse» Rabat, le 21 mai 2015 Messieurs les Gouverneurs, Chers collègues, Mesdames, Messieurs, C est un grand plaisir pour moi de m adresser à une audience aussi éminente, dans le cadre de ce séminaire sur les défis de la politique monétaire dans la région MENA et les avantages de l adoption d un dispositif structurel de prévision et d analyse. Je tiens tout d abord à vous souhaiter, au nom de Bank Al-Maghrib, la bienvenue à Rabat et vous exprimer ma gratitude pour avoir répondu à notre invitation. Je voudrais adresser en particulier mes vifs remerciements à M. Douglas Laxton, Responsable de la Modélisation au sein de la Direction de la Recherche au FMI, et toute son équipe ici présente pour leur apport dans la préparation de ce séminaire de haut niveau qui s inscrit dans l accompagnement de Bank Al- Maghrib pour la mise à niveau de son dispositif analytique et de prévision. Mesdames, Messieurs, Neuf ans plutôt, j ai eu le privilège d accueillir ici même des participants de marque en la qualité de Hauts responsables de Banques centrales, des Ministères des Finances et du FMI lors d un séminaire dédié au ciblage d inflation. Depuis cette manifestation, le monde a connu bien des événements, dont le plus marquant a été la crise financière de 2008. Celle-ci a eu des retombées aussi bien au niveau des marchés que de l environnement macroéconomique ou encore et surtout au niveau de la formulation et de la conduite des 1

politiques monétaires. Sur ce point, Permettez-moi, Mesdames et Messieurs d illustrer mes propos par quelques réflexions sur l expérience de notre pays. Tout d abord, j aimerai revenir sur les orientations que le Royaume a adoptées depuis le début de la décennie 2000. En premier lieu, le Maroc s est inscrit dans un processus d ouverture commerciale et financière de plus en plus marqué qui s insère dans la volonté d insérer davantage l économie marocaine dans l économie mondiale. Dans ce sens, le Maroc a conclu une série d accords de libre-échange avec 56 pays dont l Union européenne, les Etats-Unis, la Turquie et un certain nombre de pays arabes et a procédé à une libéralisation graduelle de la réglementation des changes. En conséquence, le taux d ouverture de l économie s est inscrit en nette hausse de 61% du PIB en 2000 à plus de 80% en 2013 et les investissements nets étrangers ont progressé de 0,6% du PIB à 3,2% sur la même période. En second lieu, et porté par l ambition de devenir un hub financier régional, reliant l Europe, le Moyen-Orient et l Afrique, le Royaume a lancé le chantier structurant de Casa Finance City, bénéficiant de plusieurs réformes qui ont eu trait, notamment, à la fiscalité, à la réglementation des changes, à la formation des ressources humaines et au cadre juridique. Les efforts consentis dans ce sens n ont pas manqué de porter leurs fruits et Casa Finance City s est vue attribuée le 42 ème rang dans le classement du Global Financial Centers Index et le 2 ème au niveau de l Afrique. Ces orientations nous ont interpellés par rapport à l adéquation de la fixité de notre régime de change. C est ainsi que BAM et le Ministère des Finances se sont accordés sur l opportunité d un passage graduel vers un régime de change plus flexible et l adoption du ciblage d inflation. Cette transition qui permet de favoriser la compétitivité de l économie, l atténuation des chocs externes et le soutien aux stratégies de diversification des flux de capitaux étrangers, ne pouvait être envisagée que si un certain nombre de conditions ou de pré-requis sont réunis. Tout d abord, la Banque centrale s est vue dotée en 2006 d une indépendance institutionnelle et opérationnelle, lui permettant de s affranchir de toute influence politique dans sa mission d assurer la stabilité des prix. Parallèlement à ces acquis institutionnels, nous avons procédé en interne à la consolidation de nos capacités analytiques et prévisionnelles, en implémentant un processus systématique des projections macroéconomiques et en continuant à développer des outils d aide à la décision pour des 2

fins de simulation et de prévision. Parallèlement, et en vue de communiquer et de vulgariser les décisions de politique monétaire, nous avons renforcé notre transparence à travers le déploiement d un éventail de supports informationnels. Conscients qu une transition réussie vers davantage de flexibilité du régime de change nécessite l existence d institutions financières solides et des marchés financiers efficients, nous avons enfin déployé un ensemble d actions concrètes visant l alignement du système financier marocain sur les meilleurs standards internationaux notamment sur les volets de la réglementation et de la supervision. Grâce à ces efforts de mise à niveau institutionnelle, structurelle et analytique, le Maroc s est vu classé par le FMI parmi les pays adoptant une politique monétaire d ancrage du taux de change avec un cadre analytique proche de celui du ciblage d inflation. Néanmoins, notre préparation du passage à ce nouveau régime a été confrontée à une série de chocs exogènes liés à la récession en Europe en lien avec la crise financière, à la hausse des prix de l énergie et à la dégradation de l environnement régional, dans le sillage des répercussions de ce qu on a appelé le Printemps arabe. En conséquence à ces développements, les équilibres interne et externe ont été fragilisés, ce qui n a pas manqué d interpeller les autorités gouvernementales. Afin de redresser les équilibres macroéconomiques, le gouvernement a entrepris une série de réformes structurelles visant à renforcer la soutenabilité budgétaire et externe du pays, notamment en supprimant graduellement les subventions aux produits pétroliers, en stabilisant le poids de la charge salariale par rapport au PIB, en renforçant l efficience et la transparence du régime fiscal en vigueur et en accélérant la cadence de la réforme des caisses de retraite. Ces ajustements ont été largement approuvés par les institutions internationales, notamment le FMI qui a renouvelé depuis 2012 l éligibilité du Maroc à la ligne de précaution et de liquidité. Pour notre part, et s inscrivant dans le cadre actuel de politique monétaire, nous avons mis en place une série de mesures permettant l assouplissement des conditions monétaires pour le financement de l économie tout en continuant à veiller à ne pas porter préjudice au redressement des fondamentaux macroéconomiques. Nous avons ainsi porté nos injections de liquidité sur le marché monétaire de l équivalent de 0,7% du PIB en moyenne en 2007 à l équivalent de 6,1% du PIB en 2014. De même, nous avons adopté un certain nombre de 3

mesures non conventionnelles destinées principalement aux TPME en acceptant comme collatéral les effets représentatifs de cette catégorie d entreprises. Aussi, nous avons mis en place un Fonds de soutien financier dont le but est de soutenir les TPME viables mais connaissant des difficultés d ordre conjoncturel. Plus récemment et en tenant compte de la conjoncturelle atone de l économie, le conseil de la Banque a enfin diminué le taux d intérêt directeur de 25 points de base successivement en septembre et décembre 2014, pour le ramener de 3% à 2,5%. Ainsi, cette combinaison de politiques conventionnelles et non conventionnelles nous a permis de tenir le cap de la croissance à un niveau moyen de 4,1% entre 2009 et 2013 tout en maintenant l inflation à un niveau modéré de 1,2% en moyenne sur les quatre dernières années. Par ailleurs, la Banque a poursuivi ses efforts d alignement de son dispositif analytique et prévisionnel sur les standards internationaux, en travaillant sur un modèle dynamique et stochastique d équilibre général (DSGE) pour l évaluation des politiques économiques et en renforçant son interaction avec les autres outils d aide à la décision, actions que nous avons commencées en 2010. En vue de renforcer le travail mené en interne, nous avons également sollicité une mission d assistance technique auprès du FMI. Celle-ci a pour but de nous accompagner dans le perfectionnement de notre dispositif structurel de prévision et d analyse, tout en intégrant les spécificités de notre économie. Vous aurez l opportunité d apprécier plus en détail les avancées réalisées en la matière durant les prochaines présentations. Plus récemment, BAM et le Ministère des Finances ont fait aussi appel à une mission FSAP (The Financial Sector Assessment Program) afin d évaluer notre secteur financier dans ses différentes composantes. En même temps, nous avons demandé l accompagnement du FMI notamment sur les volets opérationnels de la transition vers davantage de flexibilité de notre régime de change et l adoption du ciblage d inflation. Je reste persuadé que ce séminaire donnera lieu à des échanges et des débats interactifs, tant sur le plan institutionnel que sur le plan opérationnel, en faisant ressortir les expériences de nos pays respectifs. Vu la qualité et l expertise des intervenants, il ne manquera pas de constituer un enrichissement certain. 4

Je saisis ce temps de parole occasion pour vous inviter autant que faire ce peut à joindre l utile à l agréable en visitant la ville de Rabat qui vient d être classée au Patrimoine mondial par l UNESCO. Je vous remercie pour votre attention et je souhaite plein de succès à nos travaux. 5