Leipzig News 5 juillet 2013 N 4 Finales internationales des 42 es Olympiades des Métiers La pression monte! Au troisième jour de compétition, la pression monte d un cran. Le rythme des épreuves s est intensifié. Les jeunes de l Équipe de France doivent donner le meilleur d eux-mêmes, malgré la fatigue accumulée, avant la dernière et décisive ligne droite de demain : «Les jeunes doivent à présent puiser dans leurs réserves pour tenir physiquement car cela commence à être dur ( ).C est là que le mental est important, pour aller au-delà de la fatigue physique», explique Benjamin Callar, l un des chefs d équipe qui accompagne les candidats français, avec Angélique Frank et Hervé Jaunet. Dans allées du Leipzig Messe, le public, composé en grande partie de collégiens et de lycéens de la région, stationne de longs moments devant les stands, visiblement impressionné par les talents déployés par les candidats. Les nombreux supporters français sont toujours au rendez-vous. Tous espèrent que leurs candidats monteront sur la plus haute marche du podium. La compétition s achève demain à 16 heures. << Une supportrice de Sidoine Bocquet (taille de pierre) croise les doigts Apprentissage BTP / CCCA-BTP Photos : Bernard Charpenel / CCCA-BTP Texte : Loïc Bestard / CCCA-BTP, Catherine Gauthier / CCCA-BTP Conception graphique : Stéphane Bazin, bazinfolio.com Maquette : Floriane Monerie / CCCA-BTP
L as du carreau Si vous cherchez le carreleur français, suivez ses supporters. Ils sont près d une trentaine à arborer un tee-shirt à l effigie de Basile Ageneau, formé à BTP CFA Vendée (La Roche-sur- Yon). Silencieux et attentifs, ils se succèdent auprès de leur champion avec une ferveur bienveillante. Une malle de bois blanc, sa caisse à outils, est aux armes du candidat français. Sous un éclairage puissant digne des studios de cinéma, Basile reste imperturbable. Concentré, il connaît le scénario sur le bout des doigts, celui des épreuves en carrelage. Lors des deux premiers jours de la compétition, le décor était déjà bien dressé. Basile a achevé l un des modules des épreuves : la Porte de Brandebourg. Et ce, malgré un élément imprévu, ajouté avant le début de la compétition, dans les 30 % du sujet devant être modifiés : un petit rond de soleil jaune à insérer dans un ciel de carreaux bleus. Qu à cela ne tienne! Basile, chaussé de ses lunettes et les mains gantées, réalise son ouvrage sans hésitation. De haut en bas : << Basile Ageneau (carrelage) réalisant la carte de l Allemagne (module 2 des épreuves) << Nettoyage du module 1 des épreuves (Porte de Brandebourg) << Vérification de la verticalité des carreaux << Préparation des coupes de carreaux En ce troisième jour de compétition, Basile réalise la carte de l Allemagne, qui constitue le module 2 des épreuves. Une légère modification dans le scénario : les tracés des lignes frontières, initialement à gauche, sont maintenant à carreler à droite de l ouvrage. Cela ne pose pas de problème à Basile, qui maîtrise et exprime toute la technicité et le savoir-faire de son métier. Le geste est précis et parfait. Basile prend les mesures nécessaires, prépare ses coupes minutieusement, ordonne ses carreaux de couleur en blocs distincts. Il suit le tracé de son plan. Demain, samedi 6 juillet, le dernier module des épreuves est au programme, avec la réalisation d une chape et d un sol carrelé, dans lequel s insèrera le millésime de la finale «2013». Modeste, souriant et déterminé, Basile Ageneau est dans le rôle principal du carreleur, dont le nom s inscrira certainement au générique du palmarès de ces 42 es finales internationales des Olympiades des Métiers.
Entretien avec... Sur le pôle carrelage, vingt-quatre portes de Brandebourg sont érigées. D apparence, elles semblent identiques. Pourtant, les détails font la différence et décideront au final du classement. Détails que seul, l œil avisé du professionnel peut identifier. Entretien avec Pascal Del Toso, l expert français en carrelage, et le candidat français Basile Ageneau, qui profite de la pause pour prendre la mesure du travail de ses concurrents. Que pensez-vous de cette 42 e édition des Olympiades des Métiers? Pascal Del Toso : Je trouve le niveau très élevé cette année. Sur les 24 pays participant, j estime qu une douzaine de candidats, Basile inclus, font preuve de compétences très comparables. La lutte pour le trio de tête va être rude. Les modifications apportées aux trois modules en début de compétition sont minimes : un petit soleil ajouté sur le module 1, les pourtours du module 2 passés de gauche à droite de la carte de l Allemagne et des motifs modifiés sur le sol. Basile a parfaitement su gérer ces changements. Il est dans les temps. La journée de demain sera décisive. Comment vivez-vous cette compétition? Basile Ageneau : La pression de la compétition est intense mais j arrive bien à la gérer. J ai la chance d être encouragé par mes supporters. Je me suis habitué à leur présence depuis leur arrivée et cela ne me perturbe pas, au contraire. Au niveau du matériel, je suis parfaitement équipé, grâce au CFA de La-Roche-sur-Yon et aux fournisseurs. J ai quelques douleurs dorsales, mais les séances de kiné quotidiennes me soulagent bien. Au fil des jours, je constate que je n ai jamais fait aussi bien durant tout mon entraînement. << Pascal Del Toso, expert métier en carrelage << Basile Ageneau << Basile Ageneau et Pascal Del Toso à l issue de la troisième journée d épreuve
IMPRESSIONS D OLYMPIADES Basile Ageneau, formé à BTP CFA Vendée, concourt dans la catégorie carrelage. Le centre de formation d apprentis de La Roche-sur-Yon, membre du réseau de l apprentissage BTP, est très engagé dans les Olympiades des Métiers. Rencontre avec Pierre Deremaux, président de l association régionale BTP CFA Pays de la Loire, qui livre ses impressions sur la compétition Vous suivez les épreuves Que pensez-vous du travail de Basile à ce troisième jour de la compétition? Basile est impressionnant. C est un artiste! Il fait preuve de beaucoup de technique, d une précision hors pair et d un esthétisme très soigné dans la réalisation de son ouvrage. Il n est qu à regarder son ouvrage pour comprendre que son travail fera la différence au moment de la notation finale. Son travail est aussi une belle image de l apprentissage et des compétences des jeunes que nous formons. Comment BTP CFA Vendée s investit dans les Olympiades des Métiers? BTP CFA Vendée s est beaucoup investi dans la préparation et l entraînement de Basile. Je pense notamment à son employeur, Christophe Caron, et à son formateur Thierry Robin, qui fut son coach technique pour cette finale internationale. C est pour le CFA une tradition de s investir dans les concours métiers, notamment les Olympiades des Métiers. Basile a bénéficié d un entraînement sur mesure, tant sur le plan technique que sur le plan mental. Les concurrents sont des sportifs de haut niveau. L entraînement est la base de la réussite à une compétition. Basile en a bénéficié. C est un champion! << Basile Ageneau lors du module 1 des épreuves en carrelage << Basile Ageneau
TOUT EN IMAGES BTP << Sidoine Bocquet, candidat français en taille de pierre << Fabien Gaugain, candidat français en électricité << Victor Deneufchatel, candidat français en maçonnerie << Thomas Boué en construction de routes << Stand métier conduite d engin en démonstration << Stand métallerie
Entretien avec... Sylvie Eslan, vice-présidente du conseil régional Pays de la Loire en charge de l apprentissage et des lycées professionnels. Basile Ageneau, le candidat en carrelage, vient des Pays de la Loire Je connais bien Basile. Il a une très grande valeur humaine. Il fait preuve de beaucoup d humilité et a une grande précision dans son travail. Il a un vrai talent! C est la quatrième fois que j assiste à une finale internationale. C est toujours avec autant de plaisir et d émerveillement de voir ces jeunes qui se dépassent et qui vont jusqu au bout d eux-mêmes. Comment utilisez-vous les Olympiades des Métiers comme action de promotion des métiers et de l apprentissage? Les Olympiades des Métiers sont un vaste salon de l orientation. De nombreux scolaires sont présents. Cela peut être pour certains d entre eux un déclencheur. En région Pays de la Loire, il y a une volonté politique de promouvoir les métiers et la formation professionnelle. Nous utilisons notamment les Olympiades en ce sens. Malgré les difficultés économiques que l on connaît, il est important que les entreprises recrutent des jeunes en apprentissage, qu elles leur donnent leur chance. Quand on voit la technicité que les jeunes ont acquise, leur motivation et l excellence de leur métier, nous devons leur faire confiance. Quel dispositif d accompagnement des candidats la région met-elle en place? Il y a une véritable antériorité autour des concours métiers dans notre région. L ensemble des professionnels, qu il s agisse des responsables de branche, des directeurs et des formateurs des CFA, ainsi que des lycées professionnels, est mobilisé. Nous travaillons ainsi très en amont avec les CFA et le rectorat pour motiver les jeunes à participer à ces concours, comme les Olympiades, et leurs formateurs à les accompagner. Depuis longtemps, nous organisons des finales régionales sur un espace unique, qui donne l occasion aux jeunes de s habituer à la compétition devant un public. Entre les sélections régionales et la finale nationale, nous accompagnons les candidats sélectionnés lors de week-ends de coaching. L objectif est de créer une équipe et non pas des individus champions. Développer l esprit d équipe est très important. Chaque candidat donne ainsi le meilleur de lui-même pour lui et pour les autres.
Entretien avec... Raymond REYES, administrateur du CCCA-BTP et vice-président de Constructys Que pensez-vous de la compétition? C est magnifique! Je connais bien les Olympiades des Métiers. Il s agit de la meilleure compétition au monde pour mettre en valeur et à l honneur les jeunes et les métiers. J espère que la France montera souvent sur le podium international! Les jeunes représentent l excellence Oui, le niveau de la compétition est très élevé. C est le signe de l excellente maîtrise de leur métier et de leur bonne préparation. Les Français se préparent, mais restent bien ancrés dans la réalité de leur métier. D autres pays ont une autre optique et façonnent de véritables «bêtes à concours». À ce sujet, je pense que nous devrions, dans le réseau de l apprentissage BTP dont sont issus plusieurs candidats, renforcer la préparation des jeunes dès leur participation au niveau régional. Il faut optimiser nos chances de médailles. Quelles actions devraient être menées? Nous devrions mobiliser davantage de CFA de notre réseau pour susciter plus de vocations, inviter plus de jeunes à s inscrire à la compétition. Cela suppose de mobiliser des moyens supplémentaires, d engager une véritable démarche projet. Il faut avant tout renforcer la communication au sein de notre réseau sur les Olympiades des Métiers. Il faut également qu au sein des conseils d administration des associations régionales les professionnels soient mieux informés. La mobilisation doit être générale. Elle doit être totale! Les Olympiades des Métiers servent la cause des métiers et de l apprentissage. Nous aurons toujours besoin de professionnels pour construire. Rien ne remplacera la main de l homme. Cette compétition en est la meilleure preuve.
Les experts essuient les plâtres Curieusement, l espace dédié au métier de la plâtrerieconstruction sèche est désert. Il est près de 10 heures et pas l ombre d un candidat sur le stand. Quelques experts apparaissent brièvement, s interpellent puis disparaissent dans leur retranchement. Julien Renard, l expert métier français, accessoirement médaillé d or à la finale internationale de 1997 à Saint-Gall (Suisse), explique cet étrange ballet. «Une réclamation a été déposée par les experts métiers de deux pays à propos d une notation qui leur semble litigieuse. Nous tentons de trouver une solution. La compétition est donc interrompue. Cela nécessite de modifier le planning des deux dernières journées pour permettre aux treize candidats de poursuivre l épreuve dans les temps. J espère que cet incident n aura pas trop perturbé les concurrents et surtout pas Anthony Da Silva, notre plâtrier français. Salarié dans l entreprise landaise qui l a formé, il a tout juste 20 ans et a été très bien préparé tant sur le plan technique que psychologique. Il s est parfaitement glissé dans la compétition et à ce jour, je considère qu il fait partie des six meilleurs candidats. Les modules sont d un bon niveau et exploitent concrètement tous les aspects techniques. Le premier module concerne le montage de la structure de la cabine. Le second consiste en la réalisation du plafond et le troisième module est une pose de staff.» Julien Renard, qui a connu le poids de l or autour du cou, semble avoir reconnu un successeur potentiel. De haut en bas : << Anthony Da Silva, candidat français plâtrerie et construction sèche << Julien Renard, expert métier en plâtrerie et construction sèche << Anthony Da Silva << Stand plâtrerie et construction sèche
ZOOM SUR... Comment préparer la relève pour ne pas être à côté de la plaque Les treize candidats du pôle plâtrerie et construction sèche jouent cet après-midi à cache-cache dans la structure de leur cabine. Ils en enduisent avec agilité les plaques qu ils ont montées la veille sous l œil avisé de Frédéric Goubet, formateur métier à BTP CFA Loir-et-Cher (Blois). Au départ, coordinateur de la sélection des candidats plâtriers pour la région Centre, c est la huitième fois qu il participe à des finales internationales des Olympiades des Métiers. «Initialement et jusqu en 2005, la compétition concernait surtout le métier de staffeur, explique Frédéric Goubet. Par manque de concurrents au niveau international, le métier risquait d être retiré des compétitions. En 2007, le cahier des charges a été modifié afin que soit intégré le travail du plaquiste. Aujourd hui, les "voies humides" qui désignent les matériaux hors plâtre comme les briques ou le staff, et "les voies sèches" que sont les plaques et les carreaux de plâtre, entrent à parts égales dans la composition des épreuves de plâtrerie-construction sèche.» << Frédéric Goubet << Anthony Da Costa << Experts métiers en plâtrerie et construction sèche notant une épreuve Ces détails ne semblent pas concerner Anthony Da Costa. Ce jeune homme de 19 ans est apprenti en BP Plâtrier-plaquiste à BTP CFA Loir-et-Cher, où il a déjà obtenu son CAP, doublé d un CAP staff obtenu à BTP CFA Brétigny-sur-Orge. S il accompagne aujourd hui Frédéric Goubet, son formateur métier, c est qu il a participé aux finales nationales de Clermont-Ferrand, où il a décroché le titre de jeune espoir. Anthony Da Costa a ainsi bénéficié du même entraînement technique que le médaillé d or, Anthony Da Silva. «Côtoyer tous ces jeunes qui viennent du monde entier, c est passionnant, confie-t-il. Je m aperçois que les techniques de travail sont très différentes d un pays à l autre. J espère pouvoir atteindre le niveau international d ici à deux ans. L idée de m envoler pour le Brésil pour y représenter mon pays est ma principale motivation.» Rendez-vous dans deux ans
Entretien avec... Daniel Vatant, conseiller technique apprentissage et alternance au cabinet de Michel Sapin, ministre du Travail, de l Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social. Que pensez-vous de la compétition? C est la première fois que j assiste à une finale internationale des Olympiades des Métiers. L événement est considérable et l atmosphère très chaleureuse. Il y règne une bonne humeur très agréable. Tout le monde est uni autour de la formation des jeunes et de l excellence des métiers. On est à la fois dans l émulation collective et la compétition. Qu est-ce qui vous a le plus impressionné lors de votre visite? La concentration des jeunes candidats. Les ouvrages qu ils réalisent durant leurs épreuves tendent à la perfection. Plus c est parfait et plus ça a l air simple. C est étonnant! Il n y a pas meilleur salon de l orientation. En France, l ensemble des acteurs de la formation professionnelle se mobilise pour les Olympiades des Métiers : les branches professionnelles, les collectivités, l État Tous concourent pour donner aux jeunes le maximum de chances de réussite. Cet événement contribue également à promouvoir les métiers et la formation professionnelle, notamment l apprentissage. L Allemagne a une longue tradition de l apprentissage En effet, il y a une forte culture de la formation en entreprise, qui semble plus ancrée qu en France. Les jeunes se forment en centre de formation lorsque l entreprise ne peut leur offrir toutes les situations de formation nécessaires à la qualification. C est une des spécificités du système allemand par rapport à l alternance telle que nous la connaissons.
TOUT EN IMAGES << Didier Ridoret (au centre), président de la FFB, entouré notamment, de gauche à droite, de Jean-Yves Robin (FFB), Michel Guisembert (président de WorldSkills France) et Aline Mériau (FFB, présidente de BTP CFA Centre) << Extérieur du Leipzig Messe << Alexandre Gavand, candidat français en bijouterie-joaillerie << Candidats en mécatronique << Tram de Leipzig << Stand de la compétition en maintenance aéronautique
TOUT EN IMAGES << Esplanade aux drapeaux WorldSkills du Leipzig Messe << Monika Tohvri, candidate estonienne en art floral << Stand de la région de Saxe, cubes dessinés réalisés par des écoliers << Sung Chang Youn, candidat coréen en ingénierie plastique << Nicolas Pierot, candidat français en pâtisserie-confiserie << Centre-ville de Leipzig