YD/KF/AE REPUBLIQUE DE CÔTE D IVOIRE ------------- COUR D APPEL D ABIDJAN -------------------- TRIBUNAL DE COMMERCE D ABIDJAN -------------------- ORDONNANCE DE REFERE du 27/10/2015 ----------------- RG N 3766/2015 ------------------- Affaire : La Société Carthage Internationale Moving dite C.I.M. (Cabinet ORE & Associés) Contre La Société Africaine de Transit et de Transport dite SA2T (M e ATTABI Honoré) ----------------- DECISION ----------------- Contradictoire --- Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu elles aviseront ; mais dès à présent, vu l urgence ; Recevons la société Carthage International Moving dite CIM en son action ; L y disons mal fondée ; L en déboutons ; La condamnons aux entiers dépens de l instance. AUDIENCE PUBLIQUE DU 27 OCTOBRE 2015 L an deux mil quinze ; Et le vingt-sept octobre ; Nous, Docteur KOMOIN François, Président du Tribunal de Commerce d Abidjan, statuant en matière de référé en notre Cabinet sis à Cocody les Deux-Plateaux ; Assisté de Maître ANGUI ATSE, Greffier ; Avons rendu l ordonnance dont la teneur suit : Par exploit d huissier du 14 octobre 2015, la Société Carthage Internationale Moving dite C. I. M. a assigné la Société Africaine de Transit et de Transport dite SA2T à comparaître le 20 octobre 2015 devant la juridiction des référés de ce siège à l effet de s entendre : - lui faire injonction de libérer et remettre entre les mains de Monsieur Chagona James William le conteneur n HJSCTUN5002181100 contenant les effets personnels et le véhicule de ce dernier sous astreinte comminatoire de dix millions (10.000.000) de francs CFA par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir ; - ordonner l exécution provisoire de la décision à intervenir sur minute et avant enregistrement ; - condamner aux entiers dépens de l instance distraits au profit du Cabinet Oré et Associés. Au soutien de sa demande, elle expose qu elle a confié à la société SA2T la prise en charge de la procédure et des frais de dédouanement d un conteneur n HJSCTUN5002181100 comportant des effets personnels et un véhicule appartenant à Monsieur Chagona James William, qui a été embarqué à Tunis sur le navire Hanjin Versailles le 5 août 2015 et est arrivé à Abidjan le 9 septembre 2015 ; 1
Que pour l accomplissement de sa mission relativement audit conteneur, la société SA2T lui a transmis une facture n 0287/15 en date du 19 août 2015 d un montant de trois mille deux cent quatre-vingt (3.280) Euros ; Que suivant un Swift en date du 8 septembre 2015, elle s est acquittée du règlement de la facture susmentionnée par virement du montant sur le compte BICICI n CI0060155001189470008769 appartenant à la société SA2T ; Que contre toute attente, la société SA2T refuse de livrer le conteneur susmentionné à Monsieur Chagona James William sous prétexte qu elle resterait lui devoir des créances antérieures n ayant aucun lien avec ledit conteneur ; Que pour cette raison, la société SA2T a décidé de «réquisitionner» selon elle, c est-à-dire retenir le conteneur dont s agit en violation flagrante de toutes les dispositions légales en la matière ; Qu en effet, l article 68 de l Acte uniforme portant organisation des sûretés dispose que : «Le droit de rétention ne peut s exercer que : - Si la créance du rétenteur est certaine, liquide et exigible ; - S il existe un lien de connexité entre la naissance de la créance et la détention de la chose retenue ; - Et si le bien n a pas été saisi avant d être détenu par le rétenteur». Que ces dispositions posent des conditions qui sont cumulatives de sorte que si l une des conditions fait défaut, le droit de rétention ne peut se réaliser ; Qu en l espèce, la société SA2T ne fait pas la preuve à son encontre d une décision de justice définitive justifiant une créance certaine, liquide et exigible en l espèce ; Qu en outre, la société SA2T réclame de prétendues créances antérieures qui n ont aucun lien avec le conteneur de sorte qu il n existe aucun lien de connexité ; Qu enfin, il est de jurisprudence constante que le droit de rétention ne peut s exercer légitimement que si le bien 2
retenu appartient au débiteur ; ce qui n est pas le cas en l espèce pour la simple raison que le conteneur dont s agit est au nom et contient des effets de Monsieur Chagona James Williams ; Qu au regard de ce qui précède, il est évident que la rétention opérée par la société SA2T sur le conteneur dont s agit ne se justifie pas en l espèce et est donc abusive de ce fait ; Que malgré la sommation du 13 octobre 2015 d avoir à libérer le conteneur concerné, la société SA2T refuse obstinément de s exécuter ; Qu elle sollicite que la juridiction de céans l y contraigne ; En réplique, la SOCIÉTÉ AFRICAINE DE TRANSIT ET DE TRANSPORT dite SA2T fait valoir que les caractères certain, liquide et exigible de sa créance résultent de factures qu elle a adressées à la société CARTHAGE INTERNATIONAL MOVING dite CIM et qu elle n a jamais contestées et a plutôt au contraire reconnues à travers les échanges de correspondances ; Qu en outre, les sociétés CIM et BIARD ont été en relation de partenariat avec la société SA2T pour l expédition des biens du personnel de la Banque Africaine de Développement dite BAD de Tunis à Abidjan, et que c est dans le cadre de ce partenariat qu elle a pris en charge les formalités douanières et portuaire concernant le conteneur actuellement objet de rétention ; Dès lors pour elle il y a connexité entre la créance de la S2AT et le conteneur retenu ; Enfin elle précise que le conteneur retenu n a fait l objet d aucune saisie antérieure ; Les conditions des articles 68 et 69 de l acte uniforme portant organisation des suretés étant réunies, il convient, selon la défenderesse, de débouter la société CIM de ses prétentions ; En la forme SUR CE 3
Sur le caractère de la décision La défenderesse a comparu et conclu ; Il y a donc lieu de statuer par décision contradictoire ; Sur la recevabilité de l action L action ayant été initiée dans le respect des prescriptions légales de forme et de délai, il y a lieu de la recevoir ; Au fond Sur la demande tendant à la restitution du conteneur retenu La société CIM sollicite la condamnation de la société S2AT, sous astreinte comminatoire de dix millions (10.000.000) de F CFA par jour de retard, à lui restituer le conteneur N HJSCTUN5002181100 que celle-ci retient ; celle-ci s y refuse aux motifs qu elle exerce un droit de rétention sur ledit conteneur. L article 68 de l acte uniforme portant organisation des sûretés dispose : «Le droit de rétention ne peut s'exercer que : - si la créance du rétenteur est certaine, liquide et exigible ; - s'il existe un lien de connexité entre la naissance de la créance et la détention de la chose retenue ; - et si le bien n'a pas été saisi avant d'être détenu par le rétenteur» ; Il s en infère que trois conditions cumulatives doivent être remplies pour pouvoir exercer un droit de rétention ; La première tient en l existence d une créance certaine, liquide et exigible entre les parties ; Est certaine, une créance dont l existence est actuelle et incontestable ; Est liquide une créance déterminée en son quantum ; Est exigible, une créance dont le débiteur ne peut se prévaloir d aucun terme ou condition pouvant en retarder ou empêcher le paiement de sorte que le titulaire peut en 4
exiger immédiatement le paiement ; En l espèce, la société S2AT retient le conteneur litigieux pour avoir paiement d une créance de vingt-cinq mille huit cent soixante-douze (25.872) Euros ; Les factures impayées et non contestées produites au dossier attestent de l existence d une somme de vingt-cinq mille huit cent soixante-douze (25.872) Euros que la société CIM reconnaît devoir à la société S2AT à travers diverses correspondances ; aucun terme n a été convenu entre les parties pour le paiement de cette créance ; Il existe donc entre les parties une créance actuelle et incontestable, déterminée en son quantum et dont le paiement peut être immédiatement exigé ; ce qui en fait une créance certaine, liquide et exigible ; Dès lors, contrairement à ce qu avance la demanderesse, il n est pas nécessaire pour la société S2AT de disposer d une décision de justice pour faire la preuve de sa créance à son égard ; La première condition est ainsi remplie ; La deuxième condition tient en l existence d un lien de connexité entre la naissance de la créance et la détention de la chose ; L article 69 de l acte uniforme portant organisation des sûretés précise que : «La connexité est réputée établie : 1 ) lorsque la chose retenue a été remise jusqu au complet paiement de la créance du rétenteur ; 2 ) lorsque la créance impayée résulte du contrat qui oblige le rétenteur à livrer la chose retenue ; 3 ) lorsque la créance impayée est née à l occasion de la détention de la chose retenue.» ; En l espèce la société S2AT retient le conteneur dont la restitution est sollicitée pour avoir paiement d une créance née de relations d affaire entre les parties portant sur l expédition des biens du personnel de la Banque Africaine de Développement dite BAD de Tunis à Abidjan ; Le conteneur litigieux contient des affaires appartenant à l un des membres du personnel de la BAD et a été confié à la société S2AT par la société C.I.M. à l occasion du 5
contrat d expédition liant les parties dans le cadre du partenariat établi entre elles à cet effet ; Il y a donc un lien de connexité entre la naissance de la créance et la détention du conteneur retenu ; La deuxième condition est également remplie ; La dernière condition réside dans l absence d une saisie antérieure ; En la présente cause, le conteneur retenu ne fait pas l objet de saisie antérieure, de sorte que la dernière condition s en trouve elle aussi remplie ; Les conditions requises pour exercer le droit de rétention étant toutes réunies en l espèce, il sied de dire que la demande tendant à la restitution du conteneur N HJSCTUN5002181100 est mal fondée et la rejeter ; Sur les dépens La demanderesse succombe et doit supporter les dépens ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référés et en premier ressort ; Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu elles aviseront ; mais dès à présent, vu l urgence ; Recevons la société Carthage International Moving dite CIM en son action ; L y disons mal fondée ; L en déboutons ; La condamnons aux entiers dépens de l instance. Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus. ET AVONS SIGNE AVEC LE GREFFIER. /. 6