Le Bulletin Économique. www.eulerhermes.com N 1188. Les dossiers. Transports Un monde à deux vitesses



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Direction des Études Économiques du Groupe Euler Hermes Le Bulletin Économique www.eulerhermes.com N 88 * Les dossiers Transports Un monde à deux vitesses * notre savoir au service de votre succès

Euler Hermes Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Sommaire n 88 Les dossiers Transports Un monde à deux vitesses Le Bulletin Économique n 88 Les dossiers Transports Un monde à deux vitesses Éditorial page 3 page 4 > Automobile L Europe en panne dans un monde qui roule page 4 1 Un marché mondial en croissance de 4/5% par an page 5 2 Une production tirée par la croissance de la demande des pays émergents mais pas seulement page 6 3 Le marché mondial a également profité de la reprise aux États-Unis et au Japon page 7 4 L Europe continue de souffrir page page > Transport maritime Une offre surcapacitaire page page 13 > Transport ferroviaire Un secteur en croissance mais dépendant des fonds publics page 13 page 14 > Aéronautique L industrie aéronautique sur des vents porteurs page 14 1 Un niveau de livraisons d appareils immunisé contre les influences de l environnement économique? page 14 2 Des défis demeurent pour l industrie aéronautique page 16 3 L accès au financement pour les achats d appareils, toujours un paramètre crucial pour l industrie aéronautique page 18 page 19 > Transport aérien Les compagnies aériennes classiques, un monde fragmenté page 19 Implantations page 21 Les Bulletins Économiques de l année page 23 Le Bulletin Économique du Groupe Euler Hermes est publié mensuellement par la Direction des Études Économiques du Groupe Euler Hermes. Il est destiné aux clients du Groupe Euler Hermes, mais est aussi disponible sur abonnement pour des entreprises ou organismes extérieurs. Reproduction autorisée sous réserve de mention de la source. Se renseigner auprès de la Direction des Études Économiques Directeur de la publication et Chef Économiste : Ludovic Subran Études macroéconomiques et défaillances : Maxime Lemerle (Responsable), Mahamoud Islam, Ana Boata (Économistes), Romeo Grill (Économiste Allemagne), Dan North (Économiste États-Unis), Clément Bouillet (Chargé d Études) Études sectorielles : Yann Lacroix (Responsable), Bruno Goutard, Marc Livinec, Didier Moizo (Économistes sectoriels) Études Risques Pays : David Atkinson (Responsable), Andrew Atkinson, Manfred Stamer (Économistes) Édition : Martine Benhadj Conception graphique : Claire Mabille Administration et documentation : Valérie Poulain, Mathilde Lavaud Pour tous renseignements : Direction des Études Économiques 1, place des Saisons 92048 Paris La Défense Cedex Tél. : +33 (0) 1 84 50 46 Courriel : research@eulerhermes.com > Euler Hermes Société anonyme à directoire et conseil de surveillance au capital de 14 451 032,64, RCS Paris B 388 236 853 Impression : Évreux Compo à Évreux Dépôt légal octobre 20 ; issn 1 162 2 881 Achevé de rédiger le 13 décembre 20 2

Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Euler Hermes Éditorial Une nouvelle mobilité année 20 aura marqué un tournant pour le transport au plan mondial, qu il L soit routier, ferroviaire, maritime ou aérien. Malgré une croissance naturelle tirée par la démographie, et l enrichissement, les cartes ont été largement rebattues entre régions du monde et acteurs du transport. L Europe semble en atterrissage forcé, voire à l arrêt, pendant que le nouveau monde (pour ne pas parler de pays émergents, vu qu ils ont clairement émergé après la crise de 20), lui, roule vite, parfois très vite. Ces chiffres relativement inquiétants, sont par ailleurs, tout aussi limités en termes de perspectives. La crise prolongée en zone euro créé notamment de nombreux obstacles et davantage d incertitudes sur l avenir des marchés en Europe. La réduction du soutien public face aux ajustements budgétaires massifs, les ménages au pouvoir d achat sous pression et dans l attente de jours meilleurs, déplacent leurs décisions de consommation sont autant de raisons de s attendre à un impact sur la rentabilité des acteurs du secteur. On attend avant d acheter la nouvelle voiture, on hésite à partir loin en vacances. Activité en berne, les défis des surcapacités sont autant de tracas que la filière doit résoudre. Les restructurations menées à bien sur le sol américain, dans l automobile ou l aérien, semblent déferler de l autre côté de l Atlantique, perturbant encore davantage une industrie qui prend ses sources dans les révolutions industrielles qui ont façonné le Vieux continent. Pourtant, comme l écrit Roger Fournier, l imagination est la meilleure compagnie de transport au monde et elle reste vive en Europe. Lorsque que l on s intéresse aux stratégies des constructeurs automobiles, ou à la force du business model des avionneurs, ou encore à l innovation (il n y a qu à assister à des salons pour voir les incroyables trouvailles encore en prototype), on se rend compte que malgré un marché déprimé, les idées restent claires et nombreuses. La mobilité des savoirs et des savoir-faire semblent être une belle évolution pour le transport dans les pays industrialisés. Pendant ce temps, une révolution s opère il est vrai, dans les pays moins mûrs disons. Le rattrapage en termes d équipement pour le transport, et surtout en moyens de transport sera lui, une révolution. Et comme pour toute révolution, y compris industrielle, on peut toujours compter sur l Europe! _Ludovic Subran 3

Euler Hermes Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Automobile L Europe en panne dans un monde qui roule Le marché mondial croît actuellement de +4/5% par an, mais la production et la consommation se sont déplacées vers les nouvelles économies. Dès 20, la croissance des marchés émergents se stabilise (à un tempo honorable), grâce notamment à un soutien public et privé au Brésil et en Inde. Le net redressement de l industrie automobile américaine est entaché par la crise européenne, l industrie nipponne continue de souffrir du yen cher. En Europe, face à un marché toujours en baisse de -7% en 20 et durablement bas, les constructeurs géné- Légende de la météo des secteurs Note A B Note Note C Note D Perspectives favorables Des signes de faiblesse Faiblesses structurelles Crise imminente ou avérée Non disponible > La météo des secteurs est un système de notation établi sur la base de l expertise microéconomique des arbitres et des analystes du groupe Euler Hermes qui suivent les risques au plus près des entreprises partout dans le monde, à travers un réseau de plus de cinquante filiales locales. La météo donne un diagnostic qualitatif sur la santé et les perspectives d un secteur à l étude dans un pays, une zone ou le Monde. Elle recoupe généralement les prévisions de progression de l activité et reflète plus la santé des entreprises (marges, solvabilité) que la progression des chiffres d affaires. > à partir de cette année, la météo couvre un plus grand nombre de pays 32 au total répartis sur les six grandes régions Euler Hermes. Le nombre de modalités pour la notation a été réduit à 4, contre 5 auparavant, pour éviter un niveau moyen peu représentatif. La catégorie non disponible correspond à un secteur absent d un pays ou à un agrégat non calculable. La météo d un secteur pour une région donnée est la somme pondérée (par le PIB) des météos des pays concernés._ Source : Euler Hermes 4

Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Euler Hermes ralistes manquent de rentabilité, et devront nécessairement adapter leurs outils industriels. Plus que jamais, une présence internationale et adaptée est indispensable pour dégager une bonne rentabilité et financer investissements et recherche. Note Monde proche de 75% pour atteindre près de 4 millions de véhicules. à l opposé, la production chutait de -16% au Royaume-Uni, de -20% aux États-Unis de -24% en France et de -38% en Italie. La chute de près de -28% au Japon est à relativiser par les difficultés de production qui ont perduré plusieurs mois suite au tremblement de terre et Tsunami début 20. On évoque ici la production des véhicules particuliers et commerciaux pour une vision exhaustive. Au total, près de 80 millions de véhicules ont été produits en 20 dont 75% de voitures particulières (VP) et 25% de véhicules commerciaux (VC, poids lourds, bus, véhicules commerciaux légers). 1Un marché mondial en croissance de 4/5% par an Après avoir chuté de -% en 20 et rebondi de 26% en 20, la production automobile mondiale a retrouvé en 20-20 son rythme de croisière avec une croissance de 4/5% par an. Pour 2013 nous estimons que cette croissance devrait se maintenir. Cependant, si la croissance mondiale de la production a retrouvé un rythme linéaire, on a constaté un profond bouleversement entre 20 (avant crise) et 20 (après crise) avec une forte contraction de la production dans les pays matures, hors Allemagne, et une forte poussée des pays émergents. La Chine a vu sa production, comme son marché, exploser de 7% sur la période pour dépasser les 18 millions de véhicules produits et devenir ainsi le premier marché mondial. L Inde a également connu un fort taux de progression Production automobile mondiale 90 85 80 75 70 65 60 véhicules particuliers et véhicules commerciaux, en millions d unités prévisions 55 00 01 02 03 04 e 13p Sources : OICA, prévisions Euler Hermes Production automobile par pays Production automobile par pays (VP et VC) en millions d unités Production VP et VC 20 20 Chine 8,9 18,4 Inde 2,3 3,9 Mexique 2,1 2,7 Brésil 3,0 3,4 Corée du Sud 4,1 4,7 Allemagne 6,2 6,3 Grande Bretagne 1,8 1,5 Espagne 2,9 2,4 USA,8 8,7 France 3,0 2,3 Japon,6 8,4 Italie 1,3 0,8 Source : OICA Variation de la production automobile par pays (VP et VC) 20/20 Chine 7,4% Inde 74,7% Mexique 27,9% Brésil 14,4% Corée du Sud 14,0% Allemagne 1,6% Grande Bretagne -16,4% Espagne -18,5% USA -19,7% France -23,9% Japon -27,6% Italie -38,5% Source : OICA 5

Euler Hermes Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Note Chine Une production tirée par la croissance 2de la demande des pays émergents, mais pas seulement Avec la crise 20-20, des plans de relance massifs avaient généré des croissances de ventes annuelles impressionnantes pour les véhicules particuliers. La Chine devenue le 1er marché du monde Le pays a connu une augmentation des ventes automobiles de +50% en 20 et encore de plus de 33% en 20 avant de revenir à un rythme de croissance plus sain de 5/6% par an. Le marché chinois est ainsi passé de moins de 7 millions d unités pour l année 20, à plus de 15 millions cette année. La croissance des ventes est quasi certaine pour de nombreuses années du fait d un taux d équipement encore très faible, de l ordre de 5%, quand il atteint 60% en Europe et au Japon, et dépasse même les 80% aux États-Unis. Il s agit de surcroît d un marché très rentable, le client ayant soif de toutes les nouvelles technologies et des meilleurs équipements de confort. Il reste dominé par les constructeurs occidentaux, General Motors et Volkswagen s y disputent la première place. Les constructeurs de nationalité chinoise représentent moins du 1/3 du marché, et sont encore trop nombreux, on en dénombre près d une centaine, ce qui nécessitera des rapprochements et des fusions pour obtenir des acteurs de taille internationale capables de rivaliser, notamment en recherche et développement avec les leaders du secteur. L Inde, bien qu en croissance, reste un petit marché rapporté à sa population de plus d un milliard d habitants L Inde a connu également une forte croissance des ventes de près de 20% en 20 et de plus de 30% en 20 avant, là aussi, de s assagir avec un rythme revenu à 4/5% par an. Mais c est bien là le seul parallèle avec la Chine car le marché indien reste de taille très modeste à 2 millions de véhicules par an, soit la taille du marché français. Il est de surcroît orienté sur des véhicules très peu chers, low cost voir ultra low cost, à l image de la Tata Nano, le véhicule à moins de 2 000 dollars. L Inde offre également un fort potentiel de croissance à long terme, avec un taux d équipement inférieur à 2%, mais il est pour l heure nettement moins rentable que le marché chinois. Toutefois, à l inverse de la Chine et de ses multitudes d acteurs, le secteur automobile indien est dominé par quelques grands conglomérats, tels Tata ou Mahindra à la puissance financière certaine. Note Inde Immatriculations VP Immatriculations VP en Chine Immatriculations VP en Inde 18 glissement annuel en millions d unités prévisions 2,5 glissement annuel en millions d unités prévisions 16 14 2,0 1,5 8 6 1,0 4 2 13 0,5 13 Sources : China Association Automobile Manufacturers, prévisions Euler Hermes Sources : Society of Indian Automobile Manufacturers, prévisions Euler Hermes 6

Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Euler Hermes Le Brésil à la recherche d un second souffle Pour soutenir le marché, le gouvernement brésilien a dû réduire, voire dans certains cas supprimer la taxe sur les produits industrialisées depuis août 20, et jusqu'à fin décembre 20, ce qui a mécaniquement dynamisé les ventes qui devraient croître de 7% cette année, avant certainement de ralentir à 3/4% en 2013. Il se vend au Brésil plus de 2,8 millions d unités plutôt orientées sur des modèles moyen de gamme à l européenne. Tous les grands constructeurs y sont présents industriellement, y voyant là aussi de bonnes perspectives de croissance à moyen terme avec un taux d équipement de seulement 15%. La Russie pourrait devenir le nouveau moteur du continent européen Si le taux d équipement y est plus élevé, à près de 25%, il repose sur un parc très ancien avec plus de ans de moyenne d âge. Mais là plus encore qu ailleurs, c est l industrie automobile qui est à reconstruire. C est la raison pour laquelle certaines barrières ont été mises en place afin de forcer les constructeurs à produire sur place, et que le principal constructeur russe, Avtovaz (fabricant de la marque Lada) a été vendu au groupe Renault, qui y apporte non seulement des fonds mais également ses modèles de marque Dacia. Le marché russe devrait croître de % en 2013 et encore de 5% en 2013, dépassant alors les 3,1 millions d unités et devenant le 1er marché du continent européen. Note Russie Note Brésil Immatriculations VP Immatriculations VP au Brésil Immatriculations VP en Russie 3,5 glissement annuel en millions d unités prévisions 3,5 glissement annuel en millions d unités prévisions 3,0 3,0 2,5 2,5 2,0 2,0 1,5 1,5 1,0 1,0 13 0,5 13 Sources : Associaçao Nacional dos fabricantes de Vehiculos Automotores, prévisions Euler Hermes Sources : statistiques nationales, prévisions Euler Hermes 7

Euler Hermes Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses La rentabilité des constructeurs automobiles par origine Le marché mondial a également profité 3de la reprise aux états-unis et au Japon Simple rattrapage ou vrai rebond, des situations contrastées aux États-Unis et au Japon. Les états-unis en net redressement profitent d un effet rattrapage Alors que sur longue période, le marché américain immatriculait plus de 17 millions de véhicules par an, il s est littéralement effondré à,5 millions d unités en 20, entraînant dans sa chute deux des trois constructeurs General Motors et Chrysler placés sous la protection du droit des faillites. Mais les difficultés des constructeurs américains ne sont pas la conséquence de la crise économique et financière de 20-20, elles résultent de leur perte de parts de marché avec une offre produits mal adaptée et des coûts de États-Unis 20 20 20e 2013p variation CA 18,2% 8,3% -1,5% 3,9% Taux de résultat opérationnel* 7,4% 6,5% 4,7% 5,5% Source : données cumulées GM, Ford, consensus * Taux de résultat opérationnel=résultat opérationnel/ca Note États-Unis structure trop élevés. En effet, sur les exercices 20 et 20, soit avant la crise, General Motors et Ford avaient dégagé une perte cumulée de plus de 60 milliards de dollars. Avec l aide de l État pour General Motors et Chrysler, seul pour Ford, ils ont dû restructurer leurs outils de production avec la fermeture de 18 usines et des effectifs passés de 1,1 million de salariés en 20 à moins de 700000 en 20. Depuis 20, le marché se redresse et affiche même cette année une croissance de % pour se rapprocher de 15 millions d unités, niveau qu il devrait largement franchir en 2013 avec une croissance de 5% des ventes. Les groupes américains, forts d une offre renouvelée, totalement restructurés, et sur leur propre marché en croissance, ont retrouvé le chemin de la rentabilité et permis tant à General Motors qu à Chrysler de sortir du Chapter, le premier en revenant sur le marché boursier, le second en s alliant avec l Italien Fiat. Avec une rentabilité opérationnelle de 5/6% affectée en 20 par les pertes de 1 milliard de dollars pour chacune de leurs filiales européennes. Hier encore moribonde, l industrie automobile américaine a su se remettre en question et opérer les choix stratégiques, certes particulièrement lourds mais nécessaires, pour lui permettre de revenir dans le peloton de tête des constructeurs automobiles mondiaux. Le marché américain offre la particularité d être dominé par les ventes de light trucks et Sport Utility Vehicule (SUV) qui représentent plus de 50% des ventes totales, et qui offrent un bon niveau de rentabilité. Immatriculations VP et effectifs aux États-Unis Immatriculations VP Évolution des effectifs chez les constructeurs et équipementiers 18 glissement annuel en millions d unités prévisions 1400 en milliers 1300 16 00 10 14 00 900 800 700 13 600 00 01 02 03 04 Sources : Auto Alliance, prévisions Euler Hermes Sources : statistiques nationales 8

Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Euler Hermes Note Japon La rentabilité des constructeurs automobiles par origine Japon 20 03/20 03/20 03/20e 03/2013p var CA,2% -,1% 5,7% -2,6% 19,0% Taux de résultat opérationnel* 8,0% 2,0% 3,9% 3,0% 4,5% Source : données cumulées Toyota, Nissan, Honda, Mazda, Mitsubishi, consensus * Taux de résultat opérationnel=résultat opérationnel/ca Au Japon, le rebond des ventes est technique La forte croissance constatée sur 20, supérieure à 30%, résulte d une base comparable 20 marquée par l effondrement de la production et des ventes, de plus d un million de véhicules, liées au tremblement de terre et tsunami. Sur le long terme, le marché nippon est plutôt baissier avec le vieillissement de sa population, la saturation des centres-villes, et l obligation de détenir un parking pour tout achat d un véhicule dans les mégapoles. Pour 2013, le marché japonais devrait connaître une contraction d environ 5%. Au delà de la volatilité de leur propre marché, les constructeurs japonais souffrent d une forte concentration de leur production automobile sur l Archipel, et donc de l évolution de la parité de sa propre monnaie face au dollar ou à l euro. Ce qui fit sa force sur la première partie de la décennie 2000, un yen déprécié de 40% face à l euro sur la période 2001-20, lui apportait un avantage compétitif évident. Durant cette période, la marge opérationnelle moyenne des constructeurs japonais oscillait entre 7 et 8%, mais la parité yen/euro ayant retrouvé depuis mi-20 son niveau de début 2000 (0 yen pour 1 euro) réduisant leur avantage compétitif, et donc leur rentabilité opérationnelle qui s affiche maintenant à un niveau de 4% plus conforme à celle d un constructeur généraliste. Production des constructeurs japonais en millions d unités Production 20 20 Japon 9 944 637 7 158 525 étranger 856 942 13 382 390 Part du Japon 46% 35% Source : Jama (Japan Automobile Manufacturers Association) Immatriculations VP au Japon et parité yen/euro Immatriculations VP Parité yen/euro 6,0 glissement annuel en millions d unités prévisions 1,20 0 JPY=1 EUR 5,5 1, Gain de compétitivité 5,0 0,92 4,5 0,78 4,0 0,64 Perte de compétitivité 3,5 13 0,50 00 01 02 03 04 Sources : Jama (Japan Automobile Manufacturers Association), prévisions Euler Hermes 9

Euler Hermes Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Note Europe 4 L Europe continue de souffrir Après l épiphénomène prime à la casse, le marché européen a retrouvé son trend baissier engagé en 20. Un marché durablement déprimé Avant la crise, les immatriculations automobiles en Europe s élevaient entre 15,5 et 16 millions de véhicules par an. Depuis la crise, le marché ne cesse de décroître malgré l épiphénomène 20 des primes à la casse. Actuellement, on est sur une tendance annuelle d environ,6 millions d unités vendues, en baisse de -7% par rapport à 20, et 2013 devrait encore afficher une légère contraction que l on estime à environ 3%. Au delà du cas grec, dont les ventes ont chuté à 64 000 en données annuelles quand elle culminait à 280 000 par an avant la crise, c est l ensemble de l Europe du Sud qui souffre. En Espagne, les ventes ont été plus que divisées par deux, comme au Portugal ; en Italie, elles ont chuté de plus de 40% et au Royaume-Uni, elles ont baissé de près de 20%. En France, le marché a été soutenu par d importantes remises et ristournes, mais la chute est en cours, et seule dans ce panorama bien sombre l Allemagne se maintient au dessus de 3 millions de véhicules immatriculés. acteurs et sur les sites de production. La production automobile de véhicules particuliers en Italie a été plus que divisée par deux depuis 20 (légèrement au dessus des 400 000 par an), où un site de production a été fermé (Termini en 20). En France également, la production a été divisée par deux (à 1,5 million d unités) et d importantes restructurations sont annoncées par PSA avec la fermeture annoncée pour 2014 du site d Aulnay. Au-delà des situations italienne et française, c est une large partie de l industrie automobile européenne positionnée sur une offre généraliste qui doit gérer les surcapacités de production actuelles, comme a dû le faire Opel avec la fermeture du site d Anvers en 20, et comme vient de l annoncer Ford avec la fermeture programmée de Genk en Belgique d ici 2014. Production VP en Italie 1,0 glissement annuel en millions d unités Qui nécessite l adaptation des outils de production Cette forte contraction du marché européen de plus de 20% correspond à une diminution des ventes européennes d environ 3,5 millions de véhicules, ce qui n est pas sans conséquence sur la rentabilité des 0,8 0,6 Immatriculations VP en Europe 0,4 Sources : statistiques nationales 16,5 16,0 15,5 glissement annuel en millions d unités prévisions Production VP en France 3,4 glissement annuel en millions d unités 15,0 14,5 2,9 14,0 13,5 2,4 13,0,5 1,9,0 13 1,4 Sources : ACEA, prévisions Euler Hermes Sources : statistiques nationales

Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Euler Hermes Au sein d une Europe à deux vitesses La production espagnole a, elle, baissé de 26%, mais avec d importants efforts de compétitivité, celle-ci se contracte à un rythme proche de celui du marché. à l inverse, la production allemande a dépassé fin 20 son niveau d avant crise à près de 6 millions d unités ; elle évolue par contre sur 20 comme le marché européen qui concentre 65% de ses exportations automobiles et affichera sur l année 20 une contraction de 7%. Cette évolution à deux vitesses se lit aussi dans les chiffres de rentabilité des constructeurs européens, les généralistes pris en tenaille entre le développement d une offre low cost, et la descente en gamme des constructeurs premium affichent une très faible rentabilité d exploitation a seulement 1% de leur chiffre d affaires en 20, quand les constructeurs allemands, forts de leur présence sur tous les marchés, notamment États-Unis et Chine très rentables et de leur offre haut de gamme favorisant la marge, affichent une rentabilité d exploitation de 7,5% en 20. Ce différentiel de rentabilité limite d autant, pour les constructeurs généralistes, leurs capacités d investissements, tant en Recherche et Développement, qu en développement commercial pour profiter de l ensemble des marchés en croissance. YL La rentabilité des constructeurs automobiles par origine France 20 20 20e 2013p var CA 15,7% 7,9% -3,3% 4,1% Taux de résultat opérationnel* 2,9% 2,1% 1,0% 2,0% Sources : données cumulées PSA, Renault, consensus * Taux de résultat opérationnel=résultat opérationnel/ca Allemagne 20 20 20e 2013p var CA 21,4% 17,4%,1% 4,2% Taux de résultat opérationnel* 6,1% 7,4% 7,5% 8,3% Sources : données cumulées BMW, Daimler, VW, consensus * Taux de résultat opérationnel=résultat opérationnel/ca Équipementiers : la force d être mondial > Dans le contexte d un marché européen extrêmement dégradé, il est intéressant de regarder l évolution de la rentabilité des grands équipementiers européens de rang 1. Ils affichent depuis 20 un niveau de rentabilité qu ils n atteignaient pas, loin s en faut, au début des années 2000 outre le fait qu ils ont géré la crise en adaptant leur outil de production au volume en Europe, ils sont surtout allés chercher la croissance là où elle se situe, c'est-à-dire dans les pays émergents, mais aussi en investissant sur le continent américain. Cette capacité à aller chercher la croissance exige des moyens financiers que les sous-traitants de rang 2 et 3 n ont pas forcement. à l opposé de la rentabilité des grands équipementiers, les sous-traitants régionaux souffrent de la dégradation du marché européen et pour la plupart affichent une rentabilité faible ou négative. Europe 20 20 20 20 20 2013 var CA,0% -17,8% 34,7% 16,9% 7,6% 6,1% Taux rex* 3,4% 2,1% 6,9% 7,1% 6,8% 7,1% Source : cumulé Valeo, Faurecia, Plastic Omnium, Continental, Autolive, consensus * Taux de résultat opérationnel=résultat opérationnel/ca Production en Espagne et en Allemagne Production VP en Espagne Production VP en Allemagne 2,3 glissement annuel en millions d unités 6,00 glissement annuel en millions d unités 2,2 5,75 2,1 2,0 5,50 1,9 5,25 1,8 5,00 1,7 1,6 4,75 1,5 4,50 Sources : statistiques nationales Sources : statistiques nationales

Euler Hermes Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Transport maritime Une offre surcapacitaire > 1. Le transport maritime en quelques chiffres La mer tient une place prépondérante dans la globalisation : 0 000 navires battant 198 pavillons assurent le transport d environ 80% du transit commercial mondial. 43 millions de barils, sur une demande quotidienne d environ 80 millions, font l objet chaque jour d échanges internationaux par voie maritime. Le transport maritime de personnes, sans contestation pendant des siècles, se fait désormais en avion, à l exception résiduelle des croisières :,6 millions de personnes ont ainsi été transportées sur les flots en 20 contre 2 milliards dans les airs. PIB et commerce 4 3 2 1 0-1 -2 croissance annuelle, en % et en volume Commerce mondial (axe d) PIB OCDE (axe g) PIB non OCDE (axe g) -3 98 99 00 01 02 03 04 13 Sources : IHS Global Insight, prévisions Euler Hermes Croissance de la flotte mondiale de vrac sec 1500 00 en milliers de conteneurs embarqués 15 5 0-5 - -15 > 2. Le fret maritime a profité de l envolée du commerce mondial, mais souffre du ralentissement des échanges en 20 Le transport maritime de marchandise a évolué au gré du commerce mondial, affichant une croissance moyenne de 5,5% au cours des vingt dernières années. Mais le constat est actuellement bien plus terne, trois ans après l effondrement du commerce mondial en 20, le premier semestre 20 a marqué l arrêt définitif de la courte phase de redressement des échanges enregistrée en 20. La détérioration des échanges internationaux de biens et de services devrait se traduire par un taux de croissance du commerce mondial autour de 4%. Au cours des derniers mois, les évolutions des taux de fret, aussi bien pour les porte-conteneurs que le vrac et les activités de service, témoignent que des déséquilibres importants persistent sur ces différents marchés entre la capacité de transport offerte et la demande. Par conséquent, la capacité de la filière à adapter son offre aux évolutions de la demande sera un élément essentiel pour le transport maritime international afin de parvenir à une stabilisation des taux de fret dans les prochains mois. > 3. Une offre qui devrait rester surcapacitaire jusqu en 2014 et affecter la rentabilité des acteurs Le secteur du transport maritime est en effet menacé, notamment dans les pays avancés, par les évolutions des prix des carburants marins, par des politiques environnementales contraignantes et par la mauvaise situation économique de plusieurs compagnies européennes. Pour la plupart d entre eux, le principal problème auquel ils doivent faire face concerne l offre de capacité de transport, et non pas la demande. La hausse de la flotte mondiale et donc des capacités devrait perdurer au moins jusqu en 2014. Cela implique deux conséquences pour les armateurs : une moindre utilisation des navires, et donc une moindre couverture des charges fixes, et une plus grande difficulté à imposer leurs prix de vente. 500 0 500 e : estimation, p : prévision Source : BIMCO, CRSL e 13p 14p Livraisons Démolitions 15p > 4. Le paradoxe d un secteur encore en croissance, mais pénalisé par ses surcapacités Pour 2013, les perspectives restent également préoccupantes pour le transport maritime en raison d une conjoncture économique toujours dégradée, notamment en Europe, générant un ralentissement du trafic sur les principaux marchés maritimes alors que les livraisons de nouveaux bateaux resteront importantes, menaçant d accroître encore les surcapacités. YL

Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Transport ferroviaire Progression des LGV dans l Union européenne de 1985 à 20 8000 en kilomètres Un secteur en croissance mais dépendant des fonds publics 7000 6000 5000 4000 3000 2000 00 0 85 90 95 00 01 02 03 04 Sources : Union internationale des chemins de fer Dépt. Grande Vitesse, sources nationales NB : ne sont reprises que les lignes ou les sections de lignes sur lesquelles les trains peuvent circuler à plus de 250 km/h Le poids du poste génie civil dans un projet de LGV >Les projets de création de lignes nouvelles à grande vitesse sont particulièrement coûteux. La mission a estimé le coût de construction d une ligne de 400 km sur un terrain ne présentant pas d obstacles naturels : Construction de l infrastructure Coût Structure en millions EUR en % Maîtrise foncière (pour mémoire) 540 9 Ingénierie (MOA, MOE) 600 Génie civil (terassements, OA...) 3180 53 Voies, ballastage 80 18 équipements ferroviaires (caténaires) 300 5 équipements ferroviaires (signalisations, télécommunications...) 300 5 Total 6000 0 MOA : maîtrise d ouvrage ; MOE : maîtrise d œuvre ; OA : ouvrage d art ; Source : MEDDTL > L industrie ferroviaire en quelques chiffres L industrie du ferroviaire s étend du métro ou tramway au train à grande vitesse. Selon l UIC (organisation internationale du ferroviaire), le rail a transporté en 20 2700 milliards de passagers kilomètres et 9000 milliards de tonnes kilomètres pour son activité fret. On dénombre environ 1 milliard de kilomètres de voies à travers le monde. En Europe, la part modale des chemins de fer est de 6% en transport de passagers et 7% pour le fret. > Vers une mobilité propre L ensemble du secteur bénéficie des investissements en Europe et en Amérique du Nord dans une optique d amélioration et parfois de rénovation des infrastructures existantes. Au contraire, l Asie et l Amérique du Sud conçoivent des nouveaux réseaux qui équiperont leurs villes et leurs régions en pleine croissance démographique. Qu il s agisse de désengorger les villes et réduire la pollution, le métro et le tramway offrent de belles perspectives de croissance, nombre de villes partout dans le monde développent cette forme de transport collectif. Le secteur des transports est responsable d environ 23 % des émissions mondiales de C02, la plus grande part de ces émissions étant imputable au transport routier et à l automobile. Les émissions globales de CO2 n ont pas cessé d augmenter depuis 1990 et l ensemble des modes de transport à l exception du rail ont vu croître leur part des émissions de gaz à effet de serre produites à partir d énergie combustible. Les compagnies de chemins de fer exploitant des services partout dans le monde produisent actuellement moins de 1 % des émissions totales de CO2 imputables aux activités de transport. > Les grands projets de lignes à haute vitesse Le transport ferroviaire offre lui aussi de belles perspectives après avoir fait sa révolution il y aune trentaine d années suite au lancement du train à grande vitesse, s il est bien connu en Europe et au Japon avec notamment les constructeurs français Alsthom, allemand Siemens et les japonais Japan Railway (JR) Tokai, JR East et JR West. De nombreux projets ont également plus récemment été lancés en Chine, où dès 2003 était planifiée la construction de 000 km de LGV d ici à 2020, chiffre porté à 16000km. La Chine a d ailleurs, face à ses investissements massifs, décidé de développer son propre TGV qu elle propose maintenant à la grande exportation. Selon l UIC, le développement rapide de la LGV, notamment en Asie, devrait porter à 50000 km le total des lignes à haute vitesse d ici 20. Quels que soient les pays, les projets se multiplient : au Maroc, 1500 km à construire d ici 2035, en Arabie Saoudite, 450km d ici 2014, au Brésil, 5 km d ici 2018. Mais au delà des kilomètres construits, c est le matériel roulant qui offre de réelles perspectives de croissance à l exportation, comme ce fut le cas pour Alstom en Corée du Sud, et plus récemment au Maroc. Comme tout secteur en croissance, la concurrence y est forte, notamment avec l Allemand Siemens qui outre son marché intérieur a obtenu les marchés espagnol, russe et chinois. > De fortes perspectives de croissance soumises aux finances publiques Ainsi, des prévisions de l OCDE font état d une croissance de la demande de transport, à l horizon 20, de 80 % pour le fret et 50 % pour le transport de passagers. Les transports par rail devraient progresser de huit fois et le transport ferroviaire de personnes de douze fois. Reste néanmoins une inconnue, le coût extrêmement élevé de tels investissements. On considère le prix du kilomètre d une ligne LGV à 15 millions d euros sur un parcours sans obstacle qui avec la crise de la dette, notamment en Europe, pourrait ralentir certains projets, à l image de ce que l on a pu constater aux états-unis, où des onze projets initialement présentés par le ministère des Transports début 20, il n en reste plus que six mi-20, cinq projets ont été abandonnés, le plus souvent pour des raisons de financements publics impossibles à mobiliser aux états-unis, la Floride en est un cas emblématique. YL 13

Euler Hermes Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Aéronautique 1400 00 00 800 600 400 200 L industrie aéronautique sur des vents porteurs Livraisons annuelles d appareils de plus de 0 places en unités 2e choc pétrolier Guerre du Golfe Crise du //2001 Crise 20-20 0 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 e Sources : constructeurs, Euler Hermes Note monde L industrie aéronautique poursuivra sa croissance en 2013 (+% des livraisons d avions de plus de 0 places), sous l'effet d une nouvelle progression des cadences de livraisons. La robustesse des carnets de commandes confère aux deux intervenants une grande visibilité sur les prochaines années, sans pour autant totalement occulter des risques industriels liés au déploiement de nouveaux programmes et les tensions actuelles sur la sous-traitance. 1Un niveau de livraisons d appareils immunisé contre les influences de l environnement économique? En 20, la production d avions commerciaux a poursuivi sa progression pour établir un nouveau record de livraisons à 55 unités (e), en progression de 14%. L industrie aéronautique confirme donc la solidité de son activité, qui semble s être affranchie de l environnement économique. 14

Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Euler Hermes Les moteurs de cette résistance/croissance en unités 20 20 20 20 20e Commandes nettes 1433 413 14 2224 1700 Carnets de commandes 7400 6850 7000 8200 8700 Sources : constructeurs, Euler Hermes Ce nouveau paradigme rompt ainsi avec la succession de chutes de production qui ont jalonné les 30 dernières années du secteur, au gré de la conjoncture mondiale. En effet, à chaque choc conjoncturel, le secteur subissait de fortes corrections d activité durant plusieurs années avant de retrouver la croissance. En ce qui concerne la récession 20-, l industrie aéronautique se distingue de bon nombre d autres filières puisque son niveau de production a traversé les turbulences économiques, sans pratiquement ne pas déroger de sa voie haussière. Compte tenu des augmentations des cadences de production d ores et déjà prévues par les constructeurs et sans considération pour les difficultés économiques rencontrées par l Europe, les livraisons pourraient même encore croître de % en 2013. Le nombre de commandes nettes pour 20, estimé en repli d environ 25%, a néanmoins souffert de la comparaison avec une année 20 exceptionnelle. En 20, en réponse aux performances de l A320 Neo d Airbus au cours l année précédente, la vedette du marché aura été, avec plus de la moitié des commandes annuelles, le monocouloir concurrent de Boeing, le B737 Max. Même avec ce retrait des commandes, le secteur reste sur des résultats commerciaux globaux encore très confortables, permettant de nouveau de conforter les carnets de commandes, qui représentent dorénavant environ 7 à 8 ans de production. En 2013, le nombre de commandes devrait encore faiblir pour revenir à son niveau moyen, clôturant ainsi deux années de forte effervescence commerciale suscitée par la mise sur le marché d appareils, en phase avec les besoins d une clientèle de compagnies aériennes aux prises avec les dégâts sur leur rentabilité d une facture carburant élevée. Des raisons de rester confiant sur l avenir Un examen plus attentif du portefeuille de clients des constructeurs incite à l optimisme car le secteur repose sur un triple relais d activité et de croissance. La lecture de la répartition géographique des compagnies clientes confirme l importance des interve- Le prix élevé du kérosène, du carburant pour les avionneurs L épée de Damocles que constitue le prix du carburant pèse sur la rentabilité de toutes les compagnies du secteur, quelle que soit leur taille et leur zone. Pesant environ 1/3 des coûts d exploitation, le cours du kérosène est le baromètre de la profitabilité sectorielle : lorsqu il flambe, les compagnies voient leurs résultats fondre, lorsqu il y a une accalmie, les intervenants retrouvent une meilleure rentabilité. En 20, les cours, encore à des niveaux historiquement élevés, ont obéré les résultats nets des acteurs du secteur, qui sont tombés globalement à +4,1Mds$. Néanmoins, on peut noter le chemin parcouru en comparant le bénéfice 20, certes modeste, aux pertes abyssales de 20 dans un contexte de prix du carburant similaire. Les transporteurs ont donc commencé à s adapter à la contrainte dorénavant quasi structurelle de coûts énergétiques élevés mais la rentabilité nette sectorielle semble se heurter à un plafond de verre, infranchissable dans de telles conditions de prix pétroliers. L étape suivante à cette première phase d adaptation a trouvé une réponse par le biais des avionneurs et motoristes qui ont mis sur le marché des appareils monocouloirs (gamme pour laquelle la demande est la plus forte), remotorisés et permettant d envisager des réductions de consommation de l ordre 15%. L engouement rencontré par ces appareils (les chiffres de commandes en sont la preuve) illustre la nécessité pour les compagnies de se doter d une flotte plus efficiente qui leur donnera la possibilité de retrouver une latitude de rentabilité. Les constructeurs (et la filière) sont les grands bénéficiaires puisque leurs carnets de commandes se sont davantage renforcés avec ces nouveaux appareils. Évolution annuelle des cours du carburant et des profits nets du transport aérien 150 0 90 60 30 0-30 USD par baril et mds USD 03 04 Profit net du transport aérien mondial Cours annuel moyen du carburant Sources : IATA, Euler Hermes -26,1 mds USD +8,4 mds USD +4,1 mds USD e 13p 15

Euler Hermes Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Ventilation des carnets de commandes des deux principaux avionneurs 5% Amérique latine et Caraïbes 16% Europe 2% Afrique 2Des défis demeurent pour l industrie aéronautique Malgré les perspectives favorables, l industrie aéronautique n en demeure pas moins soumise à certains risques. 26% Source : Euler Hermes 33% 15% Amérique du Nord Moyen-Orient Asie-Pacifique nants asiatiques et moyen-orientaux, qui constituent à eux seuls près de la moitié des commandes en valeur, pour seulement un tiers du trafic actuel. Deuxième relais d activité et de croissance : le dynamisme des compagnies low costs, en particulier asiatiques dont le potentiel demeure substantiel du fait du poids encore limité de ce type d offre sur ce marché régional. Enfin, troisième levier d activité et de croissance, en l occurrence un levier qui s affirme depuis 20, le renouvellement des flottes, à l image des commandes de monocouloirs par les compagnies américaines, afin de remédier au vieillissement de la flotte locale. Ce triple relais de prospérité, gage pour la vitalité commerciale et opérationnelle assure aussi une ventilation réconfortante des risques exogènes auquel le secteur est exposé, tels que les crises économiques régionales ainsi que les difficultés de certains segments de clients. à plus long terme, Airbus estime les besoins du transport aérien mondial, sur la période 20-2031, à 28200 nouveaux appareils (de plus de 0 places pour les avions passagers et dont 900 avions-cargo), correspondant à une valeur de 4000Mds$ sur la période. à cet horizon, la flotte mondiale aura doublé, passant de 15500 unités à l heure actuelle à 32500. Une rentabilité et une trésorerie sous pression industrielle Depuis plusieurs années, les performances des avionneurs ne sont pas affectées par les fluctuations défavorables de leur activité, dorénavant quasi inexistantes, mais par les coûts générés par le développement et la montée en puissance industrielle des nouveaux programmes. En effet, auprès des deux principaux constructeurs se sont multipliés les exemples de difficultés, telles que de lourds retards au cours du développement ou des problèmes dans les phases d industrialisation, qui ont affecté leur rentabilité et leur trésorerie. Encore en 20. Ainsi, les coûts liés au développement industriel de l A350XWB et les surcoûts engendrés par les opérations visant à résorber les microfissures sur toute la flotte d A380 ont encore pesé sur la profitabilité d exploitation d Airbus, mais l augmentation de la production sur toutes les gammes a contribué à son amélioration, passant de 1,7% en 20 à plus de 3% du chiffre d affaires en 20. Boeing a, quant à lui, maintenu une profitabilité opérationnelle élevée, de l ordre de 9,5%, grâce à une plus large gamme et en amortissant les surcoûts occasionnés par la montée en puissance du B787 sur la totalité de la production d avions projetée. Pour 2013, l amélioration des résultats se confirmera mais demeurera dépendante de l évolution de ces nouveaux programmes. Une expectative qui pèse sur les ventes de longcourriers et de jumbo jet L intérêt de carnets de commandes très fournis prend une dimension très concrète, avec le constat de la faiblesse des commandes enregistrées sur les segments de longs courriers et des jumbos jets en 20 : commandes dont le nombre a été divisé par 4 La rentabilité des constructeurs aéronautiques en % CA 20 20 20 20 20e Airbus Commercial 8,5% +1,5% +1,1% +1,7% +3,3% Boeing Commercial Airplanes 4,2% -1,7% +9,4% +9,7% +9,5% Sources : constructeurs, Euler Hermes 16

Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Euler Hermes Ventilation des commandes des constructeurs aéronautiques en 20 0 en quatre ans. Ainsi, s inscrivant dans une tendance baissière depuis 20, 20 marque un point bas pour les deals de long-courriers et jumbo jets, tant en nombre qu en part dans les commandes annuelles (moins de %), résultat des incertitudes, dissuasives actuellement pour les potentiels acheteurs, sur les calendriers de livraisons (B787/A350), les problèmes techniques (microfissures sur l A380) et les attentes de décisions stratégiques (évolution du B777). Une conjonction d éléments défavorables a également entravé les achats de ces gammes, qui plus est, plus coûteuses, en cette année 20 : rétorsion suite au dispositif de quotas d émissions de CO2 imposé par l UE (avant sa suspension) ainsi qu une plus grande sensibilité du secteur à la conjoncture mondiale. En revanche, ces quelques années de médiocres performances commerciales n ont pas entamé significativement la profondeur des carnets de commandes de ces gammes. Des réponses stratégiques à ces risques structurels Ces risques, et d autres, intrinsèques à l activité et au marché des constructeurs, façonnent le visage de l industrie aéronautique de demain. Risque 1 Les tensions ressenties au sein de la soustraitance suite aux hausses de production décidées par les donneurs d ordre finaux, les constructeurs. La voie à emprunter pour la sous-traitance et ouvertement encouragée par les avionneurs, passe bien évidemment par une consolidation des industriels, en particulier de rang 2 et 3, leur permettant de disposer d une assise financière à même de leur assurer l accès aux financements pour investir ou pour soutenir leur trésorerie dans les phases de fluctuations d activité (à la hausse comme à la baisse). Risque 2 Les incidences des difficultés des nouveaux programmes sur la rentabilité et la trésorerie des deux groupes, génératrices d incertitudes peu conciliables avec les exigences de la communauté financière. Les réponses empruntent plusieurs directions et s inscrivent dans le temps : recherche de flux réguliers pour lisser les variations d activité/rentabilité avec le renforcement des activités de maintenance, réparation, pièces détachées, par principe moins cycliques. gestion différente des programmes, avec dorénavant davantage de régulières itérations technologiques plutôt que des programmes décennales porteurs de nombre de ruptures technologiques. Il s agit dans ce cas de limiter les risques techniques/technologiques. possibles collaborations ponctuelles horizontales entre avionneurs afin de répartir les risques industriels. Risque 3 Le duopole Airbus/Boeing battu en brèche par l arrivée sur le marché de monocouloirs canadiens, chinois, russes. Face à cette perspective qui va bientôt se réaliser, les deux acteurs ont appliqué une stratégie d assèchement des potentiels du marché avec une forte agressivité commerciale. 80 60 40 20 0 e Long-courriers/jumbo jets Monocouloirs Sources : constructeurs, Euler Hermes 17

Euler Hermes Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses 3L accès au financement pour les achats d appareils, toujours un paramètre crucial pour l industrie aéronautique Le financement est un rouage indispensable entre les constructeurs aéronautiques et les transporteurs aériens. Période de transition Des craintes sont nées au cours et au sortir de la dernière crise au sujet d un potentiel tarissement des financements pour les livraisons d appareils neufs, mais le secteur n a pas rencontré de difficultés particulières. La béquille essentielle pour le secteur est, depuis cette période, la montée des puissances des mécanismes de soutien public à l export déployés par les États-Unis, l Allemagne, la Grande Bretagne et la France. D après Boeing Capital Corporation (BCC), les prêts bancaires adossés à ces garanties publiques ont ainsi représenté, selon les estimations, environ 30% des sources de financement du secteur en 20. Pour mémoire, leur niveau naviguait à environ 20% avant la crise, démontrant ainsi le besoin de pallier au retrait (très) partiel de certaines banques du marché aéronautique. Cette année, les financements bancaires (sans garantie publique) assuraient environ 21%. La crise n a pas eu pour seul effet de renforcer l importance des dispositifs de soutien public, mais a aussi poussé les acheteurs à se tourner vers d autres sources de financement, en particulier les marchés financiers (obligations), qui sont vraisemblablement passés de 5% à % des financements en 20. La situation, certes stabilisée, n est pas dépourvue de dangers pour les compagnies aériennes car la récente révision des modalités du soutien à l export public dans le cadre de l OCDE prévoit un réel renchérissement de ce mécanisme. Les leasers, dans un cycle gagnant, gagnant, gagnant en 20 Une pénurie de financement semble écartée et ce contexte de financement des nouveaux appareils toujours en mode crise n entrave pas la vitalité des livraisons et des commandes. Outre l émergence de nouveaux acteurs bancaires (japonais, chinois), le financement sectoriel a bénéficié du renforcement du rôle des leasers, appelés à posséder la moitié de la flotte mondiale en 2020. Cette dynamique s inscrit dans une convergence d intérêt : pour les avionneurs, besoin de vendre davantage pour financer les surcoûts inhérents aux nouveaux programmes et volonté d assécher le marché avec une offre renouvelée pour maintenir les compétiteurs émergents à l écart ; pour les compagnies, besoin d appareils pour accompagner la croissance et se doter d une flotte modernisée moins gourmande en carburant ; pour les leasers, à la recherche d actifs stables pour valoriser pleinement les liquidités des investisseurs attirés par la résilience de l actif appareils commerciaux affichée durant la crise 20-. Un cycle gagnant-gagnant-gagnant 18 Compagnies aériennes Besoin d appareils Croissance du marché Nécessité d appareils plus économes en carburant (recherche de flexibilité pour leur flotte) Source : Euler Hermes Avionneurs Besoin de vendre Financer les nouveaux programmes Étouffer la concurrence émergente Leasers Recherche d actifs solides Financements abondants via des investisseurs attirés par la résilience de cet actif Moindre implication de certains acteurs bancaires Une année 2013 porteuse de quelques incertitudes Cette convergence d intérêt qui a contribué à alimenter l effervescence du secteur aéronautique ne semble pas exempte d écueils susceptibles de briser ce cycle gagnant-gagnant-gagnant dès 2013 : les avionneurs peuvent connaître des difficultés industrielles lors des augmentations des cadences de production prévues ; certaines compagnies peuvent traverser des incertitudes financières les poussant à reconsidérer leurs engagements ou à revoir leur capacité à la baisse, entraînant ainsi une mise sur le marché d appareils ; les leasers peuvent être déstabilisés par des conditions défavorables (taux de leasing sous pression du fait d une inadéquation ponctuelle entre offre et demande ou dépréciation accélérée de leur portefeuille avec la perspective de la mise sur le marché de nouvelles gammes). Les perspectives dès 2013 ne sont pas donc dénuées d incertitudes. BG

Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Euler Hermes Le transport aérien mondial, symbole de la mondialisation, présente une réalité diverse entre les différentes zones. Les compagnies aériennes classiques, un monde fragmenté Note monde Consolidation et rayonnement de l activité des acteurs locaux distinguent les zones États-Unis Le jardin domestique Marché concentré Activité domestique majoritaire Europe Sous tous les feux Marché fragmenté Activité internationale prépondérante Moyen Orient Appel du large Marché limité Activité internationale prépondérante Chine Le jardin domestique bis Marché concentré Activité domestique prépondérante Asie (hors Chine) Le sens de l équilibre Marché fragmenté Activité plus diversifiée et pratiquement égale entre régionale et internationale Aussi paradoxal soit-il, le transport aérien se caractérise par une réelle fragmentation en marchés régionaux. Ainsi, les compagnies classiques américaines s appuient sur un vaste marché domestique qui assure plus des 2/3 de leur volume d activité, avec une forte concentration des acteurs, en totale opposition avec l environnement européen très morcelé, donc très concurrencé et avec des compagnies classiques beaucoup plus présentes sur les vols internationaux. Quand on intègre la proximité géographique, cette caractéristique partagée avec les compagnies du Moyen-Orient éclaire sur la rivalité entre les compagnies des deux zones. En Asie, les compagnies classiques chinoises profitent d un marché intérieur en constante progression et concentré tandis que les autres compagnies classiques asiatiques présentent un profil plus équilibré : quasi parité entre vols domestiques et internationaux et plus forte diversification de l activité (+20% des revenus sont issus du cargo). Source : Euler Hermes 19

Euler Hermes Bulletin économique n 88 Les Dossiers Transports Un monde à deux vitesses Des convergences dans cette diversité Une grande sensibilité de l activité à l environnement économique 130 0 1 0 90 80 indice base 0=20 Passagers Cargo e Le secteur du tranport aérien se trouve particulièrement exposé aux fluctuations du climat économique, à l échelle mondiale ou régionale. Dans ces circonstances, le trafic est bien évidemment le premier à être touché mais les prix sont également moteurs dans les évolutions car les capacités dans le transport aérien ne sont pas aussi souples que dans d autres activités de services et se trouvent parfois en décalage par rapport aux besoins (trop de capacités face à la demande => pression déflationniste sur les prix /capacités sous tension => pression inflationniste sur les prix). En 20, le découplage entre chiffres d affaires passagers et cargo s explique en premier lieu par Source : IATA, Euler Hermes des tendances contraires des trafics. La comparaison des chiffres 20, une solide croissance de +5,7% pour l activité passagers et un retrait de -1,9% pour le cargo, montre cette dissociation des évolutions. Le trafic passager a bénéficié de la vitalité concomitante des vols internationaux (+6,4%) et domestiques (+4,4%), dans le sillage d une économie mondiale en croissance en 20 ainsi que de l effervescence économique continue des zones émergentes (Asie et Amérique du Sud). Le cargo a, quant à lui, pâti en particulier des difficultés rencontrées par la zone euro, qui ont perturbé deux importantes lignes cargo. Pour 20, la trajectoire s est également trouvée contraire sur les prix (une première depuis 2001), avec une hausse pour le segment passagers de l ordre de 2,5% alors que le cargo connaissait une baisse d environ -2%. Cette poussée déflationniste sur ce dernier suit une inadéquation entre les tendances de l offre et de la demande car les capacités demeuraient stables (+0,7%) pendant que le trafic déclinait ( -1,9%). Le segment confirme une certaine rigidité à la baisse des capacités. Des grandes manœuvres stratégiques dans le transport aérien en 20 > Deux initiatives peu pensables il y en encore récemment pour les compagnies aériennes classiques ont marqué cette année : la mise en place ou le développement d une offre low costs en leur sein pour stopper la saignée opérée par les actuels opérateurs low costs sur les vols court- et moyen- courriers. Ces orientations se sont surtout avérées pour les transporteurs asiatiques et européens. des rapprochements, dans le cadre d alliance ou d accords de partage de codes avec les compagnies du Golfe afin de les intégrer dans une approche synergique et non plus seulement conflictuelle. > Dans la foulée, pour 2013 et par la suite, l accent pourrait être porté sur la recomposition du secteur au travers d opérations capitalistiques, au gré d acquisitions de compagnies en proie à de graves difficultés (TAP, LOT, SAS ) ou de possibles avancées dans la constitution de groupes réellement mondialisés, ouvrant ainsi la voie vers une banalisation du transport aérien mondial. Le tour du monde des marchés en 20 (sur base des échantillons EH) États-Unis En 20, les transporteurs aériens classiques américains ont poursuivi une stratégie de place, largement partagée depuis la crise, qui vise à maintenir des prix rémunérateurs via un strict contrôle des capacités (stabilité pour cette année) qui permet de disposer d une réelle emprise sur les prix ( pricing power ) et de faire ainsi passer des hausses pour absorber la flambée des prix du carburant (facteur très handicapant du fait d une flotte américaine peu performante). La capacité d imposer des hausses de prix s est pourtant légèrement érodée (+6% le premier semestre 20 contre +8% en 20) établissant peut-être les premières limites de cette stratégie en cas de possible détérioration du climat économique. L année 20, avec une rentabilité moyenne nette de plus de +2% (hors charges de restructuration d AMR), bénéficie de la comparaison avec une année 20 affectée par les pertes d AMR/American Airlines. L amélioration pour 2013 tient en grande part à la prise en compte du redressement de cette dernière. Europe Le ralentissement de l augmentation trafic constaté sur le premier semestre (+4% contre 7% en 20) reflète la dégradation de l économie européenne. Les compagnies n ont pas pu compter sur le segment premium, pôle de 20 rentabilité par le passé, qui a stagné sur la même période. Cependant, une inflexion de la part des compagnies classiques européennes est intervenue en 20 : frein sur la course aux parts de marché, meilleur contrôle de l offre afin pouvoir disposer d un plus fort pricing power. Cette stratégie, tangible au premier semestre 20 (+4%, en augmentation par rapport au modeste 2% de 20) et dans la même veine que celle qui a contribué au redressement des transporteurs américains, s inscrit cependant dans un contexte concurrentiel beaucoup plus rude, qui en limite les effets. En 20, elle aura été dans les tous cas insuffisante face à une forte pression du cours du pétrole et au moindre dynamisme du marché puisque le secteur ressortira en perte. La voie de baisse des coûts engagée cette année n a pas encore eu beaucoup de retombées mais devrait permettre de revenir à l équilibre en 2013. Asie (hors Chine) Les compagnies classiques asiatiques (hors chine) ont bénéficié d un environnement économique plus favorable et donc ont affiché une croissance toujours soutenue de leur trafic (+8%). En revanche, la bataille est féroce avec les acteurs low costs locaux pour s arroger une part de ce gâteau et cette concurrence avivée a pesé sur les prix (quasi stagnation), alors que la pression sur les coûts par la facture pétrolière est restée très forte. Leur activité cargo a été frappée de plein fouet par le ralentissement des échanges avec l'europe. En conséquence, ces deux vents contraires ont causé l érosion de moitié de la rentabilité nette des transporteurs classiques asiatiques. Pour 2013, on mise sur l adaptation du périmètre de l offre pour prévoir un léger renforcement de leurs performances. Chine Les compagnies classiques chinoises s assurent une rentabilité généralement plutôt élevée en exploitant la croissance substantielle du trafic domestique, dans un environnement favorable. En 20, cette rente aurait eu tendance à s éroder car l afflux de capacités sur les dernières années (+8% au premier semestre), légèrement en décalage par rapport à l évolution des besoins en 20 (+7%), a mis les prix légèrement sous pression en 20 (+2% au premier semestre 20 contre +7% en 20). Alors que le coût du carburant demeurait très pénalisant, cette moindre capacité de répercuter ces fluctuations aux consommateurs a obéré la rentabilité des compagnies chinoises, qui a ainsi baissé de l ordre de 30% en 20. Pour l année prochaine, la taux de marge nette devrait se maintenir, faisant du transport aéronautique chinois, un fort pôle de rentabilité pour le paysage sectoriel mondial. Rentabilité moyenne nette des compagnies classiques en % CA 20 20e États-Unis -1,0% +2,2%* Europe 0,4% -0,5% Asie (hors Chine) 4,0% 2,0% Chine 6,3% 4,5% Source : échantillons Euler Hermes * Hors charges de restructuration d AMR/Amercan Airlines