Diverticulose colique et sigmoïdite



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Transcription:

ITEM 234 Diverticulose colique et sigmoïdite OBJECTIFS Diagnostiquer une diverticulose colique et une sigmoïdite. Identifier les situations d'urgence et planifier leur prise en charge. Argumenter l'attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient. LIENS TRANVERSAUX ITEM 4 ITEM 104 Septicémie. ITEM 148 Tumeurs ITEM 195 Douleurs ITEM 200 État ITEM 203 Fièvre ITEM 217 Syndrome ITEM 275 Péritonite Évaluation des examens complémentaires dans la démarche médicale : prescriptions utiles et inutiles. du côlon et du rectum. abdominales et lombaires aiguës chez l'enfant et chez l'adulte. de choc. aiguë chez l'enfant et chez l'adulte. occlusif. aiguë. Sujet tombé au concours de l'internat : 1998 1998 (zone Sud) Madame S., 55 ans, est hospitalisée en urgence pour douleurs abdominales diffuses à prédominance sousombilicale et température à 38,5 C. À l'interrogatoire, on ne retrouve pas de troubles du transit récent ou ancien. À 7 heures du matin, 5 minutes après être allée à la selle, apparition de violentes douleurs sousombilicales. Quatre heures plus tard, température à 38,8 C. Le médecin traitant prescrit des antalgiques. À 21 heures, devant la persistance des symptômes, la patiente vient aux urgences. À l'arrivée, température à 39 C. Pas de vomissement, pas d'arrêt des matières et des gaz. L'abdomen est souple, sauf au niveau de la fosse iliaque gauche où il existe une défense bien localisée. Le toucher rectal retrouve une douleur dans le cul-de-sac de Douglas. La NFS : 15 000 GB avec 90 % de polynucléaires neutrophiles. Sur les radiographies d'abdomen sans préparation, il existe quelques niveaux liquides du grêle dans la fosse iliaque gauche. Il n'y a pas de pneumopéritoine. Un lavement aux hydrosolubles est fait en urgence. Il montre des diverticules sigmoïdiens et une image de fuite extracolique localisée du produit de contraste. 1) Quel diagnostic évoquez-vous? 2) Quel traitement envisagez-vous en première intention? 3) Quels sont les éléments vous permettant d'évaluer l'efficacité de ce traitement? 4) Malgré le traitement, un syndrome occlusif apparaît, les signes locaux (douleur, défense) augmentent, la température reste à 39 C et l'hyperleucocytose atteint 30 000 GB. Que traduit cette évolution? 5) Quel traitement s'impose dans ce cas? 6) Dans une autre éventualité, grâce au traitement médical, l'évolution est satisfaisante et persistante : apyrexie, abdomen complètement souple, transit normal, NFS normale. Quelle attitude thérapeutique ultérieure envisagez-vous après le retour à la normale. Hépato-Gastro-Entérologie. Chirurgie digestive 2012, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés 325 ú

ITEM 234 SNFGE, 2006. Le texte complet est disponible sur le site internet de la SNFGE ( http://www. SNFGE.asso.fr/01-Bibliotheque/0D-Pratiques-cliniques/referentiels.asp ), il répond à cinq questions. Quelle est la valeur diagnostique des différents examens dans la diverticulite simple et compliquée? Quelle doit être la stratégie diagnostique? Quel est le traitement médical des diverticulites aiguës non compliquées? Quelle est la prise en charge thérapeutique des formes compliquées de la diverticulite sigmoïdienne (abcès, fistule et péritonite)? Quel est le traitement chirurgical à froid de la diverticulite sigmoïdienne? Quelle est la prise en charge d'une hémorragie d'origine diverticulaire? POUR COMPRENDRE La diverticulose colique est le fait d'avoir des diverticules, ce qui n'est pas pathologique. La plupart des porteurs de diverticules (80 %) n'en seront jamais symptomatiques. La diverticulite est la complication la plus fréquente. C'est un tableau d'appendicite à gauche. Le scanner est l'examen qui permet le diagnostic. Le traitement de la diverticulite est médical. Les complications de la diverticulite sont l'abcès, la péritonite, la fistule et l'occlusion. La péritonite est la complication grave. Le traitement est chirurgical, il existe plusieurs types d'intervention. I. ÉPIDÉMIOLOGIE La diverticulose colique se voit essentiellement dans les pays occidentaux, elle est rare en Afrique. Elle concerne 50 % de la population de plus de 60 ans et moins de 10 % avant 50 ans. Ce n'est pas une pathologie en soit puisque 80 % des porteurs d'une diverticulose colique n'en seront jamais symptomatiques. 90 % des diverticules sont situés sur le côlon sigmoïde, tous les segments coliques peuvent être concernés. Les pathologies du tissu conjonctif (syndrome de Marfan, syndrome d'ehlers- Danlos) sont associées à la présence de diverticules, volontiers pancoliques, chez des personnes jeunes. II. PHYSIOPATHOLOGIE Un diverticule est une hernie de la muqueuse et de la sous-muqueuse à travers la musculeuse. Cette hernie se fait aux zones de faiblesse de la musculeuse colique, là où les vaisseaux la traversent. Les diverticules mesurent de 5 à 10 mm le plus souvent. Le diverticule géant unique ( > 10 cm) est très rare. 326

Diverticulose colique et sigmoïdite La pathogénie n'est pas complètement connue, elle associe des troubles de la motricité colique avec hyperpression segmentaire à l'altération de la résistance de la musculeuse colique par sénescence. Les diverticules peuvent devenir symptomatiques par deux types de manifestation indépendants : l'infection et l'hémorragie. La complication infectieuse (diverticulite) est liée à l'obstruction stercorale d'un diverticule avec abrasion muqueuse, ischémie focale et perforation ou microperforation. Elle concerne essentiellement le sigmoïde, en cas de diverticulite d'un autre segment colique, la prise en charge est identique. La complication hémorragique est l'érosion d'un vaisseau sous-muqueux dans un diverticule. Diverticulite sigmoïdienne I. DIAGNOSTIC A. Clinique Il s'agit d'une douleur de la fosse iliaque gauche associée à une fièvre à 38 38,5 C. Une constipation ou une diarrhée par irritation peuvent être associées de façon non spécifique ITEMS 195, 203. À l'examen, il y a une défense de la fosse iliaque gauche, le reste de l'abdomen étant souple et non douloureux. Chez un patient maigre, on peut palper un cordon induré qui correspond au segment colique œdématié. C'est un tableau «d'appendicite à gauche». En pratique, la douleur est parfois hypogastrique ou en fosse iliaque droite en cas de dolicho-méga-côlon avec une grande boucle sigmoïdienne. B. Biologie Il y a un syndrome inflammatoire biologique aspécifique : hyperleucocytose ; augmentation de la CRP ; augmentation de la procalcitonine. C. Imagerie ITEM 4 Le scanner abdomino-pelvien avec injection de produit de contraste est le seul examen utile et nécessaire. L'opacification digestive n'est pas nécessaire mais certaines équipes la réalisent de principe. Cet examen permet : le diagnostic positif (infiltration de la graisse péricolique, diverticules coliques, épaississement de la paroi sigmoïdienne) ( fig. 234-1 ); d'écarter les diagnostics différentiels. À l'exception du cancer colique dont l'aspect au scanner peut être identique ; le diagnostic des complications (abcès, fistule, perforation). 327

ITEM 234 Épaississement pariétal colique Infiltration de la graisse péricolique Fig. 234-1. Scanner de diverticulite. Recommandations pour la pratique clinique (2006) ( http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2008-08/complications_ diverticulose_colique_-_argumentaire_question_1.pdf) Il n'est pas recommandé de réaliser de cliché d'asp chez un patient cliniquement suspect de diverticulite. Il n'est pas recommandé de réaliser un lavement aux hydrosolubles en première intention chez un patient cliniquement suspect de diverticulite. Il est recommandé de réaliser un examen TDM à tous les patients cliniquement suspects de diverticulite du côlon et ce, à chaque épisode afin : d'établir le diagnostic positif (infiltration péricolique associée à la présence de diverticules) ; de poser un diagnostic alterne ; d'aider à la prise de décision thérapeutique en urgence (drainage d'un abcès, chirurgie en urgence) et à distance (nombre de poussées inflammatoires). L'examen TDM doit être réalisé dans les 24 heures suivant l'admission des patients hospitalisés ou dans les 72 heures suivant la suspicion diagnostique et la mise en route du traitement antibiotique pour les patients non hospitalisés. Il n'est pas recommandé de réaliser systématiquement une échographie abdominale chez un patient cliniquement suspect de diverticulite en dehors de situations cliniques particulières (suspicion de pathologie utéro-annexielle). Chez un patient cliniquement suspect de diverticulite, l'irm n'est pas recommandée. La coloscopie virtuelle est contre-indiquée. Il n'est pas recommandé de réaliser une coloscopie chez un patient suspect de diverticulite. D. Diagnostics différentiels 1. Cancer colique ITEM 148 Toute poussée de diverticulite doit être considérée comme un cancer colique potentiel. La distinction est le plus souvent impossible au scanner en urgence. Une tumeur abcédée peut donner une véritable présentation clinique de diverticulite avec défense. La coloscopie à distance de l'épisode infectieux (2 mois) est donc indispensable. 328

Diverticulose colique et sigmoïdite 2. Pyélonéphrite gauche Parfois la douleur irradie dans l'abdomen. La bandelette urinaire rectifie le diagnostic. 3. Salpingite ou pyosalpinx gauche L'interrogatoire et l'examen gynécologique doivent le rechercher. En cas de doute, une échographie pelvienne sera le meilleur examen. 4. Rares a) Hématome du muscle psoas iliaque gauche C'est un accident des anticoagulants. Il s'agit d'une douleur intense de la fosse iliaque gauche avec cliniquement un empâtement localisé. La température est normale habituellement mais une fébricule est possible. Il faut rechercher une cruralgie gauche et un déficit moteur du quadriceps (nerf crural). b) Anévrysme iliaque gauche fissuré Une masse pulsatile est palpable. La douleur est liée à l'hématome qui diffuse en fosse iliaque gauche. c) Appendagite C'est la torsion d'une frange épiploïque sur son axe. La présentation clinique est celle d'une diverticulite. Le scanner rectifie le diagnostic ( fig. 234-2 ). Cette affection est bénigne, et les anti-inflammatoires traitent efficacement les symptômes. Zone graisseuse hypodense avec un halo hyperdense Fig. 234-2. Scanner d'appendagite. II. COMPLICATIONS La classification de Hinchey permet de classer les complications infectieuses. Le stade I correspond a une poussée de diverticulite avec des signes de gravité au scanner (épanchement péricolique modéré ou bulle péricolique) ( tableau 234-I ). Tableau 234-I. Classification de Hinchey Stades Complications infectieuses Stade I Stade II Stade III Stade IV Phlegmon ou abcès péricolique Abcès pelvien, abdominal ou rétropéritonéal (péritonite localisée) Péritonite généralisée purulente Péritonite fécale 329

ITEM 234 A. Péritonite ITEMS 104, 200, 275 La péritonite généralisée est la complication la plus grave, elle engage le pronostic vital. Elle est inaugurale de la maladie diverticulaire infectée neuf fois sur dix. Une douleur diffuse et intense avec défense généralisée évoque le plus souvent le diagnostic. Le pneumopéritoine confirme le diagnostic. On distingue : la péritonite purulente (80 % des cas), c'est la rupture en péritoine libre d'un abcès. Prise en charge précocement, l'évolution est favorable le plus souvent ; la péritonite stercorale (20 %), perforation colique avec écoulement fécal dans la grande cavité péritonéale. Le choc septique est précoce et le taux de mortalité compris entre 20 et 40 %. B. Abcès C'est une péritonite localisée, circonscrite par les structures de voisinage (grêle, vessie, utérus, paroi musculaire), secondaire à une perforation ou microperforation d'un diverticule infecté. La présentation est celle d'une diverticulite avec une fièvre plus élevée (39 40 C) et une défense nette. Le scanner confirme le diagnostic ( fig. 234-3 ). Sigmoïde inflammatoire Abcès a Abcès Sigmoïde inflammatoire 330 Fig. 234-3. a et b. Scanners d'abcès périsigmoïdien. b

Diverticulose colique et sigmoïdite C. Fistule La fistule est une communication anormale entre deux structures. Elle résulte d'une inflammation d'un organe au contact de la diverticulite ou d'un abcès qui aboutit à une perforation du côlon dans un organe (vessie, intestin grêle, utérus, peau) ( fig. 234-4 ). Air intravésical Fistule colo-vésicale Sigmoïde inflammatoire Fig. 234-4. Scanner de fistule sigmoïdovésicale. La fistule colovésicale est la plus fréquente, surtout chez l'homme et la femme hysterectomisée (la présence de l'utérus empêche le plus souvent le contact entre le côlon et la vessie). Le diagnostic est fait le plus souvent après une poussée de diverticulite non diagnostiquée. Les manifestations cliniques sont une fécalurie, une pneumaturie, infections urinaires à répétition, polybactérienne à germes digestifs. D. Occlusion colique ITEM 217 L'occlusion colique survient après plusieurs poussées inflammatoires, ou dans le cas d'une diverticulite chronique. Le mécanisme est la fibrose cicatricielle sténosante. L'occlusion survient en cas d'obstruction complète de la lumière sigmoïdienne. La présentation clinique est un syndrome occlusif avec météorisme important avec à l'imagerie une distension du côlon d'amont. Le diagnostic différentiel avec un cancer colique nécessitera une endoscopie digestive basse après avoir traité l'occlusion colique par une colostomie, examen réalisé en dehors de toute poussée inflammatoire ITEM 148. La prothèse colique (stent) n'est pas un traitement possible de l'occlusion d'origine diverticulaire car elle ne «s'accroche» pas à la sténose. III. TRAITEMENT Le traitement de la diverticulite et de ses complications a été bien codifié en 2006 dans les Recommandations pour la pratique clinique. 331

ITEM 234 A. Diverticulite sigmoïdienne non compliquée L'hospitalisation est nécessaire en cas de poussée mal tolérée (douleur importante, troubles de l'alimentation) ou survenant sur un terrain fragile (patient âgé, comorbidités). Le traitement sera médical avec une antibiothérapie orale en cas de traitement ambulatoire, intraveineux en cas d'hospitalisation. Le reste du traitement sera essentiellement antalgique. Il n'y a pas de régime alimentaire particulier. Les anti-inflammatoires sont à proscrire en raison du risque d'aggravation. Le traitement médical est efficace dans la majorité des cas, le recours à la chirurgie en cas d'échec est rare. Recommandations pour la pratique clinique (2006) ( http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2008-08/complications_ diverticulose_colique_-_argumentaire_question_2.pdf ) Il n'est pas recommandé de réaliser une décontamination bactérienne du tube digestif en prévention primaire de la diverticulite. Il n'est pas recommandé de modifier la proportion en fibres du régime alimentaire ou de réaliser une décontamination bactérienne seule ou en association à un traitement par aminosalicylés, ou de prescrire des probiotiques en prévention secondaire de la diverticulite. Chez les patients ayant un antécédent de diverticulite, l'utilisation des corticoïdes et des anti-inflammatoires non stéroïdiens doit être discutée, compte tenu de leur effet potentiellement délétère sur la maladie diverticulaire. Il est recommandé de proposer une hospitalisation en cas de diverticulite aiguë avec mauvaise tolérance clinique (signes d'irritation péritonéale, impossibilité de maintenir une hydratation orale, absence d'amélioration après 48 à 72 heures de traitement ambulatoire, impossibilité de surveillance ambulatoire, terrain fragilisé), et/ou signes de gravité au scanner. En ambulatoire, il est recommandé d'utiliser en première intention une antibiothérapie orale associant une pénicilline A et un inhibiteur de bêtalactamase ou en cas d'allergie, une fluoroquinolone (ofloxacine) associé à un nitro-imidazolé pendant 7 à 10 jours. La durée est à évaluer en fonction de l'évolution. En hospitalisation, il est recommandé d'utiliser une antibiothérapie, initialement intraveineuse, pendant une durée totale de 7 à 10 jours. La durée est à évaluer en fonction de l'évolution. En l'absence de contre-indication aux bêtalactamines, les deux schémas suivants peuvent être utilisés : pénicilline A/inhibiteur de bêtalactamase ; céphalosporines de 3 e génération (cefotaxime, ceftriaxone) en association à un nitroimidazolés. En cas d'allergie aux bêtalactamines, il est recommandé d'utiliser une association fluoroquinolone (ofloxacine) et nitro-imidazolé ou l'association d'un aminoside et soit d'un nitroimidazolé, soit d'un lincosamide. Lors du relais oral, on peut utiliser soit une pénicilline A/inhibiteur de bêtalactamase, soit l'association fluoroquinolone et nitro-imidazolé. Stade I de Hinchey : en cas d'échec du traitement médical et/ou du drainage sous guidage d'imagerie, le traitement chirurgical recommandé est la résection-anastomose éventuellement protégée par une stomie. La voie laparoscopique peut être utilisée. 332

Diverticulose colique et sigmoïdite La colectomie préventive est recommandée en cas de signes de gravité au scanner lors de la poussée (bulles d'air péricoliques, épanchement péricolique) et chez les patients jeunes ( < 50 ans). La notion de colectomie après la deuxième poussée n'est plus d'actualité. Le bénéfice réel de cette chirurgie reste encore très discuté actuellement. Recommandations pour la pratique clinique (2006) ( http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2008-08/complications_ diverticulose_colique_-_argumentaire_question_4.pdf ) Il est recommandé de réaliser une chirurgie prophylactique après une poussée de diverticulite avec signes de gravité au scanner. En l'absence de signes de gravité au scanner, le bénéfice réel de la chirurgie prophylactique, même après deux poussées, reste à évaluer. Pour cette raison, la chirurgie prophylactique, même après deux poussées, ne doit pas être systématique. Un délai d'environ deux mois est recommandé après la dernière poussée de diverticulite. Avant cette intervention, la coloscopie est recommandée pour explorer l'ensemble du cadre colique, en particulier chez les patients de plus de 50 ans, et chez les patients à risque élevé de cancer rectocolique. La résection sigmoïdienne prophylactique pour diverticulite doit être réalisée au mieux sous laparoscopie par un opérateur entraîné à cette technique. L'âge > 75 ans et l'obésité ne sont pas des contre-indications à la réalisation d'une laparoscopie. La charnière rectosigmoïdienne doit être emportée avec la résection. L'extension de la colectomie en amont du sigmoïde n'est pas justifiée même en présence de diverticulose étendue au côlon car elle ne diminue pas le risque de récidive. De même, l'extension de la diverticulose sur le côlon ne modifie pas l'indication opératoire de sigmoïdectomie. B. Péritonite ITEM 275 C'est une urgence chirurgicale. Pour les péritonites purulentes (Hinchey III), le traitement sera une toilette péritonéale avec, selon les conditions locales et les habitudes du chirurgien : un simple drainage, une colectomie avec anastomose et stomie de protection ou une colectomie sans rétablissement de la continuité (intervention de Hartmann). Pour les péritonites stercorales (Hinchey IV), la règle est de faire une colectomie sans rétablissement de la continuité (intervention de Hartmann). Recommandations pour la pratique clinique (2006) (http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2008-08/complications_ diverticulose_colique_-_argumentaire_question_3.pdf) Stade III de Hinchey : il est recommandé de réaliser une résection sigmoïdienne plutôt qu'une stomie de dérivation. Le choix entre résection-anastomose ( ± stomie de protection) et intervention de Hartmann dépend des conditions locales et générales du patient. Stade IV de Hinchey : l'intervention de Hartmann est l'intervention de référence. La résection-anastomose protégée par une stomie peut être proposée à la place de l'intervention de Hartmann en fonction des conditions locales et générales. 333

ITEM 234 Un peu d'histoire Henri-Albert Hartmann (1860 1952). Professeur de pathologie chirurgicale et chef de service à l'hôtel-dieu à Paris. Travailleur infatigable et enseignant rigoureux et sévère, il a étudié tous les domaines de la chirurgie générale, notamment la pathologie colique, du rectum, de l'estomac, des voies biliaires et publié de nombreux travaux en gynécologie et urologie. Il a décrit en 1921 la résection sigmoïdienne sans rétablissement de la continuité pour le cancer en occlusion. L'intervention qui porte son nom est encore fréquemment réalisée actuellement en cas de péritonite. C. Abcès Le traitement est médical avec l'antibiothérapie. En cas d'abcès de diamètre supérieur à 5 cm, il est recommandé de réaliser un drainage per-cutané, guidé par imagerie (scanner ou échographie) permettant d'évacuer la collection purulente. Recommandations pour la pratique clinique (2006) ( http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2008-08/ complications_ diverticulose_colique_-_argumentaire_question_3.pdf ) Stade II de Hinchey : il est recommandé de drainer sous guidage d'imagerie les abcès de plus de 5 cm de grand axe et de réaliser un prélèvement microbiologique. Le drainage ne modifie pas l'antibiothérapie initiale. Il n'y a pas d'attitude systématique reconnue concernant les modalités de surveillance et d'efficacité du drainage. La surveillance clinique et biologique reste le critère principal d'évaluation. En cas de drainage efficace de l'abcès, une résection sigmoïdienne est recommandée à distance, dans des conditions électives, par résection-anastomose. En cas d'échec ou d'impossibilité de réalisation ou d'échec du drainage, un traitement chirurgical avec résection anastomose ± stomie de protection est recommandé. D. Fistule Le traitement est chirurgical réalisant une colectomie avec rétablissement de la continuité plus ou moins protégé par stomie. La fistule vésicale est généralement de petite taille fermée par une suture. Recommandations pour la pratique clinique (2006) ( http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2008-08/complications_ diverticulose_colique_-_argumentaire_question_3.pdf ) En cas de fistule sigmoïdovésicale, le traitement chirurgical est recommandé en privilégiant une résection-anastomose en un temps. La voie d'abord laparoscopique est possible dans cette indication. 334

Diverticulose colique et sigmoïdite E. Occlusion colique ITEMS 148, 217 Le traitement en urgence est celui de l'occlusion colique, soit une colostomie en amont de l'obstacle. Une colectomie, une fois l'occlusion levée, est réalisée secondairement, protégée ou non par une stomie. Diverticulose hémorragïque L'hémorragie n'est pas une complication d'une poussée inflammatoire. Elle se voit plus fréquemment au niveau du côlon droit. Recommandations pour la pratique clinique (2006) ( http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2008-08/complications_ diverticulose_colique_-_argumentaire_question_5.pdf ) En cas d'hémorragie basse abondante et/ou mal tolérée, il est recommandé de réaliser une fibroscopie digestive œsogastroduodénale afin d'éliminer une cause haute, responsable du saignement, observée dans 10 à 15 % des cas. Il est aussi recommandé de réaliser une anuscopie afin d'éliminer une cause basse évidente. La stratégie diagnostique dépend ensuite du degré de gravité, c'est-à-dire du retentissement hémodynamique et/ou des besoins transfusionnels du patient (plus ou moins de six culots dans les 24 dernières heures). En fonction de la disponibilité et des habitudes des équipes, peuvent être réalisées : une coloscopie totale sur un côlon préparé pour tenter de préciser le siège et la cause de l'hémorragie. Un geste thérapeutique d'hémostase sur un diverticule peut être réalisé dans le même temps ; une TDM avec injection iodée intraveineuse, car elle peut permettre de localiser l'origine du saignement sur le cadre colique, et tend à remplacer l'angiographie diagnostique dans cette indication. En cas d'état hémodynamiquement instable ou de dépendance transfusionnelle (plus de six culots dans les dernières 24 heures), un traitement actif est recommandé : un traitement endoscopique, après une préparation colique rapide, peut être proposé en première intention ; l'embolisation radiologique, dans les centres ayant l'expérience de cette technique, peut être proposée à la place du traitement endoscopique. Le traitement chirurgical en urgence est recommandé en cas : d'impossibilité ou d'inefficacité des autres traitements ; d'une persistance ou d'une récidive précoce de l'hémorragie, nécessitant une transfusion massive ou répétée ; la chirurgie en urgence doit, dans l'idéal, consister en la réalisation d'une colectomie segmentaire après localisation précise préopératoire du site hémorragique ; la place de la colectomie totale «à l'aveugle» doit être limitée aux seuls patients présentant des diverticules diffus du côlon et pour lesquels la localisation précise en préopératoire du saignement s'est révélée impossible. Elle doit néanmoins être préférée à une colectomie segmentaire (droite ou gauche) «à l'aveugle». 335

ITEM 234 Fiche Dernier tour Épidémiologie 80 % des porteurs d'une diverticulose colique n'en seront jamais symptomatiques. 90 % des diverticules sont situés sur le côlon sigmoïde. Diverticulite sigmoïdienne Diagnostic Diagnostic positif : douleur de la fosse iliaque gauche associée à une fièvre à 38 38,5 C et défense ; syndrome inflammatoire biologique ; le scanner abdomino-pelvien est l'examen nécessaire et suffisant pour : le diagnostic positif (infiltration de la graisse péricolique +++), les diagnostics différentiels, les complications (abcès, fistule, perforation). Diagnostics différentiels : cancer colique : toute poussée de diverticulite est potentiellement un cancer colique, la coloscopie est donc nécessaire deux mois après la poussée ; autres : pyélonéphrite, salpingite. Complications Péritonite : grave, souvent inaugurale de la maladie diverticulaire (90 %). On distingue : la péritonite purulente (80 %); la péritonite stercorale (20 %). Abcès : collection purulente, péricolique ou pelvienne. Fistule : fistule colovésicale le plus souvent avec pneumaturie, fécalurie et infections urinaires à répétition. Occlusion colique : complication tardive, après plusieurs poussées. Difficile à distinguer d'un cancer. Traitement Diverticulite sigmoïdienne non compliquée : le traitement sera médical avec une antibiothérapie orale ou intraveineuse et un traitement antalgique ; la colectomie prophylactique après diverticulite est moins pratiquée qu'auparavant. Elle concerne les patients âgés de moins de 50 ans ou avec complications. Péritonite : péritonites purulentes, toilette péritonéale avec : un simple drainage, une colectomie avec anastomose et stomie de protection ou une colectomie sans rétablissement de la continuité ; péritonites stercorales : colectomie sans rétablissement de la continuité (intervention de Hartmann). Abcès : traitement médical par antibiothérapie péni A + ac. clavulanique ou C3G + imidazolés ; drainage per-cutané pour les abcès supérieurs à 5 cm. 336

Diverticulose colique et sigmoïdite Fiche Dernier tour Fistule : le traitement est chirurgical, colectomie et suture vésicale. Occlusion colique : colostomie puis colectomie. Diverticulose hémorragique Si l'hémorragie est abondante, d'abord une endoscopie digestive haute. Coloscopie et scanner pour localiser le saignement (si possible latéraliser côlon droit/ côlon gauche). La coloscopie est un traitement de première intention pour l'hémostase. L'embolisation par voie intra-artérielle est une option possible. La chirurgie est réservée aux patients non contrôlés par les autres thérapeutiques. Colectomie segmentaire si le saignement est localisé et latéralisé, sinon colectomie totale en dernière extrémité. 337