LA DOULEUR: Signes cliniques, évaluation. Docteur Gérard TERRIER Service d Accompagnement et de Soins palliatifs CHU Dupuytren 87042 Limoges



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Transcription:

LA DOULEUR: Signes cliniques, évaluation Docteur Gérard TERRIER Service d Accompagnement et de Soins palliatifs CHU Dupuytren 87042 Limoges

Définitions: Douleur: Expérience sensorielle et émotionnelle désagréable + lésion tissulaire présente ou potentielle ou décrite en termes d une telle lésion Douleur aiguë: Brève, qui ne s inscrit pas dans la durée, mais dont l intensité est variable Douleur chronique: Persistante depuis au moins trois mois

Signes cliniques (1) Différence entre adulte et enfant: recours au langage possible ou non Interrogatoire et examen clinique rigoureux, description précise des symptômes = diagnostic du mécanisme et des causes Référence aux définitions sémiologiques élémentaires Toute modification doit entraîner une réévaluation Anxiété, stress, dépression, souffrance psychique, sociale sont pris en compte séparément

Signes cliniques (2) SEMIOLOGIE: Douleur provoquée Douleur de fond Accès douloureux, prévisible ou non Réapparition de la douleur Douleur irradiée, rapportée, projetée, référée Allodynie, analgésie Paresthésie, dysesthésie, hyperesthésie, hyperalgésie, hyperpathie

Signes cliniques (3) DOULEURS PAR EXCES DE NOCICEPTION: Stimulation des nocicepteurs Rythme mécanique ou inflammatoire Topographie régionale (pas de topographie neurologique systématisée) Examen neurologique normal Forte sensibilité à la morphine DOULEURS NEUROPATHIQUES (DOULEURS NEUROGENES): Lésion nerveuse périphérique ou centrale Composante continue, fulgurante; dysesthésie Compatible avec une origine neurologique périphérique ou centrale Signes d hyposensibilité (hypoesthésie, anesthésie) ou d hypersensibilité (allodynie) Sensibilité à la morphine très variable

Signes cliniques (4) Douleurs liées à l évolution de la maladie initiale Douleurs liées au(x) traitement(s) spécifique(s) de la maladie initiale Douleurs sans rapport avec la maladie initiale Douleurs intriquées

Evaluation Evaluation unidimensionnelle de l intensité: Echelle verbale Echelle visuelle analogique (EVA) Echelle numérique Evaluation pluridimensionnelle, qualitative: Questionnaire de Saint-Antoine (QDSA) Hétéro-évaluation: Echelle DOLOPLUS 2 Evaluation du soulagement Localisation topographique de la douleur

Signes cliniques et évaluation de la douleur chez l enfant Définition de l IASP inapplicable pour: Prématuré ) Nouveau-né ( Absence de verbalisation Nourrisson ) Hétéro-évaluation obligatoire Nb: IMC, Handicapés mentaux?

Hétéro-évaluation Interprétation personnelle de la douleur: Subjective Très individuelle (culturelle, cognitive ) Nb: La douleur est toujours stressante, le stress n est pas toujours douloureux!

Notions anatomo-physiologiques et expérimentales 16 ème semaine de vie in-utero: éléments anatomiques et neuroendocriniens = perception et transmission des stimuli douloureux Stimuli douloureux entre 28 ème et 32 ème semaine = comportement ultérieur différent Douleur aiguë prolongée = morbidité augmentée Nouveaux-nés, nourrissons algiques = sensibilité différente aux douleurs ultérieures

Evaluation de la douleur Beaucoup d essais Application clinique souvent décevante: manque de répétitivité Tout (ou presque!) semble encore à découvrir, sauf: Indicateurs comportementaux: visage, membres Variations des paramètres physiologiques (FC, PA, FR)

L évaluation de la douleur chez le petit enfant est difficile! Qu en est-il chez l enfant «techniqué», intubé, curarisé? (Echelle «COMFORT»?)

Les échelles Douleur chronique: Echelle DEGR (Douleur Enfant Gustave Roussy) Echelle SAN SALVADOUR (Rétrospective) Douleur aiguë: Nombreuses = Y en a-t-il une (des) bonne(s)?

Echelles de la douleur aiguë Evaluation en points: de 7 à 20 7 : POCIS, TPPPS 9 : DAN 10: NFCS, OPS 13: CHEOPS 15: EDIN, PPMP 18: PIPP 20: Amiel-Tison mais inversée!

Echelles de la douleur aiguë: En fonction de l évaluateur Echelle PMPP: Echelle pour parents ou accompagnateurs

Echelles de la douleur aiguë: En fonction de «l évalué» Prématuré: PIPP Nouveau-né: EDIN, DAN, NFCS Nourrisson: POCIS, OPS Enfant: CHEOPS, TPPPS, Amiel-Tison

Pour être efficace il faut (faudrait?) une échelle: Simple d utilisation Reproductible Comparative Compatible avec l EVA (?)

Propositions: Echelle EDIN (Echelle de Douleur et d Inconfort du Nouveau-né): sur 15 points; tout score égal ou supérieur à 5 = traitement Echelle OPS (Objective Pain Scale) pour le nourrisson: sur 10 points; tout score égal ou supérieur à 3 = traitement Eventuellement CHEOPS (Children s Hospital of Eastern Ontario Pain Scale)

Quelles réponses? Quelques notions simples: Prescription systématique d antalgique(s) en postopératoire ou pour tout acte potentiellement douloureux Câlinage, environnement Coordonner et subordonner les soins aux périodes d analgésie pharmacologique Connaître pharmacocinétique et pharmacodynamie des produits chez l enfant Personnel spécialisé et formé Réévaluation régulière+++ Nb: Ne pas négliger les «adjuvants»: atropine, saccharose, immobilisation

Il n existe pas de différence: D intelligence De fonction motrice Comportementale Chez l enfant ayant reçu de la morphine en période néonatale!

Les réponses du traitement de la douleur doivent être adaptées: En fonction de l évaluation et/ou du geste à accomplir Selon l échelle de l OMS (3 paliers) Paracétamol (attention chez le nouveau-né!), nalbuphine (0,2 mg/kg), codéïne, morphine, anesthésiques locaux

CONCLUSIONS Nous proposons préférentiellement les échelles EDIN et OPS pour l évaluation, pour leur complémentarité, faute de mieux! Leur utilisation montre leur facilité d emploi Elles sont reproductibles et comparatives Elles devraient servir essentiellement à l évaluation de l efficacité du traitement antalgique mis en œuvre OPS est «compatible» avec l EVA Une réponse adaptée et si possible «anticipée» doit toujours être envisagée