Dominique FIGEAT. Directeur le Direction du Renouvellement Urbain. Caisse des Dépôts et Consignations. Paris, FRANCE



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Transcription:

23 26 JUNE 202 Dominique FIGEAT Directeur le Direction du Renouvellement Urbain Caisse des Dépôts et Consignations Paris, FRANCE Le financement du renouvellement urbain en France 1

Le financement du renouvellement urbain en France Dominique FIGEAT, directeur du programme renouvellement urbain à la Caisse des dépôts et consignations Les dispositifs qui se mettent en place en France en matière de financement du renouvellement urbain, en particulier le rôle que peut y jouer la Caisse des Dépôts et consignations, établissement public financier, n ont pas beaucoup d équivalent dans les autres pays de l union européenne. Ces politiques de renouvellement urbain appellent des dispositifs nouveaux d ordre juridique, administratif et financier et induiront des mutations importantes pour les acteurs urbains. I.- Les fondements et les objectifs du renouvellement urbain Les villes françaises, mais également la plupart des villes européennes, ont à faire face à des enjeux de divers ordres qui apparaissent aujourd hui comme les enjeux majeurs des prochaines décennies. Tout d abord, les enjeux sociaux doivent permettre de donner à chacun la possibilité de satisfaire ce droit fondamental qu est le droit au logement, non seulement le droit au logement décent, mais aussi le droit de choisir son logement. Or on assiste plutôt à un renforcement des mécanismes de ségrégation avec un accroissement de l arrivée des ménages les plus pauvres dans des quartiers qui font l objet de procédure d intervention de divers types et, à l inverse, l accélération des départs pour d autres types de quartiers, d autres types d habitat de la part de ceux qui ont la possibilité de choisir. A côté de ces enjeux sociaux, il y a bien entendu des enjeux écologiques dans la gestion de la ville et, en particulier, l exigence d une optimisation des ressources naturelles avec, au premier rang, la maîtrise du foncier, des terrains urbanisés. Si la France, par rapport à nombre de pays européens, a la réputation d avoir encore un foncier largement disponible, il est évident que l on ne peut pas poursuivre continûment des politiques de gaspillage du foncier même si la France a une certaine latitude en la matière. Au-delà, il y a également la recherche de l optimisation des ressources énergétiques, des ressources en eau, et l inscription des politiques d organisation et de gestion urbaine dans une conception d un développement durable, dont on ne peut pas dire qu il est aujourd hui au fondement des politiques urbaines. Le troisième enjeu est économique, comme l expriment les témoignages de la communauté européenne. L expérience de l Europe met en avant la faible croissance économique lorsque les villes fonctionnent dans des conditions urbaines, sociales, immobilières profondément déséquilibrées. La capacité d attirer des investissements économiques et de la main-d œuvre dans les villes nécessite des conditions de fonctionnement urbain cohérentes que permet seule une bonne maîtrise du développement urbain. Enfin, le dernier enjeu auquel il faut répondre est la capacité à disposer d un patrimoine immobilier, d une offre de logements qui correspondent à la demande des ménages les plus modestes dans le secteur du logement social, mais aussi, d une manière générale, pour l ensemble des catégories de ménages. On voit bien aujourd hui qu un certain nombre d évolutions, non seulement dans les quartiers d habitat social, mais aussi dans les centres-villes ou dans des sites urbains, n offrent plus une diversité des types d habitat qui permette de répondre correctement à la demande des ménages. Face à ces différents enjeux, il faut pouvoir intégrer les mécanismes de marché dans les politiques publiques. Deux exemples montrent que le fonctionnement du marché peut conduire à des résultats strictement contradictoires au regard des objectifs recherchés. Dans le domaine du marché immobilier, on constate aujourd hui, dans toutes les enquêtes, une forte demande pour la maison individuelle. Or l accélération de la construction de maisons individuelles a conduit à des phénomènes de diffusion, d extension urbaine, qui constituent à l évidence des dysfonctionnements qu il faut résorber dès aujourd hui et que les politiques sectorielles, par exemple celle concernant les transports collectifs, ne sont pas à même de réguler correctement. Savoir tenir compte de cette demande, savoir se donner les moyens d y répondre sans pousser à l étalement urbain, à la diffusion urbaine avec tous les problèmes que cela pose, est une nécessité des politiques publiques que le marché ne peut assurer seul. Un deuxième type d exemple se situe dans le domaine des investissements commerciaux. Lorsqu un investisseur a le choix entre situer cet équipement dans du tissu urbain dense, là où la clientèle est présente et facilement accessible, ou dans un tissu périphérique, le choix est fait en faveur d implantations périphériques au regard de critères de rentabilité de l investissement. L implantation d équipements commerciaux dans la ville doit respecter un certain nombre d infrastructures, d équipements, une certaine organisation urbaine, et représente un surcoût mais également des difficultés 2

d intégration qui poussent les investisseurs à choisir des équipements dans des zones périphériques. Si une politique volontariste dans ce domaine n est pas menée, les implantations que l on a pu constater ces dernières années se poursuivront, avec l effet extraordinairement structurant qu ils peuvent avoir sur l évolution des villes. Ainsi, le renouvellement urbain, défini comme la conjugaison d investissements d aménagement urbain et d investissements immobiliers, exige une politique volontariste des collectivités publiques, avec au premier rang les collectivités locales qui sont responsables de la définition des objectifs, du programme d actions, du pilotage de l ensemble des projets et également de la mobilisation de l ensemble des concours financiers publics nécessaires aux opérations. Parmi ces concours financiers, les financements européens prennent une place accrue aux côtés des financements de l État et de ceux des collectivités territoriales. Mais le renouvellement urbain ne concerne pas uniquement les acteurs publics de la ville: à ceux-ci revient la charge de la politique d ensemble et de la politique de financement des services publics qui participent aux opérations de renouvellement urbain, Aux acteurs privés reviennent le financement, la réalisation des projets, des services, des biens qui sont offerts par le marché: création d activités économiques, commerciales, de logements marchands. Le renouvellement urbain nécessite donc l organisation d un partenariat, non seulement opérationnel, mais également financier entre le secteur public et le secteur privé sous un pilotage d ensemble de la collectivité publique, et en particulier de la collectivité locale, avec une répartition claire des responsabilités et des financements à mobiliser. Comment avons-nous cherché à mobiliser ces financements dans le cadre des politiques publiques de renouvellement urbain en France et, en particulier, quel est le rôle de cet établissement public qu est la Caisse des dépôts et consignations? Il. -Le rôle de la Caisse des dépôts et consignations 1) Interventions dans le cadre de missions d intérêt général Rappelons que la Caisse des dépôts et consignations est un établissement financier public dont l une des missions est le financement du logement social, étendu depuis quelques années à celui du renouvellement urbain. Ce financement provient de deux grandes catégories de ressources: celles ayant pour origine la centralisation des fonds d épargne qui sont collectés par les réseaux collecteurs de l épargne populaire, Caisse d épargne, Poste, et des ressources propres de l établissement public, celles qu il tire de ses propres activités financières et bancaires. Cet établissement public, s il n a pas au sens propre d équivalent dans l Union européenne, peut néanmoins être rapproché d un certain nombre d organismes, en particulier par cette spécificité dont il dispose de conjuguer des missions d intérêt général et des activités concurrentielles dans le domaine financier, bancaire et en particulier de la banque d investissement. L Allemagne dispose d établissements financiers qui ont des missions comparables, même si elles ne sont pas exercées à l échelle nationale, comme c est le cas en France. Dans la mise en œuvre des financements qui correspondent aux missions d intérêt général de la Caisse des dépôts et consignations, celle-ci agit dans le cadre de conventions passées avec l État, ce qui est conforme au partenariat nécessaire entre secteur public et secteur privé. D une certaine manière, la Caisse des dépôts et consignations sert à établir le lien financier nécessaire entre interventions et financements publics d une part, interventions et financements privés d autre part. Comment peut-on illustrer cette double caractéristique d une intervention définie avec la puissance publique et conforme à cette conception? Premièrement par le choix des territoires dans lesquels la Caisse des dépôts et consignations intervient et qui font l objet d une politique locale contractualisée avec la puissance publique dans ses objectifs et dans les financements publics qui sont mobilisés. Ils correspondent à ce que l on appelle les territoires prioritaires de la politique de la ville, grands projets de ville, opérations de renouvellement urbain. Mais ils ne s y réduisent pas. Nous avons obtenu du gouvernement que, sur les territoires et les quartiers dans lesquels existent des opérations de renouvellement d une certaine ampleur, les dispositifs financiers incitatifs de la Caisse des dépôts et consignations puissent intervenir. Cette légitimité publique se justifie, non seulement par la sélection à apporter aux financements qui sont mobilisés et l arbitrage nécessaire à faire, mais aussi au regard de la réglementation européenne, dès lors que des financements qui recourent à des dispositifs financiers ou fiscaux incitatifs sont mobilisés. Il est à la fois nécessaire et légitime du point de vue du droit européen, qu ils puissent relever clairement de l intérêt général, et que cet intérêt général soit bien fixé par l État national. 2) Modalités d intervention de la Caisse des dépôts et consignations: l exercice de ces deux métiers financiers différents et complémentaires 3

Dans le cadre de son métier de prêteur, la CDC attribue des financements sous forme de prêts aux opérateurs de renouvellement urbain. Des gammes de prêts spécialement dédiées aux opérations de renouvellement urbain, les prêts projets urbains (les PPU) ont été établis il y a une dizaine d années, et plus récemment les prêts renouvellement urbain qui sont des prêts consentis dans des conditions financières tout à fait privilégiées, puisque les prêts renouvellement urbain sont consentis à un taux de 3 % sur des durées qui peuvent aller jusqu à cinquante ans et peuvent prévoir des différés d amortissement jusqu à dix ans, en particulier en tenant compte de la situation financière des opérations et des emprunteurs. Ces prêts ont aussi une caractéristique majeure par rapport aux prêts traditionnels que connaissent les bailleurs sociaux puisqu ils sont destinés à financer tous types d investissements dans les opérations de renouvellement urbain, d une part les investissements immobiliers, démolition de logements, reconstruction, réhabilitation, mais également des investissements urbains, et également des investissements économiques qui peuvent être réalisés par tous types d opérateurs, des opérateurs publics (collectivités locales, organismes du logement social, aménageurs publics) mais également par des opérateurs privés (investisseurs privés) dès lors, bien entendu, qu ils répondent aux critères et, en particulier, aux critères d objectif de ces opérations. On voit là une évolution qui reste quantitativement relativement marginale par rapport à la masse des financements qui sont mobilisés: les prêts renouvellement urbain représentent sur les trois années 2000-2002, 10 milliards de francs de prêts, alors que 25 milliards de francs annuels sont attribués traditionnellement aux organismes de logement social, ou aux aménageurs publics. Sans être négligeables, ce sont des masses qui sont encore secondaires, mais on voit bien une évolution assez significative de doctrine, car ce sont des prêts qui financent des investissements dans des opérations de renouvellement urbain et qui ne sont pas exclusivement dédiés à des investisseurs et des opérateurs publics. On passe donc clairement, à travers ces prêts, d une logique de financement d acteurs à une logique de financement d opérations, à condition que ces opérations se situent dans un cadre d action publique. Deuxième métier exercé, c est le métier d investisseur public, et celui-là peut exiger un peu plus de clarifications. Un des objectifs recherchés à travers ces opérations de régénération urbaine, de restructuration urbaine est le traitement des espaces publics, des transports collectifs, de l aménagement urbain, de l immobilier, mais également de recréer les conditions du développement économique dans ces quartiers, en particulier en matière d immobilier, d immobilier commercial, d activités, également en matière d habitat résidentiel. Ceci nécessite le recours à des investisseurs aujourd hui peu motivés sur des opérations soit trop risquées, soit se déroulant dans des territoires sur lesquels ils estiment que le risque de l investissement est trop élevé du point de vue de sa sécurité et de l image du quartier. Par cette activité d investisseur public, la CDC cherche à anticiper la transformation urbaine des quartiers, de manière à permettre, par la réduction ou le partage de la prise de risques, l investissement marchand là où aujourd hui il est absent. Ainsi, depuis deux ans, nous effectuons des investissements «dans des opérations d immobilier commercial, d immobilier d activités, de traitement de copropriétés, sur lesquelles la prise de risque est élevée, sur lesquelles la rentabilité est plus faible que celle de l investissement marchand, en s associant à des acteurs privés de manière que se recrée un processus d investissement. Dans ces quartiers désertés aujourd hui par l investissement économique, l objectif est de recréer une diversité des modes d intervention, des types d activités, qui nous paraît être un des objectifs de ces politiques de restructuration urbaine. Ill. -Les obstacles aux opérations de restructuration urbaine Il existe bien entendu des obstacles de plusieurs types. En premier lieu, d ordre politique. On constate en France une difficulté des collectivités locales à définir des objectifs opérationnels laissant toute leur place à la diversité sociale, à la diversité urbaine, à la diversité immobilière. Un partenariat opérationnel d acteurs responsables est difficile à établir, comme le prouvent, par exemple, les lenteurs de mise en place des dispositifs de la politique de la ville. Une deuxième série d obstacles est d ordre opérationnel. Ces projets nécessitent des montages et une ingénierie particulièrement complexes. La mesure en France des efforts et des investissements, des financements, qui doivent être affectés à ces phases de montage et d ingénierie n est pas encore totalement prise en compte. La CDC y consacre une partie importante de son programme de financements, en prélevant une partie des masses financières affectées à ces opérations à ce dispositif d ingénierie. Aujourd hui, un fonds d investissements est constitué qui est doté pour les trois années, 2000, 2001 et 2002, de 3 milliards de francs. Sur ce fonds de 1 3 milliards de francs, 100 millions de francs sont consacrés 4

chaque année (soit 300 millions de francs sur les trois ans, 10% du montant total du fonds) au financement sous forme de concours, de subventions, de ces dispositifs d ingénierie. Aujourd hui, ni l État, ni les collectivités locales, ni même les opérateurs, qu ils soient publics ou privés, n ont fait l effort de consacrer les sommes nécessaires si l on veut mettre en place sur ces opérations l ingénierie qualifiée. Un troisième type d obstacles porte sur l inadéquation des procédures, notamment en matière d urbanisme opérationnel. Aujourd hui, l ensemble des acteurs engagés dans ces opérations doive procéder à des combinaisons de procédures existantes pour permettre de réaliser, dans des conditions de relative efficacité, l ensemble des investissements qui sont nécessaires à partir de l intervention publique et des procédures publiques existantes, jusqu à la mobilisation des investissements privés, dans des conditions juridiques qui offrent peu de garanties de robustesse au regard des risques, à la fois de recours bien sûr, mais aussi des risques de toute nature qu elles comportent. De ce point de vue, la loi SRU représente une étape importante dans l affirmation des objectifs, des principes et de certains dispositifs en matière de renouvellement urbain. Le dernier obstacle est d ordre financier. Il existe un problème d arbitrage sur les dépenses publiques et les dépenses des collectivités publiques. Pourtant, depuis vingt ans que la politique de la ville existe dans ce pays, jamais autant de ressources publiques n ont été dégagées et ne peuvent être mobilisées pour cette politique. L Europe, pour la première fois, sur la période 2000-2006, consacre dans le cadre de l objectif 2 des financements européens importants pour ces politiques urbaines; l Etat lui-même a fortement renforcé ses dotations. Les collectivités locales autres que les communes en particulier les régions, et maintenant de plus en plus les départements - acceptent également de consacrer des financements qu elles n affectaient pas auparavant à ces opérations. Il n en reste pas moins, d une manière très inégale d une ville à l autre, qu il y a dans certains cas des collectivités, des communes qui sont dans l incapacité d affecter les financements publics qui leur sont nécessaires, notamment si on veut leur faire jouer le rôle de maître d ouvrage urbain. La question de la situation des organismes d HLM et des ressources qu ils peuvent affecter au financement des opérations qui concernent leur patrimoine constitue aussi un sujet de préoccupation. Une réflexion est menée avec les représentants des organismes d HLM, l Union des HLM et les fédérations concernées, pour leur donner les moyens d éclairer la situation par des dispositifs et des logiciels d aide à la décision et, en même temps, examiner avec eux, le type de réponse à apporter en fonction du type d opération. Il existe deux types de patrimoine HLM à réhabiliter : ceux qui présentent souvent une situation déficitaire, en raison d un taux de vacances élevé, sur lesquels la restructuration apporte assez rapidement à moyen terme une capacité de rééquilibrage. Au contraire certains programmes immobiliers dégagent des excédents financiers importants et les perspectives de démolition, de réaménagement, de restructuration peuvent faire perdre ces excédents, tout en chargeant financièrement les coûts d exploitation des organismes ou leur bilan par l amortissement accéléré du capital restant dû ou par le financement des coûts de démolition. Un dernier type de ressources est constitué par la mobilisation des investisseurs privés qui acceptent de s inscrire dans des opérations encadrées par la puissance publique. Des dispositifs de garantie partielle peuvent permettre de partager ou de réduire le risque que peuvent prendre les investisseurs privés, de telle manière qu ils soient mieux mobilisés sur ces opérations. En guise de conclusion, quelques observations peuvent être formulées. Premièrement, la politique de renouvellement urbain est nécessairement une politique publique conjuguant aménagement et investissement immobilier sous la responsabilité des collectivités locales. Deuxièmement, elle ne peut être mise en œuvre efficacement qu en combinant intervention publique et intervention privée dans un cadre de partenariat organisé. Troisièmement, elle exige des financements incitatifs qui permettent de bénéficier, aussi bien pour l immobilier social que pour l investissement économique privé dans certaines zones, d incitations fiscales ou de bonifications sans lesquelles les opérations ne peuvent pas être aujourd hui réalisées. Quatrièmement, les financements traditionnels affectés aux acteurs publics du logement social évoluent vers des financements à des opérations contractualisées avec la puissance publique. Dernier point, le retour de l investissement privé nécessite des formes de portage de risque, ou des formes de garantie qui permettent de réinitialiser un processus autorisant les quartiers à connaître une diversité sociale, urbaine, d acteurs et de recréer ainsi la ville qui fait défaut aujourd hui. 5