Les troubles de l humeur I) La dépression : 1) Epidémiologie : La plus fréquente des affections psychiatriques, touche 15% de la population ( 2 femmes pour un homme). Elle représente 30% des causes de suicide. 2) Sémiologie : Triade symptomatique : a) Humeur dépressive : Vision et vécu pessimiste du monde et de soi-même, douleur morale Anhédonie : perte du plaisir. Perte des intérêts, anesthésie affective, incurie. Possibilité d existence d idées suicidaires. b) Ralentissement psychomoteur : Visage peu expressif ( amimie, voire «oméga frontal»), inertie, apragmatisme, clinophilie, à l extrême : état stuporeux. Difficultés de concentration c) Troubles instinctuels : - Sommeil : insomnie, réveil matinal précoce (dépressions endogènes) - Alimentation : perte d appétit, amaigrissement de quelques kilos. - Sexualité : baisse de la libido, frigidité chez la femme, impuissance chez l homme. - 1 -
A ce trépied symptomatique peuvent s ajouter des plaintes somatiques qui, si elles sont au premier plan, peuvent masquer le tableau dépressif. 3) Classification du syndrome : Classiquement on distingue deux types de dépressions : endogène et psychogène. a) Dépression endogène : -Le terme endogène renvoie à la notion de «terrain» prédisposé : il n y a pas nécessité de facteurs déclenchants. -On retrouve souvent des antécédents familiaux ou personnels thymiques. -Facteurs biologiques et génétiques impliqués. -Terrain particulier : elle survient souvent dans le cadre du trouble bipolaire. -C est une dépression plus grave que la dépression psychogène, mais elle est également plus sensible aux antidépresseurs. b) Dépression psychogène : - Existence d une cause déclenchante ( deuil, rupture, échec professionnel). - L anxiété est souvent au premier plan (insomnie d endormissement). - Le ralentissement psychomoteur est peu intense voire absent. - Absence d idée d incurabilité, l autodévalorisation est moins marquée. - Il n y a jamais délirante, l humeur peut être encore influencée par l extérieur. - 2 -
4)Hypothèses physiopathologiques : Les antidépresseurs, médicaments qui se sont révélés efficace sur la symptomatologie dépressive, ont permis de proposer une hypothèse mono-aminergique de la maladie dépressive. En clair, il existerait un hypofonctionnement du réseau sérotoninergique cérébral (d où l efficacité des antidépresseurs sérotoninergiques) mais aussi, vraisemblablement, d une implication de la noradrénaline et de la dopamine. 5)Formes cliniques : a) La mélancolie ou accès mélancolique : C est une de dépression sévère : triade sévère (douleur morale majeure). Elle est le plus souvent symptomatique d un trouble de l humeur sousjacent ( trouble bipolaire). - Clinique : Le début peut être brutal ou insidieux. Intensité de la forme dépressive : auto-dévalorisation, auto-accusation. Anhédonie voire anesthésie affective qui peut alterner avec des moments d hypersensibilité émotionnelle douloureuse. Le ralentissement psychomoteur est majeur ( forme stuporeuse). Symptomatologie à prépondérance matinale (réveil précoce) avec amélioration vespérale. Importance de l anorexie et de la perte de poids. Haut risque suicidaire. Triade mélancolique : - Indignité ( ne mérite plus de vivre, d être soigné). - Culpabilité, autodévalorisation. - Incurabilité et désespoir. Possibilité d un délire : propos hors de la réalité. - 3 -
Les thèmes délirants sont congruents à l humeur. Forme particulière : le syndrome de Cotard : délire de négation d organe : «je n ai plus d estomac». c) La dépression anxieuse : L anxiété est au premier plan ( angoisse, palpitations, «tension interne»). Le ralentissement psychomoteur fait place à une agitation anxieuse Le risque suicidaire est important. d) La dépression de l enfant et de l adolescent : Baisse du rendement scolaire, fugues, alcoolisations. «Rupture» par rapport à l état habituel de l enfant. e) La dépression du sujet âgé : Soit une dépression «d involution» ou pseudo-démentielle: troubles cognitifs marqués, une évolution démentielle est fréquente. Soit une dépression «masquée» : au premier plan, la personne présente des manifestations algiques ( céphalées, douleurs ).et les symptômes dépressifs peuvent passer au deuxième plan. f) Les dépressions «secondaires» : La dépression fait suite à un autre trouble somatique ou psychique : Causes endocriniennes : hypothyroïdie, Addison, Cushing. Causes neurologiques : Parkinson, SEP Cancers, tumeurs cérébrales, maladies de système et collagénoses. Toxiques et médicaments : neuroleptiques, bêtabloquants, ALDOMET, corticoïdes, interféron alpha Causes psychiatriques : alcoolisme, toxicomanies, troubles anxieux, schizophrénie, pathologies névrotiques - 4 -
II) Le trouble bipolaire ( ancienne psychose maniaco-dépressive) : 1) Définition : Succession d accès dépressifs et/ou d accès maniaques. Evolution : entre les accès, les intervalles sont «libres» de tout symptôme clinique thymique. Le type de récidive dépend de la forme évolutive ( forme bipolaire, ou unipolaire dépressive). 2) Physiopathologie : C est la pathologie psychiatrique où la génétique intervient le plus ( risque de 70 % chez des jumeaux monozygotes). 3) L accès maniaque : Image en «miroir» de la dépression. a) Clinique : Début souvent brutal, ou rapidement progressif : Prodromes évocateurs : insomnie, sans fatigue. Excitation intellectuelle : projets multiples, achats excessifs inutiles. Désinhibition, extravagance vestimentaire, impudeur. Activité épistolaire, graphorrhée. Intolérance à la contradiction, cynisme. Agitation psychomotrice. Tenue débraillée, hypermimie. Contact : hypersyntone, familier, ironique, jovial mais peut très rapidement se mettre en colère Humeur : euphorie expansive, hyperhédonie. Du point de vue cognitif : attention superficielle et mobile, hypersensibilité aux stimuli extérieurs. - 5 -
Accélération du cours de la pensée ( tachypsychie, logorrhée, fuite des idées, jeux de mots (coq-à l âne). Exaltation imaginative jusqu à la mégalomanie. Hyperphagie, hypersexualité, insomnie rebelle constante. -Risques : Dépenses inconsidérées. Accident Complications somatiques ( déshydratation, problèmes cardiovasculaires). b) Formes cliniques : - Fureur maniaque : forme suraiguë. - Accès hypomaniaque : symptomatologie atténuée. - Manie délirante : délire à thèmes mystiques, mégalomaniaques - Etat mixte : coexistence de symptômes dépressifs et maniaques. c) Formes évolutives : - Forme bipolaire : récurrence d épisodes maniaques associés à des épisodes dépressifs. - Forme unipolaire (dépressive) : récurrence d épisodes uniquement dépressifs. - Forme saisonnière : «dépression saisonnière» : SAD Symptomatologie sub-dépressive en automne-hiver : asthénie, manque d énergie, hypersomnie, prise de poids, et augmentation de l appétit pour les hydrates de carbone ; Traitement : photothérapie. - 6 -
4) Traitement : a) Accès maniaque : Hospitalisation, isolement, traitement antimaniaque ( lithium, DEPAKOTE, antipsychotique : ZYPREXA) b) Trouble bipolaire : Thymorégulateurs : lithium, DEPAKOTE ou DEPAMIDE, TEGRETOL. Si dépression : antidépresseur mais attention au risque de virage maniaque! - 7 -