Prophylaxie et traitements antibiotiques



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Pratique quotidienne formation complémentaire Prophylaxie et traitements antibiotiques J. Thomas Lambrecht Clinique de chirurgie buccale, de radiologie et de stomatologie du Centre de médecine dentaire de l Université de Bâle Mots clés: antibiotiques, chirurgie bucco-dentaire, infections odontogènes Adresse pour la correspondance: Prof. D r D r med. J. Thomas Lambrecht Klinik für zahnärztliche Chirurgie, -Radiologie, Mund- und Kieferheilkunde Zentrum für Zahnmedizin der Universität Basel Hebelstrasse 3, 4056 Bâle Tél. 061/267 26 06, fax 061/267 26 07 E-mail: J-Thomas.Lambrecht@unibas.ch Traduction française de Thomas Vauthier en chirurgie bucco-dentaire Les antibiotiques sont administrés à titre prophylactique et thérapeutique. Du fait que les conditions régissant l administration de ces substances sont continuellement soumises à des modifications en raison de l apparition de résistances bactériennes, il y a lieu de réévaluer à certains intervalles les régimes préconisés et de les adapter à la nouvelle situation. Dans le domaine de la médecine dentaire, il ne faudrait prescrire des antibiotiques à titre prophylactique qu avec beaucoup de retenue. En revanche, chez les patients à risque en premier lieu en cas de risque d endocardite la prophylaxie antibiotique est impérative. De même, une antibiothérapie est absolument indiquée en tant que modalité thérapeutique adjuvante à la chirurgie primaire dans le traitement de l ostéomyélite aiguë, ainsi que des abcès disséminés à distance et des abcès touchant plusieurs loges. En cas de doute, il est judicieux d adresser le patient à une clinique ou un centre spécialisé équipé des infrastructures adéquates en la matière. (Illustrations et bibliographie voir texte allemand, page 601) Introduction Les étiologies odontogènes figurent au premier plan des infections affectant les tissus osseux et les parties molles de la sphère oro-maxillo-faciale (tab. I). Dans le domaine de la médecine dentaire, les antibiotiques sont administrés à titre prophylactique et thérapeutique (tab. II et III). Le terme de «couverture antibiotique» utilisé à l origine dans le domaine des traitements par quarantaine doit être considéré comme étant du jargon dépourvu de tout sens pertinent; de ce fait, il ne devrait plus être employé actuellement. Les antibiotiques font partie des médicaments le plus souvent administrés dans la pratique dentaire. Il est toutefois nécessaire de réévaluer régulièrement les modalités de cette pratique. A ce propos, il convient de tenir compte des trois critères suivants: 1. A quel moment l administration d antibiotiques est-elle indiquée en chirurgie bucco-dentaire? 2. Quels sont les antibiotiques propices à cet effet? 3. Quels délais faut-il respecter pour la prophylaxie ou le traitement par des antibiotiques? Outre la contamination des plaies, qui est un processus local, il est possible que des interventions bucco-dentaires entraînent une bactériémie, en d autres termes une dissémination de germes colonisant la cavité buccale, vers la circulation sanguine (fig. 1+2). D après les résultats issus de vastes études réalisées par RAHN (1989), les manipulations dans la région de la gencive marginale (par exemple détartrage, curetage de poches), au même titre que les avulsions dentaires, se trouvent en tête des causes de telles disséminations. Des bactériémies ont été mises en évidence dans environ deux tiers des cas d avulsions dentaires 608 Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 6/2004

Prophylaxie et traitements antibiotiques en chirurgie bucco-dentaire Tab. I Etiologies des infections odontogènes 1. Avulsions dentaires 2. Parodontite apicale chronique (granulome apical) 3. Accidents d éruption dentaire 4. Restes radiculaires infectés 5. Dents incluses/enclavées infectées 6. Kystes infectés 7. Parodontite marginale Tab. II Types de prophylaxie antibiotique 1. Prophylaxie de brève durée: début 4 à 2 heures avant l intervention, jusqu à 48 heures après l intervention au maximum 2. Prophylaxie ultrabrève: début 4 à 2 heures avant l intervention, jusqu à 24 heures après l intervention au maximum 3. Prophylaxie «one-shot»: administration de l antibiotique en une dose unique (p. ex. au début de l intervention) Tab. III Types de traitements antibiotiques 1. Traitement calculé: s oriente selon les germes probablement impliqués et leur sensibilité 2. Traitement non ciblé: après le début d une infection, mais sans disposer de résultat de culture, respectivement d un antibiogramme 3. Traitement ciblé: après le début d une infection, mais fondé sur des résultats d examen bactériologique et un antibiogramme 4. Traitement systémique: a) par voie orale b) par voie parentérale (intraveineuse) 5. Traitement local et d injections intraligamentaires, et dans quelque dix pour-cent après des injections simples à travers la muqueuse buccale ainsi que lors de résections apicales (fig. 3). Il faut considérer les poches parodontales comme représentant le réservoir principal des bactériémies. Ainsi, le nombre de bactéries aérobies et anaérobies chez des patients présentant une mauvaise hygiène bucco-dentaire ou des affections parodontales à un stade avancé était environ deux fois supérieur à celui des patients avec une très bonne hygiène bucco-dentaire et un parodonte sain (fig. 4). Tant pour les médecins-dentistes que pour les médecins généralistes et spécialistes, il est important d être conscient du fait que durant les interventions qui impliquent la gencive marginale, des bactéries sont disséminées vers la circulation sanguine dans une proportion correspondant à leur nombre respectif dans la composition de la flore à l intérieur des poches parodontales. Trois minutes après des interventions de ce genre, les analyses ont démontré la présence d environ 800 germes dans le volume total du sang en circulation (RAHN 1989). La durée totale de la bactériémie est d environ 45 minutes; passé ce délai, le sang est en grande partie purifié par le système réticulo-endothélial ainsi que par la phagocytose intravasculaire assurée par les leucocytes polyvasculairenucléaires (WOOD et coll. 1951). L importance de la bactériémie provoquée pour des raisons iatrogènes réside dans le fait qu elle représente la condition «sine qua non» de l endocardite bactérienne. En outre, elle est considérée, selon OTTEN (1990), comme étant responsable d infections métastatiques au niveau du cerveau, de la plèvre, du foie et de la rate. Les endoprothèses, les shunts, les stimulateurs cardiaques, etc., de même que certaines maladies cardio-vasculaires, figurent également parmi les autres éléments de risque faisant l objet de discussions (BECK & OFFENBACHER 2001; KARAMITSU et coll. 2001). Parallèlement à la progression de l âge de l individu, la flore microbiologique de la cavité buccale est soumise à des modifications, tant du point de vue qualitatif que quantitatif. Après la percée des dents de lait, la flore buccale chez les enfants en bas âge s élargit avant tout dans le spectre des germes anaérobies. Après la percée des dents définitives, il est possible de déceler en outre des germes supplémentaires, par exemple différentes variétés d Entamœba et de Trichomonas. Dans tous les groupes d âge, il est possible de mettre en évidence, à titre facultatif, un nombre restreint de levures (par exemple Candida albicans). A part certains virus (par exemple herpesvirus), presque toutes les bactéries importantes en médecine humaine peuvent être présentes en tant que germes transitoires. A ce propos il convient d évoquer en particulier le staphylocoque doré, les streptocoques hémolytiques, les pneumocoques, Hæmophilus influenzæ et différentes variétés d entérobactéries. Dans les cas d infections odontogènes, on trouve de manière prépondérante des flores mixtes, composées de germes aérobies et anaérobies, qui peuvent parfois comprendre plus de dix souches de bactéries. Dans ces flores mixtes, le nombre de germes anaérobies dépasse de loin celui des aérobies. Jusqu à présent, l investissement en temps et au plan technique nécessaires pour les analyses bactériologiques ont été les principaux écueils s opposant à ce que le praticien installé en cabinet privé puisse fonder de routine son choix d un traitement précoce et adéquat sur un diagnostic microbiologique rapide et fiable. Les constants développements dans le domaine des méthodes de diagnostic basées sur le génie moléculaire font espérer qu il sera bientôt possible de déterminer de façon précise l étiologie des infections parodontales et des abcès odontogènes. L utilisation de routine de tels procédés de génie moléculaire (par exemple par analyse séquentielle comparative de l ARN) permettra alors de poser des diagnostics microbiologiques rapides, fiables et économiques (GOEBEL 1994). Indications pour l administration d antibiotiques en chirurgie bucco-dentaire Une prophylaxie par des antibiotiques est indiquée dans les cas suivants: 1. Interventions de durée prolongée; 2. Interventions comportant un risque élevé de contamination; 3. Patients à risque sur le plan de la médecine interne, en fonction de l avis du médecin traitant. Une prophylaxie par des antibiotiques est impérativement nécessaire en cas de risque d endocardite: Risque élevé Prothèses valvulaires cardiaques Status après endocardite bactérienne Risque modéré Vices cardiaques congénitaux (exceptée: communication interauriculaire) Vices cardiaques opérés de manière palliative ou provisoire Vices valvulaires dus à des maladies rhumatismales Prolapsus de la valve mitrale accompagnée d insuffisance mitrale Cardiopathie hypertrophique obstructive Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 6/2004 609

Pratique quotidienne formation complémentaire (Groupe suisse de travail pour la prophylaxie des endocardites [MALINVERNI 1984; FLUECKIGER et coll. 1991; BERTHOLD 1993; MOREILLON 2000].) Il convient de noter qu en l état actuel des connaissances, le concept selon lequel il n existe aucun fondement scientifique pour l administration prophylactique d antibiotiques en chirurgie bucco-dentaire reste toujours valable les situations spécifiques évoquées mises à part. Le risque d une utilisation inadéquate d antibiotiques et les résistances largement répandues contre les antibiotiques jouent un rôle considérablement plus important que le bénéfice potentiel de l administration prophylactique non spécifique des antibiotiques (TONG & ROTHWELL 2000). Selon SCHUBERT (2003) une antibiothérapie est indiquée de façon absolue à titre de mesure adjuvante à la chirurgie en tant que modalité thérapeutique primaire, entre autres dans les cas suivants: 1. Ostéomyélite aiguë 2. Phlegmons 3. Abcès disséminés à distance 4. Abcès intéressant plusieurs loges 5. Lorsque l étiologie bactérienne de l affection a été confirmée 6. Thrombose de la veine angulaire Choix de l antibiotique Des recommandations générales concernant le choix des médicaments à utiliser en médecine dentaire ont été compilées par AL-NAWAS (2000) dans une prise de position de la Société allemande de chirurgie dentaire, buccale et des maxillaires (DGZMK) (tab. IV). Des recommandations particulières ont été formulées pour un certain nombre d affections spécifiques intéressant la sphère oro-maxillo-faciale: Abcès Par principe, les abcès sont traités par incision et drainage, puis par l élimination de la cause. Lorsque l incision et le drainage provoquent un écoulement de pus, il n y a pas d indication à une antibiothérapie (exceptions: voir plus haut). Par contre, l administration d antibiotiques est indiquée pour la prévention d une surinfection en cas de risque de dissémination vers les tissus mous adjacents. Traitement de premier choix: aminopénicilline + inhibiteur de la -lactamase. Traitement alternatif en cas d allergie à la pénicilline: clindamycine, macrolides. Tab. IV Recommandations générales concernant le choix des médicaments à utiliser en médecine dentaire selon la Société allemande de chirurgie dentaire, buccale et des maxillaires (DGZMK). (Posologies applicables aux adultes en bonne santé et de poids normal. Adaptation nécessaire de la posologie chez les enfants et en présence de maladies générales). Groupe Dénomination DCI Nom commercial Posologie (liste non exhaustive) Pénicilline V phénoxyméthylpénicilline Megacilline orale 3 1,5 mio UI Ospen Pénicilline Spirig Pénicilline Cimex Aminopénicilline amoxicilline Azilline 3 750 mg Clamoxyl Clavamox Aminopénicilline amoxicilline + Augmentin 3 625 mg + inhibiteur de la -lactamase acide clavulanique Aziclav Clindamycine clindamycine Dalacin C 3 300 mg Céphalosporines I céfaclor Ceclor 3 500 mg Ceclor Retard Céphalosporines II céfuroxime Zinacef 2 250 mg Zinat Céphalosporines III cefpodoxime Orelox 2 200 mg Podomexef cefixime Céphaoral 2 200 mg céfotaxime Claforan i. v. seulement i. v. Tétracycline doxycycline Sigadoxin (Ø en CH) 2 100 mg Supracycline Vibramycine Doxycycline HelvePharm Macrolides érythromycine Erythrocin 3 500 mg roxithromycine Rulid 1 300 mg clarithromycine Klacid 2 500 mg azithromycine Zithromax 1 500 mg Nitroimidazole métronidazole Arilin 3 400 mg Flagyl Source: DZZ 57 (8) 2002 (Ø en CH): spécialité non disponible en Suisse 610 Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 6/2004

Prophylaxie et traitements antibiotiques en chirurgie bucco-dentaire Tab. V Posologies recommandées pour les antibiotiques administrés pour le traitement adjuvant des parodontites marginales Antibiotique Posologie pour personnes Durée adultes préconisée Tétracycline 4 250 mg/j 21 jours Doxycycline 1 200 mg/j 1 jour 1 100 mg/j 20 jours Métronidazole 3 400 mg/j 8 jours Métronidazole 3 400 mg/j 8 jours et Amoxicilline 3 500 mg/j 8 jours Métronidazole 2 500 mg/j 8 jours et Ciprofloxacine 2 500 mg/j 8 jours Amoxicilline + 3 500 mg/j 14 jours acide clavulanique Ciprofloxacine 2 500 mg/j 10 jours Clindamycine* 4 300 mg/j 7 jours * à n administrer qu en cas d intolérance aux antibiotiques alternatifs Infiltrat Lorsque l incision ne provoque pas d écoulement de pus, il faudrait administrer un antibiotique en raison du risque de surinfection. En cas d accident d éruption, outre le traitement local, un traitement antibiotique n est indiqué que lorsque le patient présente des symptômes généraux concomitants, tels que la fièvre, des troubles de la déglutition ou un trismus, qui signalent la présence d une surinfection. Il va de soi que l on cherchera par la suite à éliminer la cause première (par exemple avulsion de la dent de sagesse ayant provoqué l accident d éruption). Traitement de premier choix: aminopénicilline + inhibiteur de la -lactamase. Traitement alternatif en cas d allergie à la pénicilline: clindamycine, macrolides. Les infections spécifiques, en particulier les actinomycoses cervico-faciales seront traitées par l association de la chirurgie et d une antibiothérapie (LAMBRECHT et coll. 1984). Traitement de premier choix: pénicilline G (par voie intraveineuse), aminopénicilline (par voie intraveineuse jusqu à la régression des symptômes de l infection, ensuite par voie orale pendant deux semaines). Traitement alternatif: tétracycline, céphalosporine, clindamycine (par voie orale). Interventions ambulatoires de chirurgie bucco-dentaire Les interventions simples de chirurgie bucco-dentaire (avulsions dentaires, extractions dentaires chirurgicales, résections apicales, etc.) ne nécessitent en principe aucune prophylaxie par des antibiotiques chez les patients en bonne santé (TONG & ROTHWELL 2000; POESCHL et coll. 2004). Ce n est qu en cas de complications infectieuses qu un traitement par des antibiotiques est indiqué. La pose d implants ostéointégrés fait partie des interventions de chirurgie bucco-dentaire dont le nombre va s accroître à l avenir. Dans ce domaine également, il n y a aucune indication à une prophylaxie ou un traitement par des antibiotiques chez les patients en bonne santé. Chez les patients à risque, la pose d implants ne devrait être envisagée qu après une évaluation approfondie. En revanche, pour les poses d implants associées à des mesures d augmentation osseuse (par exemple par des greffes d os autologue) une prophylaxie antibiotique par une aminopénicilline combinée avec un inhibiteur de la -lactamase est indiquée. D éventuelles complications seront traitées par des antibiotiques selon les critères évoqués plus haut. Opérations de kystes Après des ablations chirurgicales de kystes, il peut être judicieux de combler la cavité résiduelle par des biomatériaux, afin de stabiliser le caillot sanguin et de favoriser la guérison osseuse. En général, il est possible de renoncer à une prophylaxie antibiotique chez les patients en bonne santé. En cas de dénudation du nerf alvéolaire inférieur au cours de l opération, les options thérapeutiques considérées comme étant propices sont soit la prophylaxie «one shot» (administrée en une dose unique), ou alors un traitement antibiotique (premier choix: pénicilline V, céphalosporines, aminopénicilline + inhibiteur de la -lactamase; traitement alternatif: clindamycine). Pénétration iatrogène dans le sinus maxillaire Dans des conditions physiologiques, le sinus maxillaire est une cavité stérile (LAMBRECHT et coll. 1986). Lorsque, dans le cadre d une intervention de chirurgie bucco-dentaire, il y a une exposition accidentelle du sinus maxillaire initialement exempt de germes, il n y a pas de prime abord d indication à un traitement antibiotique, à condition que la communication bucco-sinusienne soit fermée dans les plus brefs délais (au maximum dans les six heures qui suivent), par exemple à l aide d une plastie par lambeau. Si le sinus mis à nu est infecté, l infection sera traitée par des méthodes conservatrices. La décision s il y a lieu d instaurer un traitement ciblé par des antibiotiques devra être prise en fonction de la situation individuelle (LAMBRECHT 1995; KAISER 2003). Traumatologie En cas de blessures de tout genre, il y a lieu de s assurer par principe que le patient est au bénéfice d une protection suffisante contre le tétanos. Dans les cas de réimplantations dentaires, une prophylaxie antibiotique péri-opératoire de courte durée est indiquée. Il faut considérer les fractures du procès alvéolaire comme étant des fractures ouvertes. Par conséquent, un traitement antibiotique est indiqué dans ces situations (FEIFEL 1994). De même, en fonction de leur étendue, de la durée depuis leur survenue et du degré de contamination, les lésions de la gencive et des muqueuses peuvent éventuellement nécessiter, dans le cadre du traitement chirurgical, une prophylaxie ou un traitement antibiotique de courte durée (premier choix: pénicilline V, céphalosporines, aminopénicilline + inhibiteur de la -lactamase; traitement alternatif: clindamycine). Recommandations spéciales concernant les patients souffrant de maladies générales ou les patients à risque traités au cabinet dentaire Les patients à risque se caractérisent, entre autres, par des troubles comme une diathèse hémorragique, une susceptibilité accrue aux infections et des troubles de la cicatrisation des plaies. Comme il a été précisé plus haut, une prophylaxie antibiotique est impérativement indiquée chez les patients présentant un risque d endocardite. Dans ces cas, il est également indispensable de demander au préalable l avis du médecin traitant. Le non-respect en connaissance de cause de l impératif d une prophylaxie de l endocardite sera considéré comme étant une faute professionnelle. Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 6/2004 611

Pratique quotidienne formation complémentaire A l heure actuelle, les médicaments et les régimes suivants sont recommandés pour la prophylaxie de l endocardite: Risque d infection modéré Par voie orale amoxicilline 2,25 g (3 750 mg) per os 1 h avant et 750 mg per os 6 h après l intervention** *clindamycine 600 mg per os 1 h avant l intervention *clarithromycine ou azithromycine 500 mg per os 1 h avant l intervention *céfuroxime 1 g per os 1 h avant l intervention Par voie parentérale amoxicilline (ou ampicilline) 2 g i. v. ou i. m. 30 minutes avant et 1 g i. v./i. m. ou 750 mg per os 6 h après l intervention** *clindamycine 600 mg i. v. 30 minutes avant l intervention *céfazoline 1 g i. v. ou i.m. 30 minutes avant l intervention *vancomycine 1 g en perfusion pendant 1 à 2 h, à commencer 1 h avant l intervention *teicoplanine 400 mg i. v. ou i. m. 1 h avant l intervention *en cas d allergie à la pénicilline **deuxième dose à titre d option Risque élevé d infection Par voie orale amoxicilline 2,25 g (3 750 mg) per os 1 h avant et 750 mg per os 6 h après l intervention** *clindamycine 600 mg per os 1 h avant l intervention *clarithromycine ou azithromycine 500 mg per os 1 h avant l intervention *céfuroxime 1 g per os 1 h avant l intervention Par voie parentérale amoxicilline (ou ampicilline) 2 g i. v. ou i. m. 30 minutes avant et 1 g i. v./i. m. ou 750 mg per os 6 h après l intervention *clindamycine 600 mg i. v. 30 minutes avant l intervention *céfazoline 1 g i. v. ou i. m. 30 minutes avant l intervention *vancomycine 1 g en perfusion pendant 1 à 2 h, à commencer 1 h avant l intervention *teicoplanine 400 mg i. v. ou i. m. 1 h avant l intervention *en cas d allergie à la pénicilline Selon les cartes personnelles de prophylaxie de l endocardite éditées par la Société suisse de cardiologie, case postale 368, 3000 Berne 14; fax 031/388 80 88; e-mail: docu@swissheart.ch Chez les patients souffrant de diabète sucré, la macro- et microangiopathie diabétique entraînent une susceptibilité accrue aux infections et souvent des troubles persistants de la cicatrisation des plaies. Pour ces raisons, il y a lieu d administrer aux patients souffrant de diabète insulinodépendant et associé à une labilité de l état métabolique des antibiotiques à titre prophylactique, en fonction de l avis du médecin traitant ou en cas de complications à titre thérapeutique. Les maladies hépatiques ayant entraîné des troubles de la fonction hépatique sont corrélées à des déficits de facteurs de coagulation et, dans certains cas, également à un taux réduit de leucocytes. Pour ces raisons, on observe un nombre accru non seulement d hémorragies mais également d infections chez ces patients. Les maladies rénales entraînent une accumulation plus ou moins importante de produits métaboliques toxiques. Lorsqu une dialyse est nécessaire, il faut administrer à ces malades un traitement anticoagulant par de l héparine pendant la durée de la dialyse. De ce fait, ces patients présentent également un risque accru d hémorragies et d infections. Il est dès lors recommandé de réaliser les traitements bucco-dentaires de préférence durant les intervalles «libres» entre les séances de dialyse. Dans les cas de leucémies, qui se caractérisent par la présence en excès dans la moelle osseuse et parfois dans le sang de leucocytes immatures ou de leurs précurseurs, la compétence des défenses immunitaires n est pas garantie. Il résulte de ce fait une susceptibilité accrue aux infections ou des carences immunitaires (état d immunosuppression). De même, les patients ayant reçu des greffes d organes et qui doivent par conséquent suivre des traitements à long terme par des stéroïdes ou des immunosuppresseurs, encourent un risque accru d infections. Chez les patients qui doivent suivre un traitement par des anticoagulants, on observe très souvent la formation d hématomes dans le cadre d interventions de chirurgie bucco-dentaire; ces hématomes nécessitent dès lors une prophylaxie antibiotique ciblée. Les radiothérapies dans la sphère cervico-faciale entraînent des situations défavorables sur le plan de la vascularisation; il en résulte une diminution de la résistance locale à des invasions de germes. Dans ces cas, une prophylaxie par des antibiotiques est obligatoire. Cette liste résume les facteurs de risque les plus fréquents dans le domaine de la chirurgie bucco-dentaire et des maxillaires. La situation devient précaire lorsque plusieurs des facteurs de risque évoqués sont présents simultanément. Afin de prévenir d éventuelles complications en raison du nombre élevé de germes colonisant la cavité buccale, il y a lieu, chez les patients courant un tel risque multiple, d instaurer des mesures particulières dans le cadre de tous les traitements susceptibles de provoquer des hémorragies, comme par exemple les avulsions dentaires, les détartrages et toutes les interventions de chirurgie bucco-dentaire provoquant des saignements au niveau de la gencive. Outre la collaboration étroite avec le médecin de famille ou le spécialiste en médecine interne, l instauration d une prophylaxie antibiotique périopératoire fait partie intégrante des mesures de protection du patient. Le but suprême de la prophylaxie antibiotique dans ces situations est de prévenir des infections, tant locales que systémiques. Lors du choix de l antibiotique, il est indispensable de tenir compte de l anamnèse du patient, ainsi que des expériences que le médecin traitant, ou le spécialiste en médecine interne, a acquis à l occasion de prophylaxies, respectivement de traitements par des antibiotiques administrés dans le passé au patient en question. Chez les patientes à risque durant la grossesse, les bêtalactames, c est-à-dire par exemple toutes les pénicillines, sont considérées comme étant les antibiotiques de premier choix; force est toutefois de constater que pour de nombreuses substances récemment mises au point, nous ne disposons pas encore d un nombre suffisant de résultats d études scientifiques. Pour ces patientes, les tétracyclines et les fluoroquinolones, ainsi que les sulfamides et les aminoglycosides sont contre-indiqués. Dans tous les cas, la collaboration avec le gynécologue traitant est fortement recommandée (TAUCHNITZ 1994). Il convient de noter que les effets secondaires de certains médicaments peuvent avoir des conséquences particulièrement graves chez les femmes enceintes, du fait qu ils sont susceptibles d affecter non seulement la mère, mais également le fœtus. Pour cette raison, une évaluation très stricte des indications à une éventuelle antibiothérapie est une conditio sine qua non. En guise de conclusion, il faut attirer l attention sur le fait que dans les cas de doute, le transfert du patient à un centre ou une 612 Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 6/2004

Prophylaxie et traitements antibiotiques en chirurgie bucco-dentaire clinique disposant des infrastructures nécessaires s impose. Dans un tel cadre, il est possible d effectuer des examens bactériologiques avant l administration d un antibiotique. En outre, il n y a pas lieu de craindre d éventuelles erreurs lors du prélèvement des échantillons, respectivement durant le transport des ceux-ci, qui sont des facteurs risquant de compromettre l analyse correcte des germes. De plus, les centres ou cliniques permettent de réduire le temps nécessaire pour les différentes étapes du diagnostic et du traitement, du fait qu il est possible de consulter dans les meilleurs délais les spécialistes des différentes disciplines médicales impliquées. En même temps, les centres ou cliniques constituent un cadre idéal pour la prise en charge du patient sur le plan de la médecine générale et pour la réalisation rapide des examens supplémentaires pour le diagnostic (cultures de sang, examens de laboratoire, radiographies, etc.), ainsi que pour la prise de la décision de savoir si une hospitalisation est nécessaire pour le bien-être du patient. Remarque de l auteur Le présent travail avait pour thème «La prophylaxie et les traitements antibiotiques en chirurgie bucco-dentaire», en mettant l accent sur les aspects les plus importants du point de vue du médecin-dentiste. En ce qui concerne les antibiothérapies en cas de maladies parodontales, le lecteur est prié de se référer aux travaux de RATEITSCHAK (1989), VAN WINKELHOFF et coll. (1996), FLEMING & KARCH (1998) et MOMBELLI (2003). Remerciements L auteur souhaite exprimer sa profonde gratitude à sa collègue, M me le D r Ursula Flückiger, PD, Département de médecine interne de l Hôpital cantonal de Bâle, Petersgraben 4, 4031 Bâle, pour la revue critique du manuscrit et les précieuses suggestions. Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 114: 6/2004 613