Paludisme Actualités 2015 Professeur Pierre Aubry. Mise à jour le 11/01/2015



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Transcription:

Paludisme Actualités 2015 Professeur Pierre Aubry. Mise à jour le 11/01/2015 1. Introduction : vers l'élimination du paludisme? En 2001, les dirigeants du monde entier ont adopté les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) pour améliorer l'état du monde d'ici 2015. Un des objectifs est une réduction du nombre de cas de paludisme de 50% d'ici 2015 (OMD 6). Ce but est en voie d'être atteint. Le paludisme a, en effet, régressé au cours des dernières années dans toutes les régions du monde sous l'effet de l'amélioration conjointe de la lutte anti-vectorielle (distribution massive de moustiquaires imprégnées d'insecticides à longue durée d'action [MILDA] et plus localement aspersion intra-domiciliaire d'insecticides), du diagnostic rapide des infections plasmodiales (tests de diagnostic rapide [TDR]), des traitements efficaces (combinaisons à base de dérivés d'artémisinine [CATs], des traitements présomptifs intermittents [TPI] des femmes enceintes et des enfants) et des changements sociaux (urbanisation, développement économique) et climatiques. Le Rapport 2014 du paludisme dans le monde à partir des données 2013 confirme que le paludisme reste un problème de santé publique, même si les chiffres fournis sont encourageants. Plus de 3,2 milliards de personnes sont encore dans le monde à risque de développer un paludisme, risque considéré comme élevé pour 1,2 milliards En 2013, on estime à 198 millions le nombre de cas dont 584 000 ont été mortels, les enfants représentant 78% des cas et la Région Afrique 90%. Cependant, l évolution de l incidence et de la mortalité du paludisme est très favorable : - 64 pays sur 88 pays endémiques sont en bonne voie pour inverser la tendance de l incidence du paludisme, 55 sont en passe d atteindre la cible fixée par l OMS de réduire de 75% le nombre de paludisme d ici 2015, - dans la Région africaine de l'oms, le nombre de personnes infectées est tombé de 173 millions en 2000 à 128 millions en 2013, - la prévalence de l infection palustre a nettement diminué en Afrique sub-saharienne depuis 2000 : la prévalence moyenne de l infection chez les enfants âgés de 2 à 10 ans a diminué de 49%, - de même, la mortalité liée au paludisme a diminué de 47% dans le monde depuis 2000 et de 54% dans la Région Afrique ; - au niveau mondial, 4,3 millions de décès ont été évités entre 2001 et 2013, dont 92% chez les enfants de moins de 5 ans vivant en Afrique subsaharienne. C est d abord dans la lutte antivectorielle que de très grands progrès ont été faits avec la distribution de moustiquaires imprégnées d insecticides, mais aussi grâce à un diagnostic le plus précoce possible grâce aux tests de diagnostic rapide permettant, s ils sont négatifs, d économiser le stock de traitement dont l accès reste encore insuffisant. Le financement du paludisme est en augmentation : en 2013, 2,7 milliards US$ sont disponibles, chiffre multiplié par 3 depuis 2005. Cependant, 5,1 milliards US$ sont nécessaires pour atteindre l élimination du paludisme. 2. Epidémiologie 2.1. Trois acteurs : le parasite (un protozoaire), le moustique (l anophèle), l homme. 2.1.1. Le paludisme humain est provoqué par quatre espèces de plasmodium : - Plasmodium falciparum : responsable de la fièvre tierce maligne, la seule espèce qui tue, très fréquente (98% des cas de paludisme en Afrique, 90 % à Madagascar et aux Comores), tropicale, résistante à la chloroquine, mais vite éteinte si le malade survit. 11

- P. vivax : responsable de la fièvre tierce bénigne. Il a une distribution plus étendue que P. falciparum, sauf en Afrique subsaharienne. Il n'est pas si anodin qu'on le dit : des formes graves, voire mortelles, ont été rapportées en Inde, en Amazonie. - P. ovale : responsable de la fièvre tierce bénigne. - P. malariae : responsable de la fièvre quarte bénigne. Une cinquième espèce, P. knwolesi, responsable du paludisme du singe, a été retrouvée comme infection humaine à fièvre quarte dans quelques pays d'asie du sud-est. Attribuée au début à P. malariae, elle est due en fait à P. knowlesi. L'évolution est potentiellement grave et l'infection doit être traitée comme P. falciparum. 2.1.2. Le moustique hôte définitif : l'anophèle femelle, vecteur exclusif d une maladie strictement inter-humaine. Sur plus de 500 espèces d'anophèles connues, près d'une cinquantaine sont capables de transmettre les plasmodium. 2.1.3. L homme hôte intermédiaire : seul hôte réservoir, avec un cycle schizogonique ou asexué, des formes sexuées qui assurent la transmission et la survie de l espèce et l'acquisition d une immunité de type prémunition au prix d une mortalité infantile très élevée pour P. falciparum. 2.2. Le cycle évolutif du plasmodium comprend quatre phases : - le développement parasitaire chez l homme depuis la migration des sporozoïtes vers le foie jusqu'aux gamétocytes en passant par le cycle érythrocytaire schizogonique ou asexué, - la transmission «homme - moustique» avec l ingestion par le moustique des gamétocytes, - le développement sporogonique chez le moustique depuis les gamétocytes dans l estomac jusqu aux sporozoïtes dans les glandes salivaires, - la transmission «moustique - homme» avec l injection par le moustique à l'homme des sporozoïtes. Au cours de la première phase, les schizontes se rompent environ une semaine après la piqûre du moustique et libèrent les mérozoïtes dans le sang. Ils envahissent les globules rouges (GR) puis se développent en trophozoïtes qui maturent en schizontes et se divisent en mérozoïtes qui envahissent de nouveau les GR. Ce processus au sein des GR correspond aux accès palustres avec fièvre et frissons. Après 1 à 2 semaines, des gamétocytes sont produits et sont repris au cours de nouvelles piqûres de moustiques. Les hypnozoïtes sont des formes dormantes intra-hépatocytaires responsables des accès de reviviscence qui peuvent survenir après des mois ou des années dans les infections à P. vivax et à P. ovale. Il n'existe pas d'hypnozoïtes pour P. falciparum et P. malariae. 2.3. Le vecteur 2.3.1. Ecologie vectorielle : l anophèle femelle - a besoin de prendre des repas sanguins pour la maturation des œufs, - a une espérance de vie de 3 à 12 semaines, - reste près de son lieu de naissance (< 300 m), - pique la nuit entre le coucher et le lever du soleil, - vit dans ou hors des maisons (endophile / exophile), - préfère l homme ou les animaux (anthropophile / zoophile), - abonde dans certains gîtes et pas dans d autres. La longue durée de vie et la forte préférence pour l'homme des espèces africaines des vecteurs, en particulier d'an. gambiae, le vecteur africain du paludisme, expliquent que plus de 90% des décès par paludisme surviennent en Afrique sub-saharienne. Exemple des Iles de l océan Indien Une vingtaine d espèces anophèliennes sont impliquées dans les îles de l'océan Indien, dont : - An. gambiae : gîtes temporaires, côtes de Madagascar, Comores (citernes) - An. funestus : collections d eaux permanentes, Madagascar (rizières) - An. mascarensis : dans le sud est de Madagascar (Région de Fort-Dauphin), à Ile Sainte Marie - An. arabiensis : Madagascar, Ile Maurice, Ile de la Réunion. An. arabiensis est la seule espèce pouvant être responsable de l émergence de cas autochtones à La Réunion ou à Maurice, bien que sa faible longévité (<14 jours) et son comportement exophile et zoophile favorisent le maintien de l état d éradication. Il faut, en effet, 4 à 5 semaines pour qu un anophèle infesté devienne infestant. 22

2.3.2. Transmission Elle nécessite des conditions climatiques, telles que le régime des précipitations, la température et l'humidité (température > 18 C pour P. falciparum et > 16 pour P. vivax) et d'altitude (< 1500 m en Afrique). D où la notion de stabilité du paludisme : - paludisme instable : transmission brève, vie de l anophèle brève, peu de prémunition, forte mortalité à tout âge, - paludisme stable : transmission prolongée, circulation anophèlienne pérenne, anophèle anthropophile et à espérance de vie longue, prémunition rapide, mais mortalité infantile importante. Le paludisme stable existe dans toute l Afrique intertropicale, sauf dans le centre des grandes villes, à une altitude supérieure à 1500 m et dans des zones de transmission faible (Sahel). Il existe schématiquement cinq faciès épidémiologiques du paludisme en Afrique : - le faciès équatorial dans la forêt et les savanes post-forestières : paludisme stable avec transmission pérenne et prémunition forte dès l'âge de 5 ans, - le faciès tropical dans les savanes humides : paludisme stable avec transmission saisonnière longue > 6 mois et une prémunition établie à 10 ans, - le faciès sahélien des savanes sèches et des steppes : paludisme instable avec transmission saisonnière courte < 6 mois (par exemple : août à novembre au Mali), prémunition plus longue à établir liée à la régularité de la transmission, - le paludisme austral des plateaux du sud de l'afrique : paludisme instable à transmission saisonnière, immunité apparemment peu solide, risque d'épidémies, - le paludisme des montagnes entre 1000 et 1500 m : paludisme instable avec transmission limitée par la température (cap des 18 C), peu ou pas d'immunité, épidémies violentes (exemple : Burundi), grandes variations inter-annuelles (température et pluies), problème du réchauffement climatique. Quatre faciès épidémiologiques sont décrits à Madagascar en lien direct avec les différents types climatiques : - paludisme stable à forte transmission toute l année sur la côte est (faciès équatorial), - paludisme stable mais avec forte transmission en saison des pluies (novembre à mars) sur la côte ouest et le nord (faciès tropical), - paludisme instable à transmission liée aux précipitations dans le sud (faciès sahélien), - paludisme instable et saisonnier (novembre à avril) sur les Hautes Terres Centrales jusqu'à 1500 mètres d altitude (faciès montagnard). 2.4. Répartition géographique La transmission du paludisme est élevée dans toute la zone intertropicale entre le 30 de latitude Nord et le 30 de latitude Sud : - en Afrique intertropicale, dans tous les pays, sauf le Lesotho : le paludisme est du à P. falciparum (où il est majoritaire souvent à plus de 90%) et à P. ovale, ou plus rarement à P. malariae; - dans l océan Indien : Madagascar, Archipel des Comores, Zanzibar, - en Amérique latine, il y a une diminution globale des cas, sauf au Honduras, en Colombie, en Guyane française et au Surinam. Il y a une forte proportion d'infection à P. vivax, - en Asie : dans tous les pays de l Asie du sud-est, sauf à Brunei; dans la plupart des pays d Asie du centre-sud, en particulier Inde, Sri Lanka, Pakistan, Afghanistan, Bangladesh, - au Proche et au Moyen Orient : dans les pays de la zone, sauf à Bahreïn, et Qatar, - dans les Caraïbes : en Haïti et en République dominicaine - en Océanie : aux Iles Salomon, au Vanuatu, en Papouasie Nouvelle Guinée. Les Départements et Territoires français d outre-mer sont des pays sans transmission de paludisme (Martinique, Guadeloupe, La Réunion, Nouvelle Calédonie, Polynésie), sauf la Guyane et Mayotte. En Guyane, P. falciparum et P. vivax se répartissent à part égale, mais il y a actuellement une augmentation du nombre de cas à P. vivax. A Mayotte, où les cas de P. vivax ne représentent que 3%, le paludisme est sous contrôle dans la commune de Bandraboua. Le Conseil Supérieur d Hygiène Publique de France (CSHPF) signale chaque année les changements de groupe des pays d endémie (Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, n 16-17 du 3 juin 2014). 2.5. Immunité contre le paludisme : notion de prémunition L'immunité contre le paludisme est complexe et soulève de nombreuses questions. Le paludisme stimule l'immunité innée et l'immunité adaptative (CD4 et CD8). C est un état d immunité relative ou prémunition : équilibre hôte-parasite après plusieurs années d exposition si la transmission est 33

constante, acquis progressivement en 5 à 10 ans au prix d une mortalité infantile élevée. C'est une immunité labile, qui disparaît en 12 à 24 mois chez le sujet immun qui quitte la zone d endémie, chez la femme enceinte au 2 e et 3 e trimestre de la grossesse et chez le splénectomisé. L acquisition lente et progressive de la prémunition est couplée avec l acquisition d'anticorps protecteurs dont la spécificité reste inconnue. Ceci permet cependant de comprendre la fréquence du paludisme chez les femmes enceintes primipares : au niveau du placenta, les GR parasités vont exprimer un nouveau variant antigénique PfEMP1. Celui-ci étant inconnu du système immunitaire, l'immunité pré-existante est inefficace. Ce variant antigénique entraîne la sécrétion d'igg spécifiques à la grossesse, anticorps apparaissant après 20 semaines d'aménorrhée chez les primipares et réapparaissant plus tôt chez les multipares, pour ensuite diminuer dans le post-partum. Des facteurs génétiques confèrent une résistance, en particulier des facteurs de résistance érythrocytaires : modifications de la chaîne ß de l hémoglobine (HbS, HbC, HbE), modifications des taux de synthèse des chaînes de globine (thalassémies), modifications d un enzyme érythrocytaire essentiel (G6PD), modifications des caractères de la membrane et du cytosquelette des érythrocytes (groupe sanguin Duffy, ovalocytose héréditaire). En Afrique subsaharienne, il est admis que le paludisme est du à P. falciparum et à P. ovale, plus rarement à P. malariae, mais que les populations de cette région ne sont pas infectées par P. vivax, car ce paludisme nécessite la présence du sous groupe Duffy sur les hématies, l'antigène Duffy étant le récepteur de P. vivax. Or, dans cette région, les africains sont majoritairement Duffy négatifs. Cependant, une part croissante de patients d Afrique et d Amérique du sud sont infectés par P. vivaxbien que leurs globules rouges soient indemnes de la protéine de surface Duffy.. 2.6. Chimiorésistance 2.6.1. Du vecteur : Il y a une expansion rapide des résistances aux insecticides chez les principaux vecteurs du paludisme, en particulier d A. gambiae aux pyréthrinoïdes en Afrique subsaharienne. Deux formes de lutte anti-vectorielle sont efficaces : les moustiquaires imprégnées d'insecticides à imprégnation durable, la pulvérisation d'insecticides à effet rémanent à l'intérieur des habitations. En 2013, 44% de la population à risque (femmes enceintes, enfants) a accès à une moustiquaire imprégnée d insecticide contre 2% en 2004. Mais, 278 millions de personnes vivent sans moustiquaires imprégnées sur une population à risque de 840 millions. Seulement 123 millions de personnes ont été protégées par la pulvérisation intra-domiciliaire d insecticides, soit 3,5% de la population mondiale à risque. De plus, la résistance aux insecticides, en particulier aux pyréthoïdes, a été signalée dans 49 des 63 pays ayant communiqués des chiffres depuis 2010. L'Afrique subsaharienne et l'inde, caractérisées par de hauts niveaux de transmission, suscitent de grandes préoccupations à cet égard.. La mise au point de nouveaux insecticides pour l'imprégnation des moustiquaires est une priorité.. 2.6.2. Du plasmodium : La résistance des plasmodium intéresse essentiellement P. falciparum, mais des souches de P. vivax sont chloroquinorésistantes en Papouasie Nouvelle Guinée, en Asie du sud-est (Birmanie, Vietnam), en Amazonie. 2.6.2.1. D abord à la chloroquine : Dès 1957, les premiers cas de résistance à la chloroquine sont apparus en Asie et en Amérique du sud. Cette résistance s'est ensuite répandue sur les deux continents, puis en Afrique (1980) où elle touche aujourd'hui la totalité des zones d'endémie palustre. La chloroquino-résistance est caractérisée par la persistance de parasites asexués dans les hématies du patient 7 jours après le début d un traitement bien conduit par la chloroquine (25 mg/kg pendant 3 jours). L évaluation de la résistance en fonction de la parasitémie permet de définir trois seuils de résistance - résistance de stade RI : disparition des parasites au 7 ème jour, suivie d une réapparition, - résistance de stade RII : diminution de la parasitémie, - résistance de stade RIII : aucune diminution de la parasitémie. Les résistances de stade RI, RII, RIII permettent de séparer les pays infectés en 3 groupes 1, 2, 3, appelés par l OMS zones A, B, C. Les pays du groupe 0 sont des pays sans paludisme. Tous les pays d'afrique sub-saharienne sont du groupe 3. Dans l'océan Indien : Madagascar, l Union des Comores, Mayotte, le Mozambique sont du groupe 3 (RIII). Le passage de Madagascar parmi les pays du groupe 3 date de 2013. L'OMS a certifié 44

l'élimination autochtone du paludisme à La Réunion en 1979. Le dernier cas de paludisme autochtone à Maurice date de 1997. Aux Seychelles et à Rodrigues, il n'y a pas de risque palustre car il n'y a pas d'anophèle. Il y a une diminution de la chloroquino-résistance au Malawi; cependant la haute prévalence de la résistance de P. falciparum à la chloroquine dans les pays limitrophes (Mozambique et Zambie) ne doit pas faire réintroduire la chloroquine seule, mais toujours en association. 2.6.2.2. Puis, aux autres médicaments La résistance aux autres médicaments antipaludiques est bien documentée selon la zone géographique : - pour la quinine : les premiers cas documentés de résistance à la quinine ont été rapportés dans les années 1960 au Brésil et en Asie du sud-est, puis deviennent moins rares depuis les années 1980 en Asie, en Amérique du sud et en Afrique. - pour l'amodiaquine : des résistances croisées à la chloroquine et à l'amodiaquine ont été observées in vivo et in vitro. Cependant, l'amodiaquine semble plus efficace que la chloroquine, même dans les zones où la résistance à la chloroquine est élevée - pour la méfloquine : molécule apparue à la fin des années 1970, il a été observé l'apparition et la propagation de souches résistantes en Asie. Des résistances à l'association artésunate-méfloquine se sont développées sur le continent asiatique. - pour la sulfadoxine-pyriméthamine : l'efficacité de la pyriméthamine a rapidement diminué en raison du développement rapide d'une résistance du parasite à cette molécule en Afrique de l'est (Kenya, Tanzanie). La pyriméthamine a alors été associée à la sulfadoxine. Il y a moins de dix ans, cette association était encore recommandée dans la plupart des pays africains dans le traitement de l'accès simple à P. falciparum. Puis la résistance à l'association suladoxine-pyriméthamine s'est étendue rapidement. Cependant, elle connait un regain d'intérêt dans le traitement préventif intermittent du paludisme. - pour les dérivés de l'artémisinine : l'artémisinine, connue depuis 2000 ans en Chine, n'a été étudiée en Occident que depuis les années 1970 et introduite dans la pharmacopée au début des années 1990. La résistance de P. falciparum à l'artémisinine est connue depuis 2008 dans le bassin du Mékong en Asie du sud-est. Des souches résistantes ont été décelées au Cambodge, au Myanmar, en Thaïlande, au Viêt-Nam et plus récemment au Laos. Si la résistance devait se propager à l Inde et à l Afrique subsaharienne ou y apparaître, les conséquences en terme de santé publique pourrait être extrêmement graves, puisqu aucun médicament antipaludique efficace et aussi bien toléré que les polythérapies à base d artémisinine n est actuellement disponible 3. Etude clinique 3.1. Tableaux communs aux quatre plasmodium 3.1.1. Accès palustres simples 3.1.1.1. Accès de primo-invasion chez les sujets non immuns. Le délai après la piqûre infectante est variable : classiquement de 11 jours (entre 7 et 14 jours), en fait peut être long chez le sujet sous chimioprophylaxie inadéquate (peut être supérieur à un an) - fièvre > 39 C, frissons, sueurs, céphalées, myalgies, malaise général, anorexie - tableaux trompeurs : fièvre modérée (syndrome grippal), cytopénie isolée chez des sujets suivant une chimioprophylaxie incorrecte 3.1.1.2. Accès chez les sujets immuns : le portage d infections plasmodiales asymptomatiques est fréquent dans les zones où la transmission est pérenne. Il faut penser à une autre maladie infectieuse associée à un paludisme - infection avec portage asymptomatique. 3.1.1.3. Accès répétés liés à des reviviscences schizogoniques ou accès intermittents. Frissons, chaleur, sueurs, accès se répétant tous les 2 jours : fièvre tierce maligne à P. falciparum ou bénigne à P. vivax, P. ovale, ou tous les 3 jours : fièvre quarte bénigne : P. malariae. Ces accès s'accompagnent d'une splénomégalie. La splénomégalie est le témoin de la prémunition, sa présence et son degré chez les enfants de moins de 10 ans constituent un des marqueurs du niveau d endémie palustre (indice splénique). 3.1.2. Paludisme viscéral évolutif (PVE) : Principales caractéristiques du PVE : - infections palustres répétées - enfants de 2 à 5 ans non encore prémunis vivant en zones d endémie, expatriés dans des zones où existent des souches chloroquinorésistantes, - anémie, cytopénie, - fièvre modérée et intermittente, 55

- splénomégalie constante, modérée, - recherche d hématozoaires positive par intermittence avec parasitémie faible, - sérologie antipalustre : titre des anticorps très élevés (IgG) - réponse au traitement assez rapide. - plasmodium en cause : en principe tous, en pratique P. falciparum. Il faut différencier le PVE et la Splénomégalie palustre hyperimmune (SPH) ou malarique hyperactive (ancienne splénomégalie tropicale), forme chronique du paludisme avec le PVE et la néphropathie quartane. Principales caractéristiques de la SPH : - adultes vivant en zones d endémie - splénomégalie volumineuse - absence de fièvre - recherche d hématozoaires négative - sérologie antipalustre : titre très élevé d anticorps (IgM) - réponse au traitement très lente : prescrire en premier dérivés de l'artémisinine, puis relais par la chloroquine pendant 6 mois pour son action immunomodulatrice. 3.1.3. Fièvre bilieuse hémoglobinurique (FBH) Bien connue avant 1950, en rapport avec les prises de quinine dans une zone d endémie à P. falciparum, la FBH a resurgi au cours de ces dernières années. Les cas sont toujours observés avec la quinine, mais aussi avec des molécules de structure chimique apparentée (halofantrine). L importance d une polymédication associant 2 ou plusieurs antipaludiques est soulignée. La FBH associe : - fièvre élevée + hémoglobinurie macroscopique (urines couleur porto) due à une hémolyse intravasculaire aiguë, - choc, anémie aiguë, insuffisance rénale aiguë (IRA), - pronostic sévère : mortalité de l ordre de, morbidité élevée : 90% des patients présentent une IRA nécessitant dans un cas sur deux une épuration extra-rénale - diagnostic avec l hémolyse aiguë associée à une forte parasitémie au cours d un paludisme grave et avec l hémolyse médicamenteuse (amino-8-quinoleines, sulfamides et sulfones en cas de déficit en G6PD). La FBH est une contre indication absolue à l emploi d amino-alcools. PVE et FBH sont des formes sévères du paludisme à P. falciparum, mais restent classés en dehors des accès palustres graves. 3.1.4. Les néphropathies du paludisme : la néphrite quartane est une néphropathie glomérulaire chronique de l enfant avec syndrome néphrotique impur due à P. malariae, liée à une glomérulopathie par dépôts de complexes immuns et les néphropathies aiguës glomérulaires et/ou tubulaires du paludisme grave à P. falciparum, le plus souvent chez l adulte. 3.2. Accès palustres graves à P. falciparum 3.2.1. Les critères de paludisme grave ont été actualisés par l OMS en 2000. Ces critères sont les mêmes chez l adulte et chez l enfant. Tableau I - Critères de gravité 2000 de l OMS du paludisme grave Neuropaludisme (score de Glasgow < 9, score de Blantyre <2 chez l enfant de moins de 5 ans) Troubles de la conscience (score de Glasgow <15 et >9) Convulsions répétées (> 1/ 24 heures) Prostration Syndrome de détresse respiratoire Ictère (clinique) Acidose métabolique (bicarbonates plasmatiques < 15 mmol/l) Anémie grave (Hb < 5g/dl ou Ht < 15%) Hyperparasitémie (> 4% chez le sujet non immun ou > chez le sujet immun) Hypoglycémie (< 2,2 mmol/l) Hémoglobinurie macroscopique Insuffisance rénale - adulte : diurèse < 400 ml /24h. ou créatininémie > 265 µmol/l - enfant : diurèse < 12mL/kg/24h ou créatininémie élevée pour l âge Collapsus circulatoire (TAS <50 mm Hg avant 5 ans, TAS < 80 mm Hg après 5 ans) Hémorragie anormale Oedème pulmonaire (radiologique) 66

3.2.2. Accès pernicieux palustre ou neuropaludisme ou paludisme cérébral - température : 39 C jusqu à 42 C - coma calme avec hypotonie et aréflexie. Chez l adulte ; coma hypotonique sans convulsion ni signe focal; chez l enfant, convulsions, - score de Glasgow < 9 - pas de signes méningés, mais ponction lombaire obligatoire - convulsions > 2/24 h (enfants) - parfois, manifestations psychiatriques au début - anémie - + autres critères de gravité 3.2.3 Accès palustres graves (autres que le neuropaludisme) La présence d un seul des critères du paludisme grave lors de l examen clinique initial définit l accès palustre grave qui doit être traité comme un neuropaludisme. Dans les deux cas, la mortalité est élevée, supérieure à 10%, voire à 30% avec risques de séquelles chez l enfant dans 10% des cas (épilepsie, cécité corticale), particulièrement au décours d une hypoglycémie. 3.3. Formes cliniques du paludisme 3.3.1. Paludisme de l enfant (non encore prémuni en zone d endémie) Le paludisme de l enfant apparaît après la disparition de la protection du nouveau-né par les anticorps maternels et le remplacement progressif de l HbF par l HbA, après l âge de 3 mois. L'enfant acquiert une immunité labile et incomplète, au prix de nombreux accès palustres graves. Il faut insister d emblée sur la nécessité d un traitement rapide et efficace et sur le rôle protecteur d une supplémentation en vitamine A. 3.3.1.1. Les accès palustres simples - toute fièvre chez un enfant en zone d endémie palustre doit faire évoquer le paludisme, - elle peut être isolée ou accompagnée de signes digestifs (vomissements, diarrhée surtout chez le nourrisson), de céphalées, de convulsions, - la présence de convulsions ne doit pas être abusivement attribuée à une fièvre élevée, mais doit faire craindre l installation d un neuropaludisme. 3.3.1.2. Les formes graves. Trois formes cliniques graves prédominent : le neuropaludisme, l anémie grave, la détresse respiratoire. Les facteurs de gravité sont : le neuropaludisme (profondeur du coma, convulsions répétées, âge < 3 ans, parasitémie > ), et l hypoglycémie attribuée au paludisme. En zone d endémie, plus de 90 % des décès sont observés chez des enfants. 3.3.1.3. Le paludisme congénital : la réalité de l infection transplacentaire du nouveau-né est admise, liée au passage de globules rouges parasités du placenta. Le paludisme congénital-maladie est rare. Il apparaît après un délai variable de 5 à 60 jours et le signe clinique constant est la fièvre. 3.3.2. Paludisme de l adulte Classiquement, l adulte autochtone ne présente pas de formes graves en zone d endémie palustre. En pratique, le paludisme grave de l adulte est une réalité. C est une pathologie émergente dont la recrudescence actuelle relève de plusieurs facteurs : urbanisation non contrôlée croissante, variations climatiques, usage erroné des antipaludiques, prolifération dense d anophèles dans les quartiers périphériques des villes. Par rapport au paludisme de l enfant, l'hypoglycémie et l'anémie sont rares. On note la fréquence des tableaux polymorphes associant état de choc, insuffisance rénale, coagulopathie, hémoglobinurie et détresse respiratoire, l atteinte neurologique étant alors au second plan. La mortalité est proche de. On note la fréquence des infections nosocomiales et des décès par choc septique. 3.3.3. Paludisme de la femme enceinte Le paludisme est beaucoup plus fréquent chez la femme enceinte, surtout pendant le 3 e trimestre et à l accouchement. Des complications aiguës et graves sont notées : mortalité fœto-maternelle, accès pernicieux palustre dans les régions d endémie instable où les cas sont peu fréquents en dehors des épisodes épidémiques. En zone de paludisme stable, problèmes d anémie chez la mère et retard de croissance fœtale responsable d un déficit pondéral à la naissance, principalement marqué chez les primipares. Fréquence de l hypoglycémie sévère après début du traitement par la quinine (qui favorise la libération d insuline), de l œdème pulmonaire, de l anémie. La prophylaxie pendant la grossesse dans les zones d endémie doit être systématique. 3.3.4. Le paludisme transfusionnel : Il survient 2 à 3 semaines après une transfusion. Dans les pays développés, le dépistage se fait chez les donneurs de sang ayant séjourné en zone d endémie palustre depuis plus de 4 mois et 77

jusqu à la 3 ème année après leur retour, un séjour remontant à moins de quatre mois en zone d endémie est une contre-indication absolue à un don homologue. 3.3.5. Le paludisme et l infection à VIH/Sida Les infections par le plasmodium et le VIH sont deux problèmes majeurs de santé publique notamment en Afrique subsaharienne. L'infection par le VIH augmente l'incidence des accès palustres d'autant que l'immunodépression est profonde. L'existence d'une parasitémie est associée à une majoration transitoire de la charge virale, surtout lorsque le niveau de parasitémie est élevé. La prise en charge comprend, outre le traitement de l'infection à VIH, l'application à large échelle des mesures de prévention du paludisme, l'utilisation du cotrimoxazole ou du traitement préventif intermittent du paludisme au cours de la grossesse, le traitement curatif de tout patient parasitémique fébrile, ainsi que l'amélioration de la sécurité transfusionnelle. L'OMS recommande que toutes les femmes enceintes infectées par le VIH vivant dans des zones d'endémie palustre reçoivent un traitement préventif intermittent antipaludique par au moins deux doses de sulfadoxine-pyriméthamine afin de limiter les conséquences materno-placentaires de l'infection plasmodiale en association avec l'utilisation systématique des moustiquaires imprégnées. Quant à la chimioprophylaxie par le cotrimoxazole recommandée chez les patients infectés par le VIH en Afrique subsaharienne lorsque le taux de CD4 est inférieur à 500/mm 3, elle est très intéressante pour son efficacité antipaludique. Plusieurs études ont montré que le cotrimoxazole diminuait l'incidence des accès palustres et de la mortalité chez les patients infectés par le VIH. 3.3.6. Les formes graves à P. vivax L'OMS estime qu'il y a environ 130 à 390 millions de cas de P. vivax chaque année, essentiellement en Asie du sud-est (52%), dans les pays de l'est méditerranéen (15%), et en Amérique du sud (13%). Les symptômes sont classiques : frissons; fièvre, malaise, céphalées, myalgies comme pour les autres espèces, mais la fièvre est souvent plus élevée qu'avec P. falciparum. L'évolution chronique de P. vivax peut durer plusieurs années entraînant une hypoprotidémie, des œdèmes et une perte de poids importante. Une évolution mortelle est possible par anémie sévère, troubles respiratoires, malnutrition, voire coma. Chez la femme enceinte, P. vivax est une cause fréquente d'anémie et de réduction du poids de naissance. 3.3.7. Le paludisme d'importation Le nombre de cas de paludisme d importation a été estimé à environ 3 510 cas en 2012, dont 198 formes graves (10,7%), avec un total de 9 décès (létalité : 0,48% sur l ensemble des cas, 4,5% sur les formes graves). 95,8% des cas proviennent Afrique subsaharienne. Les cas surviennent principalement chez des sujets d origine africaine (78%) résidant en France ou arrivant d Afrique. Ils sont dus en majorité à P. falciparum (88%) Les facteurs de risque de paludisme grave chez le voyageur sont : un âge supérieur à 40 ans, une parasitémie > 4% chez l'adulte, une contamination en Asie du sud-est, une infection par une souche plasmodiale résistante à la chloroquine, un traitement antipalustre auto-déterminé. 2.3.8. Le syndrome neurologique post-paludisme (SNPP) Le SNPP est défini comme une encéphalopathie post-infectieuse survenant dans les deux mois qui suivent une infection par P. falciparum traitée et guérie. Les signes cliniques sont un syndrome confusionnel aigu, des crises d épilepsie ou d autres signes neurologiques ou psychiatriques. Ses relations avec les autres syndromes neurologiques post-infectieux sont discutées, en particulier avec l encéphalopathie aiguë disséminée, répondant à la corticothérapie. Il faut différencier le SNPP de la rechute d un accès palustre. L amélioration est spontanée, sans corticothérapie. 4. Diagnostic L OMS a recommandé en 2010 un dépistage de tous les cas suspects de paludisme. En 2013, 62% des patients suspectés de paludisme dans la Région Afrique ont été soumis à un test de diagnostic (dans le public), par rapport à 40% en 2010. C est le nombre total des tests de diagnostic rapide (TDR) qui a augmenté passant de 200 000 en 2005 à plus de 160 millions en 2013, alors que le nombre des examens microscopiques n a pas évolué (197 millions). 4.1. Diagnostic clinique : il y a de grandes difficultés au diagnostic clinique. 4.2. Diagnostic biologique : 4.2.1. Non spécifique : 88

- ont un intérêt diagnostique : la thrombopénie, l'absence d'hyperleucocytose, une hémoglobine «limite» ou basse, une hyperbilirubinémie, stigmate d'une hémolyse, des ALAT augmentées (< 2 x N). - ont un intérêt pronostique : la thrombopénie, l'acidose, l'insuffisance rénale, l'hypoglycémie (critères de gravité). 4.2.2. Spécifique : 4.2.2.1 Diagnostic direct 4.2.2.1.1. Les techniques microscopiques conventionnelles, frottis mince, goutte épaisse : elles demeurent la référence, elles nécessitent une méthodologie simple, mais précise et rigoureuse et un long apprentissage. La sensibilité est corrélée au temps d observation (pour un frottis : lecture d au moins 100 champs, en pratique 20 minutes). Le frottis mince permet : - l étude morphologique des hématozoaires, - le diagnostic différentiel entre les espèces plasmodiales (il reste toujours un défi même pour un lecteur averti). La goutte épaisse, examen de référence de l OMS, est largement utilisée pour le diagnostic de routine. Sa sensibilité (seuil de détection d'hématies parasitées/µl) est de 20 hématies parasitées/µl, 10 fois plus élevée que celle du frottis mince (100 à 200). Le problème du diagnostic d espèce se pose rarement et l incertitude est le plus souvent sans conséquence sur la conduite thérapeutique. 4.2.2.1.2. La technique microscopique par fluorescence La coloration fluorescente des acides nucléiques par l acridine orange : le malaria-test QBC (quantitaive buffy-coat). Cette technique nécessite un équipement particulier. Sa sensibilité est de 5 hématies parasitées/µl. 4.2.2.1.3. La détection des antigènes du paludisme par immunochromatographie : les tests de diagnostic rapide. Plusieurs tests de diagnostic rapide (TDR) par immunochromatographie sont disponibles. Ils sont classés en fonction du nombre d'antigènes détectés. La plupart, à l'exception de la série OptiMal, permettent la mise en évidence de l'hrp2 (Histidin Rich Protein 2), spécifique de P. falciparum; certains permettent la mise en évidence de la pldh (Plasmodium lactate déshydrogénase) : Pf pour P. falciparum, Pv pour P. vivax; Pan-LDH commune aux quatre espèces plasmodiales. La sensibilité et la spécificité revendiquées par les constructeurs de ces tests sont comparables Le tableau II résume les caractéristiques de neuf TDR du paludisme Palutop Kat-Quick Malaria ICT Malaria OptiMAL Pf 1 Now ICT Malaria OptiMAL Pf 2 Toda Malaria diag4+ Palutop+4 Core Malaria Distributeur All Diag AES Fumouze Diagnostic laboraitories Fumouze Diagnostic laboratorie s Toda Pharma All Diag Core diagnostics Nombre d'antigènes détectés 1 1 1 1 4 4 4 4 4 Antigène (s) détecté (s) HRP2 (1) HRP2 HRP2 Pf-LDH (2) HRP2 et Pan-LDH (3) Pf-LDH et Pan- LDH HRP2 et Pan-LDH HRP2, Pv-LDH (4) et Pan-LDH HRP2, Pv-LDH et Pan-LDH Espèce (s) détectée (s) Pl. falciparum Pl. falciparum Pl. falciparum Pl. falciparum Pl. falciparum + autres espèces (5) Pl. falciparum + autres espèces (5) Pl. falciparum + autres espèces (5) Pl. falciparum + autres espèces (6) Pl. falciparum + autres espèces (6) (1) HRP2 : spécifique de Pl. falciparum (2) Pf-LDH : LDH spécifique de P. falciparum (3) Pan-LDH : LDH commune aux quatre espèces plasmodiales (4) Pv-LDH : LDH spécifique de Pl. vivax (5) le test ne différencie pas les espèces P. vivax, P. malariae et P. ovale entre elles (6) le test différencie P. vivax. 99

Les limites des TDR dans le diagnostic du paludisme Les tests rapides antigéniques sont simples d'utilisation, rapides et d'un apport précieux en poste isolé. Cependant, les tests rapides ont des limites : - les faux négatifs sont dus à une faible parasitémie de l'ordre de 100 parasites par µl, soit 0,002% d'hématies infectées. Or, il est fréquent de mettre en évidence en pathologie d'importation ou chez le voyageur non immun en zone d'endémie sous chimioprophylaxie non ou mal adaptée des parasitémies très faibles. Le résultat des TDR peut donc être faussement négatif. - les faux positifs, moins bien connus, sont dus à une lecture trop tardive après le dépôt des réactifs, à la présence d'auto anticorps ou de facteur rhumatoïde à des taux élevés. De plus, la persistance de la circulation de l'hrp2 après disparition des parasites du sang circulant est trouvée jusqu'à 15 jours après négativité des tests microscopiques. D'une manière générale, ces tests ne doivent pas être employés seuls. La stratégie d'utilisation des TDR dans le diagnostic du paludisme - en zone d'endémie, les TDR peuvent éviter l'utilisation systématique du traitement présomptif qui contribue à la sélection des souches de P. falciparum résistantes. A Madagascar, où la répartition des espèces est de 90% pour P. falciparum et 6,3% pour P. vivax (surtout sur les Hautes Terres), le choix est un TDR de type HRP2 pour dépister P. falciparum et LDH pour P. vivax (par exemple Core Malaria pan/pv/pf). - au retour d'une zone d'endémie, le diagnostic du paludisme d'importation doit être microscopique : frottis mince ou goutte épaisse, associé ou non à un TDR, - chez le voyageur, l'auto-diagnostic par un TDR n'est pas légitime. 4.2.2.1.4. La mise en évidence des antigènes parasitaires par technique ELISA (pldh, HRP2). 4.2.2.1.5. Les techniques de biologie moléculaire : la PCR permet la détection de parasitémies très faibles (intérêt : voyageurs sous chimioprophylaxie) 4.2.2.2. Diagnostic indirect La détection des anticorps : dans le sérum ou le plasma par technique ELISA Elle n a pas de place pour le diagnostic des accès palustres sur le terrain : elle ne permet pas de différencier une infection palustre en cours d un paludisme antérieur. Elle permet un diagnostic rétrospectif du paludisme chez un sujet non immun. Elle a, en pratique, trois indications : étude d une fièvre prolongée inexpliquée hors zone d endémie, dépistage chez les donneurs de sang, études épidémiologiques. En pratique, le diagnostic parasitologique repose sur le frottis sanguin : - positif, il permet l identification de l espèce et le calcul de la parasitémie, - négatif, il ne doit pas faire conclure à l absence d accès palustre, mais poursuivre la recherche des parasites (goutte épaisse, 2 ème frottis, test rapide sur bandelette) et seule la négativité de ces examens permet de conclure à l absence d accès palustre. Une nouvelle technique mise au point par des chercheurs de Singapour permettrait un diagnostic «éclair» du paludisme par détection à l aide d un appareil magnétique d une substance larguée par la parasite dans le sang (à suivre).. 4.3. Le diagnostic différentiel du paludisme : la babésiose. La babésiose est une maladie cosmopolite causée par des parasites intra érythrocytaires (Babesia spp.), transmises à divers animaux par des tiques. La maladie humaine est connue sur le continent américain (Babésia microti) et en Europe (B. divergens). En Afrique, des cas humains ont été décrits au Mozambique, au Soudan, en Côte d'ivoire et en Afrique du sud, posant un diagnostic différentiel avec le paludisme d'autant que les caractéristiques cliniques et biologiques (en particulier, les formes rondes au sein des hématies) des deux maladies sont proches. Le diagnostic repose sur le frottis sanguin et la goutte épaisse. La PCR est peu disponible. La quinine et la clindamycine sont les traitements recommandés. 5. Traitement De plus en plus de résistances se développent contre les traitements actuels du paludisme, et les chercheurs tentent d'identifier de nouvelles armes pour éliminer le paludisme. Les traitements étudiés ci-dessous concernent des médicaments à notre disposition. Il y a en 2013 deux nouveaux traitements pour la prise en charge du paludisme, dans ses formes graves (l artésunate) et non compliquées (l association dihydroartémisinine-pipéraquine). 5.1. Les antipaludiques 5.1.1. Classification des antipaludiques 10 0

5.1.1.1. Schizonticides érythrocytaires - Amino-4-quinoleines : chloroquine (Nivaquine ), amodiaquine (Flavoquine ), pipéraquine. - Amino-alcools : quinine (Quinimax, Surquina, Quinine Lafranc ), méfloquine (Lariam ), halofantrine (Halfan ), luméfantrine. - Sesquiterpènes : artémisinine et ses dérivés : dihydroartémisinine, artéméther, artèsunate. - Antimétabolites : - antifoliques : sulfadoxine, dapsone, - antifoliniques : proguanil (Paludrine ), pyriméthamine (Malocideâ), - antibiotiques : cyclines (Doxypalu, Granudoxy Gé, Vibraveineuse ), clindamycine (Dalacine, Zindacine ), - analogues de l ubiquinone : atovaquone. 5.1.1.2. Schizonticides intra hépatiques - Amino 8 quinoléines : primaquine (Primaquine ), tafénoquine. - Antimétabolites : proguanil, cyclines. 5.1.1.3. Gamétocytocides : - Amino 8 quinoléines : primaquine (Primaquine ), tafénoquine. 5.1.1.4. Associations d antipaludiques à effet synergique schizonticide L'action synergique schizonticide de plusieurs molécules permet d augmenter l efficacité des médicaments antimalariques et d obtenir une protection mutuelle des produits contre l acquisition de résistance des plasmodies, essentiellement de P. falciparum. Certaines de ces associations sont déjà anciennes : - Quinine + tétracyclines en zones de quininorésistance (forêts d Asie du sud-est et Amazonie); - Sulfadoxine + pyriméthamine (Fansidar ) - Méfloquine + sulfadoxine + pyriméthamine (Fansimef, utilisé en Asie du sud-est), - Chloroquine + proguanil (Savarine, utilisée en chimioprophylaxie seulement), Les «nouveaux» antimalariques sont tous associés, au moins en bithérapie : -soit en associations libres (2 sortes de comprimés) : artésunate + sulfadoxine/pyriméthamine (Arsudar ), artésunate + amodiaquine (Arsucam ), artésunate + méfloquine (Artequin ) ; - soit en associations fixes (FDC : fixed dose combination) : atovaquone + proguanil (Malarone ), chlorproguanil + dapsone (Lapdap ), artéméther + luméfantrine (Coartem /Riametâ), artésunate + amodiaquine (AS/AQ, Coarsucam ), artésunate + méfloquine (AS/MQ ). 5.1.2. La quinine : c est un schizonticide endo-érythrocytaire. Elle mérite une étude spéciale, car elle reste en pratique le traitement de référence des formes graves du paludisme à P. falciparum. - elle se présente en ampoules, comprimés, suppositoires, - suivant la gravité du tableau clinique, la voie d administration et la posologie sont différentes : - en cas d accès simple : posologie classique de 24 mg/kg/j. (en pratique 8 mg/kg de quinine base toutes les 8 heures, pendant 7 jours, injectable ou per os), - en cas de critères de gravité, dose de charge : 17 mg/kg de quinine base en 4 h., puis dose d entretien de 8 mg/kg en 4 h., toutes les 8 h, en perfusion intraveineuse obligatoire, pendant 7 jours, - nécessité de calculer les doses de quinine base : le Quinimax est directement exprimé en alcaloïdes bases (98% de quinine base, forme galénique de Quinimax ), - si le paludisme est contracté en zone de quinino-résistance (Asie du sud-est, Amazonie) : adjoindre la doxycycline, 200 mg/j ou la clindamycine, 10 mg/kg toutes les 8 heures - elle peut s'administrer par voie intra rectale biquotidienne : 15 à 20 mg/kg de quinine diluée (Quinimax solution injectable), à renouveler éventuellement 12 heures après [Kit d urgence à disposition] - elle entraîne fréquemment des acouphènes, même aux doses normales - elle peut être cause d'hypoglycémie sévère (hyperinsulinisme) chez la femme enceinte, - la seule contre indication (CI) : les antécédents de Fièvre bilieuse hémoglobinurique, - la grossesse et l'allaitement ne sont pas des CI, - il faut faire attention au surdosage en quinine, se méfier d une cardiotoxicité avec torsade de pointe, collapsus : la posologie exprimée en quinine base doit être calculée avec attention, surtout chez l enfant. 5.1.3. Les autres antimalariques schizonticides utilisés en monothérapie! amino 4 quinoléines : 11 1

- chloroquine (Nivaquine ), comprimés à 100 et à 300 mg, sirop pédiatrique 5 mg/ml, ampoule injectable dosée à 100 mg IM, posologie OMS 25 mg/kg en 3 jours. J1 et J2 : 10 mg/kg, J3 : 5 mg/kg - amodiaquine (Flavoquine ), comprimés à 153 mg, 30 mg/kg en 3 jours La chloroquino-résistance est présente actuellement dans pratiquement toutes les zones d endémie, mais il persiste une relative efficacité clinique en Afrique de la chloroquine et de l amodiaquine. Les effets indésirables sont pour la chloroquine : toxicité cardiovasculaire en bolus ; pour l'amodiaquine : agranulocytose, hépatite grave (en chimioprophylaxie).! amino-alcools autres que la quinine : - méfloquine (Lariam ) : posologie : 25 mg/kg en 2 ou 3 prises; seule présentation : comprimés de 250 mg; CI : antécédents psychiatriques ou de convulsions; effets neuropsychiques, vomissements - halofantrine (Halfan ) : posologie, 25 mg/kg en 3 prises; présentation, comprimés à 250 mg ; suspension buvable à 100 mg/5 ml; nécessité d'une deuxième cure d'halofantrine 7 jours plus tard pour éviter une éventuelle rechute plasmodiale chez un sujet non immun; CI : patients à risque cardiaque d'où la réalisation préalable d'un électrocardiogramme avant une cure d'halofantrine à la recherche d'un éventuel allongement de l'espace QT.! dérivés de l'artémisinine en monothérapie - artéméther (Paluther ) dérivé de l'artémisinine utilisé seul par voie injectable. Il se présente en ampoules pour intramusculaire profonde (ampoules de 40 mg/0,5 ml et 80 mg/1 ml). Il est prescrit dans les formes graves à P. falciparum à la posologie de 1,6 mg/kg toutes les 12 heures à J1 (3,2 mg/kg/24h), puis 1,6 mg/kg/24h de J2 à J5. il peut être utilisé dans des régions peu médicalisées, compte tenu de son mode d administration par voie IM. Il est bien toléré. - rectocaps d'artésunate : gélule rectale utilisée seule par voie rectale, utile pour la prise en charge du paludisme grave en zone isolée, dosages de 50, 100 ou 200 mg, dose recommandée : 10 mg/kg/j. Le traitement par suppositoires d'artésunate est recommandé par l'oms dans les zones où le délai pour atteindre un Centre de Santé est long en attendant de pouvoir être pris en charge dans une structure sanitaire. - artésunate par voie intraveineuse : c'est une avancée thérapeutique majeure dans le traitement des accès graves à P. falciparum. L'OMS recommande l'utilisation de l'artésunate IV en première intention dans le paludisme grave à Pl falciparum chez l enfant et l adulte. L artésunate IV (Malacef ) se présente en poudre et solvant pour solution injectable en IV direct (vitesse d'injection : 3 ml par minute), à la posologie de 2,4 mg/kg à heure 0, heure 12, heure 24 et toutes les 24 heures pendant 3 jours. Le relais est pris par un antipaludique oral après 3 jours. On a observé des cas d anémie hémolytique tardive à la suite du traitement à l artésunate injectable chez des voyageurs non-immuns et chez des enfants africains présentant un paludisme grave, en particulier les patients ayant une hyperparasitémie. Paluther et Malacef sont des spécialités disponibles en France sous Autorisation Temporaire d'utilisation (ATU) nominative. 5.1.4. Les anciens antimalariques utilisés en bithérapie :! sulfadoxine-pyriméthamine (Fansidar ) Il se présente en comprimés à 500 mg de sulfadoxine et 25 mg de pyriméthamine; posologie : 3 comprimés en une prise (adulte), enfant : 1 cp/10 kg. Résistance de souches de P. falciparum d'asie, d'afrique de l'est, d'amérique du sud. Toxicité hématologique et cutanée 5.1.5. Les «nouveaux» antimalariques utilisés en bithérapie - association atovaquone + proguanil (Malarone ). Dosage adultes et enfants > 40 kg : comprimés à 250 mg d atovaquone et à 100 mg de proguanil; dosage enfants de 11 à 40 kg : comprimés à 62,5 mg d'atovaquone et à 25 mg de proguanil. Elle est prescrite dans le traitement du paludisme simple à P. falciparum et en chimioprophylaxie du paludisme à P. falciparum. La posologie dans le traitement de l'accès simple est de 20/8 mg/kg/j pendant 3 jours en prise unique quotidienne, soit 4 cp adulte par jour si plus de 40 kg de poids, 3 cp adulte de 31 à < 40 kg, 2 cp adultes de 21 à < 30 kg, 1 cp adulte de 11 à < 20 kg. Chez l'enfant de moins de 11 kg : 2 cp enfant/j de 5 à < 9 kg, 3 cp enfant/j de 9 à < 11 kg de poids. Cette association a une action sur les souches hépatocytaires de P. falciparum. Elle est bien tolérée, quelques troubles digestifs sont signalés. - association chlorproguanil + dapsone (Lapdap ) se présente en comprimés de chlorproguanil (C) 80 mg, et de dapsone (D) 100 mg, et en comprimés enfants : C 15 mg, D 18,75 mg. Ce médicament peut déclencher des hémolyses en cas de déficit en G6PD et nécessite des précautions d emploi chez les patients anémiques. - association avec dérivés de l'artémisinine 12 2

. association artéméther + luméfantrine (Coartem /Riamet ) se présente en comprimés à 20 mg d artéméther et à 120 mg de luméfantrine et est prescrit pour le traitement de l accès palustre simple à P. falciparum : 4 comprimés en 2 prises par jour pendant 3 jours (dose adulte). Il n est pas utilisé en chimioprophylaxie. Les effets secondaires sont des troubles du sommeil, des céphalées, des étourdissements, des troubles digestifs, un prurit. Il n y a pas de cardiotoxicité. Il y a une présentation pédiatrique : Coartem Dispersible formulation pédiatrique.. association artésunate + amodiaquine en association libre (Arsucam ) ou en association fixe (AS/AQ, Coarsucam )) est prescrite dans le traitement de l'accès palustre simple à P. falciparum en Afrique. La posologie est une prise par jour pendant 3 jours. Il y a quatre dosages selon l'âge : 3-11 mois, 1 comprimé AS/AQ 25 mg/67,5 mg; 1 à 6 ans, 1 comprimé 50 mg/135 mg; 7 à 13 ans, 1 comprimé 100 mg/270 mg; 14 ans et au-dessus, 2 comprimés (100 mg/270 mg).. association artésunate + méfloquine : association libre (Artequin ) ou association fixe (AS/MQ ), qui est recommandé par l'oms pour le traitement du paludisme à P. falciparum non compliqué en Asie et en Amérique latine. La posologie est une prise par jour pendant 3 jours. Il se présente en comprimés AS/MQ 25 mg/50 mg et 100mg/200 mg. 5.1.6. Les combinaisons thérapeutiques à base d'artémisinine (CTAs) Elles sont recommandées par l'oms pour le traitement du paludisme non compliqué. Elles comportent un médicament d'action rapide et de courte durée de demi-vie (dérivés de l'artémisinine) et un autre médicament partenaire d'action lente et de longue durée de vie. Les associations fixes artésunate + amodiaquine (AS/AQ, Coarsucam ), artésunate + méfloquine (AS/MQ ), artéméther + luméfantrine (Riamet/Coartem ) favorisent la compliance du traitement. De nouveaux CTAs sont à notre disposition, dont la combinaison dihydroartémisinine + pipéraquine 320 mg/40 mg (Eurartesim.) Ces nouvelles combinaisons, efficaces et bien tolérées, sont prescrites dans le traitement du paludisme simple. Administrés en prise unique pendant 3 jours, elles constituent une thérapie de choix permettant de réduire les problèmes d'observance et de faciliter la prise en charge communautaire. L Eurartesim est prescrit selon le poids (ex : 3 comprimés/j/3 j chez l adulte de 35 à 75 kg, 1/2 comprimé/j/ 3 chez l enfant de 5 à 7kg) Tableau III - Médicaments antipaludiques utilisables en traitement curatif Médicaments (spécialités) Accès à P. vivax, P. ovale, P. malariae Accès simple à P.falciparum Chloroquinosensible Accès simple à P.falciparum Chloroquinorésistant Accès grave à P.falciparum Quinino-sensible Accès grave à P. falciparum Quinino-résistant Quinine QUINIMAX - 8mg/kg/j toutes les 8 heures X 7 j 8mg/kg/j toutes les 8 heures IV X 7 j + dose de charge 8mg/kg/j toutes les 8 heures IV X 7 j + dose de charge + cyclines Chloroquine NIVAQUINE 25 mg/kg en 3 jours, 10, 10, 5 mg /kg/j Idem ou 500 mg/j x 5 j Amodiaquine FLAVOQUINE 30 mg/kg en 3 j Sulfadoxine Pyriméthamine FANSIDAR 3 cp en une prise x 1j enfant : 1 cp/10 kg Méfloquine LARIAM 25 mg/kg en 2 ou 3 prises x 1 j Halofantrine HALFAN 24 mg/kg en 3 prises x 1j 2 ème cure à J7 13 3

Doxycycline DOXYPALU VIBRAVEINEUSE 200 mg/j + quinine IV Artémether Luméfantrine RIAMET COARTEM 4 cp /prise en 6 prises à H0, H12, H24, H36,H48, H60 dose adulte Atovaquone Proguanil MALARONE 4 cp en 1 prise x 3 j dose adulte Artéméther IM PALUTHER 3,2 mg/kg x1j + 1,6 mg/kg/jx4j 3,2 mg/kg x1j + 1,6 mg/kg/jx4j Artésunateamodiaquine AS/AQ, Coarsucam Artésunateméfloquine AS/MQ Artésunate IV Malacef Dihydroaetémisinine +pipéraquine Eurartesim AS : 4 mg/kg/j AQ : 10 mg/kg/j x 3 j AS : 4 mg/kg/j MQ : 25 mg/kg x 3 j Dihydroartémisinine pipéraquine 320 mg /40 mg 1 prise par jour x 3j posologie selon le poids 2,4 mg/kg heures 0, 12, 24 et toutes les 24 heures pendant 3 jours 2,4 mg/kg heures 0, 12, 24 et toutes les 24 heures pendant 3 jours 5.1.7. Les antimalariques gamétocytocides La primaquine (Primaquine ) est le seul médicament disponible qui «efface» les gamétocytes de P. falciparum matures chez l homme, empêchant ainsi la transmission de l hématozoaire aux moustiques. L hémolyse due à la primaquine est dose-dépendante chez les déficitaires en G6PD. Résistance à l artémisinine 5.2. Conduite à tenir devant un accès palustre. 5.2.1. Accès palustre à P. falciparum 5.2.1.1. Accès palustre simple Sont à priori actifs dans les PED dans le traitement de l'accès palustre simple : la quinine, le Fansidar, le Lariam, la Malarone. L'Halfan n'est plus, en pratique, prescrit au moins chez l'adulte. Mais, actuellement ce sont les combinaisons AS/AQ, AS/MQ et artéméter-luméfantrine (Coartem /Riamet ) qui sont recommandées en première ligne du paludisme non compliqué dans les PED.. Vu la résistance de P. falciparum à l artémisinine dans les pays de la sous-région du Grand Mékong, Il faut traiter par les ACT pendant 6 jours au lieu de 3 dans ces pays. 5.2.1.2. Accès palustre grave La quinine intraveineuse demeure l antipaludique de l urgence : 24 mg/kg/j de quinine base avec dose de charge recommandée par l OMS tant chez l adulte que chez l enfant, indépendamment de la zone géographique. La doxycycline est associée à la quinine dans les zones de résistance (forêts d'asie du sud-est et Amazonie) où les souches de P. falciparum sont résistantes à la quinine : 200 mg si plus de 12 ans, 100 mg entre 8 et 12 ans pendant 7 jours. Les nouvelles présentations injectables de l artémisinine sont des substituts à la quinine : artésunate par voie rectale, artéméther (Paluther ) par voie intramusculaire et artésunate en intraveineux direct (Malacef ). L artésunate IV est plus efficace, plus maniable et mieux tolérée que la quinine en perfusion IV dans le traitement de l accès pernicieux palustre. Elle est délivrée en France par ATU 14 4

nominative. Il faut souligner l intérêt du Paluther dans le traitement du paludisme grave : il peut être utilisé dans des régions peu médicalisées, compte tenu de son mode d administration par voie IM. Le dosage de la quininémie permet de juger de l efficacité du traitement étiologique par la quinine. Les valeurs thérapeutiques sont comprises entre 10 et 15 mg/l ; au-dessous de 8 mg/l, il y a risque d inefficacité; au-dessus de 20 mg/l, il y a risque de cardiotoxicité. Le dosage de la quininémie est indispensable pour adapter la posologie de la quinine en cas d insuffisance rénale. 5.2.2. Accès palustre à P. vivax, ovale, malariae La chloroquine est le traitement de choix : 25 mg/kg en 3 jours (J1 et J2 : 10 mg/kg, J3 : 5 mg/kg). L action hypnozoïtocide de la primaquine en fait le traitement des rechutes à P. vivax et P. ovale. Les cas de paludisme à P. vivax étant en augmentation en France en raison de l'augmentation des voyages (Guyane) et de la présence de troupes françaises en zones d'endémie (Afghanistan), le Haut Conseil de la Santé Publique a émis, en octobre 2008, un avis relatif à l'élargissement des prescriptions de primaquine dans le cadre du traitement du paludisme à P. vivax et à P. ovale. Utilisée dans la cure radicale, la posologie recommandée par l'oms est de 0,25 mg/kg/j (adulte : 15 mg/j) pendant 14 jours, après 3 jours de chloroquine. La dose en prophylaxie terminale, qui consiste à traiter les personnes ayant été exposées à un fort risque d'infection par P. vivax, voire par P. ovale, est de 30 mg/j (0,5 mg/kg par jour pour les enfants) pendant 15 jours Les incertitudes sur la place de la primaquine dans l'arsenal thérapeutique sont dues à l'hémolyse causée chez les sujets déficitaires en G6PD. Des souches de P. vivax résistantes à la chloroquine et à la primaquine ont été signalées. Les accès graves à P. vivax et à P. knwolesi sont traités comme les accès graves à P. falciparum. 5.2.3. Traitement symptomatique du paludisme grave chez l enfant Il est résumé dans le tableau IV. Le remplissage vasculaire rapide, recommandé dans les pays développés, est délétère chez l'enfant atteint d'une infection sévère avec défaillance circulatoire d'intensité modérée en Afrique. Tableau IV - Traitement symptomatique du paludisme grave chez l enfant, associe au traitement antipalustre. Symptômes Traitement Acidose métabolique Anémie grave Collapsus Coma Convulsions Hémorragie par CIVD Hyper parasitémie Hyperthermie Hypoglycémie Insuffisance rénale Oxygénothérapie et correction de la cause : hypoglycémie, anémie, déshydratation, collapsus, septicémie. Transfusion si mauvaise tolérance. Remplissage vasculaire prudent. Nursing, ventilation mécanique si score de Glasgow < 8. Hypertension intracrânienne : oxygénation et correction des facteurs adjuvants, mannitol déconseillé. Pas de prévention systématique. Traitement des crises : diazépam IVL 0,3 mg/kg ou intra rectal 0,5 mg/kg, puis dose de charge de phénobarbital 10-20 mg/kg Si état de mal convulsif : sédation et ventilation mécanique Plasma frais congelé. Quinine IV. Exsanguino-transfusion non indiquée. Mesures physiques et paracétamol 60 mg/kg/j. Salicylés contre-indiqués. Sérum glucosé à 50% : 1 ml/kg IV, puis perfusion de sérum glucosé à 5%. Correction de l hypovolémie, puis relance de la diurèse par le furosémide ; si échec : épuration extra-rénale. 5.2.4. Traitement du paludisme chez la femme enceinte. A l exception de la quinine et de l'artémisinine, les médicaments antipaludiques sont contre-indiqués chez la femme enceinte au premier trimestre de la grossesse en cas d'accès grave. Les autres médicaments utilisables en cas d'accès simple sont la méfloquine utilisable au 2 ème et 3 ème trimestre et l'atovaquone-proguanil utilisable pendant toute la grossesse. La doxycycline est contre-indiquée pendant toute la durée de la grossesse. 15 5

Tableau V - Traitement de l accès palustre chez la femme enceinte recommandé par l'oms en 2010. Premier trimestre Deuxième et troisième trimestres Plasmodium falciparum Accès non compliqué Quinine per os + clindamycine pendant 7 jours ou artémisinine + clindamycine si échec Artémisinine + clindamycine pendant 7 jours ou quinine per os + clindamycine pendant 7 jours Plasmodium falciparum Accès grave Artésunate IV ou Quinine avec dose de charge et relais par quinine per os, pendant au total 7 jours si l'accès à l'artésunate n'est pas possible Artésunate IV ou Quinine avec dose de charge et relais par quinine per os, pendant au total 7 jours si l'accès à l'artésunate n'est pas possible Plasmodium vivax, malariae, ovale Chloroquine per os pendant 3 jours Chloroquine per os pendant 3 jours 5.2.5. Traitement du paludisme en 2013 En 2013, 79 des 88 pays où le paludisme à Plasmodium falciparum est endémique ont adopté comme traitement de première intention les ACT. 70% des cas de paludisme pourraient être traités si l on tient compte du nombre d ACT distribués en Afrique (dans le public). Cependant, entre 56 et 69 millions d enfants atteints de paludisme n ont pas reçu d ACT. Le nombre des pays autorisant la commercialisation des monothérapies à base d artémisinine par voie orale a rapidement diminué, seuls 8 pays ne les ont pas encore retirées fin 2014. La flambée de Maladie à Virus Ebola (MVE) a eu un impact dévastateur sur la capacité des pays les plus touchés à lutter contre le paludisme. L OMS a recommandé en décembre 2014 d administrer un traitement à base d ACT à tous les malades fébriles dans les zones touchées par la MVE. 5.2.6. Traitement du paludisme à Pl. falciparum résistant à l'artémisinine (Asie du sud-est) La résistance de P. falciparum à l'artémisinine en Asie du sud-est a pour risque l'introduction de parasites pharmaco-résistants dans d'autres zones d'endémie dans le monde. Le remède est l'adjonction d'une monodose de primaquine par voie orale (0,75 mg base/kg pour une dose maximale de 45 mg base pour un adulte) au traitement pour accélérer l'élimination des gamétocytes. 5.2.7. Traitement présomptif du paludisme Un traitement antipaludique sans avis médical doit rester l'exception et ne s'impose qu'en l'absence de possibilité de prise en charge médicale dans les 12 heures. L'abandon du traitement présomptif du paludisme au profit du traitement exclusif des cas confirmés est recommandé. La pratique des TDR de type HRP2 doit permettre l'application d'une politique de traitement exclusif des cas de paludisme confirmé. 5.2.7. Prise en charge d'une fièvre au retour d'un pays à risque Toute fièvre avec la notion d'un voyage en pays tropical, récent ou lointain, doit faire évoquer un paludisme. Un diagnostic et un traitement appropriés sont rapidement nécessaires, le risque avec P. falciparum étant l'évolution vers un neuropaludisme et/ou vers des formes graves, responsables de décès. Un seul signe de gravité implique l'hospitalisation. 6. Prophylaxie 6.1. Lutte antivectorielle - aménagements de l environnement destiné à diminuer le nombre de gîtes anophéliens, - technique de l'insecte stérile : elle permet l'éradication ou la diminution d'une population d'insectes, les mâles irradiés par un rayonnement gamma (bombe au Cobalt 60) deviennent sexuellement stériles à cause de mutations dominantes au niveau du sperme. - aspersions intra-domiciliaires d insecticides à effet rémanent, 16 6

- moustiquaires imprégnées d insecticides : outil majeur de prévention du paludisme au niveau communautaire, stratégie de lutte recommandée par l OMS. Mais la résistance des vecteurs est préoccupante, et il est nécessaire de ré-imprégner régulièrement les moustiquaires pour maintenir leur efficacité. Actuellement, il y a un développement de moustiquaires imprégnées d'insecticides de longue durée d'action (MILDA) [OLYSET, PERMANET ] avec une efficacité de 5 ans. Les mères sont au cœur de la prévention du paludisme de l'enfant : ce sont les mères les mieux informées qui utilisent le plus les moustiquaires imprégnées d'insecticides. - ports de vêtements imprégnés d'insecticides (utilisés par les armées) - répulsifs (insecticides ou repellents). Beaucoup de répulsifs sont disponibles sur le marché. Deux produits sont recommandables en pratique : le DEET et le KBR 3023. Les données de toxicologie, au moins sur le DEET, qui a été très étudié, sont rassurantes. Le CDC d Atlanta ne restreint son utilisation que chez les nourrissons de moins de 2 mois. La durée d action des répulsifs est, comme leur efficacité, très variable en fonction de la concentration du produit. La durée d action du DEET est, par exemple, pour le DEET 30% de 6 heures. Pas plus de 3 applications par jour. Le tableau VI traite des concentrations des substances actives entrant dans la composition de répulsifs corporels en fonction des tranches d'âge et de la population (d'après les recommandations de bonne pratique clinique sur la «Protection personnelle antivectorielle» publiées par la Société de Médecine des voyages et la Société française de parasitologie, label HAS). Catégorie d'âge et de population De 6 mois à l'âge de la marche De l'âge de la marche à 24 mois Nombre maximum d'applications par jour 1 1 1 2 2 2 De 24 mois à 12 ans 2 2 2 2 Plus de 12 ans 3 3 3 3 Femmes enceintes 3 3 3 Substance active DEET PMDRBO IR3535 DEET PMDRBO IR3535 DEET KBR3023 PMDRBO IR3535 DEET KBR3023 PMDRBO IR3535 DEET KBR3023 IR3535 Concentration 20, 25 et 30% 19 à et 25% 20, 25 et 30% 19 à et 25% 20, 25 et 30% et 25% 19 à et 25%, 25 et 30% 20, 25, 30, 34 et 50% 20 et 25% 19 à et 25% 20, 25, 30 et 35% 20, 25 et 30% Le tableau VII donne la liste des produits biocides répulsifs, contenant des concentrations en substances actives jugées efficaces. Substance active Concentration Nom commercial Présentation DEET 1 25% 30% 30% 30% 34% 50% Ultrathon lotion Insect écran famille Moustidose lotion répulsive zones infestées Moustifluid zones à hauts risques Prébutix lotion répulsive zone tropicale Ultrathon créme Insect écran zones infestées adultes Lotion Lotion Crème 17 7

IR3535 25% 25% 25% 30% 35% Biovectrol familleif Moustifluid zones tempérées Mpistifluid jeunes enfanrs Moustokologne haute tolérance Picsol antimoustiques Les botaniques insectes Vendome adultes Apaisyl répulsif moustique Cinq sur Cinq tropic enfants Prébutix lotion répulsive zone Europe Moustifluid zones tropicales et à risque Bouclier insect Cinq sur Cinq Ttropic Lotion Lotion Lotion Lotion / roll-on Lotion KBR3023 25% 25% 25% Centaura Insect Ecran peau enfant Moskito guard Répuls Total Apaisyl répulsif moustique haute protection Insect Ecran spécial tropiques Multidose lait répulsif famille Moustikologue protection extrême Emulsion Sray Lait Lotion PMDRBO 19 à 19 à 25% 25% 25% Mousticare peau pray famille, lingettes répulsives Puressentiel spray antipique Mousticare zones infectées Biovectrol naturel Mosi-guard, lingettes et stick Les précautions en vue d une protection efficace contre les anophèles doivent être prises dès la tombée de la nuit. Mais, certains moustiques, comme Anopheles darlingi de la Région amazonienne, piquent entre 8 et 10 heures du soir, avant l'heure du coucher. Il faut alors combiner moustiquaires imprégnées et répulsifs. Il ne faut pas les utiliser en cas d antécédents d allergie cutanée, ne pas les appliquer sur les endroits où la peau est très fine, sur des blessures ou abrasions de la peau, sur le pourtour des yeux et des lèvres. Il convient de se laver les mains après application des répulsifs, pour ne pas risquer de se frotter les yeux, car les produits sont irritants. Enfin, il ne faut pas faire plus de trois applications par jour. Devant le risque de contracter un paludisme, aucun moyen de protection contre les piqûres de moustiques ne doit être négligé chez le jeune enfant. L utilisation de répulsifs ne doit donc pas être absolument exclue. En France, leur utilisation n'est restreinte que chez les nourrissons de moins de 6 mois. Les moustiquaires de berceau et de poussette imprégnées ou non d'insecticides restent alors le moyen le plus efficace. Les effets secondaires des répulsifs, telles les irritations de la peau, sont assez fréquents mais disparaissent généralement en quelques heures après l'arrêt de l'application. Les personnes allergiques ou à la peau sensible doivent appliquer un peu de produit sur une petite zone pour tester leur réaction. Les effets secondaires plus graves sont très rares et principalement liés à une mauvaise utilisation du répulsif : surdosage du à une quantité appliquée trop importante ou à des applications trop rapprochées, application autour de la bouche, dans les plis du coude ou sur les paumes de mains, ingestion accidentelle par l enfant. Aucun répulsif n'a été étudié lors d'un usage prolongé supérieur à trois mois. Le DEET est le produit avec lequel le recul est le plus grand. Les études effectuées avec ce produit chez les enfants et les femmes enceintes n'ont pas confirmé la suspicion de toxicité sur le système nerveux central, ni montré de risques de malformation du fœtus. Enfin, différents répulsifs ne doivent pas être utilisés en même temps. 6.2. Chimioprophylaxie 6.2.1. Chimioprophylaxie des expatriés et des voyageurs 18 8

La prophylaxie médicamenteuse est indispensable pour les zones à P. falciparum. Elle n est pas efficace à 100%. Elle doit être prise pendant tout le séjour et après le retour pendant une durée variant avec l antipaludique. Schéma prophylactique pour l adulte suivant le groupe 1, 2 ou 3 : - pays du groupe 1 : chloroquine (Nivaquine ) 100 mg/j, séjour + 4 semaines après, - pays du groupe 2 : association chloroquine (100 mg/j) + proguanil (200 mg/j) (Savarine ) 1 comprimé par jour, séjour + 4 semaines après; ou association atovaquone + proguanil (Malarone ) : dose chez les sujets de plus de 40 kg :1 comprimé adulte (250 mg/100 mg) par jour, séjour + une semaine après. - pays du groupe 3 : trois choix sont possibles : - choix n 1 : Lariam, comprimés à 250 mg, 1 comprimé par semaine, 10 jours avant + séjour + 3 semaines après, - choix n 2 : Malarone : même dose que pour les pays du groupe 2, séjour + une semaine après, - choix n 3 : doxycycline (Doxypalu, Granulodoxyl Gé), comprimés à 100 et 50 mg: 100 mg chez l adulte et chez l enfant de plus de 8 ans ou pesant plus de 40 kg, 50 mg chez l enfant de plus de 8 ans pesant moins de 40 kg, séjour+ 4 semaines après. Schéma prophylactique chez la femme enceinte suivant le groupe 1, 2 ou 3 : - pays du groupe 1 : Nivaquine - pays du groupe 2 : Savarine ou Malarone, - pays du groupe 3 : séjour déconseillé, si séjour indispensable : Lariam ou Malarone Schéma prophylactique Nivaquine chez l'enfant - pays du groupe 1 : Nivaquine - pays du groupe 2 : association chloroquine (Nivaquine ) 1,5 mg/kg/j + proguanil (Paludrine ) 3 mg/kg/j (la Savarine n étant prescrite qu à partir de 15 ans) ou Malarone, comprimé enfant (62,5 mg/25 mg) suivant poids : 1 cp/j de 11 à 20 kg, 2 cp/j de 21 à 30 kg, 3 cp/j de 31 à 40 kg à heure fixe et en prise unique. - pays du groupe 3 : si poids > 15 kg ou âge > 3 ans : Lariam ; alternative : doxycycline si > 8 ans ou Malarone si poids entre 11 kg et 40 kg : de 11 à 20 kg 1cp/j, de 21 à 30 kg : 2cp.j, de 31 à 40 kg : 3 cp/j. Si enfant < 11 kg, ½ cp/j de 5 < 7 kg (hors AMM), ¾ cp/j de 7 < 11kg (hors AMM). La chimioprophylaxie doit être poursuivie pendant 4 semaines après le retour, sauf pour le Lariam pendant 3 semaines et pour la Malarone pendant une semaine seulement, ce court délai s expliquant par l activité schizonticide de la Malarone dans les formes tissulaires de P. falciparum en développement transitoire dans le foie. La durée de la chimioprophylaxie, classiquement de trois mois, a été prolongée à six mois en 2010. Extrait du Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire n 21/22/2010 «Lors du premier séjour, la chimioprophylaxie, adaptée au niveau de résistance, devrait être impérativement poursuivie au moins pendant les six premiers mois. Au-delà de cette durée et sachant que la poursuite d une prise continue pendant plusieurs années pose des problèmes d'observance et paraît irréaliste, la chimioprophylaxie peut être modulée avec l aide des médecins référents locaux. Une prise intermittente durant la saison des pluies ou lors de certains déplacements peut par exemple être envisagée. Dans tous les cas, il est indispensable que la prise en charge rapide d une fièvre par le médecin référent puisse être assurée. Il convient de prévenir les intéressés de la persistance du risque d'accès grave lors des retours de zone d endémie, surtout pendant les deux premiers mois». Les tableaux IX et X résument la prophylaxie chez l'adulte et la femme enceinte, et chez l'enfant selon les groupes de chimiorésistance, 2010. Tableau IX - Chimioprophylaxie antipalustre chez l'adulte selon les groupes de chimiorésistance. Groupe Adulte Femme enceinte Groupe 1 Chloroquine (Nivaquine ) ) 100 mg/j à prendre pendant le séjour et au retour pendant 4 semaines Nivaquine 100 mg/j Séjour + 4 semaines au retour Groupe 2 Chloroquine + Proguanil (Nivaquine 100 mg/j Savarine 19 9

Groupe 3 Malarone + Paludrine 200 mg/j) ou Savarine Séjour + 4 semaines au retour ou Atovaquone 250 mg + Proguanil 100mg (Malarone 1cp/j) Séjour + 1 semaine au retour ou Méfloquine 250 mg (Lariam 1 cp/semaine) Séjour + 3 semaines au retour ou Doxycycline (Doxypalu 100 mg/j, Granudoxy Gé 100 mg/j) Séjour + 4 semaines au retour Séjour + 4 semaines au retour ou Malarone (peut être envisagée si nécessaire) Malarone (peut être envisagée si nécessaire) ou Lariam Tableau X - Chimioprophylaxie antipalustre de l'enfant selon les groupes de chimio résistance. Molécule Présentation Posologie Commentaires, durée, indications Nivaquine Sirop à 25 mg = 5 ml Cp sécables à 100 mg Paludrine Cp sécables à 100 mg Lariam Cp sécables à 250 mg Malaroneenfants Cp à 62,5 mg/25 mg 1,5 mg/kg/j < 8,5 kg : 12,5 mg/j 8,5 à 16 kg : 25 mg/j 16 à 33 kg : 50 mg/j 33 à 45 kg : 75 mg/j 3 mg/kg/j 9 à 16 kg : 50 mg/j 16 à 33 kg : 100 mg/j 33 à 45 kg : 150 mg/j 5 mg/kg/ semaine 15 à 19 kg : 1/4 cp/sem 19 à 30 kg : ½ cp/sem 30 à 45 kg : ¾ cp/sem 5 à < 7 kg : ½ cp/j (hors AMM) 7 à <11 kg : ¾ cp/j (hors AMM) 11 à <21 kg : 1 cp/j 21 à <31 kg : 2 cp/j 31 à <40 kg : 3 cp/j Attention aux intoxications accidentelles A prendre pendant le séjour et les 4 semaines qui suivent Pays du groupe 1 (et 2 en association avec le Proguanil) Uniquement en association avec la chloroquine Séjour + 4 semaines au retour Pays du groupe 2 Contre-indications : convulsions, troubles neuropsychiatriques Déconseillé : pratique de la plongée A commencer 10 jours avant le départ, pendant le séjour et les 3 semaines qui suivent Pays du groupe 3 Prendre avec un repas ou une boisson lactée A prendre pendant le séjour et durant la semaine qui suit Durée : 3 mois consécutifs maximum Malarone Cp à 250 mg/100 mg 1 cp/j si poids > 40 kg Pays du groupe 2 et 3 Doxypalu Granudoxy Gé Cp à 50 mg Cp à 100 mg Cp sécables à 100 mg < 40 kg : 50 ùg/j > 40 kg : 100 mg/j Contre-indication : âge < 8 ans Prendre au dîner A prendre pendant le séjour et les 4 semaines qui suivent Pays du groupe 3 Il y a deux candidats à la prophylaxie des formes tardives de la maladie : la primaquine et l association atovaquone-proguanil, agissant sur le cycle hépatique, pour les voyages dans les régions infestées par P. vivax (Corne de l Afrique, Asie, Amérique du sud [Guyane]). Chez les voyageurs, la primaquine peut être prescrite : - en cure radicale ou éradicatrice après un premier accès à P. vivax ou à P. ovale, an combinaison avec un schizonticide, à la posologie de 30 mg/j pendant 14 jours, - en prophylaxie terminale à la posologie de 30 mg/j pendant 14 jours à débuter le jour du retour de la zone d'endémie, - en prophylaxie antipaludique, à la posologie de 30 mg/j à débuter la veille du départ, à poursuivre pendant tout le séjour et 7 jours après le retour. Pour les enfants, la dose est de 0,5 mg/kg/j. Le déficit en G6PD est une contre-indication. 6.2.2. Traitement Préventif Intermittent (TPI) des femmes enceintes et des enfants des pays en développement Le traitement préventif intermittent (TPIp) consiste dans l administration intermittente et systématique d antipaludiques : amodiaquine ou sulfadoxine-pyriméthamine (SP) chez les femmes 20 0