les αteliers un partenariat public-privé au service des élus et des praticiens du foncier Évaluation foncière et immobilière : comment faire? Synthèse de l Atelier du 22 octobre 2012 PROGRAMME Introduction Gérard LERAS, Vice-président du CERF Rhône-Alpes et 3 ème conseiller spécial délégué à la politique foncière du Conseil régional Rhône-Alpes Sybille THIRION, Directrice, CERF Rhône-Alpes Delphine LOUVRIER, Chargée de mission foncier, CERF Rhône-Alpes Interventions La méthode par comparaison Philippe POURCHET, Directeur de l EPFL 73 Josette REMY, Chargée de missions foncières à l EPFL 73 Présentation de la méthode utilisée par FRANCE DOMAINE : théorie et applications. Critique et adaptation opérationnelle de la méthode. La méthode du compte à rebours Martin REVEL, FPI Région Lyonnaise, Directeur de l agence Nacarat de Lyon Présentation de la méthode utilisée par les promoteurs immobiliers. La méthode par le rendement Gérard LEVY, ARRA HLM, Directeur de la SEMCODA Présentation des méthodes d évaluation utilisées par la SEMCODA dans le cadre de ses opérations d aménagement, de construction et d acquisition/amélioration. Le regard du banquier sur l évaluation Michel ROUAULT, Directeur de l économie sociale à la Caisse d Epargne Rhône-Alpes Présentation de la vision du banquier sur l évaluation et le montage de projet.
Introduction M. LERAS introduit l atelier en rappelant l importance de l évaluation. Il souligne l existence de différentes méthodes d évaluation en fonction des types de foncier (agricole, urbain, ). Mme LOUVRIER précise que l évaluation est une spéculation sur la valeur théorique d un bien. Il s agit d une préoccupation ancienne formalisée et théorisée à partir du XVIII ème siècle et qui s intéresse alors notamment à évaluer la richesse des Nations. Elle ajoute que, selon le type de commanditaire et la vocation de l évaluation, les méthodes d évaluation varient. M. BOURGUIGNON explique que le thème de l évaluation est plus que jamais une actualité car la 4 ème charte de l expertise en évaluation de l IFEI est signée ce jour à Paris. Il souligne également qu une Cour d Appel a récemment déclaré la méthode du compte à rebours comme étant valable pour appuyer les décisions de justice. Jusqu alors seule la méthode par comparaison était admise. Il précise que France Domaine a d ailleurs demandé à devenir observateur à l IFEI, ce qui est tout à fait innovant dans la démarche de cette institution. Interventions LA METHODE DU COMPTE A REBOURS Intervention de Martin REVEL, Directeur de l agence Nacarat de Lyon, membre de la FPI Région Lyonnaise La méthode d évaluation par le compte à rebours, utilisée par les promoteurs, a trois composantes : un terrain, une constructibilité (déterminée à partir du PLU et du travail des architectes) et un prix de vente envisagé de l opération. Quelle est la sensibilité du prix du terrain par rapport à l opération? M. Revel projette un tableau de simulation d une opération joint au présent compte rendu. M. Revel présente les différents éléments du tableau. Il précise que dans une opération plusieurs postes de dépenses sont incompressibles (taxes, coûts de construction, VRD, archéologie préventive ) et que les estimations pour la construction intègrent les aléas. Ces derniers peuvent varier de 2 à 3%, voire plus pour les opérations de réhabilitation. Le poste «honoraires» représente les honoraires du promoteur (entre 5 et 6 % du prix de revient HT de l opération). M. Revel précise qu il ne faut pas confondre honoraires et marge de l opération, qui correspond à la rémunération de l actionnaire de la société de promotion et de la banque. Il insiste sur le fait que les «biens» (matériaux, ) achetés mentionnés dans le rétro bilan vont servir à fabriquer un produit qui sera vendu entre 12 et 18 mois après. La conjoncture économique aura donc un impact important sur le prix de vente final. Par exemple, en 2008, les terrains achetés en 2007 avaient un prix très élevé par rapport au prix de vente des opérations construites dessus. Concernant la garantie finale de l opération mentionnée dans le tableau, elle est versée à la banque responsable en dernier lieu en cas de défaillance du promoteur. Le prix de vente comprend la marge du promoteur. Au démarrage de l opération, on fixe cette marge à 8% car beaucoup d aléas sont à envisager et notamment l augmentation des coûts de construction ou encore une crise du logement. Aujourd hui, il est difficile de construire à moins de 1450 euros/m² HT, parking compris. C est à partir de ces calculs que l on peut estimer les prix du foncier (en euros/m² de SHON). Dans l hypothèse où le propriétaire du terrain dispose d une meilleure proposition par un autre opérateur, le promoteur recalcule alors son projet en essayant de trouver les postes sur lesquels son concurrent a pu économiser pour proposer plus pour le foncier. Il faut dans ce cas procéder par tâtonnement pour trouver le «bon prix» du foncier. 8% de marge permettent de rémunérer le risque de l opération. Ce chiffre peut être inférieur si une partie de l opération est réalisée par un investisseur
ou, si une partie de l opération est réputée sans risque. Certaines opérations de promotion comprennent du logement social, dans l hypothèse d une opération avec 25% de logements sociaux obligatoires, la négociation foncière va inclure une séparation entre logement en accession libre et en accession sociale. Dans pareil cas, le propriétaire peut diminuer son prix de moitié sur la partie destinée à accueillir les logements sociaux. La marge de 8% est un grand sujet de débat entre les promoteurs et les collectivités car aujourd hui les bailleurs n achètent pas la part de logements qui leur est réservée au prix du marché. Une partie du logement social est donc financé par les acquéreurs des logements libres Dans l hypothèse d une crise avec baisse des prix de vente, la marge diminue très rapidement. Les effets étant très sensibles, on peut rapidement atteindre le point mort de l opération, c est-à-dire une marge nulle. Un technicien de la Communauté de communes de la Vallée du Garon (CCGV) travaillant sur le PLH explique que son intercommunalité donne une subvention aux bailleurs. Il demande si ce paramètre peut rentrer dans le bilan du promoteur. M. REVEL précise que la subvention viendra alléger la partie logement social de l opération et que cela va contribuer à équilibrer les prix avec l accession libre. Une autre personne demande si les bailleurs sociaux utilisent également la méthode du compte à rebours. M. REVEL explique qu ils utilisent une méthode très différente. LA METHODE PAR COMPARAISON Présentation de Philippe POURCHET, Directeur de l EPFL 73 et Josette REMY, chargée de missions foncières à l EPFL 73 La présentation est structurée en 2 temps : Mme REMY, détachée de France Domaine, présentera la méthode par comparaison puis M. POURCHET expliquera son application concrète pour un EPF. Mme REMY décrit la méthode par comparaison utilisée par France Domaine. Pour l évaluation d un bien immobilier, il s agit de rechercher des biens de même nature sur un espace de comparaison cohérent. Si le marché est peu actif, on élargira le champ de recherche et, pour les biens rares, il sera même élargi à l échelle nationale. Elle précise que l évaluateur s attache à examiner les données physiques et juridiques du bien puis analyse les prix déclarés. Les valeurs trop basses et trop hautes sont écartées. En termes de biens à comparer, les sources disponibles sont la base ŒIL (dont l exhaustivité varie selon les départements) et la base des hypothèques (très exhaustive y compris pour les fonds de commerces, mais qui ne dispose pas de recherche multicritères). Ensuite chaque évaluateur construit sa propre base en fonction des cas étudiés et grâce aux DIA (lorsque les collectivités les envoient à France Domaine). La mise en œuvre de la méthode par comparaison est complexe et des corrections sont souvent nécessaires de la part de l évaluateur qui les justifie dans ses appréciations, la situation la plus objective est la DUP car toutes les parties sont prenantes. Mme REMY précise que si la méthode par comparaison est la méthode principale, l utilisation d autres méthodes est parfois nécessaire pour les agents de France Domaine : par le revenu, par estimation du coût de remplacement déprécié, par le prix de revient, par le compte à rebours, par la valeur de récupération foncière et par indexation. M. POURCHET poursuit en expliquant que dans la pratique cette méthode par comparaison a des failles. France Domaine demande notamment énormément de documents au commanditaire de l évaluation. Il précise à ce sujet qu une demande a été faite auprès du Sénat pour obtenir la liste exacte des éléments que France Domaine est en droit de demander avant de procéder à une évaluation. M. POURCHET ajoute que la visite de terrain n est pas toujours réalisée par les évaluateurs. Il précise qu en outre France Domaine rédige une note interne (qui est communicable) de manière à savoir ce qui justifie le prix indiqué. Les collectivités peuvent également acheter au prix qu elles souhaitent et ne sont pas toujours obligées de suivre l estimation de France Domaine. M. POURCHET précise que les EPFL ont une charte qui demande de ne pas acheter à un prix supérieur à l évaluation de France Domaine. Il explique qu il est possible de discuter l estimation, d acheter en dessous du montant de l évaluation mais également de faire estimer sans avoir donné le contenu de l intégralité du projet.
M. BOURGUIGNON explique que depuis 8 à 10 ans les biens doivent être évalués en fonction de leur état actuel. La France a été condamné par la Cour européenne des Droits de l Homme sur ce point. Depuis, France Domaine demande toujours quel est le projet à venir. Pour certains biens cela reste délicat : quelle doctrine notamment pour les terrains en AU? Il précise que pour un terrain qui sera ouvert à l urbanisation dans douze ans, on prévoit une fourchette de 5% d augmentation par an : cela donne une estimation. M. POURCHET explique que France Domaine n utilise officiellement jamais le compte à rebours pour ses estimations. La méthode par comparaison reste donc sa méthode de référence malgré ses défaillances face aux marchés. Pour les opérations d aménagement, malgré le fait que la SEMCODA n est pas coutumière de ces opérations, elle a pu en mener quelques unes depuis une dizaine d années. Sur de telles opérations, la question qui se pose est de savoir comment financer le foncier et les VRD. Dans les faits, les charges sont réparties sur le prix des logements et l équilibre se fait entre les différentes catégories de logements produites. LA VISION DU BANQUIER SUR L EVALUATION Intervention de Michel ROUAULT, Directeur de l économie sociale à la Caisse d Epargne Rhône- Alpes LA METHODE PAR LE REVENU (OU PAR LE RENDEMENT) Intervention de Gérard LEVY, Directeur de la SEMCODA, membre de l ARRA-HLM La SEMCODA est un opérateur créé en 1959 à Bourg-en-Bresse à l initiative du Conseil général. En 1979, une évolution législative permet de donner des financements aux SEM pour le logement social. Aujourd hui, 62% du capital de la SEMCODA provient des collectivités (du Conseil général et de 128 communes associées). Le reste provient de capitaux privés (le 1% logement, Dexia, la Caisse des Dépôts et la Caisse d Epargne). La SEMCODA produit des logements sociaux «traditionnels», des logements étudiants et pour les séniors (avec un impératif pour ces derniers de 10 /m² au maximum), des logements en accession à la propriété sociale avec du PSLA et de l accession à la propriété classique. M. LEVY précise que le PSLA permet d être exonéré d impôts fonciers pendant dix ans et qu avec ce dispositif l organisme s engage à racheter le bien pendant quinze ans à l acquéreur en cas de défaillance. Gérard Lévy ajoute qu en dehors du Grand Lyon et du Pays de Gex, SEMCODA parvient à une moyenne de 1700 par m² habitable. Pour cela, la SEMCODA apporte 15 000 euros de fonds propres par logement. Pour les acquisitions/réhabilitations dans les cœurs de village, les projets sont plus chers que dans le neuf surtout depuis le durcissement des normes «amiante», ce qui l amène à penser que l avenir n est pas dans la réhabilitation. Le contexte bancaire actuel est lié à la réglementation bancaire issue de Bâle III suite à l affaire Lehman Brothers de septembre 2008 qui avait généré une crise des liquidités bancaires. Les banques centrales ont stoppé les échanges interbancaires montrant la dépendance des banques dans le refinancement. La crise a généré des pertes importantes pour les banques. Il leur est donc nécessaire aujourd hui de conserver des fonds propres : un ratio de fonds propres durs (9%), un ratio structurel d actifs en liquide pour faire face à une crise pendant 30 jours et des actifs. Ce système est très différent de celui des banques des années 80. A l époque les banques prêtaient à leurs clients sur le long terme et empruntaient court sur les marchés. A présent, on est passé à une logique de moyen terme. Les banques ne prêtent plus pour des projets demandant de grosses liquidités (notamment aux collectivités). L économie change donc substantiellement avec une désintermédiation et un accès direct aux marchés (50% aux Etats Unis). Pour une banque, les critères d évaluation vont varier selon le type de risque (public, mixte et privé). Pour l évaluer la banque réalise une analyse de la contrepartie des opérations passées et de la relation bancaire. Pour une structure publique, l analyse de la situation financière sur la contrepartie se fait sur le long terme. Pour l analyser, la banque prend en compte les paramètres techniques de l opération, un PPI, s il en existe un (vu comme un baromètre), une convention avec un EPF qui sécurise le partenariat pour la banque
Pour une structure mixte, depuis la loi de 2005 et la fin du régime public des conventions publiques d aménagement, l approche a changé. A présent, le banquier regarde l opération d aménagement de long terme (risque à 6/8%). Le concessionnaire assume les écarts. Les SEM évaluent ainsi mieux leurs risques financiers. Cela se fait selon la méthode de matrice des risques sur l évaluation des dépenses (terrains, juridiques, délais, ) rapportée aux fonds propres. Les banques travaillent avec les SEM pour améliorer cette méthode d évaluation du risque. Pour les structures privées, l analyse de l opération se fait avec des ratios clefs par rapport aux fonds propres : la marge, le risque bancaire (toujours inférieurs à 60%), les frais de réservation et les charges foncières par rapport au prix de revient (20/25%). La part du foncier est complexe à déterminer et repose sur l analyse de l opération.